La LNH de retour à Québec

Alors que certains joueurs ont préféré aller pêcher les pétroroubles du côté de la KHL ou s’adonner au tourisme sportif en Europe, un petit groupe d’autochtones a décidé de se réunir durant la grève de la Ligue Nationale en jouant des matchs exhibition à divers endroits du Québec, et ce en attendant que Gary Bettman et Donald Fehr daignent se bouger le cul pour l’intérêt du hockey.

L’idée originale, baptisée la «tournée des joueurs», est venue des deux joueurs québécois Maxime Talbot et Bruno Gervais. Plutôt que de passer leur temps à faire fumer leur Playstation ou à faire acte de présence en liquette débraillée et tongs trouées lors des conférences de presse de l’Association des joueurs de la Ligue nationale de hockey, ils ont opté pour organiser une tournée dont l’objectif est de récolter des fonds pour des causes aussi nobles que variées (éducation, maladie, formation). Histoire de ne pas rouiller et de faire plaisir aux fans habitant dans des lieux aussi improbables que Rouyn-Noranda ou Blainville-Boisbriand. On ne sait pas si c’est du niveau de la même supercherie que la fameuse lutte contre le cancer du sein matérialisée par les chaussures, casquettes et lavettes rose bonbon qu’arborent les très virils footballeurs de la NFL, mais on leur accordera néanmoins le bénéfice du doute.


La foule des grands jours au Colisée !

Nous nous souvenons

Tout le monde le sait, le hockey, c’est le Canada anglophone. Les Nordiques ont disparu, et il est plus facile de trouver un type qui parle français à Bienne ou Zurich qu’à Montréal. C’est dire. Du coup, la Belle Province essaie tant bien que mal de refaire son immense retard sur le reste du pays en terme de hockey. Pour contredire cet état de fait, cette tournée qui faisait halte le 11 octobre dernier au vénérable Colisée Pepsi – antre des Remparts de Québec de Patrick Roy – fut un bon baromètre.
Le problème, c’est que le Québec, c’est l’Amérique. Qu’ils le veuillent ou non et peu importe la loi 101. Une fois calé dans son siège et après avoir enlevé ses cinq couches de vêtements (il fait déjà bien en-dessous de zéro degré dehors à cette période), quoi de mieux que de s’envoyer 58 onces de beurre fondu saupoudré de pop-corn dans un récipient de 95 pouces cubes. Ici, pas de place pour la spontanéité. Il faut demander aux spectateurs d’applaudir à certains moments-clés, de faire la vague ou de faire du bruit. Tels des moutons, ces derniers sont déjà limites pour suivre le mouvement, mais totalement incapables de laisser leur expression exploser d’elle-même lors d’un match de hockey. De là à penser qu’ils en comprennent à peine les règles, il n’y a qu’un pas que nous franchissons allègrement. Et à pieds joints. Un bon point tout de même avec l’absence de pom-pom girls customisées.


Deux équipes avec une grande profondeur de banc

A l’occasion de ce match de promotion, il a fallu adapter les règles pour que celles-ci paraissent attractives à ces incultes. Des pénaltys («fusillades») organisés entre chaque tiers, histoire qu’il y ait quand même quelques buts dans cette rencontre de pousse-pucks. Aucune charge appuyée n’était tolérée et aucune pénalité n’a été sifflée (le concept est considéré comme trop ardu à comprendre pour un public non averti). Dans cette ambiance de cathédrale, nous avons été ravi d’apprendre que «la blonde du gars de 250 livres au secteur 123 s’est faite crosser en asti par ce maudit chien sale de Réal et son truck qui pue de la marde». En revanche, quelle déception d’entendre de la part de la fille située 22 rangs derrière nous que sa «matante n’avait pas eu de fun pantoute lors de sa dernière séance d’aquagym prénatal». Méchante affaire…

Un jeu un peu Bouillon

Sur ce match qui voyait s’affronter Québec à Montréal, il ne fallait donc pas s’attendre à voir un engagement digne d’une finale de la Coupe Stanley. Compréhensible de ne pas vouloir se foutre en l’air si le conflit, par le plus pur des hasards, venait à se résoudre. A défaut d’un jeu avant tout axé sur le physique, c’était l’occasion de voir toute l’étendue des qualités techniques des grévistes qui ont souvent bénéficié de boulevards savamment concoctés par les paires défensives adverses, mais sans que les arrières ne laissent les gardiens livrés à eux-mêmes comme c’est la coutume grotesque lors des matchs des Etoiles, faisant passer au passage les derniers remparts pour de profonds nazes.


