HC Sierre : une faim pathétique

Au terme d’un calvaire comptable supporté avec courage, CartonRouge.ch a le regret de vous annoncer la disparition subite du HC Sierre, club de tradition (?) et vibrante cheville ouvrière militant pour la création d’un HC Valais. Hélas, après que les Epiney, Granziero et consorts aient viscéralement tailladé dans les entrailles financières du club, une voie royale était ouverte pour que Silvio Caldelari vienne déposer l’épitaphe finale sur le tombeau de Graben : «Ci-gît le HC Sierre, on dit qu’il fut bon… mais bon à quoi ?»

Souvenirs inutiles

Indubitablement, le HC Sierre a fait rêver des générations, moi le premier. Créé dans les frimas hivernaux de 1933, les Rouges et Jaunes ont fait rêver toute la populatze valaisanne grâce à des mythiques matchs disputés initialement sur l’étang de Géronde, puis dans un Graben qui fut une enceinte à la fois moderne (place debout sur caisses à vendanges) et fonctionnelle (pissoirs directement sur la ligne CFF limitrophe). Bâti grâce au fin nez de certains dirigeants (Willy Anthamatten et Eddy Duc le jeune) et emmené par des entraîneurs de renom tels que Frantisek Vanek, Juhani Tamminen et Philippe Bozon (non, là je plaisante), le HC Sierre s’est hissé durant pas moins de 16 ans au fin sommet de l’élite du hockey Suisse. Puis, dans les années 80, grâce à une série de joueurs 100% du cru (Martin Lötscher, Cyrille Bagnoud, Didier Massy….) et un arrivage de choix de l’Atlantique-Nord (Dubé, Metivier, Miller, Glowa…), le HC Sierre a véritablement fait swinguer tous les amoureux du palet rond valaisan, y-compris les nonnes du Couvent d’à coté. Plus récemment, malgré un passage en première ligue dans les années 90, le HC Sierre allait se refaire une petite place en Ligue Nationale B, obtenant même trois titres de vice-champion suisse durant ces 15 dernières années.


C’est pas faute de les avoir prévenus…

Oui mais patatras ! Pour maintenir les performances sportives de choix et pérenniser la tradition d’un club, il faut un management visionnaire et raisonnable, bref des attributs qui vont aussi bien aux Valaisans que du rouge à lèvres à un bouquetin !

Le début de la fin

Le petit monde sportif du Vieux-Pays avait bien tout cru voir après la quasi disparition du FC Sion version Kadji, la liquidation du vrai HC Martigny et l’éclipse totale de l’énigmatique BBC Sion-Wissigen. Contre toute attente, la gangrène sportivo-financière allait remonter subrepticement le Rhône pour s’attaquer à l’ineffable Jean-Daniel Epiney. Courroucé par un 8e rang en championnat  et par une élimination déshonorante en quart de finale des play-off, l’indéboulonnable président décida à l’unanimité qu’il allait à lui tout seul privilégier la piste gériatrique afin de requinquer son équipe.
Et voilà  que débarquèrent les séniles Picsou de Ligue A (DiPietro, Paterlini et le loufoque Snell), accompagnés d’une fiche de paie à l’image de la démagogie folle d’un dirigeant pourtant démissionnaire. Les résultats orchestrés par le monodimensionnel entraîneur Morgan Samuelson furent à la hauteur de cette stratégie utopique et le Titanic sierrois commença sa glaciale croisière. A cela, ajoutons également les sous-performances chroniques du duo  Cormier-Jinman qui ne patinaient que sur une lame et ce, malgré des salaires de ministre. Le public commençait à gueuler sec et votait avec ses pieds en omettant la descente hebdomadaire sur le Graben.
A ce stade, la plaie n’était peut-être pas encore mortelle, mais voilà que la pérennisation du HC Sierre fut confiée au Philippe Bruggisser du HC Crans-Montana, Gilbert Granziero. Pour situer le gaillard, une seule de ses répliques suffit. Lorsque interrogé sur l’impact d’une non-qualification pour les play-off, il déclara candidement à Canal 9 : «Je n’en sais rien…de toute façon, nous n’en sommes pas là et nous compterons les bouses à la fin du Combat de Reines.» L’édifiant Granziero oubliait qu’à la place de Reines d’Hérens, il possédait un bande de biquettes aussi intéressée au futur du HC Sierre que Nabilla aux thèses de Schopenhauer. Avec une qualification en play-off 2011 manquée et l’engagement d’un nouvel entraîneur en cours de saison (le surfait Bozon), le perte et profit sierrois se déglingua illico sans que personne ne s’en inquiète car d’après des sources bien informées, les clubs de tradition ne meurent jamais. C’est cela, oui.

