Les damnés du pénalty

Il ne faut pas revêtir un maillot jaune pour tirer les pénaltys en ce mois de juillet. Après le Brésil, tant chez les hommes que chez les femmes, c’est au tour du Borussia Dortmund de totalement foirer sa série de tirs au but dans le Revierderby. Du coup, c’est Schalke 04 qui s’adjuge la Supercup d’Allemagne.

J’ai déjà eu maintes fois l’occasion de t’expliquer que le Borussia Dortmund avait l’équipe la plus formidable, phénoménale, fantastique et on en passe, de toute la galaxie. Toutefois, cette équipe de rêve a un gros défaut : elle ne sait pas tirer les pénaltys. L’an passé, le BVB est devenu le premier champion d’Allemagne sacré sans avoir marqué le moindre pénalty (cinq tirés, tous manqués). Et l’aventure en Coupe d’Allemagne s’était abruptement arrêtée contre Offenbach, équipe de Dritte Liga, après une séance de tirs au but perdue.

Alors, lorsque Schalke 04 a obtenu ce qu’il cherchait dans cette Supercup, soit ne pas encaisser de but durant le temps réglementaire, et que l’on est passé directement aux tirs au but (il n’y a pas de prolongations en Supercup), je n’étais pas d’un optimisme débordant. Et en plus, le fameux théorème de Sacha Clément, selon lequel l’équipe qui a dominé le match et s’est heurtée à un gardien en état de grâce a moins de chances de remporter une séance de pénaltys que l’équipe qui a subi et n’a guère alerté le portier adverse, ne parlait pas en faveur du BVB. Et cela s’est vérifié : les quatre premiers tireurs de Schalke ont tous réussi leur pénalty, alors que le gardien königsblaue Ralf Fährmann retenait les essais de Kevin Grosskreutz, qui n’aurait jamais dû tirer vu les innombrables contentieux qu’il entretient avec le public de Gelsenkirchen, et d’Ivan Perisic, qui rêvait sans doute d’un autre scénario pour son premier match officiel avec le maillot jaune et noir. J’espère que tu ne m’en voudras pas trop mais je ne t’ai ramené ni récit ni photo de la remise du trophée : le ballon du dernier pénalty n’était pas encore retombé que je quittais déjà le stade en maugréant.

Derby pour une coupe en bois

En l’occurrence, ce trophée n’a pas une grande signification. En Allemagne, la Supercoupe n’a pas une longue tradition. Disputée entre 1987 et 1996, elle avait ensuite été remplacée par une Coupe de la Ligue. À l’initiative d’un sponsor, la Supercup avait fait son retour officieusement en 2008, avant de redevenir officielle, sous l’égide de la DFL, en 2010. Mais généralement, les clubs la considéraient plutôt comme un gros match de préparation. Sauf que cette saison, le champion d’Allemagne c’est le Borussia Dortmund et le vainqueur de la Coupe, Schalke 04, soit les deux clubs entretenant la plus grande rivalité du foot allemand. Et entre les deux rivaux de la Ruhr, pas question de match amical. L’excitation des supporters dans les rues de Gelsenkirchen et l’ambiance survoltée dans le stade en atteste. Comme d’habitude, le Revierderby a électrisé les masses. Car soulever un trophée – fut-il en bois – sous le nez de l’éternel rival, ça n’a pas de prix.

Vaine domination

Ce n’est pas tellement aux tirs au but que le BVB a perdu ce derby mais bien plutôt par son incapacité à concrétiser sa large domination, surtout pendant la première heure de jeu. Le champion 2011 (je ne m’en lasserai jamais…) a confirmé la belle impression laissée quelques jours auparavant lors de la victoire impériale à la Liga Total ! Cup devant Hambourg, le Bayern et Mainz. Il a juste manqué les buts :  Kehl a placé une tête sur le poteau (5e), le centre de Löwe est passé devant le but sans être repris (26e), Fährmann s’est brillamment interposé devant Gündogan (27e), Lewandowski (43e) et Götze (60e), Gündogan a été contré (34e) et Kagawa a mal négocié un contre à cinq contre deux (57e). Bref, il y avait largement la place pour s’offrir un succès assez tranquille.

Schalke en voie de rédemption

Schalke en revanche n’a pas montré grand-chose, deux occasions à signaler, une tête mal cadrée d’Höwedes sur corner (16e) et un tir de Moravek bien sauvé par le pied de Weidenfeller (74e). L’entraîneur Ralf Rangnick avait manifestement peur de prendre une dérouillée qui aurait fait mal à un club en pleine reconstruction, il a donc disposé son équipe avant tout pour défendre, même si les Knappen se sont un peu enhardis en fin de match. Les deux stars au salaire exorbitant, Raul et Huntelaar, ont d’ailleurs été complètement transparents. Devant son public, Schalke n’a donc pas fait preuve d’un panache fou mais le résultat donne raison à Ralf Rangnick. N’en déplaise à l’entraîneur dormundois Jürgen Klopp, qui a prétendu le contraire, dans le Derby, seul le résultat compte, pas la manière.