Arbiiiitre, surnombre !

Cela dit, cette rencontre a permis de se rendre compte que Kristopher Letang (prononcez «le temps») est bien l’un des meilleurs défenseur du monde, que le directoire des Canadiens ne s’est pas gêné pour diverses substances non identifiées juste avant de prolonger Price (avec la jurisprudence Scott Gomez, plus rien ne nous étonne), que Hal Gill fait passer Andreas Beutler pour un piccolo et qu’Alexandre Burrows est capable de noircir la feuille de match sans même être présent sur la glace. Même si l’atmosphère était plutôt bon enfant, aucune des deux équipes n’a voulu concéder la défaite lors de ce derby de circonstance. Question d’honneur et de prestige dira-t-on. En dépit d’une avance de trois buts sur Québec, l’équipe Montréal a flanché sur la fin, permettant aux «locaux» de l’emporter de justesse. L’intensité a donc été plus que correcte durant les dernières minutes du match, sans compter un Marc-André Fleury des grands soirs pour sauvegarder ce petit but d’avance.
La seule déception de la soirée aura été la faible affluence du Colisée de cette rencontre où seuls 5’621 spectateurs sont venus parsemer les gradins de l’amphithéâtre, la faute, en partie, au fait que le match était retransmis en direct à la TV. Mauvaise excuse ? Peut-être, enfin oui, complètement. Les Québécois de la Vieille Capitale se devait d’être présents en masse afin de donner un signe clair à la Ligue Nationale au sujet épineux d’un éventuel retour des Nordiques, ces mêmes partisans qui se déplacent régulièrement, et nombreux, au Nassau Coliseum notamment pour faire entendre leur cause. Sur ce coup, ce fut un cuisant échec. Dommage, car il n’y aura point de partie remise.

Québec – Montréal 6-5 (1-2 3-3 2-0)

Colisée Pepsi, 5’621 spectacteurs.
Buts : 1re Burrows (Gorges, Talbot) 0-1, 9e Parenteau (Desharnais) 1-1, 20e Gionta (tir au but) 1-2, 26e Burrows (Talbot) 1-3, 27e Pominville (Gorges) 1-4, 34e Eller (Bouillon, Bernier) 2-4, 37e Begin (Letang, Gill) 2-5, 40e Perreault (Bélanger) 3-5, 40e Parenteau (tir au but) 4-5, 43e Desharnais (Parenteau) 5-5, 55e Bouillon (Moen, Perreault) 6-5.
Pénalités : aucune.
Québec: Fleury; Vlasic, Bouillon; Hamrlik, Beauchemin; Bissonnette; Desharnais, Bernier, S.Gagné; Perreault, B.Pouliot, Eller; Moen, Parenteau, Bélanger; Prust. Entraîneurs: Bergeron/Therrien.
Montréal: Price; Letang, Gill; Gervais, Gorges; Pominville, Talbot, Darche; Gionta, Burrows, Armstrong; Latendresse, Begin, Brassard; Bailey. Entraîneurs: Carbonneau/Demers.

Écrit par Mathieu Nicolet et Yves de St-aÿ

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2 Commentaires

  1. Mouais, conclusion un peu rapide et facile… Les affluences au Colisée pour les matchs des Remparts sont régulièrement au-dessus des 10’000 spectateurs, ce qui n’est pas si mal pour des juniors… Cela prouve la passion des partisans québécois, qui mériteraient de voir renaître les Nordiques prochainement.

    J’imagine qu’en l’occurrence, pour ce match de gala, ils savaient très bien que le spectacle ne serait pas à la hauteur et que c’était plus proche d’une opération commerciale qu’autre chose.

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