Un déplacement à Wil prix

Vous vous demandez peut-être parfois ce qui peut amener un supporter du LS à sacrifier son dimanche pour passer une journée dans un minibus. C’est pourtant un phénomène très répandu à l’échelle planétaire : j’ai lu dernièrement des études dignes de foi qui détaillent par le menu ce qui pousse une moitié de l’humanité à quitter sa région, à déserter la campagne pour rejoindre la Wil.

Nous ne faisons donc que participer à ce mouvement de masse. A la différence que, comme le voudrait tellement le poisson qui se tortille dans le panier du pêcheur assassin, nous rejoignons ensuite dès que possible notre élément naturel, à savoir les alentours de la Pontaise, hors duquel nous n’évitons la desquamation qu’à grandes lampées de bière.Seuls un David Copperfield en grande forme ou le BWFK sont capables de proposer un aller et retour Lausanne-Wil avec billet d’entrée au match compris pour la somme de 30 francs par personne, et de s’en sortir avec un bénéfice pour le groupe. Ce genre d’offre est de nature à attirer le chaland aussi sûrement que la paire de burnes d’un arbitre le pied de Constantin, ou qu’une formule débile le cerveau spongieux d’Edmond Isoz. Et effectivement, la surprise fut heureuse de recevoir un coup de grelot de Monsieur Paul Garbani himself, persona non grata cette semaine au LS, pour avoir dernièrement fourni l’essentiel de sa nourriture à une scatophaga stercoraria du tabloïd Le Matin.
C’est ainsi que l’immense Mister Paul est venu relever et la moyenne d’âge et le niveau de discussion footballistique dans notre véhicule, au grand plaisir des onze autres jeunets du Blue-White Fanatic Kop. Il est à noter que Paul s’affiche régulièrement jusque sur le banc de touche avec une écharpe du groupe : maximum respect.


Monsieur Paul (Photo Pascal Muller)

On aurait pu penser que la présence de la demi-légende parmi nous aurait calmé les plus déchaînés de nos membres, plus prompts à disserter sur l’histoire du bukake à travers les âges que d’écouter Paul nous vanter les mérites d’un 4-5-1 en phase de récupération, qui se transforme en 4-3-3 en phase offensive, mais faut pouvoir s’appuyer sur deux vrais ailiers de débordement. Il n’en fut rien, et c’est un aller particulièrement bruyant et chaotique qui fut d’entrée imposé à notre vénérable recrue. Passer de Maurice Chevalier à Komintern Sect sans respecter les sas de décompression aurait pu être dangereux, mais l’éternelle jeunesse de Paul lui permit de passer l’obstacle. On l’a même vu sourire en écoutant Didier Super, c’est dire.
Les supporters du LS gardent un souvenir ému de Wil, après s’y être imposés trois années en coupe de Suisse, de la demi-finale en 1998 qui se termina par l’agression à coups de chaise pliante de l’arbitre par un Willageois énervé, à la victoire 10-9 aux penalties en huitième en 2002, suite à un ultime tir au but envoyé sur le poteau par… Rapo. On en durcit encore. En championnat par contre, le LS restait sur une défaite 3-1 au Bergholz. Et tous les Lausannois se souviennent des scènes de joie hystérique des Wilains qui avaient tenu le nul à la Pontaise lors de l’avant-dernière journée de championnat la saison dernière, ouvrant largement la voie à une promotion de Sion et à un petit arrondissement de fin de mois, que voulez-vous, il faut bien vivre.
En comptant les arrivées de nos expatriés et autres cheminots, ce sont 18 membres du BWFK qui prirent place légèrement en latérale du champêtre Bergholz. A noter que pour la première fois depuis leur création il y a une année, aucun membre des Rabiosos, le second groupe de supporters du LS, n’avait effectué le déplacement.
J’ouvre une petite parenthèse pour souligner la différence d’ambiance que cela peut engendrer d’avoir affaire à une sécurité composée de bipèdes normaux. Contrairement aux habitudes, pas de regards torves, pas de Rambos de clapier, pas d’aboyeur qui vient hurler parce que notre bâche couvre une pub… La sécurité est présente, certes, mais avenante et même souriante. La fouille n’a même pas eu lieu (!). Ça change de la Pontaise et des Robocop au regard de tanche qui s’arrêtent à la limite du toucher rectal, et qui nous font bien comprendre que les supporters sont la lie de l’humanité.
Le LS s’aligne dans une formation 4-5-1 «surprise», avec Scalisi et Thurre sur le banc, alors que Malgioglio et Lacroix sont titularisés. Il est certain qu’après la scandaleuse pantalonnade de Delémont la semaine dernière, il fallait faire quelque chose (c’est d’ailleurs en gros ce que demandait Mister Paul, mais bon…), et en toute première urgence bétonner le secteur défensif. Ainsi, le LS entre bien dans le match, développe les actions les plus intéressantes et se crée les premières occasions. Mais il y a deux vérités en ce bas monde, à laquelle nul ne saurait échapper : «A force de dominer sans marquer, on s’expose aux contres» et «Tu peux la secouer tant que tu veux, la dernière goutte est toujours pour le slip». C’est ainsi après que Mauro ait ajusté le poteau que sur le contre, et en trois passes pour remonter le terrain, Wil ouvrit la marque.