Les auditeurs ont la parole

Avec le HC Sierre mal en point sportivement, sans stratégie à long terme et les poches percées, les membres de son Assemblée extraordinaire pouvaient bien entendu se permettre le luxe de renvoyer comme des malpropres les outrecuidants Vincent Maret, Gerold Cina et Andrei Nazheskin qui avaient osé proposer une idée de fusion entre les fringants Red Ice et l’agonisant HC Sierre. Bien supporté par les vieux pachydermes du club sierrois (Eddy Duc en tête), Silvio Caldelari (Quat’ Sous pour les intimes) débarqua avec des plans de funambules qui se mariaient à merveille avec son caractère de supporter fanatique et borné, pour qui l’amour de l’écharpe rouge et jaune prend le dessus sur toute réflexion cartésienne. Le HC Sierre est bel et bien parti en faillite en ce soir du 20 mars 2012, car Silvio s’évertua par la suite à souffler sur des braises chimériques alors que son joujou était déjà en cendres.


«Le mur est par là, je crois…»

Sur Canal 9, ce gestionnaire hors-catégorie de Silvio Caldelari déclara : «Après une séance comptable avec Granziero et la fiduciaire sur des comptes non-audités (sic!), la perte s’élevait à 144’000 Francs, donc pour moi tout était en ordre !» Imaginons juste une seconde quelques questions que n’importe quel pékin aurait posé au caissier avant de reprendre ce club : «Y a-t-il : a) des factures en suspens (fournisseurs du club), b) des créances en souffrance (rappels de la Caisse de compensation, 650’000 Francs), c) des poursuites judiciaires (contrat non-soldé de Bruno Aegerter, 180’000 Francs), d) un manque à gagner suite à la non-qualification pour les play-off 2011 (200’000 Francs) ?»
Bref, en reprenant le HC Sierre de manière si réfléchie, Silvio Caldelari veut nous faire croire qu’il ne lui a pas effleuré l’esprit que le trou dans les finances du club pouvait être aussi vertigineux que la descente du Bec des Rosses. Il tenta même de se dédouaner en affirmant dans les médias : «Je n’allais quand même pas fouiller l’ordinateur pour ressortir toutes les écritures comptables.» Non, c’est vrai Silvio, les charges salariales et sociales représentent approximativement 70% de ton roulement annuel donc n’essaie pas de t’intéresser à ces postes capitaux dans ta comptabilité. Focalise-toi plutôt sur les couleurs des écharpes pour la nouvelle saison et le prix des chambres à air pour la machine à refaire la glace.
Certes, Silvio Caldelari n’est pas responsable du trou abyssal de 985’604 Francs découvert dans les caisses du club en Novembre 2012, mais ce qu’il ne dit pas c’est le déficit que lui-même a généré (environ 400’000 Francs) lors du dernier exercice en planifiant des revenus totalement irréalistes tant au niveau des sponsors que des contributions de fantomatiques donateurs dont on n’a jamais vu la couleur. Si le trou existait déjà, Caldelari était aux commandes de la pelle mécanique pour mieux l’agrandir tout en faussant le championnat de Ligue B et en augmentant le déficit d’image du Club dans la région. Ne s’est il qu’une fois posé les questions telles que «quel est l’avenir de mon club ?», «comment puis-je le pérenniser ?» Bon, on ne demandait pas qu’il devienne aussi visionnaire que notre Constantin national, mais de là à se réincarner en un Gilbert Montagné du pauvre… 

La tradition a bon dos

A la question de savoir pourquoi il fallait absolument sauver ce HC Sierre, la  réponse du Silvio fusait : «Sierre est le seul club valaisan avec une véritable tradition de hockey». Donc si on le comprend bien, parce que les armoires étaient pleines de trophées qui prenaient la poussière, le Président du club sierrois pouvait les utiliser pour faire du chantage à la pièce de cent sous afin d’affranchir son propre bilan sportif peu appétissant, ainsi que celui de ses prédécesseurs que l’on qualifiera très poliment de cataclysmique. En fait, utiliser ce terme de tradition à toutes les sauces tout comme le valaisanisme Pa Capona est un véritable soufflet dans la figure des différents présidents, joueurs et entraineurs qui ont construit pas à pas le mythe du HC Sierre, le forgeant sur la simplicité, des joueurs du coin, un public de connaisseurs et une ambition contagieuse mais toute raisonnable.


