Deux de perdus, une de retrouvée ?

En s’inclinant dans le Derby contre Schalke 04, le Borussia Dortmund a non seulement perdu son match le plus important de la saison mais en plus probablement abandonné son titre de champion d’Allemagne qu’il détenait depuis deux ans. On ne voit que deux manières d’oublier cet après-midi funeste entre tous : l’alcool et gagner la Ligue des Champions. L’alcool, c’est fait.

Lors des deux saisons écoulées, je t’ai souvent relaté des week-ends parfaits autour du Borussia Dortmund où buts, victoires et fêtes s’enchaînaient comme dans un rêve et où tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ce week-end, on a vécu le scénario inverse, tout est allé de travers de A jusqu’à Z. Cela commence avec la défaite du LHC contre Olten juste avant d’aller prendre notre car. Ensuite, lors du trajet aller, notre car tombe en panne en pleine nuit et reste bloqué deux heures par une température glaciale au milieu de nulle part entre Freiburg et Offenburg. Ensuite, alors que j’avais prévu d’arborer un maillot spécial Derby 2011 floqué Lewandowski, j’arrive au stade et un ami me fait remarquer qu’en fait j’ai pris un maillot spécial Derby 2011 floqué Kagawa. Bref, c’était le genre de journée où le mieux que tu aurais à faire, c’est de rester tranquillement chez toi. Le problème, c’est qu’il y avait un match de foot et pas n’importe quel match, la rencontre la plus importante de la saison, Dortmund – Schalke, le Revierderby, die Mutter aller Derbys, le plus grand derby du football mondial. Si, si, je t’assure : il n’y a aucun autre derby dans le foot actuel qui oppose deux clubs situés à moins de 40 kilomètres l’un de l’autre et qui peuvent revendiquer plus de 80’000, respectivement 60’000, spectateurs de moyenne.

Les drôles d’expérimentation de JK

Malgré la chaleur estivale de l’été indien qui s’est abattu sur la Ruhr et un stade bien entendu surchauffé et archicomble, comme toujours depuis 25 ans pour le Derby, ce 141e Revierderby ne se présente pas sous les meilleurs auspices pour le Borussia Dortmund. Déjà parce que, par un malencontreux concours de circonstances, le BVB accuse deux points de retard sur son rival de toujours au coup d’envoi. Ensuite, lorsque le speaker Nobby Dickel, unique buteur du Derby 1987 remporté 1-0 par le Borussia, annonce la formation des équipes, on s’aperçoit que le BVB doit se passer de quatre titulaires, Blaszczykowski, Götze, Schmelzer et Gündogan. Lorsqu’il a pris les commandes du Borussia Dortmund à l’été 2008, l’entraîneur Jürgen Klopp faisait jouer son équipe en 4-4-2. Toutefois, après une série de mauvais résultats et quelques absences, il est passé au 4-2-3-1 depuis un match à Leverkusen à l’automne 2009, un système devenu immuable depuis et qui a permis au BVB de survoler la Bundesliga lors des deux dernières saisons. Or, pour ce Derby et compte tenu des absences, Jürgen Klopp tente un improbable 3-5-2. Là, on n’a pas compris : quand ton équipe est déjà diminuée, ce n’est surtout pas le moment de la désorienter en lui faisant adopter un système qu’elle ne connaît et  ne maîtrise pas. Et effectivement, l’expérience a tourné au fiasco avec un BVB qui n’a jamais trouvé ses marques et n’a jamais vraiment donné l’impression d’être entré dans le match. Après le match, Kloppo reconnaîtra son erreur et assumera l’entière responsabilité de la défaite, tout en s’excusant auprès des fans pour le triste spectacle proposé.