C’est un succès qui va faire beaucoup de bien à une équipe qui a beaucoup de choses à se faire pardonner après sa pathétique quatorzième place de la saison dernière. Et quoi de mieux qu’une victoire contre l’éternel rival pour sonner l’heure de la rédemption ? Schalke obtient donc un peu de répit avant les premiers sifflets de la Veltins-Arena contre sa propre équipe, grande spécialité locale. L’autre motif de satisfaction côté königsblaue, c’est bien sûr la prestation énorme réussie par le gardien Ralf Fährmann, incontestablement l’homme du match, pour son retour à Gelsenkirchen. D’aucuns doutaient de sa capacité à remplacer Manuel Neuer, sa première réponse est plus que concluante, même s’il lui faudra confirmer.

Vivement la reprise !

Ce premier déplacement outre-Rhin de la saison était aussi l’occasion de renouer avec la fameuse gastronomie des stades allemands. Deux nouveautés à signaler : les Veltins du stade éponymes sont enfin servies dans des choppes de 5dl et non plus 4dl, «ein Meisterbier», m’explique le préposé à la buvette en voyant mon maillot du BVB floqué Shinji Kagawa. Et il est désormais possible de déguster une Curry-Frikadelle : là, ils n’ont pas fait preuve d’une imagination débordante, c’est juste une Frikadelle (pour les non-initiés, une sorte de boulette de viande) coupée en rondelle dans la sauce rouge traditionnellement dévolue à la Currywurst. Comme tu peux le constater, on est déjà dans les starting-blocks, frétillants d’impatience en attendant la reprise de la Bundesliga le 5 août prochain. Auparavant, il y aura le premier tour de la Coupe, le week-end qui vient. Le BVB va à Sandhausen, pensionnaire de Dritte Liga, il serait bien inspiré de faire la différence durant le temps réglementaire parce que si ça va aux pénaltys, on sait déjà comment cela va finir.

Schalke 04 – Borussia Dortmund 0-0, 4-3 tirs au but.

Veltins-Arena, 61’673 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Kircher.
Tirs au but : Gündogan (0-1), Holtby (1-1), Hummels (1-2), Edu (2-2), Grosskreutz (Fährmann retient, 2-2), Höwedes (3-2), Leitner (3-3), Jurado (4-3), Perisic (Fährmann retient) 4-3.
Schalke 04: Fährmann; Höger, Höwedes, Papadopoulos, Fuchs; Matip, Holtby; Baumjohann (89e Edu), Raul, Draxler (46e Jurado); Huntelaar (69e Moravek).
Dortmund: Weidenfeller; Piszczek, Hummels, Santana, Löwe (76e Leitner); Kehl (75e Bender), Gündogan; Götze (75e Perisic), Kagawa, Grosskreutz; Lewandowski.
Cartons jaunes: 66e Grosskreutz, 85e Baumjohann.
Notes: Schalke sans Metzelder, Moritz ni Farfan (blessés) ; Dortmund sans  Blaszczykowski, Koch, Owomoyela, Subotic, Schmelzer, Bakalorz, da Silva (blessés) ni Barrios (Copa America).

Écrit par Julien Mouquin

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8 Commentaires

  1. Une petite question, Mon cher Julien, pourquoi cette Supercup s’est-elle déroulée à Gelsenkirchen ? Un avantage donné au vainqueur de la Coupe par rapport au Champion ?

  2. @ Julien Mouquin

    « Le Borussia Dortmund avait l’équipe la plus formidable, phénoménale, fantastique et on en passe, de toute la galaxie ».
    J’espère que c’est une grosse blague ???

    Il serait judicieux de remplacer le mot « galaxie » par « Allemagne ».

    Car en ce qui concerne la meilleure équipe de la galaxie, tu sais très bien son nom : Barça !!!

  3. le Borussia Dortmund avait l’équipe la plus formidable, phénoménale, fantastique et on en passe, de toute la galaxie

    Hahahahaha…lquelle est bonne ta blague !!!

    Décidément Julien Mouquin, tu me feras toujours rire !

  4. @christophe:
    J’ai pas la réponse, c’est la ligue qui décide, normalement c’était sur terrain neutre (l’année passée Bayern – Schalke s’était joué à Augsburg), j’imagine qu’ils ont voulu profiter de l’affiche pour remplir un gros stade et qu’ils ont donné l’avantage du terrain à Schalke pour réequilibrer les forces.

  5. Merci pour cet article Julien. Autant je te trouve imbuvable quand tu parles du FC Sion, autant j’aime tes articles sur Dortmund :)…
    En ce début de saison, habitant à une petite centaine de km de Dortmund je vais en profiter pour aller voir quelques matchs avec la complicités d’abonnés de la région et me rendre compte par moi-même de ce qu’est ce Dortmund à domicile !!!

  6. J’ai déjà eu maintes fois l’occasion de t’expliquer que le Borussia Dortmund avait l’équipe la plus formidable, phénoménale, fantastique et on en passe, de toute la galaxie.

    En 2011, Dortmund a été éliminé de l’Europa League par le 7ème de la LIGA !

    Hé oui Julien, on a vu le vrai niveau des allemands…

  7. « Alors, lorsque Schalke 04 a obtenu ce qu’il cherchait dans cette Supercup, soit ne pas encaisser de but durant le temps réglementaire »

    Ha, ha, ha !!

    « Derby pour une coupe en bois »

    C’est sûr que la Liga Total! Cup, c’est autre chose, ha, ha, ha !

    A part ça, on va bien rigoler avec la Champions League à gérer. Je crains pour toi que la saison à venir soit bien plus compliquée pour le BVB. Le genre de saison où l’on ne gagne rien et où la 14e place de Bundesliga doit être envisagée.

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