Les fous du volant nous ont fait attendre

Dans l’indifférence générale, le rallye Dakar est parti de Buenos Aires pour une boucle en Amérique du Sud. D’une logique implacable. Indifférence jusqu’à la mort d’un commerçant argentin de 48 ans, percuté par la voiture du duo Osvaldo Amor et Horacio Fenoglio. Enfin on parle de cette course ! Merci à Satanas et Diabolo au volant de leur Toyota.

Que l’ancien Paris – Dakar écrase des petits enfants tchadiens ou sénégalais, on veut bien passer l’éponge. La colonisation de la fin des années 90 est tout de même moins sanglante que par le passé. L’homme blanc doit démontrer sa supériorité sur les Africains. On l’a toujours fait, alors pourquoi arrêter ? Et puis bon, de toute façon, la faim aurait justifié l’absence de moyens pour ces enfants. Tôt ou tard. L’implacable sélection naturelle devenue pétrolique sur les chemins ensablés de la course par étapes.

Le Britannique Richard Dawkins avait une façon bien à lui de résumer cette sélection naturelle :

Deux brontosaures voient un T-Rex avancer dans leur direction et se mettent à courir aussi vite qu’ils le peuvent. Puis l’un des deux dit à l’autre :
– Pourquoi nous fatiguons-nous au juste ? Nous n’avons de toute façon pas la moindre chance d’arriver à courir plus vite qu’un T-Rex !
Et l’autre lui répond cyniquement :
– Je ne cherche pas à courir plus vite que le T-Rex. Je cherche juste à courir plus vite que toi !

Remplacez les brontosaures par deux enfants tchadiens et le T-Rex par Stéphane Peterhansel. L’analogie paraît plutôt tenir la route. En ce sens, on peut presque dire que feu le Paris – Dakar rendait service à l’espèce humaine en supprimant les moins rapides. Si Usain Bolt va si vite, c’est aussi parce que la course franco-sénégalaise a permis à la race humaine de progresser année après année.

Alors oui, c’était triste, Gérard Holtz se mobilisait tout seul en pleine nuit durant une émission autour d’un feu de camp à 2h40. L’audience se composant essentiellement de vieux endormis devant «Plus belle la vie» à 20h. Après avoir bien expié leurs pêchés, tout ce petit monde pouvait à nouveau faire chauffer les moteurs et repartir le lendemain matin pour de nouvelles aventures. Le plus bel exemple nous vient de l’édition 2006. Le 13 janvier, un garçon décède après avoir été heurté par un concurrent. Le lendemain, le 14 janvier donc, rebelotte. Un garçon de 12 ans est fauché par un camion. Nul doute que Gérard Holtz a vivement regretté ces deux épisodes. C’était sans aucun doute «tragique», «terrible» ou encore «dramatique». Mais au bout du compte personne pour remettre en question la légitimité de cette course morbide.

Depuis la première édition du rallye en 1979, 57 personnes ont trouvé la mort. Parmi celles-ci, le chanteur en haut de l’affiche Daniel Balavoine et Thierry Sabine, le docteur Frankenstein qui a créé le monstre sanguinaire. C’était en 1986, à la suite d’un accident… d’hélicoptère. Ce sont d’ailleurs quasiment les seuls décès qui restent attachés à la course automobile. Les 55 autres anonymes peuvent aller se faire foutre.

Cette année donc, c’est un automobiliste argentin qui a été percuté par une voiture de rallye. Si les Africains ne sont pas les champions du monde de «je regarde à droite, puis à gauche et encore à droite avant de traverser», il est peu probable que ce Sud-Américain ait été happé par inconscience du danger. L’excuse trouvée par les bouchers roulants sur sol africain disparaît donc en traversant l’Atlantique. Sans doute que Gérard Holtz trouve ça «tragique», «terrible» ou encore «dramatique». Bernard Jonzier doit également avoir la saucisse de Montbéliard en berne. Jusqu’à quand ? Jusqu’au prochain départ pardi ! Alors moteur, les femmes et les enfants d’abord !

