Finale de la Carling Cup : «On the road with Arsenal».

Samedi 24 février 2007, 11h30. C’est à Lausanne que commence notre long périple qui nous mènera tout d’abord à Friedrichshafen puis à Londres et finalement à Cardiff pour assister à la finale de la Carling Cup ou «Coupe de la Ligue» opposant deux des plus grands rivaux de ces dernières saisons, Arsenal et Chelsea.

C’est tout excités que nous prenons l’autoroute à Lausanne en direction de l’aéroport de Friedrichshafen au bord du lac de Constance. Mais qu’allons nous donc faire là-bas, en Allemagne, alors que la rencontre se déroule à Cardiff, capitale du Pays de Galles ? Ayant reçu la possibilité de commander les précieux sésames pour cette grande finale quelques jours avant seulement, c’était le seul moyen de joindre Londres sans payer un vol plus cher que Genève-New York aller-retour. Le stress d’avant match ne commence généralement que quelques heures avant le coup d’envoi, mais cette fois, notre cœur a dû commencer à subir un nombre élevé de pulsations dès notre passage près de Berne ! En effet, après un nombre encore jamais vu en Suisse d’accidents, de touristes et donc de nombreux et longs bouchons sur l’autoroute A1, ce n’est que 10 minutes avant la fin de l’enregistrement que nous arrivons à l’aéroport. Dire que nous avons presque raté cette finale à cause de cette Porsche jaune encastrée quelque part vers Aarau, il y avait quoi devenir fou dans la voiture ! Après un vol rapide vers l’aéroport de Stansted et une heure de car en direction du nord de Londres, nous arrivons juste à temps pour voir le fameux «Match of the Day» de Gary Lineker sur BBC1 et regarder le résumé de la courte victoire de Manchester United sur Fulham à Craven Cottage. Fulham avait pourtant pris l’avantage par McBride et malgré l’égalisation de Giggs avant la mi-temps, aurait pu l’emporter avec un peu plus de réalisme et de réussite en deuxième mi-temps. C’est finalement Cristiano Ronaldo qui donna la victoire aux Red Devils après une course folle, durant laquelle il élimina de nombreux adversaires avant de propulser le ballon au fond des filets de Lastuvka. Je dois l’admettre, ce fut un but superbe du «sale gosse» et vraisemblablement un moment clé dans la conquête du titre qui ne semble plus pouvoir échapper à l’équipe de Fergusson. Dans le duel des mal classés, Charlton infligea un 4-0 à une équipe de West Ham quasiment inexistante. Belle revanche d’Alan Pardew sur son ancien employeur et dur retour pour Curbishley à The Valley. Sur les autres pelouses de Premier League, Liverpool l’emporte 4-0 sur Sheffield United, Middlesbrough se défait de Reading par deux buts à un grâce notamment à une talonnade de génie de Mark Viduka et Everton va gagner 3-0 sur la pelouse de Watford qui semble condamné à la relégation. Il est alors temps pour nous de se coucher !
Dimanche 25 février 2007. Après de courtes heures de sommeil, nous partons à 5h45 pour aller prendre le car du Travel Club d’Arsenal qui nous mènera au Millenium Stadium de Cardiff. C’est à 7h00 précises que les cars quittent Ashburton Grove devant un magnifique Emirates Stadium qui illumine l’aube londonienne. Il est un peu plus de 11 heures et nous arrivons à Cardiff qui – normalement ! – accueille sa dernière finale de Coupe anglaise avant que le nouveau stade de Wembley soit enfin terminé après des années de retard qui auront coûté plus d’un milliard de francs suisses (certains Londoniens craignent que les Jeux Olympiques de 2012 suivent le bon exemple et se transforment en un véritable fiasco, ce qu’évidemment personne ne souhaite !). Après un bref tour du centre ville et quelques pintes dans les pubs remplis de Gooners et de Blues, nous entrons dans ce magnifique stade qu’est le Millenium Stadium.

J’ai espéré toute la semaine qu’il pleuve assez pour qu’ils ferment le toit amovible et qu’on puisse vivre cette finale dans un bruit à rendre sourd. En 2003, Arsenal gagna la FA Cup 1-0 contre Southampton sur un but de Pires et il y avait tellement de bruit qu’il était difficile d’entendre les commentateurs à la télévision ! Imaginez simplement plus de 70’000 fans dans une arène fermée ! Arsenal et Chelsea ont déjà gagné plusieurs titres à Cardiff dont une victoire 2-0 d’Arsenal sur Chelsea en 2002 sur deux buts superbes de Parlour et Ljungberg. C’est sur ces beaux souvenirs que nous prenons place dans la section rouge du stade. Arsenal va aligner son «équipe B» composée de très jeunes joueurs et de joueurs pour la plupart généralement pas alignés en championnat.
C’est cette équipe qui a amené Arsenal en finale et Arsène Wenger avait juré de leur donner la chance de briller qu’ils méritent. Henry, Gilberto, Rosiscky, Lehmann etc. vont regarder le match depuis les tribunes. En face, Chelsea aligne sa meilleure équipe composée de stars qui ont coûté plus de 250 millions de francs suisses ! L’équipe d’Arsenal au complet a coûté moins cher que Shevchenko à lui tout seul ! C’est là la grande différence entre Wenger et Mourinho. Le premier cherche des jeunes joueurs dans le monde entier et les transforme en stars, le second dépense les millions d’Abramovich pour amener des stars déjà établies à Chelsea. Wenger utilise la Carling Cup depuis de nombreuses années pour développer ces jeunes joueurs et c’est justement cette compétition qui a révélé des joueurs comme Fabregas, Senderos ou Djourou. Nous savons donc que la tâche des «Young Guns» qui ont 21 ans de moyenne sera très difficile face à cette équipe de Chelsea composée uniquement de superstars.

