HC Sierre : une question de minutes

Une minute change parfois le cours d’un match, impertinente, inlassable, elle s’écoule jusqu’à faire prendre le large à la plus ancrée des certitudes, jusqu’à insinuer inéluctablement le doute. C’est souvent dans ces soixante secondes-là que la défaite trouve sa source. Dans son antre de Graben, Sierre en a fait la douloureuse expérience face à Langenthal qui s’est finalement imposé 5-4 en prolongations.

31’16 sur l’horloge. Bochatay rejoint Haas sur le banc d’infamie des Denteliers. Quelque douze secondes plus tard, Derek Cormier ne laisse pas passer l’aubaine et, aidé par un patin adverse, inscrit le 3-1 pour le HCS. Les gros chiffres rouges, façon radio-réveil des années 90, se remettent en branle mais s’arrêtent soudainement sur 31’42. Les gestes du directeur de jeu, très peu apprécié en Valais par principe – et c’est bien légitime -, sont clairs. Randegger est pénalisé…Que demander de plus ? Le soleil enragé vient de mordre pour la troisième fois la dentelle de Langenthal, l’occasion de la déchirer définitivement lui est donné. Un, deux, trois… rien. Les secondes s’égrènent invariablement, la frustration naît, les imprécisions commencent, le mécanisme de la roue grince déjà, l’implacable sort est en marche. Les jaunes et bleus le savent, ils haussent le ton et trouvent récompense peu avant la deuxième sirène, puis peu après la reprise.
Certes, le brave Oleg Siritsa a essayé de tromper son monde en allumant la lampe à la 46e pour le 4-3. Mais il était trop tard, paradoxalement, en regard de l’avantage comptable à cet instant-là, Sierre avait laissé filer sa chance. La suite est un grand classique. Egalisation avant la fin, puis but à contre-courant en prolongations.
Dommage comme dirait l’autre. La troupe d’Aegerter avait tout pour bien faire. Elle s’était montrée séduisante dans le premier tiers, disputant sans doute son meilleur hockey depuis le début de la saison. Les 1489 spectateurs de Graben ont enfin pu apprécier des relances propres, des phases de jeu simples et rapides, une défense disciplinée, ils regretteront cependant la grande forme du portier Eichmann et un certain manque d’efficacité. Mais rien ne laissait alors présager de la fâcheuse tournure qu’allait prendre la rencontre pour Cormier, Jinman et consort.

Jinman et Cormier peuvent avoir des regrets

Le HC Sierre a montré l’espace de vingt minutes son potentiel sur la glace, même s’il n’y eut aucun réel contradicteur. Zerzuben en personne, qui a effectué son premier arrêt à la 9e minute, ne se doutait certainement pas à l’heure de déguster son premier thé qu’il serait battu cinq fois.
Tout se passait bien. Metrailler s’offrait encore le luxe de conclure un beau mouvement collectif en supériorité numérique pour inscrire le 2-0 à la 24e. Le premier but adverse, tombé à la 28e, ne semblait pas en mesure de faire douter ce Sierre-là. Mais survint alors cette minute, ce moment où tout a basculé. Incapables d’inscrire le 4-1, les Valaisans se sont laissés envahir par le doute. Ils ont commencé à bafouiller, à perdre leur précision, leur rigueur et sont retombés dans les travers moroses qui peuplent leur début de saison. Ils se sont mis à offrir des caviars, des boulevards à des Denteliers qui ont eu l’astucieuse intuition de se réveiller en sentant le vent tourner.
Une longue minute a décidé de ce match, a privé l’équipe au soleil rageur de ce déclic qu’elle cherche encore. Cette quête pourrait avec beaucoup de chance se terminer dès samedi du côté de Porrentruy où les Sierrois retrouveront des Ajoulots désireux d’effacer l’affront chaux-de-fonnier. Mais il y a fort à parier qu’il faudra encore beaucoup de patience.
Photo Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Sierre – Langenthal 4-5 ap (1-0, 2-2, 1-2 ; 0-1) 

Patinoire de Graben, 1480 spectateurs.
Arbitres : MM. Favre, Kurt et Rebillard.
Buts : 1’16 Lötscher-Cormier 1-0; 23’32 Métrailler-Keller (Sierre à 5 contre 4) 2-0; 27’28 Wellinger-Bodemann (Langenthal à 5 contre 4) 2-1; 31’28 Cormier-Jinman (Sierre à 5 contre 3) 3-1; 39’40 Charpentier-Wellinger (Langenthal à 5 contre 4) 3-2; 41’10 Gruber-Bochatay 3-3; 45’30 Siritsa-Métrailler 4-3; 54’05 Larouche-F. Randegger 4-4; 64’05 Charpentier 4-5.
Sierre : Zerzuben; Imsand, Lamprecht; Keller, Jenni; Maret, Dallenbach; Sammali, Kohli, Pannatier; Jinman, Cormier, Lötscher; Métrailler, Tognini, Maurer; Hürlimann, Tognini, Wüst.
Langenthal : Eichmann; Wellinger, G. Randegger; Stalder, Bochatay; Wegmüller, Haldimann; Falett, Küng, Baumgartner; Wieser, Larouche, F. Randegger; Gerber, Charpentier, Gruber; F. Randegger, Haas, Bodemann.
Pénalités : 4 x 2′ contre Sierre, 8 x 2′ contre Langenthal.
Notes : Sierre sans Faust, Reber, Kamber et Tondo (blessés).

Écrit par Jean-Christophe Hardy