Un grand match d’Anthony Favre !
(Photo Pascal Muller) 

On a aimé alors la réaction des Lausannois, qui avaient abandonné si facilement à Vaduz et contre Delémont. Se lançant dans la bagarre, il ne leur fallut que 10 minutes pour égaliser de façon absolument méritée, par Balthazar. En seconde mi-temps, Wil monte en puissance et il faut un Favre des grands jours (sorties dans les pieds, arrêts réflexes…) pour préserver ce point, même si le LS a toujours essayé de se porter vers l’avant et de se montrer dangereux, finissant même avec deux attaquants suite à la rentrée en fin de match d’Arona.
Le point en poche, la majeure partie des joueurs prendra la peine (pour une fois) de venir saluer ses supporters. Nous nous dirigeons en direction du minibus lorsque nous sommes abordés par une quinzaine de mastards locaux (des anciens de la Black Bears ?) qui nous proposent une baston… Drôle de planète, mais le fait qu’ils n’insistent pas après notre courtois refus prouve au moins qu’ils respectent un certain code.
Le retour est plus calme, avec néanmoins quelques bonnes poussées d’ambiance. L’horizon du gris lendemain de travail aura retenu les plus assoiffés, et c’est avec impatience que nous attendons la reprise des matches le samedi soir, jour du foot par excellence. D’ici là, une petite formalité : battre Servette à la Pontaise ce dimanche, afin de réussir enfin à cracher l’arrête que nous avons tous plantée au fond de la gorge après le dramatique 4-3 du match aller.

FC Wil – Lausanne-Sport 1-1 (1-1)  

Bergholz : 1000 spectacteurs.
Arbitre : M. Speranda. 
Buts : 21e Nushi Kristian 1-0, 30e Balthazar 1-1. 
FC Wil 1900 : Taini (46e Meier), Zverotic, Schenkel, Longo, Laski, Mica, Salifou, Taljevic, Nushi Kristian, Sabanovic (75e Gsell), Maliqi (86e Silvio). 
FC Lausanne-Sport : Favre, Kaissi (6e Ebe), Lacroix, Miéville, Mora, Cabral, Balthazar, Rey, Bugnard, Malgioglio (82e Arona), Mauro (75e Thurre). 
Cartons jaunes : 29e Laski, 33e Lacroix, 48e Longo, 58e Malgioglio, 92e Rey.

A propos Yves Martin 247 Articles
Cette Nati a deux vertus : celle de faire rêver quasi tout son peuple, et celle d'emmerder les connards de la fachosphère. Longue vie à elle.

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