L’honneur et la morale sont saufs

Même lieu, même adversaire, même stade de la compétition et même résultat : comme l’an passé, le LHC, mené 3-0 dans sa série de demi-finale contre Bienne, s’est octroyé un sursis. Sauf que cette année les joueurs lausannois n’ont pas eu besoin d’être titillés par les lunettes à soleil, palmes et autre canot pneumatique brandis par leurs supporters pour sonner la révolte.

D’emblée, les Lausannois ont paru plus agressifs et plus déterminés que dans les trois premiers matchs ; ils sont enfin parvenus à mettre sous pression cette équipe de Bienne. Durant les deux premiers tiers, les pensionnaires de Malley ont sans aucun doute réussi leur meilleure prestation depuis le début des play-offs. Dans le troisième, alors que les événements s’enchaînaient en leur défaveur, les Lions ont enfin montré cette force de caractère qui leur a si souvent fait défaut cette saison.Car, franchement, il y avait de quoi se laisser abattre lorsque, après 39’08, l’ignoble Daniel Rubin a asséné un très vilain coup sur le genou de Patrice Lefèbvre, sans aucune réaction de l’arbitre. Le Topscorer lausannois a alors eu la mauvaise idée de vouloir se faire justice lui-même en allant frapper son agresseur. C’est bien sûr une réaction inexcusable et une expulsion parfaitement logique du Québecois mais cela ne serait pas arrivé si l’arbitre avait fait son travail en renvoyant illico Rubin aux vestiaires. On ne voit pas très bien comment la faute du Biennois a pu échapper au trio arbitral, très pointilleux jusque-là, notamment en inventant une pénalité totalement imaginaire contre Benturqui pour relancer des Biennois malmenés (4-3). On avait laissé le bénéfice du doute à Alain Miéville lors du match de mardi et mis sur le compte de la maladresse les deux coups de canne que l’attaquant biennois avait assenés aux visages des Lausannois, en revanche avec Rubin, le doute n’est pas permis : déjà auteur d’un coup similaire sur Schäublin peu auparavant, le n° 41 seelandais avait manifestement la volonté de faire mal et de blesser.


A force d’en recevoir, Pat a donné un coup à Rubin
Photo Pascal Muller

Le HC Bienne a trouvé un digne successeur aux Sven Schmid, Steve Metzger, Jeff Shantz et autres grands poètes du hockey qui sévirent jadis au stade de Glace. Depuis le début de la série, les Biennois cherchent régulièrement le Topscorer lausannois, c’est de bonne guerre en play-off, d’ailleurs on ne comprend pas que les Lausannois n’aille pas chatouiller plus souvent Alexandre Tremblay. Néanmoins, il y a des limites à ne pas dépasser et Daniel Rubin a manifestement enfreint ces limites. On ne voit pas quel intérêt avait Bienne, largement supérieur dans les trois premiers matchs et parti pour une qualification sans trop de difficulté, à placer les débats sous l’enseigne du combat de rues.
Privé de son Topscorer, expulsé et sorti en boitant, encaissant le but de l’égalisation dès le début de la pénalité de cinq minutes, on pensait que le LHC allait s’écrouler. Mais, après avoir encore déploré la sortie sur blessure de Bélanger, les Lausannois ont trouvé les ressources pour résister, sans mercenaire. Et c’est Florian Conz, auteur de son meilleur match de la saison, qui est venu jouer les justiciers et priver les Biennois d’un succès qui eût été un peu honteux. Malgré une ultime et pathétique tentative de M. Stricker de favoriser une égalisation biennoise sur la fin en expulsant Brechbühl mais pas le Biennois qui lui avait envoyé son poing dans la figure, le LHC a tenu bon et a enlevé son premier succès de la série. Ouf, l’honneur et la morale sont saufs !
Les Lausannois n’ont rien volé car ils avaient dominé les débats avant que le match ne sombre dans le chaos. Paul-André Cadieux avait enfin effectué les ajustements que beaucoup réclamaient depuis longtemps : donner plus de glace à Villa et faire jouer Gailland aux côtés des deux étrangers, en lieu et place d’un Brechbühl décevant depuis le début des séries. Des ajustements payants, Villa a montré beaucoup de vista en défense et Gailland a redynamisé la première ligne, même si Bélanger a une fois encore été transparent.
Très critiquée ces derniers temps, la défense lausannoise a incontestablement resserré les boulons et a commis beaucoup moins d’erreur que lors de ses dernières sorties (malgré la passivité du duo Merz-Benturqui sur le premier but biennois). C’est d’ailleurs les défenseurs Benturqui (sur une passe lumineuse de Lefèbvre) et Schäublin qui ont montré la voie du succès après l’ouverture du score de Tremblay. La surprise du chef, c’était la titularisation de Sébastien Pellet dans les buts. Privé de glace depuis plus d’un mois, le gardien lausannois n’avait pas la tâche facile en jouant ce match décisif à court de compétition. Bien qu’un peu fébrile, il s’en est sorti tout à fait honorablement, avec une bonne dose de réussite. Néanmoins, le gardien le plus en forme du LHC actuellement reste Thomas Berger, qui devrait logiquement être titularisé pour l’acte V de la série.


