Oui, il arrive (aussi) que Gottéron perde un match

Si tu suis régulièrement les comptes-rendus des matchs de Bundesliga, tu auras compris que la Ruhr, «c’est the place to be pour tout supporter de foot qui se respecte», parce que dans la Ruhr, il y a un stade de foot tous les 30 kilomètres (dixit The Specialist). Pour le hockey sur glace helvétique, «the place to be» c’est Zurich. CartonRouge était ce soir à côté de Unique Airport, pour ce qui fut un «classique» à l’époque de Slava Bykov et d’Andreï Khomutov.

Live from Unique @ downtown Switzerland

Dans la région zurichoise, ce ne sont pas moins de trois équipes de LNA (Kloten, ZSC Lions et Rapperswil) dans un rayon de 30 kilomètres autour de Downtown Switzerland (dire qu’il y en a pour accuser les Lausannois d’arrogance dans le tiers-monde welschland) et le bucolique KEK de Küsnacht sur la Goldenküste si la LNB te tente (une victoire du LHC à l’extérieur c’est toujours plaisant pour un romand expat’). Vendredi soir, CartonRouge était au Schluefweg de Kloten pour un match opposant les Aviateurs locaux au HC Fribourg-Gottéron ; le 6e qui reçoit le 7e dans la «Grande Ligue» si souvent rêvée par quelques Chauxois qui n’en verront jamais aux Mélèzes. On allait donc assister à du beau spectacle. Le choix du match n’était pas anodin : il y a plus de chance de voir le EHC Biou devenir Schwiitzermeister que de lire un papier du très officiel rédacteur fribourgeois de Carton Rouge relatant une défaite de Gottéron. Mais heureusement, George peut compter sur ses collègues.

Une vraie patinoire

Le Schluefweg de Kloten, c’est ce que l’on appelle une patinoire moderne, sièges confortables, espace presse accueillant (CartonRouge, malgré son nom, n’est pas – encore – un média mainline. Votre serviteur a emprunté la place 48 généralement attribuée au Giornale del Popolo, tout un symbole…). «Flyers Wurst» pour les pauses et, comble du bonheur, une équipe de hockey sur glace qui joue au hockey sur glace (très loin de Malley pour ce qui est de l’équipe, à des années lumières des Mélèzes pour ce qui est de l’équipe et de la patinoire). Le seul bémol à cet écrin, les supporters adverses placés juste à côté des locaux, rappelant le triste et peu accueillant Stade de Glace (mais c’est là le seul point commun). Le plafond est bardé de drapeaux relatant les plus glorieux trophées de l’époque du EHC Kloten : les derniers titres de champion suisse 1967, 1993, 1994, 1995, 1996 (certains rappelant d’excellents souvenirs aux visiteurs) et les stars associées tels qu’Anders Eldebrink, Marco Klöti, Reto Pavoni, Peter Schlagenhauf, Roman Wäger, Felix Hollenstein et Mikael Johansson. L’entrée des joueurs se fait au son de la Guggenmusik Chlueppliseck Chloote (pour les passionnés www.chlueppliseck.ch), nous rappelant – si besoin était – de quel côté de la Sarine nous nous trouvons.

Le décor est planté

Le premier tiers de ce match ne restera pas dans les annales. Soyons francs : on s’est emmerdé. Votre serviteur, plus habitué à la lenteur et aux approximations inhérentes à la «Petite Ligue» s’est même demandé s’il ne s’était pas trompé de soir et qu’il avait sous les yeux une rencontre entre Thurgovie et GC déplacée à Chloote pour une raison obscure. La première grosse occasion sera pour les locaux après 1’54 par le Postfinance Topscorer des Aviateurs Tommi Santala que l’on verra souvent dans ce match, associé qu’il était dans la première ligne au numéro 33 Kimmo Rintanen et au géant Mark Bell. Les dix premières minutes peuvent se résumer en deux mots : Kloten domine et Gottéron dégage de façon interdite. Quatre occasions nettes pour les locaux (à l’exception du dribble de la défense du numéro 5 Yves Müller des Flyers à la 4e minute, toutes seront réalisées par la première ligne), une seule à l’actif de Gottéron par Julien Sprunger.