Écrit par Gary de Bourge

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12 Commentaires

  1. Le Dakar ne vaut pas plus que le Gumball… Une minorité se croit tout permis sous prétexte d’une pseudo compétition !

    Étant fan de belles mécaniques et de sports mécanisés, je suis écœure par tant de stupidité !!!

  2. Ranger Fabrizio Meoni au rayon des anonymes…
    Texte facile, et qui permet à son auteur de hurler avec les loups. Mais a-t-il par exemple autant d’empathie pour ceux qui décèdent sur les chantiers à l’aube d’une coupe du monde de football ou d’un infarctus devant leur téléviseur durant celle-ci?.. J’en doute.

  3. Maintenir « l’appellation » Paris-Dakar en déplaçant cette caravane néo-colonialiste en Amérique du Sud montre le degré de cynisme de ses organisateurs! Et le peu de considération accordé à leurs hôtes… Bon, au moins maintenant il n’est plus nécessaire de devoir évoquer la famine, la misère et les autres calamités qui frappent les populations africaines que l’on acceptait de généreusement venir distraire et saluer en traversant des villages à 150km/h. Plus nécessaire non plus de se donner bonne conscience en creusant quelques puits, en ouvrant 2 orphelinats et 3 écoles qui fermeront sitôt le ballet des 4×4 terminé…
    Mais quel que soit l’endroit, que l’on salisse le Ténéré ou l’Atacama, que l’on pollue l’Afrique ou l’Amérique, que l’on enlaidisse le Chili ou le Mali, chaque début d’année je ne peux m’empêcher de fredonner: »500 connards sur la ligne de départ, 500 blaireaux sur leurs motos », et un porte-parole qui en est le parfait reflet, le dégoulinant (de merde et de mauvaise foi) et parfaitement puant Gérard Holtz!

  4. @Tohu bohu: Et sinon? Des arguments? Une réponse à donner à mes interrogations ou vraiment rien de rien?..
    C’est quoi le sens de ton allusion condescendante, à travers laquelle tu me considères selon toute vraisemblance comme un aficionado de moto et de réunions de ce type alors que rien ne te permet de le savoir?

  5. @Gonzague
    Effectivement, on ne peut être certain que vous êtes un « aficionado » acharné de caravanes motorisées et sponsorisées! A contrario, nous savons désormais que vous manquez d’humour, mais pas de… susceptibilité, ni d' »arguments » abscons…

  6. @andreagol
    En règle générale, il ne me semble pas que je manque d’humour. Mais jusqu’à présent, j’avoue ne rien avoir lu ici qui fut drôle..Je ne prétends pas avoir avancé des « arguments » pertinents, mais juste une pique pour faire réagir ceux qui partagent l’avis de l’auteur. Celui-ci dit: « […] personne pour remettre en question la légitimité de cette course morbide. » Mais justement, je ne comprends pas quels sont les arguments permettant de dire que cette manifestation sportive est illégitime. Pour quelle raison serait-il « plus légitime » d’organiser une coupe du monde de football, de ski alpin, de cricket, de bobsleigh ou de caisse à savon qu’un « Paris-Dakar »??.. Je n’y participerais pas ni irais au bord de la route de peur d’y laisser ma peau mais de quel droit devrais-je ou devrait-on priver ceux que cela passionne de ce plaisir?
    J’ai l’impression -et cet article le confirme- que les seuls arguments avancés sont: le nom est usurpé (sur ce point-là et sur le côté commercial de l’évènement, je suis d’accord), ça tue et ça pollue. Or, à bien y réfléchir, il me semble que ceci pourrait s’appliquer à nombre d’autres manifestations sportives, non?
    J’espérais simplement en lire davantage que « le Dakar c’est de la merde ». Donc, effectivement, lorsque la seule « réponse » ou réaction est « vroum vroum, hein copain », ça m’irrite quelque peu…

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