Pauvre Sunny, innocente victime collatérale de la débâcle.

Lorsque deux députés au Grand Conseil valaisan s’en mêlèrent en nous ressassant cette rengaine de tradition, tout est devenu assez grand-guignolesque vu que ces élus allèrent jusqu’à évoquer l’utilité publique du club de la Cité du Soleil, tout comme le Couvent de Géronde les carnotzets du Château de Villa…et les vignes à Rouvinez. La représentation cantonale refusa d’entrer en matière, comme quoi, nos excellents politiciens savent ce qu’ils font… Au bout du compte, le mythique club sierrois fut mis en faillite le 30 Avril 2013. Des faims irréfléchies de pouvoir et d’argent (surtout celui des autres) auront eu raison en 24 mois d’un Club vieux de 78 ans. Pathétique.

The future is bright

A part créer un rigolo cas d’école pour les futurs MBA de l’INSEAD, certains prétendent que l’aventure du HC Caldelari  s’arrêtera simplement là. «Mais qu’non » dirait René Grand. On prend le pari que certains débris du HC Sierre se rapprocheront ces prochaines semaines du grand frère sédunois afin d’éviter la dégradante culbute en troisième ligue et par là même, redonner un brin d’espoir aux juniors sierrois. Et dans quelques mois, la Ville de Sierre annoncera sûrement l’abandon du projet de construction d’une nouvelle patinoire en ses terres. L’idée ne sera pas enterrée pour autant car le populaire nouveau Conseiller d’Etat responsable de l’Education et des Sports reprendra le projet au bond et s’en ira bâtir la Ems-Chemie ou la Giroud Vins Aréna sur les hauts de Savièse. C’est en ces lieux que les Red Ice émigreront et iront décrocher le titre de champion suisse en 2023, en battant facilement l’outrecuidant Fribourg-Gottéron en finale des play-off. Merci qui, merci Silvio !
Finalement, la disparition du HC Sierre n’aura apporté que du positif, ou bien ?
Photos Pascal Muller, copyright www.mediapsorts.ch

A propos Paul Carruzzo 207 Articles
Elle est pas un peu belle notre Nati et tout le bonheur qu’elle nous amène ? Alors, Rickli et compagnie, si vous ne vibrez pas devant cette équipe, vous n’êtes pas non plus monstrement obligés de regarder. Profitez d’un bon match de hornus et foutez la paix à nos joueurs, qui comme vous, ont un joli passeport rouge à croix blanche.

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5 Commentaires

  1. je suis valaisan et feu fan du feu HC Sierre et lire cet article m’a été très pénible. en effet, il résume diablement bien la situation et ça fait mal de prendre la réalité en plein poire comme ça ! espérons que la fin de l’article se réalise pour que mon fils qui aura en 2023 l’âge que j’avais lors des 3 dernières finales des play-off perdues, puisse également vibrer dans une patinoire valaisanne ! finalement ce foutu Silvio ne voulait que sauver son salaire annuel de 90’000.-… payer pour faire le clown dans les journaux et critiquer tout le monde alors qu’il n’était pas foutu de ramener quelques centaines de francs de sponsoring…

  2. Il y a des éléments intéressants dans cet article ! @fan, faire porter uniquement à Silvio la responsabilité de cette débâcle, c’est trop facile. C’est une accumulation d’erreurs et un manque de vision (ces dernières années) qui ont conduit à cette faillite ! Maintenant à voir si l’avenir du hockey valaisan se trouve du côté de Viege ou Martigny. Les uns ont une vision et des juniors et les autre une vision et des finances. À suivre

  3. je suis ajoulot mais apres le hca sierre etait mon club favori sa disparition ma atristé vous êtes valaisans comme ma grand -mere donc j ai un peu du valais dans mon sang petit a petit vous aller remonté la pente et je me réjouis déja de revenir a graben pour votre ambiance et votre sympatie vive le hc siere et vive ajoie Christophe Tschann

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