Sébastien Pellet. Photo Pascal Muller

Faut-il voir dans cette victoire lausannoise un baroud d’honneur sans lendemain, comme l’an passé (défaite 8-1 dans le 5e match), ou l’amorce d’une folle remontée ? A priori, le scénario le plus probable reste une qualification bernoise mardi sur le coup des 22h-22h15. Ce n’est pas que les Lausannois doivent redouter l’ambiance confidentielle du stade de Glace et ses trois tambours mais Bienne paraît toujours un cran en dessus. Chaque apparition de Tremblay sur la glace provoque un vent de panique dans la défense lausannoise, le power-play vaudois est toujours aussi inefficace (encore un but pris à 5 contre 4 dimanche) et les deux étrangers du LHC, s’ils peuvent être alignés, risquent d’être diminués.
Pour avoir une chance, le LHC devra entamer le match avec la même détermination et la même concentration que dimanche car le HC Bienne a laissée entrevoir quelques failles : enfin sollicité, le gardien Caminada a montré qu’il n’était pas une assurance tout risque en play-off ; d’ailleurs une éventuelle promotion biennoise passera sans doute par l’acquisition pour la finale d’un portier étranger (qui pourrait être le Fribourgeois Marek Pinc).
Tremblay a été beaucoup plus utilisé que lors des matchs précédents et les Biennois ont paru fatigués au 3e tiers. Quelques petites raisons d’espérer prolonger un peu la saison lausannoise. Patrice Lefèbvre le mériterait bien, ce serait vraiment dommage qu’il ait terminé son dernier match à Malley par une expulsion et une sortie en boitant. De toute façon, les Lausannois n’auront rien à perdre : au vu des quarts de finale et du début de cette demi-finale, arracher un sixième match à Malley tiendrait du miracle et serait tout bonus pour les hommes de Paul-André Cadieux.

Lausanne HC – EHC Bienne 5-4 (2-1, 2-3, 1-0)

Malley : 5294 spectateurs.
Arbitre : MM. Stricker ; Kehrli, Stäheli.
Buts : 7e Tremblay (Meyer, 0-1), 10e Benturqui (Lefèbvre, Gailland, 1-1), 12e Schäublin (Conz, Aeschlimann, 2-1), 22e Aeschlimann (Conz, Botta, 3-1), 26e Beccarelli (Werlen, 4 c. 5, 3-2), 27e Lussier (Schönenberger, Lussier, 4-2), 35e Tremblay (Felsner, Werlen, 4 c. 3, 4-3), 40e Reber (Felsner, Truttmann, 5 c. 4, 4-4), 49e Conz (Botta, Aeschlimann, 5-4).
Pénalités : 5×2 + 1×5 et méconduite match (Lefèvbre) + 1×10 (Brechbühl) contre Lausanne ; 5×2 + 1×10 (Tschantré) contre Bienne.
LHC : Pellet ; Merz, Benturqui ; Villa, Schäublin ; Grieder, Kamber ; Ermacora ; Lefèbvre, Bélanger, Gailland ; Botta, Aeschlimann, Conz ; Schönenberger, Schümperli, Lussier ; Brechbühl, Staudenmann, Bieri.
Bienne : Caminada ; Grossweiller, Thommen ; Meyer, Reber ; Werlen, Fröhlicher ; Kparghai ; Tremblay, Miéville, Felsner ; Rubin, Tschantré, Truttmann ; Rieder, Peter, Beccarelli ; Spolidoro, Pasche, Küng.
Notes : le 2e tiers est arrêté après 39’08 suite à des jets d’objets sur la glace. Les 52 secondes restantes ont été jouées juste avant le début du 3e tiers.

Écrit par Julien Mouquin

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