Schalke plus serein

Pourtant, Schalke n’était pas transcendant mais on a senti une équipe bien en place, mieux organisée et plus sereine. Clairement, l’entraîneur königsblaue Huub Stevens a gagné son duel tactique avec Jürgen Klopp. Comme le Borussia ne pouvait pas compter sur son collectif, défaillant, il fallait espérer un exploit individuel pour sauver la mise mais Schalke avait bien compris que, s’il parvenait à neutraliser Marco Reus, il aurait fait un bon bout de chemin vers la victoire. Et ce fut fait, avec notamment un très bon Benedikt Höwedes. Quatre jours après le naufrage de la Nationalmannschaft contre la Suède, on espère que l’entraîneur national Jögi Löw va finir par comprendre qu’il doit instituer une charnière centrale Hummels – Höwedes et arrêter d’insister avec Mertesacker, Boateng ou Badstuber.
Schalke a en plus eu la chance d’ouvrir le score sur sa première occasion, un avantage considérable dans un match pauvre en occasions de but et pauvre tout court. Sur un centre de Farfan, le renvoi hasardeux de Bender parvient à Ibrahim Affelay qui écrase un peu sa volée qui finit tout de même au fond des filets avec l’aide du poteau, typiquement le genre de but qu’encaisse une équipe qui traverse une passe difficile. C’est en vain qu’on a attendu la réaction du BVB, qui ne se crée qu’une demie occasion de toute la première mi-temps, un tir de Reus facilement stoppé par Unnerstall.

L’histoire ne s’est pas répétée

La mi-temps n’a pas changé le cours du match. Pire, Schalke double la mise sur une contre-attaque éclair. Lewis Holtby, le jeune espoir allemand qui a fait oublier Raul, lance superbement Marco Höger qui part seul battre Weidenfeller. Au Westfalenstadion, quand ni le collectif ni les individualités dortmundois ne sont au rendez-vous, on a toujours l’espoir que ce soit le public, le fameux douzième homme, qui fasse basculer la rencontre. On a toujours en mémoire le fameux Derby de 2008 où le BVB, outrageusement dominé pendant une heure et mené 0-3, était parvenu à revenir à 3-3 après que Kuranyi eût manqué le 0-4 devant le but vide. On a cru que l’histoire allait se répéter lorsque Joël Matip manque l’immanquable juste avant que Robert Lewandowski ne réduise le score en déviant un coup franc de Marco Reus. Un but quasi identique à celui que le Polonais avait inscrit dans un Derby 2011 autrement plus festif, avec une victoire du BVB et la première place du classement en prime.
Le temple jaune s’embrase et on croit à la remontée fantastique, surtout que, dans la minute suivante, Reus est tout près de l’égalisation mais il pousse trop sa balle et tire dans l’extérieur du petit filet. Mais ce n’était qu’un feu de paille : avec plusieurs joueurs relevant de blessure, d’autres évoluant à un poste qui n’est pas le leur et certains qui sont en petite forme, le BVB n’avait pas le rythme pour bousculer une solide équipe de Schalke. Jamais depuis plus de deux ans le Borussia n’avait produit aussi peu de danger devant la cage adverse. En plus, les Knappen ont parfaitement su utiliser tous les artifices possibles et imaginables pour casser le rythme et empêcher le Borussia d’enflammer le match et le stade. Il n’y aura pas d’autres chances d’égalisation, on était beaucoup plus près du 1-3 que du 2-2 avec des sauvetages de Weidenfeller devant Affelay, Fuchs et Huntelaar. Au final, même s’il m’en coûte de le reconnaître, force est de constater que Null Vier a parfaitement mérité son succès.

