Xamax : des débuts encourageants

Les saisons se suivent et si certaines choses ne se ressemblent pas, d’autres semblent inévitables, comme liées à une fatalité exaspérante. Ce printemps nous quittions Kriens sous une pluie battante en nous jurant que l’on ne nous y reprendrait plus, mais Lugano nous réservait quelques jours plus tard un pareil sort. Samedi en débarquant à la gare de Lucerne, avant de constater que j’étais entouré de maillots blancs et bleus, je dus me rendre à l’évidence, car nul besoin de s’appeler Philippe Jeanneret pour deviner que cette soirée allait être arrosée. Dans tous les sens du terme. Elle est facile.

Cela ne va pas tarder, à peine entré dans le bus spécial qui se dirige vers l’Allmend, l’épais matelas de nuages aux couleurs de charbon se crève et vide un torrent de flotte. Les Japonais s’abritent, tandis que le bus file et s’arrête devant le stade. Les portes s’ouvrent sur ce spectacle de fin du monde, l’invitation à sortir sonne faux, je crois que je vais rester ici finalement, je suis bien. Un Lucernois nous escorte finalement sous son parapluie qui plie sous le poids des épaisses gouttes tièdes, avant de nous en faire cadeau en rigolant : «Vous en aurez plus besoin que moi». Le décor est planté, je repense un bref instant à ce qui nous attend : 10’000 spectateurs secs, eux, hurlent les lettres de leur club. On est de retour en Super League, il n’y a rien à dire, certaines choses ne changent pas, d’autres oui.

Le match

Avant de voir Bâle – FCZ hier, on se demandait si le terme «match de reprise» avait encore lieu d’être dans le paysage footbalistique suisse. Une pause extrêmement courte, des matches d’entraînement à la pelle, il n’y a guère que l’intégration des nouveaux joueurs qui soulève des interrogations. La formation xamaxienne n’est en ce sens pas trop surprenante. El Haimour et Jenny remplacent Geiger et Delgado sur les côtés, pendant que dans l’axe les expérimentés Besle et Quennoz risquent bien d’être inamovibles. Le point fort des rouges et noirs ensuite, son milieu explosif. En récupérateurs, Chihab et Everson, sur les côtés avec des rôles d’ascenseurs, Malenovic et Szlykowicz. Devant c’est Matar Coly qui a été choisi pour épauler la perle argentine, Julio Hernan Rossi.

Johnny Szlykowicz a signé un but d’anthologie
(Photo Pascal Muller)

Avec Tchouga, Lustrigoal et Felipe en attaque, Lucerne se la joue «football total», mais frise la correctionnelle d’entrée. Chihab le «bûcheron orfèvre» distille un caviar à Coly qui échoue sur König, puis Besle domine l’arrière garde lucernoise de la tête, mais échoue à son tour sur le gardien remplaçant des blancs et bleus. Le match est lancé, il n’y aura pas de round d’observation pour des Xamaxiens gonflés à bloc. Le premier but sera toutefois lucernois, quand l’arbitre trouve le moyen de ne pas donner un avantage évident, c’est Mario Cantaluppi, le héros local, qui fusille sur penalty son pote Zubi, l’anti-héros local : «Zubi raus, Zubi raus» jubilent les 10’000 Lucernois qui avaient prévu d’y ajouter «Zibung rein» avant de se souvenir qu’il était suspendu pour avoir précipité la défaite des siens en finale de Coupe. Pas de quoi faire les fiers donc, car à l’exception de Felipe, c’est bien Xamax qui dans l’ensemble s’est montré le plus à l’aise dans le jeu.
C’est donc de manière hautement méritée que le très «rock’n’roll» Johnny Szlykowicz remet les pendules à l’heure. D’une frappe aussi inattendue que magistrale, le Franco-Polonais douche les ardeurs lucernoises et fait enfin capituler l’excellent Koenig. Malgré un poteau d’Emerson sur un «Xième» coup-franc, le mot de la fin sera bien pour Xamax, au terme d’une nouvelle triangulation partie du milieu du terrain, Merenda se retrouve seul face au portier suisse allemand, mais dans un angle fermé il allume le remplaçant de Zibung. Petit goût amer d’inachevé dans les rangs des visiteurs, illustré par un Merenda qui s’arrache les cheveux, l’occasion était belle de créer le premier exploit de la saison.
Mais la rencontre fut riche en enseignements. Quand Everson sera à son plein rendement et que Nuzzolo sera de retour (dès jeudi), le milieu neuchâtelois risque bien de faire parler de lui, et en particulier cet impertinent de Szlykowicz qui, sous ses airs de Denis la Malice, jurait après le match que «ce but était un coup de chance». Devant, Rossi n’a peut-être pas non plus encore trouvé toutes ses marques, mais l’Argentin bouffe du gazon et dans des conditions un brin plus clémentes (dès jeudi aussi) risque bien de retrouver rapidement le chemin des filets. Un Xamax séduisant donc, que l’on se réjouit de revoir à l’oeuvre dès jeudi dans son stade. Seul bémol, il faudra se passer des services du brillant Besle, expulsé pour une stupide faute de main à la 93ème minute. Sous le déluge, c’est Castella qui tonne ! Un premier dilemme se pose à lui. Faire jouer Joksimovic ou faire reculer Chihab ?

Lucerne – NE Xamax 1-1 (1-0)

Stade de l’Allmend : 10 000 spectateurs.
Arbitre : G. Wildhaber.
Buts : 25e Cantaluppi (pénalty) 1-0, 49e Szlykowicz 1-1. 
Lucerne : Koenig ; Diethel, Schwegler, Cipot, C.Lustenberger ; F. Lustenberger, Cantaluppi, Chiumiento ; Tchouga, Felipe, Lustrinelli (88e Bader). Entraîneur: Sforza.
NE Xamax : Zuberbuehler ; Jenny, Besle, Quennoz, El-Haimour ; Malenovic (68e Lang), Emerson, Chihab, Szlykowicz; Coly (75e Merenda), Rossi (85e Baettig). Entraîneur: Castella.
Notes : Lucerne sans Zibung (suspendu), Seoane, Thuram ni Makanaki (blessés). Xamax privé de Jaquet (blessé).
Cartons jaunes : 30e Coly (jeu dur), 36e C. Lustenberger (jeu dur), 77e Besle (jeu dur), 79e Emerson (réclamations).
Carton rouge : 93e Besle (2e carton jaune, faute de main).
Coups de coin : 6-7 (3-4).

Écrit par Roby Steedman