Les spectateurs s’endorment, les deux commentateurs de RadioFR assis juste à côté aussi, jusqu’à la 9e minute. Incroyable solo de Benjamin Plüss, une hurlée «Gottéroooooooooooooooon !!!! Noooooooooon !!!!» de RadioFR, les 200 Fribourgeois ayant fait le déplacement se manifestent… en vain. Le pétard était mouillé. Les dix dernières minutes de ce premier tiers furent à l’image des dix premières : lentes et assaisonnées de quelques occasions de part et d’autre ; on notera l’excellente occasion de Sprunger à la 18e échouant seul face au gardien Rüeger, lequel relance immédiatement sur son défenseur droite qui passe directement à un attaquant zurichois (mes excuses, je n’ai pas vu son numéro) qui échoue à son tour dans son duel face à Sébastien Caron. Ce premier tiers se terminera sur un score nul et vierge, vierge aussi de pénalité. Lorsque Gottéron joue, c’est à relever.
Un deuxième tiers à l’avantage de Gottéron, mais c’est Kloten qui marque. Au niveau des tirs cadrés, on a noté 7 pour Kloten et 4 pour Fribourg mais ce sont les Fribourgeois qui dominent. Alors qu’au premier tiers c’était Gottéron qui dégageait de manière interdite, les Flyers imiteront leur opposants d’un soir durant ce deuxième tiers. Tout cela jusqu’à la 26e minute où le PostFinance Topscorer fribourgeois Serge Aubin écope de deux minutes de prison pour avoir accroché son adversaire. Un power-play rapidement posé par les Aviateurs, un box-play rondement mené par les Fribourgeois mais cela ne suffira pas.
28 secondes avant qu’Aubin ne revienne sur la glace, une superbe triangulation entre Patrick Von Gunten, l’incroyable Tommi Santala et Marc Leuenberger voit Kloten ouvrir le score. Rien a redire, Gottéron s’est bien battu mais n’a rien pu faire. Ce tiers médian se terminera sur ce score de 1-0 même si à la 33e, on a bien failli assister à un autogoal qui aurait pu amener le deuxième but aux locaux : Franco Collenberg tente une passe à un joueur placé au centre de l’espace de jeu, la rondelle fini sa course sur l’arrière de la jambière du gardien fribourgeois. Sans un réflexe éclair de ce dernier, Collenberg aurait sans doute fini le match à la porte. Sur le plan des pénalités, on notera encore une agression de Ngoy sur Mark Bell qui partait seul affronter Caron à la 35e qui avait le poids d’un penalty.

