Ça va être dégueulasse

Le public de Malley a trop longtemps dû avaler des couleuvres version boas constrictor pour ne pas voir que là, pour une fois, tout semble bien s’emmancher. À tel point que c’en est presque suspect, pour un club collectionnant d’habitude les désillusions de tout poil. Est-ce que ça ne va pas nous péter à la gueule, tel le premier Chagaev venu à la tronche de l’espèce en voie d’extinction des optimistes béats gzamaxiens ?

Un derby ? 

À voir les Chaux-de-Fonniers se gargariser du terme de derby en s’astiquant le poireau, on s’en convaincrait presque. Mais le côté «petite ville périphérique affrontant la grande ville romande la plus proche» ne fonctionne évidemment que dans un sens. Si Genève était en LNB à la place de Lausanne, ce serait à la Cité de Calvin d’incarner tous les maux des pauvres Neuchâtelois. Du point de vue de Malley, c’est bien l’équipe du bout du Lac, pardon, nos partenaires-propriétaires bien-aimés, qui constitue LE derby. Seulement voilà. Un concours de circonstances que je ne m’explique pas fait que le LHC est momentanément en LNB. Donc pour l’instant, l’adage veut que, faute d’aigles, on mange des pigeons. Ça fait mal au sac de le dire, mais les matchs contre le HCC sont ceux avec le plus d’ambiance à Malley cette saison. Certainement en partie grâce à la haine univoque (et un peu surréaliste) qu’ils nous vouent.

En tous cas, ce n’est pas le HCC vu samedi soir à Malley qui mettra le premier grain de sable dans les mouvements d’horlogerie de haute précision de l’orfèvre van Boxmeer. Bien au contraire. Il y avait pourtant tout à craindre de ces Haut-Neuchâtelois remontés comme des pendules à l’idée d’affronter le tout-gros-qui-est-tout-méchant citadin. Surtout que le HCC n’est jamais autant motivé que lorsque le beaucoup trop injuste sort (ouin) ne le prive de son leader. On se rappelle du renversement de vapeur obtenu à Malley par les Abeilles alors qu’elles étaient menées 3-1 en play-off et que leur top-scorer Jonathan Roy avait été suspendu. Ce samedi, c’était ainsi au tour de Mondou d’être au repos suite à une légère commotion.

Des Abeilles déboussolées

Mais si, Mondou, le nominé au Pigeon d’Or, vous vous rappelez : le porte-étandard de la frustration et de l’anti-fair-play qui avait slashé par derrière avec sa canne et préméditation le mollet d’un arbitre lors des derniers play-off. Il n’avait finalement pas été condamné aux dix matchs minimum de suspension mérités pour un tel geste détestable, simplement parce que la vidéo n’était pas en full HD (ou parce qu’il avait sa licence B avec Berne). «Oui mais je visais le puck qui était à 5 mètres de là» assumera-t-il avec le courage et le panache qui le caractérise, pendant que les dirigeants chaux-de-fonniers fustigeaient les ignobles Lausa…, pardon, Viégeois pour avoir transmis la vidéo de ce geste scandaleux au juge Lausa…, pardon, unique.
Pourquoi un tel plantage de décor ? Parce qu’il résume bien l’avant-, le pendant- et l’après-match. Vacheron déclarait ainsi avant le match dans 24 Heures que Florian Conz «devait se concentrer sur son jeu, ne  pas trop discuter et arrêter les coups bas, car sur la glace, c’est un petit vicieux». Verdict ? Une défense chaux-de-fonnière emmenée par Vacheron très souvent prise en défaut, une multitude de pleurnicheries sheehanesques auprès de l’arbitre de la part du capitaine du HCC et consorts (à en faire passer le Barça pour un modèle de respect inconditionnel des décisions arbitrales) et une multitude de fautes des… Chaux-de-Fonniers très souvent pris de vitesse. Pour les coups bas, relevons la charge dans le dos totalement inutile et made in Frustration de Vacheron sur Mottet, parmi tant d’autres. À l’opposé, Conz réalisait un match irréprochable ponctué de deux réussites, dont un impressionnant solo au milieu des cinq joueurs du HCC pour le 5-2. Sans aucun doute la meilleure réponse à donner aux ridicules accusations sans fondement du capitaine des Abeilles. Et je vous fais grâce des sempiternelles excuses toutes plus fumeuses les unes que les autres que Gary avait préparées en vue de cette défaite.

