A moitié plein (et encore on ne sait pas de quoi)

On aime bien les exploits mais il faut les remettre dans leur contexte. Et si la performance du FC Bâle contre Liverpool paraît une belle étape dans la vie du club, elle résonne quand même comme un remake de l’acte contre Chelsea lors de la saison dernière. Un acte qui s’avéra, par la suite, uniquement esthétique puisque les Rhénans allèrent paumer bêtement leurs matchs suivant pour se retrouver en Europa League (et reperdre contre ce même Chelsea). Et surtout, aujourd’hui, on ne sait toujours pas contre qui les Suisses ont bien pu jouer hier soir.

On préférait quand on avait huit ans. Quand on pensait que Mickey était une honnête souris qui ne pensait qu’au bonheur des enfants et que, quand on serait grand, on aurait une grande maison avec un panda qui nous ferait des pancakes le matin. Et puis la vie s’est chargée de nous remettre à l’ordre pour nous amener vers le droit chemin de l’aigreur et du désenchantement. Heureusement, car sinon on se prendrait à s’enthousiasmer pour de trompeurs et vains exploits qui n’en sont même pas. Car ces belles conceptions du monde qui nous amènent à utiliser des expressions comme «après la pluie, la boue» ne sauraient cacher une réalité que même un positif mangeur de space cake approuverait : Liverpool était affligeant.

Bien sûr, un professionnel de l’aigreur, fidèle à l’adage qu’il est plus douloureux de perdre quelque chose que de ne pas le posséder, commence toujours par peindre un tableau idyllique, fait d’arc-en-ciel, de licornes et de filles avec du plastique dans les seins qui courent nues en cueillant des fleurs en chocolat sous des cascades d’abricotine. Donc oui, on pourra bien sûr parler de la volonté offensive et de la «jouerie» sympathique que l’équipe bleue et rouge a montrée. On évoquera aussi la jeunesse d’un Embolo plein de promesses pour la Suisse, d’un Gonzalez qui sera la nouvelle révélation très chère du club, de la filière égyptienne qui ne se tarit manifestement pas. On pourra se taper sur le ventre de satisfaction pour la prise de risque de Sousa à la sortie de Safari en introduisant un milieu offensif. Et Streller… aaah ce bon vieux Streller, si mauvais balle aux pieds mais toujours là pour mettre un vieux but de derrière les fagots. Oui mettons donc Le Petit Bonhomme en Mousse à fond dans les enceintes et dansons pour célébrer cet exploit contre un tout grand d’Europe.
Oui mais non (et c’est à ce moment-là qu’on coupe Patrick Sébastien et que tout le monde s’arrête de danser et fait «rrrroooooooh mais heu…»). Parce que quand même : où étaient les Scousers ? Comment peut-on comprendre l’apathie générale d’une équipe supposée porter un état d’esprit comme les Reds ? Sterling accumulait les maladresses digne d’un Derdiyok (je suis content de mettre à profit l’expression «tourner 7 fois sa langue dans sa bouche» dans la mesure où j’ai spontanément rigolé en pensant à «Sterling ne vaut pas une Livre» et après je me suis dit que c’était une blague ultra pourrie et sans doute déjà vue mille fois, mais du coup je la réécris quand même dans cette parenthèse… beaucoup trop longue cette parenthèse par ailleurs). Derrière tout le monde se faisait gentiment «faire l’amour» par les deux couloirs bâlois qui pourtant ne donnaient pas non plus l’impression d’une maîtrise technique ébouriffante.
Et que faisait le Captain Gerrard ? On aurait dit une ombre perdue qui attend péniblement midi pour ne plus exister. Seul Balotelli, la nouvelle tête pensante recrutée pour remplacer le Prix Nobel de physique et mathématique Suarez, se montrait digne du Liverbird. Et encore, c’était plutôt dignounet parce qu’il n’a pas eu l’occasion de repartir en mode «Why always me». Malheureusement, c’est un peu ce que montre le club depuis le début de la saison de Premier League et c’est assez inquiétant pour eux. Comme si, après avoir raté le titre à deux doigts, ils repartaient pour des années de ténèbres.

