Ambri-Piotta : bouillant froid

Pas facile de trouver un bon angle pour couvrir Ambri. Parlez-en donc au soleil… Franchement, j’aime bien ce club. D’ailleurs, parfois, au lieu d’aller travailler, il m’arrive de me mettre dans un train et de me retrouver à passer le Gothard. C’est toujours un moment intense de voir la patinoire, au pied de ce fameux couloir à avalanche et de constater que le hockey se vit passionnément même dans des coins qui doivent plus au passage du trafic poids lourd et à l’armée suisse qu’à une nature hospitalière.

Malheureusement, ça se passe plutôt mal pour les Léventins ces dernières années. Tout a peut-être commencé avec cette fameuse série contre Lugano en 2005-2006 qui les voyait terrasser l’ennemi du bas, avant de s’effondrer. Dnat Domenichelli annonçait encore son départ vers la plaine après deux saisons sous la barre. Entre temps, Ambri a certes dégotté Erik Westrum, mais, en développant son jeu, l’équipe semble montrer assez clairement sa préoccupation quant aux incertitudes nivo-financières qui planent autour et sur la patinoire.

Une locomotive pour tirer le club des rampes du Gothard (à défaut de voiture)

L’année passée, on a pensé l’étau se resserrer lorsqu’on a appris que Roland von Mentlen traînait dans les parages de la Valascia. On se demandait bien ce qu’allait nous préparer le mage qui trouvait que Fribourg, de par son bassin de population coincé entre deux centres, ne pouvait disposer d’un budget supérieur à deux crottes de lama lyophilisées. Fort heureusement, la vallée semble être régie par un omnipotent cartel des croque-morts qui aurait vu d’un très mauvais œil qu’un étranger puisse prétendre à une part de leur marché traditionnel. Le Saint-Gallois s’est désormais trouvé une bien meilleure place, du côté des Young Sprinters, histoire d’ajouter une relégation en première ligue à son long palmarès. C’est pourquoi le nouvel homme fort du club s’appelle Filippo Lombardi, figure emblématique d’un Tessin qui gagne… ses procès.


«Vous êtes en ce moment 800 à me regarder»

Si la personne est très populaire au Tessin, c’est qu’elle a tout de même réussi à ramener 50 millions de Berne pour construire une usine d’incinération des ordures. Mais avant que quelqu’un de mal intentionné ne vous prévienne, je vous le dis vite. Filippo, ça veut dire : «celui qui aime les chevaux». Et on serait à un petit pas du délit de fuite si on omettait de remarquer que ceux-ci poussent encore plus à l’excitation, voire à l’ivresse lorsqu’ils sont sous le capot. Bon, même si ça n’apporte pas grand-chose de le dire, on remarquera tout de même que M. Lombardi ne conduit plus désormais. Il a même engagé un chômeur (ndlr : dans certains cantons procéduriers, on devrait dire «ex-chômeur», mais la situation n’est pas des plus claires comme on le verra plus bas) pour le piloter vers ses différentes obligations. C’est tout de même amusant de penser que ce politicien a tant défendu le tunnel de base du Gothard, alors qu’il savait pertinemment que sa voiture serait toujours beaucoup plus rapide pour se rendre au nord des Alpes.
Pour vendre le club aux fans, des idées assez originales ont été concrétisées. D’abord, un dossier téléchargeable en PDF où toutes les images des joueurs sont floues. Ça prend une petite semaine pour se les mettre dans la tête et, surtout, identifier ceux qui sont encore là, car le document est celui de l’année passée. C’est pas mal pour occuper les gosses pour les voyages des vacances d’été. Et bonne nouvelle ! Pas besoin de parler l’italien pour être fan du HCAP. Le fameux document est traduit en allemand. Un bon point si l’on considère que les habitants de Göschenen sont un public cible, compte tenu de la proximité géographique. Ça, c’est pour le moins novateur. Mais dans un village où même la population est raréfiée, il faut en avoir de la matière grise, autre que les particules fines. Et le HCAP a pensé que pour s’assurer une disponibilité maximale envers ses fans, ce serait une excellente idée d’engager un joueur, sans préciser dans le cahier des charges de son contrat qu’il doit savoir jouer au hockey. Noah Clarke est ainsi à la disposition du club. Pratique, qu’il s’agisse de déneiger la piste d’atterrissage, ou de donner un coup de main à la ménagère du coin qui aurait pris du retard dans son repassage. Bon, ça coûte environ 600’000 francs sur deux ans, mais pour faire parler du club, il faut se donner les moyens de ses ambitions. Et en plus, c’est un bon moyen d’impliquer le président de lui donner un conducteur qui aime parler hockey.


