2421 jours après !

Pour ce premier déplacement de la saison, les Grenat se rendaient au Letzigrund sans trop d’illusions. Sur un malentendu, on aurait pu revenir à Genève avec quelque chose dans les bagages, se disait-on. Or, de façon inespérée, deux hommes en l’espace de six minutes ont bouleversé le destin d’un match qui semblait s’acheminer vers l’épilogue pronostiqué ! Le peuple servettien renoue ainsi avec la victoire en Ligue A qui manquait depuis la triste victoire au Breite (perte du doigt de Diogo) qui date du 5 décembre 2004.

Bienvenue au Letzigrund

Comme ont pu le découvrir les amis lausannois, le Letzigrund est d’une autre planète, parole de Genevois. Dès lors, je n’ose imaginer le dépaysement que ce bijou a dû provoquer aux lanceurs de hameaux des Plaines-du-Loup ! Certes, la piste d’athlétisme éloigne un peu le public des 22 protagonistes, mais il s’agit-là d’un véritable stade, pensé et peaufiné jusque dans les moindres détails. L’organisation aussi est très professionnelle, que ce soit dans l’accueil des spectateurs et des médias que dans la gestion de la manifestation. Difficile de croire que nous étions en Suisse, tant la qualité de l’infrastructure nous rappelait la patrie d’adoption de Julien Mouquin. Eh oui, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis le dernier match du Servette FC en Super League ! Désormais, les clubs helvètes se sont développés et professionnalisés. Il s’agira d’en prendre de la graine dans de brefs délais, car de ce côté-là, le SFC vit encore dans une autre ère.

La baraque tient bien

Lors des 45 premières minutes de jeu, les Servettiens ont montré un tout autre visage par rapport à celui mis en exergue dimanche dernier. Hormis un relâchement dans dernières minutes avant le thé, lors desquelles le FCZ multipliait les corners et voyait l’occasion de Margairaz détournée par Gonzo, les Grenat ont su tenir la dragée haute. Les hôtes, bien pressés par les Genevois, à l’image de l’inexorable Kouassi, peinaient à faire le jeu. Sur les côtés, les bleus et blancs ne semblaient pas être en mesure de faire la différence. À gauche, Ricardo Rodriguez, champion avec les M-17 suisses au Nigéria, était pressé sans relâche tel un citron par le revenant Vitkieviez. El luchador, en plus de son apport offensif, n’a pas ménagé ses efforts en prenant dans ses morses tout Zurichois se trouvant de son côté. À droite, Ph. Koch ne semblait pas être dans un jour particulièrement étincelant et a été amorphe, excepté son centre pour le 1-0 de Djuric. Ajoutez à cela une équipe brouillonne et en manque d’idées et vous comprendrez pourquoi le FCZ ne s’est pas montré dangereux avant la demi-heure. C’est à ce moment seulement que la troupe de Fischer aurait pu faire mal, lorsque Mehmedi, qui, dans son élan filait au but, se voyait stoppé fautivement par Baumann (jaune). Les corners des locaux s’ensuivaient mais étaient tous des proies faciles pour Gonzo.
Et Servette ? Eh bien, le onze de base de Alves, strictement composé des mêmes joueurs qui ont permis le retour dans l’élite, a aussi eu des occasions pour ouvrir la marque. On pense surtout au centre de Schlauri, suivi d’une volée trop molle d’Esteban (13e) et à la mauvaise conclusion de Marquinho suite à une passe de Goku (42e). Mais aussi à la 44e, lorsqu’un bleu et blanc perdait le cuir en défense et Vitki manquait son caviar pour Esteban. Bref, à la mi-temps, c’est un tout autre SFC que celui qui a affronté Thoune qui quitte le terrain sur un score on ne peut plus correct.

20 minutes en apnée

En revanche, l’entame de la seconde mi-temps démarrait sur les chapeaux de roues du côté des vice-champions suisses. On le sentait, tôt ou tard, la baraque genevoise aurait pété. Et le feu d’artifice a été époustouflant : à la 60e, Djuric reprenait merveilleusement le centre de Ph. Koch et trouait les filets servettiens. Asphyxiés et sauvés derechef par une sortie impériale de Gonzalez sur Alphonse, les visiteurs semblaient souffrir d’une panne de boussole. Sur un coup franc, le malin Mehmedi en profitait pour se faire oublier au cœur de la défense et dévier le ballon dans la cage du SFC. Le club du bout du lac était KO, c’en était fini. Les Zurichois auraient continué à nous danser sur le ventre et à nous humilier, se disait-on.

