La Culture de la Gagne, c’est comme le Philadelphia…

... moins on en a, plus on l’étale

On vous l’avait promis dès la Laver Cup, on donne dans l’exhibition dorénavant. Et un peu dans le masochisme et le syndrome de Stockholm, on l’avoue. Après avoir fait partie des 17’031 victimes d’une fuite massive de gaz soporifique lors du Berne-New Jersey Devils du 1er octobre 2018 à la Postfinance Arena, on a remis ça en connaissance de cause dans la flambant neuve Vaudoise aréna pour une deuxième mouture du NHL Global Series Challenge entre le LHC et les Philadelphia Flyers. Après son dépucelage pour le moins douloureux par Genève-Servette mardi dernier et sa première grosse cuite en compagnie du HC Davos samedi (d’habitude c’est dans l’ordre inverse, non?), la nouvelle enceinte de Malley était prête pour son baptême de l’air. En espérant que Justin Braun et ses coéquipiers ne seraient pas aussi rasoir que ce diable de Taylor Hall et les siens il y a douze mois. Surtout qu’on a déjà été tenté de se crever les yeux à la fourchette à escargots plusieurs fois en une semaine de performances indigentes au Chemin du Viaduc.

Le match en deux mots

Quatre-trois.

La bande annonce du match nous vient directement d’outre-Sarine. On se demande bien qui est ce « HC Lausanne ».

Les trois étoiles du match

Rappelons rapidement que nous assistions à une confrontation au cours de laquelle il fallait surtout éviter une blessure stupide et au terme de laquelle seuls deux NHLers joueraient (officiellement) leur place dans le contingent de la première équipe sur les 25 têtes de pipe de l’escouade dirigée par Alain Vigneault. Dans ce contexte particulier, on s’attendait à devoir retrousser nos manches pour vous dégoter trois astres dominants.

Avec le score, ça fait deux blagues pour le prix d’une.

⭐️ Yannick Herren. Passer d’une note de bas de page sur les consignes de transferts de Jan Alston et d’un poste sur le quatrième trio d’attaque des Lions à la première ouverture du score du LHC dans la longue histoire de la Vaudoise aréna contre une franchise de la toute puissante National Hockey League, si c’est pas du panache, on ne s’y connaît pas.

⭐️⭐️ Le baïlinguaule spikère de la patinoire dans la langue de j’expire (et vous pouvez nous croire, on n’en était pas loin). Quand il a annoncé la première ligne d’une certaine Jeanne Couturier, on savait qu’il filait un mauvais coton.

⭐️⭐️⭐️ Les jeux monstrueusement cons pendant les pauses. La palme revient aux “Dad Jokes”. Allez, un exemple pour le plaisir: “Why do I only know 25 letters of the alphabet? Because I don’t know why.” Une minute de silence pour les familles des victimes…

Quand la NHL débarque en Europe, elle amène ses règles, son ambiance aseptisée et ses avocats. On avertit donc le public que les pucks c’est dangereux.

La buse du match

Carter Hart. Malgré du cœur à l’ouvrage, le jeune portier des Flyers était aussi inspiré que les cônes fluos postés devant lui. Chassé après le 4-0 vaudois (!!!), il pourra toujours s’acheter une carte postale à Ouchy pour garder un souvenir racontable de son voyage en Helvétie.

Les passoires US, c’est pas la qualité IKEA. Du coup on échauffe un ustensile de rechange sous les quolibets de la foule qui apprécie la chose au moins autant que les commercial breaks.

Le tournant du match

Ce moment impensable qui voit les Flyers revenir à un but d’écart après une folle remontada pas écrite d’avance du tout. Franchement, on était sur le cul (à lire avec la voix de Droopy).

Le slapshot en pleine lucarne du match

Ouais alors pour ça on repassera. Du coup on va parler du big save de ce brave Luca Boltshauser, suppléant de Tobias Stephan à la mi-match, sur un penalty de Claude Giroux, qui n’en était pas à son premier échec cette semaine (il va falloir vous armer de courage et continuer à lire cette tartine pendant deux bonnes heures pour découvrir les autres).

LE grand frisson de la soirée. Ouais, enfin non.

Le vieux rotoillon en cloche du match

Le comportement ubuesque des étoiles de la plus grande ligue du monde. Volontairement humiliés pendant 40 minutes au rythme d’un jogging-raclette de Daniel Brélaz, les pensionnaires du Wells Fargo Center ont consenti à jouer (un tout petit peu) l’espace de 3 minutes pour clôturer la rencontre. La diligence passe toujours… mais pas ce soir.

Il fallait être attentif pour ne pas manquer la seule charge du match.

Le chiffre à la con

2. Comme Nolan Patrick, numéro 2 de la draft 2017 derrière un certain Nico Hischier, un des seuls noms qui claquaient vraiment aux oreilles du public helvétique dans le cockpit des Flyers. Pas de bol, la star canadienne est restée clouée au sol pour cause de migraines persistantes. Un grounding de plus ou de moins en Suisse, nous direz-vous. De fil en aiguille, il ne faisait pas un pli qu’on attendait en contrepartie un Sean Couturier taille patron et prêt à en découdre au même titre que Claude Giroux, Jakub Voracek, James van Riemsdyk ou encore Kevin Hayes, les autres stars de la constellation venue du ciel d’Amérique du Nord. Vous avez probablement compris que nos vœux ont été exaucés au centuple. On imagine par contre que la blessure de l’espoir de 20 ans Morgan Frost qui l’a également privé de ce match de gala a laissé les fans vaudois de glace.