Les clubs russes qui veulent obtenir les services d’Erik Westrum
préparent un plan sous terrain maléfique pour cambrioler la Valascia

Enfin, là où le leadership du nouveau président se fera le plus sentir, ce sera au niveau de la fréquentation des rencontres. On attend en moyenne 12’000 personnes par match à la Valascia et 25’000 pour les derbies. C’est d’ailleurs pour cela qu’il faudrait penser à construire quelque chose d’un peu plus mastoc pour «abriter» les parties. De là à installer un chauffage, faut pas exagérer.

Prendre Laporte ?

Pour ce qui est des opérations sportives, le nouvel homme fort s’appelle Benoît Laporte. On ignore s’il a été choisi pour faire résonner un jeu de mot unanime dans toute la presse spécialisée romande, quand on aura assez ri ou si c’est parce que l’accent québécois en italien rend crédible pour ce qui est du hockey, mais ça franchement, ça craint. Prendre un motivateur plutôt qu’un technicien, c’est aussi tendance que les Goo Goo Dolls à l’heure où je vous parle. Et le Franco-Canadien, titré «meilleur entraîneur 2008 au pays des ignorants du hockey», possède un CV tellement étoffé d’autres références qu’il n’est pas improbable que des petits jobs de jeunesse tels qu’aide-magasinier chez Canadian Tire ou assistant chasseur de phoque figurent sur celui-ci. Selon le rapport de scouting de hockeynofuture.com, c’est une sorte de Dany Gelinas dépourvu de lunettes qui donnent un air intelligent et doté de moins d’habiletés. Il a pu conjuguer la qualité reconnue des cours élémentaires du Québec à une démesure «gressienne» dans la confiance en ses moyens que l’on retrouve, parfois – mais c’est assez rare – chez nos voisins français. Toujours selon le même rapport, il se fera facilement engager par des gens qui ont besoin d’entendre des choses positives à leur propre sujet. Il n’aura que peu de peine à les énoncer en parlant comme faisant déjà partie intégrante de l’équipe. 


Laporte, grande ouverte

Sur le plateau de la TSR durant les Mondiaux, les plus chanceux d’entre nous ont déjà pu avoir une sorte d’avant-goût. Il annonçait que ça allait «frotter sévère dans les coins» et qu’il allait apprendre aux nouveaux types dont il était le mentor, le guide spirituel et puis un peu plus comment ils allaient gagner et se hisser parmi les meilleures équipes du pays. Oui oui, jouer dur, frapper l’adversaire c’est bien, mais faut-il encore avoir les moyens de faire autre chose que de dumper le puck et de courir stupidement après, lorsque les rois du différentiel que sont Westrum, Law et Kutlak devront penser à se reposer. Bien entendu, il y a Paulo Duca qui est loin d’être un mauvais joueur, mais ça ne fait pas une équipe. Bäumle sera encore sélectionné en équipe nationale avec une moyenne de buts encaissés supérieure à 4 par partie.
On parle beaucoup de la paire Westrum-Law qui pourrait faire un malheur. Disons que pour avoir pas mal observé Law la saison précédente, s’il se met tout d’un coup à dépasser le plateau des 50 points, c’est vraiment parce qu’il devait trouver que Jeannin avait une sale tronche et que patiner au ralenti avec l’aplomb d’un vase rafistolé à la colle blanche, c’est simplement une forme d’intox qui se pratique dans le métier.
Et puis, après Dubois qui a décidé de moins payer de sa personne en rejoignant une région où l’on se chauffe au mazout, c’est l’emblématique Nicola Celio qui a fini par prendre conscience que ses patins étaient si usés qu’il ne pouvait même plus se raser avec.
Moi j’aime bien Ambri, mais cette année, ce sera difficile, vraiment. Mais bon… À imaginer vraiment le pire, soit une confrontation contre la meilleure équipe de LNB, le nombre de spectateurs pourrait facilement monter vers 35-40’000. Une bonne affaire au fond. Et si Ambri veut bien être ridicule durant la saison régulière, Laporte devrait déjà être sorti/sortie de ses gonds en fin d’hiver (ho ho ho).
Il reste tout de même un espoir. Et si le DG, JJ Aeschlimann, nous livrait une de ses célèbres feintes, à un étage supérieur ?

Écrit par Jean-Boris Cochet-Lamouche

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6 Commentaires

  1. Bin pour ma part, je ne dirai qu’une chose:

    FORZA AMBRI!!

    Je suis ce club depuis bien des années, et en suis toujours autant fan et fière! Rester parmi l’élite quand on a si peu de moyens (contrairement à Lugano…) tient du miracle… et du support de toute une vallée!

    Bref, Viva HCAP!

  2. Bevo la birra aumenta la panza,
    bevo la birra e non è abbastanza
    fumo le canne e son sempre in botta,
    sempre e comunque Forza Ambrì Piottaa

    Excellent article!!!

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