L’ambiance et la tension montent, les équipes apparaissent sur le terrain sous les cris d’un stade complètement fou. Les équipes une fois alignées, c’est l’hymne national «God Save the Queen» qui résonne dans le stade. Le coup d’envoi est donné et pour notre plus grand bonheur, c’est Arsenal qui fait tout le jeu et qui tourne littéralement autour des Blues de Mourinho. La première grosse occasion de la partie arrive après quelques minutes lorsque le tir de Baptista passe entre les jambes de John Terry et se dirige vers la lucarne de Cech qui effectue un arrêt fantastique. Arsenal continue à dominer les débats et à la douzième minute déjà, le jeune Theo Walcott (17 ans) récupère un ballon dégagé par Chelsea, effectue un une-deux avec Diaby avant de passer au travers de Carvalho et de se retrouver seul face à Cech. Il garde son calme, ouvre le pied et sa superbe frappe contourne le gardien tchèque. Le ballon a à peine franchi la ligne de but que mon voisin me saute dessus ! La moitié su stade explose de joie, Theo Walcott vient de marquer son premier but pour Arsenal et à quel moment !

On avait pressenti que ça allait arriver aujourd’hui mais on a quand même du mal à y croire ! Arsenal mène 1-0 contre toutes attentes et l’Angleterre toute entière (du moins ceux qui n’avaient pas encore vu Arsenal en Carling Cup) réalise la magie de cette équipe de gosses qui est en train de mettre Terry, Lampard, Ballack, Shevchenko et autres dans leurs petits souliers. Tout le monde se prend dans les bras chez les fans d’Arsenal, c’est une sensation indescriptible, le foot est magique, c’est pour ces moments prodigieux que nous avons fait tout ce long voyage jusqu’à Cardiff et il n’a fallu attendre que douze minutes pour que notre corps se remplisse de joie. On a toujours du mal à y croire, je reçois un sms de mon père : «Et moi qui croyais qu’on allait se faire exploser !». On chante à perdre notre voix pour toujours : «One nil to the Arsenal» ou encore «There’s only one team in London» !
Le jeu reprend, les Gunners continuent à faire le jeu et on se dit que s’ils continuent comme ça, la Coupe ne peut pas nous échapper. Malheureusement pour nous, à la 20ème minute déjà et sur leur seule vraie action de la première mi-temps, Chelsea égalise. Ballack inexistant depuis le début lance Drogba en profondeur en face de nous ; nous pensons tous qu’il est hors-jeu mais le drapeau du juge de touche reste en bas. Drogba continue sa course et se retrouve seul face à Almunia. Il lui glisse le ballon entre les jambes et c’est l’autre moitié su stade qui explose. Les fans, les joueurs et même l’entraîneur des Gunners crient au scandale mais en fin de compte, je dois admettre que l’assistant a pris la bonne décision. C’est la jambe de Senderos qui a mis Drogba en jeu… de justesse.
Après un court réveil de Chelsea, Arsenal prend à nouveau le dessus et si Baptista et Aliadiere avaient fait preuve d’un peu plus de réalisme et de moins d’individualisme, je pense qu’Arsenal aurait pu finir la mi-temps avec un ou même deux buts d’avance. Il n’en est rien. Les équipes vont prendre le thé sur le score de 1-1 mais objectivement, Arsenal a complètement dominé les débats. Vont-ils pouvoir continuer sur ce rythme ? Les joueurs de Chelsea vont-ils se réveiller ? Ces questions et plein d’autres traversent notre esprit durant la pause.