La mascotte

Après avoir confondu Cointrin et la Blécherette (bonne note de style pour ne pas s’être laissé berner par la ressemblance troublante entre les drapeaux suisse et suédois tout de même), les émissaires de la Ligue Nationale dans notre beau Pays de Vaud ne comptaient pas en rester là.

Genève est enfin officiellement annexée.

Gritty, la mascotte interdite aux moins de 18 ans, ne savait pas quoi foutre dimanche. Il était donc de bon ton d’aller visiter une chocolaterie lausannoise typique en costume… bavarois. Si on nous disait que le mémo sur la culture helvétique que ces messieurs ont lu au préalable a été rédigé par Donald Trump lui-même on penserait quand même qu’il s’est fait aider pour se retrouver si proche de la réalité. Probablement des sources en Ukraine.

Oktoberfest dans la capitale olympique.

Et sinon, dans les tribunes?

C’est en exclusivité mondiale que Carton-Rouge vous livre le scoop de l’année: il paraîtrait qu’il y a un souci avec le secteur visiteur du nouvel écrin accueillant le joyau du patrimoine lémanique. On imagine votre surprise infinie à la lecture de ces lignes après les 6543678 tweets déjà postés à ce sujet au cours des deux dernières semaines. Sans compter les échauffourées orchestrées par des hooligans servettiens à la sortie du match d’inauguration et auxquelles Jérôme de Plan-les-Ouates et son journal intime ont miraculeusement échappé. Confirmation donc hier soir quand des hordes de supporters venus expressément de Pennsylvanie pour assister au match le plus important de l’histoire de leur franchise ont été refoulés à l’entrée de la cage réservée aux fans adverses. La raison ? Une élimination pure et simple du couloir de la largeur d’une meurtrière qui fait office de geôle pour les ultras de passage, remplacé par des places assises temporaires. Les nombreux descendants de Thomas Jefferson présents, avides de liberté, ont certainement regretté de n’avoir pu déclarer leur indépendance face au désormais tristement célèbre contrôle d’identité, annulé pour l’occasion. Chaque détail, jusqu’à la couleur orange-pénitencier de leur maillot, avait pourtant été soigné afin de se fondre dans la masse des détenus de GuantanaMalley*.

On ne peut s’empêcher de se demander si le designer qui a conçu Gritty est toujours en prison.

Bon OK, il n’y avait aucun supporter de Philly en dehors du staff et des familles des joueurs, mais on a quand même encore le droit de rêver. Et on ne parle évidemment pas des dizaines de personnes sans aucun lien avec la cité de l’amour fraternel qui sont subitement tombées en pamoison devant le chandail de Giroux au shop temporaire ou de celles qui ont ressorti leur vieux maillot de Streit ou simplement saisi une occasion unique de dépoussiérer une de leurs reliques improbables estampillées NHL. Des Pittsburgh Penguins aux Washington Capitals en passant par les New York Rangers, tous les ennemis mortels des Flyers semblaient de sortie.

La minute Pierre-Alain Dupuis

On se demande vraiment à quel genre de sorties mythiques on aurait droit si ce cher PAD devait commenter un sport auquel il ne connaît rien. Comme le hockey sur glace. Ou le football et le tennis.

Giroux était tout simplement extatique au moment de chanter les louanges du NHL Global Series Challenge.

Au rayon sorties mythiques, c’est le capitaine du club double vainqueur de la Coupe Stanley (il y a vraiment très longtemps, on vous rassure) Claude Giroux qui nous a concocté un véritable festival. Il a commencé vendredi par assurer les lecteurs du 24 Heures que son équipe ne serait « pas là pour rigoler, mais pour gagner et engranger de la confiance tout en soignant certains détails ». On imagine que les détails en question étaient éviter toute charge contre la bande et tout coup de patin intempestif susceptible de créer une accélération. On a d’ailleurs cru entendre que Jonas Junland avait déposé plainte pour plagiat. Bref, à l’heure de l’affrontement à proprement parler, on était presque gêné par la démonstration (sic !) de ces joueurs qui semblaient avoir traversé l’Atlantique sans leur amour propre. Si tout cela ne suffisait pas, le Lausanne Hockey Club diffusait le même jour sur les réseaux sociaux une vidéo du grand roux au patin noir pré-cité nous enjoignant de tout son cœur à assister à la partie en lisant un texte d’une voix si enjouée qu’on s’attendait presque à l’entendre conclure par un vibrant « rire, c’est bon pour la santé ». Le nom « Vaudoise aréna » a eu l’air de le chambouler un petit peu quand même.

La rétrospective du prochain match

Demain soir à domicile contre le Schlittschuh CRRRRRlub Rapperswil-Jona LakRRRRRers. De la côte Est étasunienne à la Goldküste de la Limmat, attention au choc thermo-culturel. Rappi étant au hockey champagne ce que Moutier est au voyage de noces, l’affiche vend du rêve en guise de gueule de bois post-NHL. Autant vous dire que le préposé au calendrier de National League a pour le moins le sens de l’humour. Gageons que les buvettes ne seront pas en rupture de stock dès la deuxième pause cette fois. En tout cas on se réjouit de pouvoir profiter du slalom de Roman Cervenka en prolongation avec une vue bien dégagée sur la piste. Si on nous avait dit qu’on déclarerait un jour le plus sérieusement du monde qu’un duel contre une poignée de touristes saint-gallois serait autrement plus âpre qu’un petit décrassage contre les Philadelphia Flyers…

*Merci au grand ancien de la rédac’ Ludwig Seeländer Diebstahler de nous avoir prêté son expression, même s’il nous a soufflé qu’elle appartenait probablement au domaine public depuis le temps.

A propos Raphaël Iberg 175 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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