Des Lions conquérants

Il y a six mois, l’entame du match aurait stressé public et joueurs : une domination sans partage mais stérile des Lausannois et l’ouverture du score du HCC sur l’un de ses trois seuls tirs cadrés du tiers (13 pour le LHC). Mais les Lausannois emmenés par Genoway et le Gretzky des Alpes n’ont nullement été affectés par ce but totalement contre le cours du match. Ce qui aurait paru comme un signe indien fatal la saison passée n’a eu aucune incidence sur le jeu du LHC. Cette équipe a continué à faire ce qu’elle sait faire de mieux : mettre de la vitesse et se créer des occasions avec le talent de ses individualités et l’entente hors et sur la glace. Sans paniquer, Staudenmann et Setzinger ont ainsi renversé la situation en 20 secondes en toute fin de premier tiers. Comme si c’était écrit que rien ne pouvait leur arriver. Le deuxième tiers aura été dominé par le LHC au point de mener de trois longueurs, avant que Braichet ne réduise l’écart avec beaucoup de réussite sur une déviation. Le score final (5-3) est donc plutôt flatteur pour des Neuchâtelois qui auront eu bien moins de vraies occasions que les Vaudois.

Forces et faiblesses

Le travail dans la continuité porte ses fruits au LHC. Auteur d’un très bon match, Kamerzin s’affirme de plus en plus comme un défenseur incontournable tant défensivement qu’offensivement, au même titre que Leeger et Stalder. Mais c’est devant que les progrès sont les plus spectaculaires, avec Simon Fischer et Dostoinov. Le premier nommé est remarquablement utilisé par Boxy dans un rôle de «pivot» devant le gardien adverse pour gêner, dévier et récupérer les rebonds. Et ça marche à tel point qu’il est devenu le surprenant top-scorer de l’équipe. Sans compter que son gabarit fait beaucoup de place au remarquable passeur pour la LNB qu’est Genoway et permet à Setzinger de jouer bien plus offensivement. Mais la mutation la plus flagrante est sans conteste celle de Dostoinov. Surnuméraire en play-off, il est devenu indispensable dans le premier bloc de power-play et dans son… quatrième bloc. Qui n’est autre qu’un second deuxième bloc, aligné fréquemment face à la ligne de parade adverse comme lors de ce dernier match, ou face à Gamache-Dubé-Cadieux (excusez du peu) en match de préparation.
Le jeu résolument offensif des Lausannois se traduit donc par une évolution à quatre blocs tout à fait homogènes. Dont la ligne percutante, rapide et très technique emmenée par le métronome (et meilleur joueur samedi) Helfenstein, qui distille de somptueuses passes à Conz et Mottet. Exit la checking line et place au jeu d’attaque, ce qui a pour effet d’avoir davantage de buts marqués et… encaissés. Le HCC a ainsi su profiter de quelques erreurs défensives qui n’auraient peut-être pas eu lieu l’année passée en s’appliquant à viser le haut du but de Caminada, point faible d’un gardien de petite taille, tout talentueux qu’il soit. En témoignent les nombreux pucks ayant heurté le plexiglas derrière le but et, à une reprise, la latte. Mais le match «sans» du routinier Neininger et un Charpentier attendant à la rouge pour tout miser sur des contres au lieu de défendre, ont pesé dans le peu de rendement du premier bloc du HCC. Les alémaniques Moser, Gemperli et Bärtschi se sont par contre montrés à leur avantage, de même que Bochatay et, bien sûr, Ciaccio.

Ce LHC fait tout juste

Un recrutement intelligent, une très bonne cohésion d’équipe, de loin le meilleur encadrement de la ligue avec van Boxmeer (entraîneur et directeur technique), Zenhäusern (coach assistant), Jursinov (consultant de tout grande classe) et Alston (directeur technique assistant)… c’est pour l’instant un sans faute. Qui se traduit par 9 points en 3 rencontres, dont une victoire dans la forteresse d’ordinaire imprenable de la Liternahalle. Même le maillot est un coup de maître, arborant les armoiries de la Ville dans un style classe et épuré. «C’est les maillots d’entraînements ? Où sont les pubs ?» entend-on dans le secteur visiteur. C’est clair que ça change des chandails bariolés et surchargés des hommes-sandwichs des autres clubs de Suisse. Un splendide maillot comme un symbole que ce LHC est enfin durablement sur de bons rails ? Si c’est le cas – et je vois mal ce LHC perdre plus de 3 matchs durant les 2 premiers tours –, cette saison pourrait bien être tout bonnement dégueulasse. Et on se réjouit.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Lausanne – Chaux-de-Fonds 5-3 (2-1 2-0 1-2)