La seconde période débute et Arsenal continue d’impressionner. Makelele laisse sa place à Robben. Abou Diaby a rapidement une occasion de redonner l’avantage aux Gunners mais, seul face à Cech, il donne une indication de trop à ce dernier quant à ce qu’il compte faire. Il ouvre le pied pour que le ballon contourne Cech mais le meilleur gardien au monde a anticipé l’idée de Diaby et effectue une superbe parade. Chelsea commence à se réveiller sous l’impulsion de Robben qui permet aux Blues d’écarter le jeu sur les côtés. Après plus ou moins une heure de jeu, John Terry monte sur corner et met sa tête dans l’espoir de propulser le ballon au fond des filets d’Almunia. Au même moment, Diaby tente de dégager le ballon et son pied percute involontairement mais très violemment la tête du capitaine de l’équipe d’Angleterre. Terry s’effondre et nous comprenons rapidement que quelque chose de grave vient de se passer.
Les joueurs d’Arsenal et de Chelsea appellent les médecins avec anxiété. Terry gît inconscient sur le sol. Il a presque avalé sa langue. Le médecin d’Arsenal et de l’équipe d’Angleterre Gary Lewin sont les premiers sur les lieux. Terry reçoit des soins durant cinq longues minutes et quitte le terrain sur une civière applaudi par le stade. Malgré l’énorme rivalité entre les deux clubs, les applaudissements des Gooners font plaisir à voir. Ces gestes de fair-play font chaud au cœur et devraient se produire plus souvent. Terry est emmené à l’Hôpital Universitaire de Cardiff et le staff de Chelsea craint une répétition du cauchemar vécu par Petr Cech au mois d’octobre.

Mikel le remplace et le match s’équilibre. Successivement, le jeune Armand Traore (17 ans lui aussi), auteur d’une sublime prestation, est remplacé par Eboué. Diaby qui s’est blessé à la cheville en percutant la tête de Terry cède sa place à Hleb et finalement Adebayor entre pour Aliadiere. À la 84ème minute, le jeune Brésilien Denilson est sous pression, il rate sa passe qui est interceptée par les Blues. Robben est lancé sur l’aile et effectue un centre de toute beauté qui parvient à Drogba. Ce dernier propulse le ballon au fond des filets d’un coup de tête magnifique. Senderos était en retard et a perdu une fois de plus son duel face à Drogba. Je n’arrive pas à y croire… Alors qu’on a dominé la plus grande partie du match, nous allons nous incliner une fois de plus face aux Blues de Mourinho la «grande gueule».
Arsenal avait pourtant déjà reçu un avertissement quelques minutes plus tôt lorsqu’une frappe magnifique de Lampard s’écrasa sur la latte. Arsenal fait tout pour égaliser et Walcott voit son shoot arrêté par Cech. Après nonante minutes, l’assistant annonce sept minutes d’arrêt de jeu (2 minutes pour 4 changements, 5 minutes pour les soins portés à Terry). Arsenal a les ressources pour égaliser et tenter un énième «come-back» cette saison. Les rouges pressent et Chelsea crée le danger sur contre-attaque dont un shoot de Shevchenko sur la latte.

Malheureusement, à peine entré dans les arrêts de jeu, Touré se fait retenir par Mikel. Au lieu de jouer le coup franc rapidement, ce dernier s’énerve et va provoquer Mikel. Fabregas et Lampard s’en mêlent. Ils s’empoignent violemment et c’est finalement 18 joueurs, 5 arbitres (le quatrième et le cinquième arbitre entrent sur le terrain) et même Mourinho et Wenger suivis par leur staff qui sont impliqués dans cette énorme échauffourée. Bilan, trois cartons rouges et deux cartons jaunes. Touré, Adebayor et Mikel sont expulsés, Lampard et Fabregas avertis. Lampard et Frabregas méritaient plus l’expulsion que Mikel et Touré selon moi. Adebayor, de son côté, a été confondu avec Eboué qui avait donné un coup à Bridge, ce dernier s’étant par ailleurs effondré de façon très ridicule. Adebayor pète un plomb et refuse de sortir du terrain pour obtenir des explications, cela ne nous fait pas gagner du temps mais je peux imaginer sa frustration ! Se faire expulser sans raison n’est pas facile à digérer ! Il reste encore quelques minutes aux Gunners pour égaliser à neuf contre dix. Mes derniers espoirs reposent sur un dernier coup franc de Fabregas sur lequel le gardien Almunia est monté. Cela ne donne rien et Howard Webb donne le coup de sifflet final.
Chelsea soulève la Coupe sous nos regards dépités. Mais nous ne regrettons pas notre long périple ! Ces jeunes Gunners ont été extraordinaires. Ils méritaient peut-être de gagner mais Chelsea a fait parler son expérience sur la fin. Il nous reste de longues heures de car dans les bouchons formés par ces 70’000 fans londoniens et comme vous pouvez l’imaginer, il y a une ambiance d’enterrement dans le bus.
Le lendemain, le Sun est très dur avec Senderos qu’il accuse de toujours perdre ses duels contre Drogba qui marqua à Cardiff ses 27ème et 28ème buts de la saison ! «Les diamants de Wenger n’ont qu’un défaut…  et il s’appelle Philippe Senderos». Je trouve ces paroles très dures pour un Philippe qui a été globalement l’auteur d’une bonne partie. Mais il faut admettre qu’il n’est pas tout blanc sur les deux réussites de Drogba. Le Guardian, journal plus sérieux, commence son article par une phrase qui résume bien la situation et qui me redonne un peu le sourire malgré la défaite : «À Chelsea la Coupe, à Arsenal le futur !»

Écrit par Alexander MacKenzie

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