Petits fours 277 – Flûtes 139

Le football suisse est magique : même en pleine trêve hivernale, il parvient à monopoliser l’attention et à truster les deux premières places de l’élection du Pigeon d’Or grâce aux rodomontades de ses dirigeants. Finalement, Ralph Zloczower, l’amateur de petits fours de Muri, devance largement Paul-André Cornu, le fabriquant de flûtes de Champagne.

En 2007, c’était déjà lors de la pause hivernale que Christian Constantin avait posé les jalons de son futur succès de fin d’année en obtenant le Pigeon de janvier grâce à son grotesque DVD des prétendues erreurs d’arbitrage défavorables au FC Sion. Ralph Zloczower marchera-t-il sur ses traces ? En tous les cas, le président de l’Association Suisse de Football sera un client sérieux pour l’élection finale. Car, malgré un nom aussi imprononçable qu’un champion olympique géorgien d’haltérophilie et un charisme digne d’une porte des Mélèzes, pardon, d’une porte de grange, l’avocat bernois s’est assuré une très brillante élection pour ce premier Pigeon de l’année.

Les vacances aux Bahamas

Rappelons que Ralph Zloczower devait sa sélection à la décision de l’ASF de fixer la finale de la Coupe de Suisse un mercredi soir, en même temps que la finale de la Coupe UEFA. Le motif de ce changement de date ? Aucun dirigeant de l’ASF ne pouvait être présent à la date habituelle de la finale le week-end de Pentecôte, tous souhaitant se rendre à un congrès de la FIFA qui se tiendra en même temps aux Bahamas. Etant donné que c’est de toute façon le président de la Confédération qui remet la Coupe au capitaine de l’équipe victorieuse, on aurait pu imaginer qu’au moins un dirigeant de l’ASF reste en Suisse pour distribuer médailles et poignées de mains.
Ou, si vraiment aucun d’entre eux ne pouvait concevoir de rater la semaine de vacances aux Bahamas aux frais de la princesse, qu’ils délèguent quelqu’un pour les représenter, Ottmar Hitzfeld, Edmond Isoz ou le concierge de la maison du football à Muri, de toute façon, tout le monde se contrefiche éperdument de savoir qui représente l’ASF à la finale de la Coupe. Sauf que ces messieurs se font manifestement une très haute idée de leur propre importance et ne voulaient pas perdre une occasion de passer à la TV. Ils ont donc choisi d’avoir le beurre et l’argent du beurre, soit le séjour aux Bahamas et le petit instant de gloire lors de la remise de la Coupe. Et tant pis pour les supporters qui vont devoir prendre un après-midi de congé pour assister au match. Et tant pis pour le football suisse, qui va voir là sa plus belle vitrine se jouer dans l’indifférence générale, concurrence de la Coupe UEFA oblige.

Un bilan défendable

Ancien président de Young-Boys et de l’association suisse de… curling, Ralph Zloczower avait été élu à la tête de l’ASF en 2001. Un peu à la surprise générale, car il avait été nettement devancé au 1er tour par le représentant de la base, le candidat de la ligue amateur feu Urs Saladin. Mais l’avocat bernois avait réussi à retourner la situation en sa faveur pour deux voix, grâce à l’appui de deux candidats éliminés au 1er tour, le représentant de la 1ère ligue, Guido Cornella, et cet autre grand bienfaiteur du foot suisse qu’est Jean-François Kurz. Etablissant ainsi d’emblée une réputation d’intrigant de salon plutôt que de dirigeant de terrain.
Certes, sous le règne de Ralph Zloczower, qui s’achèvera l’été prochain, le bilan du football suisse n’est pas mauvais : il y a eu l’obtention de l’Euro 2008, dont l’organisation, nonobstant quelques petits couacs, a été une réussite ; la Nati reste sur trois participations consécutives à des grands tournois ; notre championnat a enfin une formule cohérente et présente un niveau tout à fait honorable, tant au niveau de l’indice UEFA que des affluences dans les stades, compte tenu de la taille du pays et des moyens à disposition ; le système de formation est performant ; nos équipes juniors obtiennent les meilleurs résultats de leur histoire ; les stades se sont modernisés et il n’y a jamais eu autant de joueurs suisses à l’étranger…