Du cauchemar au rêve

Or, le football est magique, faut-il le rappeler. Il suffit de quelques détails pour passer du cauchemar au conte de fées. Et encore de moins pour parcourir le chemin inverse. João Alves avait vu juste lorsque, peu avant d’encaisser le second but, il avait lancé Karanovic dans la mêlée. Le numéro 9, en l’espace de 120 secondes a fait chavirer le Stadtclub vo Züri dans la détresse et ressusciter les Grenat de leur léthargie anticipée. Et à la manière d’un véritable killer armé d’un sang froid déroutant, s’il vous plaît ! La faim vient en mangeant, dit-on souvent. Et c’est ainsi que les Servettiens, transportés dans une spirale positive, allaient zigouiller l’équipe de Canepa en moins de 7 minutes, en allant inscrire le 2-3 définitif par Baumann à la 76e. Dès lors, face à un FCZ ayant assené abruptement le coup, les visiteurs résistaient aux timides velléités adverses. Même si on le savait déjà, c’est toujours fascinant de redécouvrir comment le côté imprévisible du football rend ce sport magique. Tout le monde s’attendait à voir un match à sens unique, avec un Servette dominé des crampons jusqu’à la dernière mèche ; ce ne fut pas le cas, hormis le flottement post-thé.

En avant toute !

Difficile de demander plus ! Vivre un tel retournement de vapeur pour son premier déplacement en SL depuis 6 ans et demi dans l’antre des vices-champions, cela faisait un petit bail. Certes, tout n’a pas été parfait, loin de là. Sans un Gonzalez dans un format européen, Servette aurait pu courber l’échine définitivement en encaissant 4 ou 5 buts. En effet, la défense a connu quelques flottements impardonnables à ce niveau-là. Mais l’esprit d’équipe, un coaching parfait, un Goran monstrueux ainsi qu’un Leoni à la ramasse, ont donné les 3 points aux visiteurs. Trois points amplement mérités, qui couronnent un réalisme époustouflant. Ah et j’oubliais, les magnifiques maillots «home» ont été étrennés lors de cette rencontre : un détail peut-être, mais un de moins auquel destiner ses inquiétudes. Continuons à être surpris de la sorte et qui sait, avec les qualifications de Yartey et de Saleiro ainsi que la probable arrivée d’un latéral/ailier gauche, ce Servette-là pourrait avoir belle mine ! De plus, n’est-ce pas un véritable conte de fées que celui d’une bande de potes, composée d’anciens joueurs de médiocres équipes de CHL, qui vainc un ogre du football suisse ? Sans se faire trop d’illusions et en ayant en ligne de mire le maintien, espérons que nous vivrons de nouveau de telles journées. Obtenir le maintien sereinement avec le même groupe qui nous a propulsé en Ligue A est en soi quelque chose de féerique, et nous y parviendrons. Après avoir vécu le jour que l’on attendait depuis 2421 jours, soyons fous et mettons les critiques dans le tiroir.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

FC Zurich – Servette 2-3 (0-0)

Letzigrund, 9200 spectateurs.
Arbitre : M. Carrel.
Buts : 61e Djuric 1-0, 68e Mehmedi 2-0, 70e Karanovic 2-1, 72e Karanovic 2-2, 76e Baumann 2-3.
FC Zurich: Leoni; Philippe Koch, Barmettler (81e Drmic), Teixeira, Rodriguez; Schönbächler (75e Nikci), Aegerter, Margairaz (77e Kukuruzovic), Djuric; Mehmedi, Alphonse.
Servette: Gonzalez; Ruefli, Baumann, Schneider, Schlauri (37e Moubandje); Pizzinat (63e Karanovic); Vitkieviez, Kouassi, Nater, De Azevedo; Esteban (46e Eudis).
Notes: Zurich sans Magnin, Beda, Chermiti, Zouaghi ni Chikhaoui (blessés) ; Servette sans Routis (blessé), Yarte ni Fall (pas de permis de travail).
Avertissements: 31e Baumann.

Écrit par Grégory Soldati

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6 Commentaires

  1. Bravo a vous! J’espere que le LS va s’en inspirer pour le match de Samedi

    ps- rien que les chiottes du Letzi vallent le deplacement!! Je me suis presque cru dans un hotel 5 etoiles ou autre lieu VIP 🙂

  2. M. Soldati,

    Le retour de Bauman et Vitkievez ont fait un bien enorme. Quand Yartey et Saleiro seront qualifié administrativement, cette équipe et son bon fond de jeux(ABE), fera encore soucis a bcp d’équipe.

  3. Très bel article. Positif mais humble (on aurait très bien prendre un 4-0). La victoire ne tient à pas grand chose (duel de gardien en notre faveur, réussite maximale) mais seule la victoire compte. Ces trois points seront précieux pour le maintien.

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