180° Sud, partie 10 : la nouvelle vague

En 1997, La Ligue nationale de hockey est allée au-delà de ses objectifs en attribuant quatre nouvelles franchises d’expansion, faisant passer le nombre d’équipes de 26 à 30. Nashville, Columbus, Atlanta ainsi que les villes jumelles de Minneapolis/St-Paul feront ainsi leur débuts (ou leur retour) en LNH entre 1998 et 2000.

Nous avions vu dans le volet précédent qu’au milieu de la décennie, Les autorités de Nashville avaient déjà tenté de séduire certaines concessions en difficulté afin de venir dans le Tennessee, moyennant un joli sussucre sous la forme d’une remise de 20 millions de dollars. Ayant échoué dans cette démarche, c’est tout naturellement que la capitale de la country s’est vu offrir la garantie de rejoindre la LNH pour la saison 1998/1999 car c’était la seule ville en lice qui possédait un amphithéâtre déjà prêt à l’emploi.Soucieuse de redonner une chance à une ville d’Atlanta connue pour être l’un des plus gros marchés des États-Unis tous sports professionnels confondus, La Ligue nationale de hockey a remis le couvert avec la création des Thrashers d’Atlanta. La franchise d’expansion rejoignit la LNH une saison après les Predators, soit lors de la saison 1999/2000. Personne n’a jamais vraiment compris l’introduction de Columbus dans la Ligue nationale de hockey, si ce n’est que la ville était dotée d’une nouvelle arène : la Nationwide Arena. L’Ohio est plutôt un État où le sport universitaire est roi et le hockey ne possède pas vraiment une place prépondérante. Qu’importe, les Blue Jackets ont fait leur entrée durant la saison 2000/2001. Les autres candidats – Kansas City et Hamilton – sont recalés : la première ville en raison de l’échec cuisant des Scouts durant les années septante – l’équipe n’était restée que trois saisons dans le Missouri –, et la ville ontarienne en raison de la trop grande proximité de Buffalo et de Toronto. Hamilton n’était également pas dans la cible géographique voulue par la LNH… Quatrième franchise de la liste, le Wild du Minnesota a déjà été traité dans la partie 6 du dossier.


Le premier maillot alternatif des Predators. Une horreur…

La saison inaugurale des Predators fut prometteuse : Avec 28 victoires obtenues, Nashville est devenue la franchise ayant obtenu le plus grand nombre de succès pour sa première saison. Or, Nashville ne confirmera pas ses bonnes dispositions et il fallut attendre la saison 2003/2004 pour que les «Preds» n’atteignent les séries pour la première fois. Après cela, la concession connaîtra les joies des play-off durant quatre saisons de suite et s’affirmera comme l’une des équipes les plus difficiles à manœuvrer. Cependant, les espoirs ne se concrétiseront jamais en séries, les Predators se faisant sortir à chaque fois au premier tour.

De Nashville à Trashville

En dépit du bon comportement de l’équipe sur la glace, les premiers soucis apparurent en coulisses dès 2007. Fatigué de perdre de l’argent, le propriétaire Craig Leipold avait admis avoir perdu 70 millions de dollars depuis la création de la franchise, avec un montant toujours croissant au fil des années. Ayant obtenu la troisième place de la Conférence Ouest avec 110 points – record de la franchise –, les Predators n’ont pu compter que sur 13’815 spectateurs de moyenne lors de cette saison 2006/2007. C’est alors le retour sur scène d’une vieille connaissance, Jim Balsillie, celui-là même qui avait tenté de racheter les Penguins de Pittsburgh un peu plus tôt.
Le milliardaire a les faveurs de la cote : il est l’interlocuteur numéro un de Craig Leipold qui compte lui vendre la franchise pour 220 millions de dollars. Au sein de la ligue, on reste méfiants par l’intérêt du boss de Blackberry ; à l’époque, ce dernier avait bien l’intention de transférer la franchise de Pittsburgh dans son fief d’Hamilton et tout porte à croire qu’il compte réitérer l’opération avec les Predators. Parallèlement à cela, la LNH déteste les relocalisations de concessions, du moins depuis qu’elle a mis sur pieds cette stratégie de développement en direction du sud. Voir la franchise déménager serait un désaveu complet pour l’organisation et lui infligerait une sacrée perte de crédibilité, surtout que c’est la Ligue elle-même qui a retenu Nashville pour accueillir une équipe professionnelle.