La théorie fumeuse du jour

«Derbysieg ist wie die Meisterschaft», une victoire dans le derby est comme un titre, prétend une expression célèbre dans le Pott. Ce titre-là, le BVB ne le gagnera pas dans ce premier tour. Et le titre de champion d’Allemagne, le vrai celui-là, s’est sans doute également envolé dans ce Derby funeste puisque le Borussia accuse désormais douze points de retard sur le Bayern Munich. Certes, la saison dernière, le BVB a mis seize points dans la vue du Rekordmeister entre la 7e et la 34e journée. Mais cette saison, cela paraît beaucoup plus compliqué. Même en retranchant au retard du Borussia les six points qu’il remporte traditionnellement dans les confrontations directes avec le Bayern, il reste encore six unités à gratter sur l’effectif le plus onéreux de l’histoire de la Bundesliga, on ne voit pas trop comment ça pourrait se faire. Surtout quand on s’aperçoit que quelques malheureuses absences suffisent à mettre Dortmund à genoux alors que le Bayern peut se passer de joueurs comme Robben, Gomez ou Alaba et quand même réussir le meilleur début de saison de l’histoire de la Bundesliga.
Il a fallu pas mal de bières et de Jägermeister pour tenter d’oublier ces deux titres perdus. On a quand même trouvé des supporters qui avaient encore la force de chanter au Lüdtkeck. Et je te livre en exclusivité la conclusion de nos cogitations alcoolisées : cette défaite n’est finalement qu’un élément d’une stratégie géniale du BVB pour gagner la Ligue des Champions. En effet, après les titres de champion d’Allemagne 1995 et 1996, le Borussia avait dû abandonner le Meisterschale au Bayern Munich en 1997 pour mieux gagner la Königsklasse : alors le but est d’être largué le plus vite possible en Buli pour tout miser sur la C1. Dans l’ambiance enivrante du Anton’s Bierkönig, cette théorie nous paraissait séduisante et crédible, sobre elle semble beaucoup plus capillotractée. Surtout qu’en jouant aussi mal que contre Schalke, le BVB court au naufrage contre le Réal Madrid mercredi. Et de toute façon, aussi prestigieuse serait-elle, une hypothétique victoire contre les Merengue ne suffirait pas à faire oublier la défaite dans le Derby, qui était clairement le match le plus important de la semaine. Définitivement, c’était un samedi aussi noir que les fonds des mines de charbon qui ont donné leur nom au Revierderby.

Borussia Dortmund – Schalke 04 1-2 (0-1)

Signal Iduna Park, 80’645 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Brych.
Buts : 14e Affelay (0-1), 48e Höger (0-2), 55e Lewandowski (1-2).
Dortmund : Weidenfeller; Hummels, Bender, Subotic; Piszczek, Leitner (89e Santana), Kehl (55e Bittencourt), Perisic (52e Schieber), Grosskreutz; Reus, Lewandowski.
Schalke : Unnerstall ; Uchida, Höwedes, Matip, Fuchs ; Höger (79e Jones), Neustädter; Farfan (71e Barnetta), Holtby (86e Moritz), Affelay; Huntelaar.
Cartons jaunes : 45e +1 Höger, 56e Schieber, 62e Leitner, 94e Unnerstall, 95e Fuchs.
Notes : Dortmund sans Blaszczykowski, Götze, Schmelzer, Gündogan ni Owomoyela (blessés), Schalke privé de Metzelder, Draxler, Papadopoulos, Obasi et Escudero (blessés).

Écrit par Julien Mouquin

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7 Commentaires

  1. Et avec les 2 prochaines défaites contre le Real Madrid…Dortmund aura déjà terminé lamentablement sa saison au début novembre…et Mouquin pourra noyer son chagrin dans la bière!

  2. Pauvre Mouquin,,,c’est la grosse déprime ! Etant donné qu’il n’aura plus rien à écrire sur son Dortmundloser, il va recommencer à écrire ses articles au vitriol sur le Barça.

  3. En réalité, il n’y a déjà presque personne qui lis et qui commente les articles de Mouquin, alors si en plus CR censure…il ne restera pas grand chose !

  4. Tu te trompes…les article de JM sont ceux que je préfère et si ils déplaisent parfois, c’est justement qu’ils sont dans l’esprit de CR, parfois décalés, toujours partisans et un poil de mauvaise foi…

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