Alors certes, le FC Bâle a joué un bon cran en-dessus par rapport au désastre de Santiago Bernabeu. Mais finalement, le système de jeu n’était pas si éloigné avec des espaces monumentaux laissés derrière, des sauvetages «à l’arrache» dans la zone des numéros 6, et personne pour couvrir, par exemple, un Schär qui monte à la moindre occasion alors même que la défense est en sous-effectif. Et, on ne le dira jamais assez, mais est-ce que cela fait partie de la charte de formation du football suisse d’avoir un ratio de but par occasions proche du bilan financier d’une entreprise qui se lancerait dans le commerce de téléphones à roulette?
On pourrait donc se dire que si l’adversaire avait été d’une autre trempe (un Real Madrid par exemple), ces erreurs auraient couté beaucoup plus chères à Bâle que face à des bonhommes en pâte à modeler qui ne savent pas comment faire avec cette balle et à quoi servent ces deux cages de part et d’autre du terrain.
Un avis d’aigri peut-être. Sans doute. On adorerait être pris en défaut lors des prochaines journées…
Photos Pascal Muller, copyright EQ Images

Bâle – Liverpool 1-0 (0-0)

Parc St-Jacques, 36’000 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Eriksson.
But : 52e Streller 1-0.
Bâle : Vaclik; Xhaka, Schär, Suchy, Safari (9e Gonzalez); Serey Die, Frei, Elneny; Embolo (81e Calla), Streller, Hamoudi (92e Zuffi).
Liverpool : Mignolet; Javi Manquillo, Lovren, Skrtel, Enrique; Henderson, Gerrard, Markovic (81e Lambert); Sterling, Balotelli, Coutinho (70e Lallana).
Cartons jaunes : 9e Sterling. 4e Gerrard. 60e Suchy. 71e Balotelli.
Notes : Bâle sans Diaz (suspendu), Samuel, Degen et Ivanov (blessés). Liverpool sans Sturridge, Can, Johnson, Allen, Sakho et Flanagan (blessés).

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13 Commentaires

  1. Ça aurait été sympa de relever les bonnes performances comme par exemple Embolo. À 17 ans ce qu’il a fait c’était assez incroyable!

  2. Pourquoi toujours dénigré ce que fait le Fc Bâle? Vous en loupez pas une pour se moquer d’eux mais alors quand ils font quelque chose de bien, eh ben non, vous trouvez des excuses pour minimaliser leur performance. C’est lassant et vraiment ridicule de votre part.. On sent bien la petite jalousie romande 😉

  3. Ah ça fait plaisir de lire des choses sensées!

    Il est bien de rappeler que Liverpool n’est pas un grand d’Europe (et que Gerrard n’a couru que 850 mètres depuis le début de la saison)!

    (Au passage, parce que je suis relou, le prix Nobel de mathématiques n’existe pas. Le génie Suarez a donc probablement reçu la médaille Fields)

  4. ….des filles avec du plastique dans les seins qui courent nues en cueillant des fleurs en chocolat sous des cascades d’abricotine.

    que du rêve cet article ! bravo

  5. « …elle résonne quand même comme un remake de l’acte contre Chelsea lors de la saison dernière. (…) les Rhénans allèrent paumer bêtement leurs matchs suivant pour se retrouver en Europa League (et reperdre contre ce même Chelsea). »

    Je crois bien que l’auteur mélange la saison 2012-2013 (Europa League) et 2013-2014 (CL)… à enventuellement corriger…

  6. Excellente, la parenthèse! Pendant le match, j’avais plutôt pensé à: « Sterling ne livre pas la marchandise ce soir. » ou « Sterling ne vaut pas son pesant en Livre. »

  7. C’est vrai que Bâle a livré une bonne partie sans pour autant être transcendant, ce qui en dit long sur la performance et l’engagement, ou non, des Reds.

    Liverpool n’appartient plus depuis fort longtemps au gotha du foot européen, ça c’est un fait. Ce qui n’enlève rien au succès des läckerliboys.

    Tant mieux si Bâle parvient à accrocher la deuxième place, même s’ils me sortent par le nase parfois.

  8. Introduction étrange : Bâle l’année dernière aurait gagné contre Chelsea en ligue de champions pour perdre ensuite contre la même équipe en ligue Europa.

    Je ne connais rien au parcours de Bâle l’année dernière mais une telle chronologie n’est pas possible. Si Bâle a été reversé en tant que meilleur troisième après avoir battu Chelsea en poules (ce que je crois comprendre de l’article), il ne peut avoir rencontré ce même Chelsea ensuite, puisque ce dernier ne peut pas avoir été troisième. Et que par ailleurs, seul le troisième est reversé.

  9. Erreur de logique dans l’introduction au sujet de l’année précédente : si Bâle a joué contre Chelsea en ligue de champions, il ne peut logiquement l’avoir recontré par la suite en ligue Europe.

  10. oups, navré pour la répétition de messages similaires, mais le code de validation en dessous du message est exaspérant : on se croirait dans les douze travaux d’Astérix dans la scène de l’administration.

  11. Dernier message, ensuite je m’en vais, promis : en y repensant dans le métro ce matin, Bâle et Chelsea ont pu se rencontrer en phase liminaire, ce qui rend l’hypothèse possible. Au temps pour moi, donc.

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