Mais beaucoup de casseroles

Néanmoins, on a l’impression que ce qui est arrivé de bien au foot suisse ces dernières années, s’est produit non pas grâce à mais malgré son président. Qui a surtout eu la chance de pouvoir s’appuyer sur quelques hommes providentiels, comme Köbi Kuhn, Bernard Challandes, Thomas Helbling (candidature de l’Euro), Benedikt Weibel (organisation de l’Euro), Hansruedi Hasler (directeur technique)… En revanche, dès que Me Zloczower et consorts se sont retrouvés en première ligne, les choses se sont gâtées : on se souvient de la gestion calamiteuse de l’affaire Frei au Portugal, de l’amateurisme avec lequel le déplacement périlleux d’Istanbul avait été préparé et du manque d’opiniâtreté pour ensuite obtenir des sanctions appropriées contre la Turquie, des scandales de la billetterie pour les matchs décisifs de qualification, privilégiant sponsors, VIP, opportunistes et petits copains au détriment des supporters les plus fidèles («qui resteront néanmoins les bienvenus contre les Iles Féroé»), du manque d’implication dans les turbulences autour de la Nati entre la Coupe du Monde 2006 et l’Euro 2008…
Bref, pour toutes ces raisons et sans doute bien d’autres encore, vous avez décidé d’octroyer à Ralph Zloczower le

Pigeon d’Or de janvier 2009 !

Le futur ex-président de l’ASF devance le président d’Yverdon-Sport Paul-André Cornu. Véritable chevalier des temps modernes, le fabriquant de flûtes de Champagne prône l’unité du foot romand autour d’un grand FC Romandie à Yverdon mais part en croisade contre tout ce qui bouge dans le foot suisse : la ligue, le FC Lucerne, le FC Baulmes, la formule de championnat, le Lausanne-Sport et, plus récemment, la commune d’Yverdon-les-Bains, qui ne saurait apprécier à sa juste valeur la notoriété qu’YS apporterait à la ville.
Mal partie dans cette élection, Patty Schnyder échoue sans combattre à la 3e place. Lors de la conférence de presse qui a suivi l’élection, au bord des larmes, la Bâloise a affirmé que les lecteurs de CartonRouge.ch étaient tous très méchants avec elle et que le mode de scrutin n’était pas favorable à son jeu. James Desmarais, alias «la plaie de la ligue» (© Mathieu Nicolet), finit lui à un 4e rang un peu décevant quand on connaît les caractéristiques du personnage. Comme quoi, contrairement à ce que pensent certains, tous les lecteurs de CartonRouge.ch ne sont pas des fanatiques du LHC qui ne pensent qu’à allumer des Ch’tis en provenance des zones sinistrées de l’Arc jurassien. Enfin, le footballeur-gifleur Ricardo Fuller n’a fait que de la figuration dans cette élection, son coup de folie passager n’ayant pas pesé lourd face à quatre candidats ayant mérité leur élection pour l’ensemble de leur œuvre. 
Classement :
1. Ralph Zloczower : 277 voix (47,35%)
2. Paul-André Cornu : 139 voix (23,75%)
3. Patty Schnyder : 91 voix (15,55%)
4. James Desmarais : 63 voix (10,80%)
5. Ricardo Fuller : 15 voix (2,55%).

 

Écrit par Julien Mouquin (texte) et Robert Johanson (dessin)

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14 Commentaires

  1. J’avais voté pour PAC mais bon, Zloczower fait bon candidat. A savoir si ce dernier accepterait un titre de ce genre…avocat bernois…il doit être hautain.
    .
    bonne continuation. Y aura-t-il un petit clin d’oeil au Vendée Globe pour le pigeon de février ?

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