Défait à Pittsburgh, Jim Balsillie revient à la charge du côté de Nashville.

Pour prévenir le coup, la Ligue nationale de hockey avait donc édicté de nouvelles règles allant en ce sens. Sur le papier, il n’y avait aucun problème pour que Jim Balsillie rachète les Predators, mais ce dernier devait signer une clause stipulant qu’il n’a pas le droit de transférer la franchise avant un délai de sept ans. En contrepartie, Les Predators devaient pouvoir garantir une affluence moyenne d’au moins 14’000 spectateurs pour que cette clause reste valable, sans quoi le contrat de location avec l’arène pouvait être dénoncé, ouvrant la voie à un potentiel déménagement. L’idéal pour la LNH et les «Preds» aurait été qu’un acheteur local daigne soumettre une offre, mais personne ne s’était manifesté à ce stade du processus.

Dupond et Dupont

Mais Jim Balsillie est un homme impatient. Impatient et pas très malin en la circonstance car il tente néanmoins de faire le forcing pour acquérir la franchise et ne masque pas son intérêt pour la déménager à Hamilton coûte que coûte. Cette attitude froisse Craig Leipold et surtout la Ligue nationale de hockey qui ne le juge pas crédible pour un sou. Jim Balsillie tentera bien par la suite de relativiser les choses en promettant de suivre les règles, mais le mal est fait. La LNH le décrète indésirable, bien que le Canadien ait soumis la meilleure offre de rachat. Jim Balsillie sur la touche, la menace vient maintenant de Kansas City où le magnat William del Biaggio compte racheter la franchise et la transférer dans le Spirit Center qui avait manqué l’acquisition des Penguins. Del Biaggio fait une offre se montant à 190 millions de dollars, mais le passé sulfureux de l’homme d’affaires ne plaide pas en sa faveur avec des nombreuses casseroles en termes de fraudes diverses et variées.
De son côté, Jim Balsillie ne s’avoue pas pour autant vaincu. Il affute ses armes en organisant une prévente de billets à Hamilton dans le but de prouver à la LNH que la demande existe. Cette action ne plaît pas du tout à la Ligue nationale de hockey du fait que la franchise soit toujours liée contractuellement à son arène de Nashville. À ce moment, Craig Leipold dit considérer toutes les options possibles, y compris celle de Balsillie. C’est alors qu’un consortium formé d’une trentaine d’investisseurs regroupés sous la dénomination «Our Team Nashville» fait son apparition dans le but de conserver l’équipe à Nashville. Balsillie était de toute manière coincé car même s’il rachetait la franchise à ce moment, son déménagement aurait été soumis au vote du le Conseil des Gouverneurs de la Ligue. La vente n’aurait alors jamais été acceptée sachant que le Canadien avait délibérément enfreint les règles de la LNH.


Le Sprint Center de Kansas City : une arène sans locataire.

L’espoir renaît alors chez les rares fans des Predators qui pensaient que tout était perdu. Incluant le fameux William del Biaggio, le collectif parvient finalement à trouver un accord avec la ville pour le rachat de la franchise pour 172 millions de dollars, incluant le paiement de tous les arriérés. Les Predators sont sauvés, la franchise reste dans le Tennessee. Une équipe du sud a certes remporté une bataille, mais cette saga a ouvert une brèche à un possible revirement de situation au sujet de la viabilité des franchises localisées dans ces marchés non traditionnels. Le front sud-est sécurisé, une énorme fissure apparaîtra au sud-ouest, avec l’effondrement des Coyotes de Phoenix.

À suivre : 180° Sud, partie 11 : le cas Phoenix

Si tu as raté le début : 180° Sud, partie 1 : prélude à l’avènement ;
180° Sud, partie 2 : le lancement ;
180° Sud, partie 3 : l’Étoile du Nord ;
180° Sud, partie 4 : entre esbroufe et couardise ;
180° Sud, partie 5 : un univers impitoyable ;
180° Sud, partie 6 : erreur corrigée ;
180° Sud, partie 7 : au revoir Québec ;
180° Sud, partie 8 : le déclin ;
180° Sud, partie 9 : un espoir nouveau

Écrit par Mathieu Nicolet

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