Malley, 5’954 spectateurs.
Arbitre : M. Kung.
Buts : 9e Moser (D.Bärtschi) 0-1, 19e Staudenmann (Augsburger, Reist) 1-1, 19e Setzinger (S.Fischer, Kamerzin) 2-1, 29e F.Conz (Helfenstein) 3-1, 31e Kamerzin (Helfenstein/5c4) 4-1, 44e Braichet (Bochatay, V.Du Bois) 4-2, 54e F.Conz (Helfenstein) 5-2, 56e Parati (Gemperli) 5-3.
Pénalités : 4×2’ contre le LHC ; 9×2’ + 1×10′ (Ganz) contre la Chaux-de-Fonds.
Lausanne: Caminada; Kamerzin, J.Fischer; Stalder, Chavaillaz; Leeger, Reist; Antonietti, Augsburger, Staudenmann; Setzinger, Genoway, S.Fischer; Helfenstein, F.Conz, Mottet; Sigrist, Dostoinov, Ulmer.
Chaux-de-Fonds: Ciaccio; Vacheron, Jaquet; Parati, V.Du Bois; Ganz, Erb; Daucourt; Bochatay, Gemperli, Braichet; Charpentier, Kast, Neininger; Moser, Plankl, D.Bärtschi; Turler, Fuchs, Pochon.
Notes : Lausanne sans Barbero (blessé) ni Le Coultre (Juniors Élites) ; la Chaux-de-Fonds sans Stephan, Mondou et Vidmer (blessés).

Écrit par Yves de St-Aÿ

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7 Commentaires

  1. « Du point de vue de Malley, c’est bien l’équipe du bout du Lac, pardon, nos partenaires-propriétaires bien-aimés, qui constitue LE derby »
    désolé pour nos amis genevois,mais en ce qui me concerne le véritable derby,ce furent les matchs contre le HC Martigny… ensuite y a la Tchaux.Tandis que pour Genève,c’est la suite tout à fait logique de la rivalité Vaud-Genève.

  2. Bon article bien provoc’, du bon carton rouge.

    Par contre, l’article qui commence en parlant des chaux-de-fonniers qui s’astiquent le poireaux… sérieux, t’as pas de miroir à la maison? t’as dû en mettre plein ton écran mon cochon!

  3. Si les Lausannois considèrent réellement les matches contre le HCC comme banals, il faudra qu’on m’explique pourquoi ils ont célébré leur victoire en amical(!) contre nous comme s’ils venaient de remporter une série de play-off au bout du 7ème match… ^^

    C’est un derby car ce sont deux clubs ambitieux de Ligue B qui ont joué les premiers rôles ces dernières saisons, ce qui attire donc le public et crée une tension supplémentaire entre les 2 équipes… Ceci est valable pour tous les championnats de tous les sports, peu importe la catégorie.

    Mais c’est pas grave, malgré votre mauvaise fois on vous aime bien quand même… =p

  4. @ fab : ah ok, c’est ça ! Pour toi, « match au sommet » et derby sont synonymes… Y a doc de beaux derbys entre Davos et Berne en LNA, alors…

  5. (25.09.11)
    Et bien les Tchaudes Pis.. Vous l’avez eu votre derby de l’arc jurasiéin…en plus vous l’avez gagné 🙂 Les portes de la LNA s’ouvre déjà 🙂
    A part cela… ne tirez pas trop sur la corde quand même et surtout soyez conscient qu’il faut savoir se contenter de peu lorsque nous sommes loin de tout…
    hein les gamins 😀
    S’il y a du monde à Malley pour les LHC vs HCC c’est d’une part parce que vous descendez en nombre dans la belle Capitale du Sport et deuxièmement parce que les Lausannois aiment vous le faire remarquer 🙂
    Allez sans rancune… mais restez humbles les montagnards 🙂

  6. Le match HCC vs LHC n est pas un derby mais juste une rivalire. En suisse on utilise le mot derby a toutes les sauces… Mais un derby est un match opposant deux equipes d une meme ville, comme GC FCZ.
    Ensuite il y a les grands classiques comme lausanne martigny geneve. Et les rivalite local ou sportive comme fribourg, geneve, bienne.
    Du moin personellement c est comme ca que je le vois et je resterais toujours un purists de l utilisation du mot derby…

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