Un troisième tiers riche… en rebondissements

Tout commence par une coutume locale : un ultra (Beni) demande sa belle (Jasi) en mariage, elle dit «oui» et tout le monde applaudit. On se réjouit dans 15 ou 20 ans voir les meneurs actuels de la Section Ouest en faire de même à Malley. Le troisième tiers commence en fanfare. Première occasion manquée des hommes de Serge Pelletier (qui a probablement hurlé contre ses boys dans le vestiaire tant Fribourg paraît métamorphosé). Il n’en fallait pas plus pour donner des ailes à Dennis Hollenstein (ça vous rappelle quelque chose ce nom ?) qui se paie le luxe de traverser toute la patinoire, d’admirer les trous de Gruyère (mais j’sais… y’a pas de trous dans le Gruyère) dans la défense fribourgeoise pour s’en aller crucifier Caron, dernier rempart abandonné.
On a cru un instant que la cage déplacée par un joueur de Gottéron allait annuler la réussite mais l’arbitre s’est convaincu du contraire en allant visionner les images. 2-0 pour les locaux, Fribourg se devait de réagir. Malgré une pénalité contre Stancescu à la 42e, le capital buts de Fribourg restait désespérément nul. Jusqu’au solo de Sandy Jeannin à la 45e. L’ancien Luganais se fait un plaisir d’allumer brillamment la rouge après avoir été servi par Knoepfli (un assist sera donné à Collenberg, on le cherche toujours). 2-1, Gottéron revient. Les fans y croient de nouveau : eux qui avaient brillé par leur silence se remettent à chanter «égalisez, égalisez…».
Et l’équipe de Gottéron les suit dans cet ordre. Cinq minutes après l’ouverture du score fribourgeoise, Ngoy, sur passe de Sandy Jeannin et de Julien Sprunger, se fait un plaisir de proposer aux deux équipes de commencer un nouveau match alors que son équipe évoluait en supériorité numérique (Julien Bonnet chauffait le banc d’infamie). Cela a eu l’effet d’une bombe chez des Flyers enfumés par le jeu agressif des boys de Pelletier. En effet, à 5 minutes de la fin du temps réglementaire, Michel Ouellet n’a rien trouvé de mieux que d’accrocher le Topscorer zurichois, geste l’envoyant directement en prison. C’est à ce moment-là que Serge Pelletier a demandé un temps mort, histoire de calmer et de reposer ses meilleurs éléments. Après une véritable Noce-à-Thomas des locaux contre le pauvre Caron, c’est finalement Von Gunten sur passe de Mark Bell qui trouvera la faille.

On jouait la 56e minute de jeu et on se disait que les carottes étaient cuites. Que nenni ! A 50 secondes de la fin du match, l’entraîneur fribourgeois décide de sortir son gardien pour mettre un sixième joueur de champ. Une stratégie qui fonctionne une fois sur deux. Cette fois-ci fut la bonne : 59’34 au panneau d’affichage, Knoepfli sur passe de Sprunger clot le bec des supporters locaux déjà persuadés d’avoir emporté l’entier de l’enjeu. 3-3, tout est à refaire pour les Flyers.

Kloten, l’équipe qui «ne convient pas à Gottéron»

Sans vouloir paraphraser nos plus grands commentateurs de la TSR (spéciale dédicace à Eric Willemin), c’est bien de cela dont il s’agit. Le but libérateur pour Kloten arrivant à la 63e. Jusqu’ici impéccable dans son rôle, Kimmo Rintanen rate sa passe qui aurait pu finir sur la crosse d’un attaquant fribourgeois seul dans la zone de défense zurichoise. Au lieu de cela, ce même Rintanen récupère la rondelle, tire contre Caron – pourtant impéccable – qui relâche, et Rintanen a tout le temps d’ajuster son tir et c’est la victoire des Flyers. Les 6579 spectateurs jubilent. La messe (ou plutôt le culte sur les terres de Zwingli) est dite.

Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Kloten Flyers – FR-Gottéron 4-3 ap (0-0 1-0 2-3)

Schlüefweg, 6579 spectateurs.
Arbitres : MM. Reiber, Stricker ; Abegglen et Wermeille.
Buts : 28e Von Gunten (Santala, Bell/5c4) 1-0, 42e Hollenstein 2-0, 46e Jeannin (Knoepfli, Collenberg) 2-1, 51e Ngoy (Jeannin, Sprunger/5c4) 2-2, 57e Von Gunten (Bell/5c4) 3-2, 60e Knoepfli (Sprunger) 3-3, 64e Rintanen (Santala, Sidler) 4-3.
Pénalités : 3 x 2′ contre Kloten Flyers ; 4 x 2′ contre FR-Gottéron.
Kloten Flyers : Rüeger; Von Gunten, Schulthess; Ju.Bonnet, Forrest; Sidler, Winkler; Y.Müller; Bell, Santala, Rintanen; Stancescu, Liniger, Jenni; Jacquemet, Bodenmann, Hollenstein; Kellenberger, S.Lindemann.
FR-Gottéron : Caron; Ngoy, M.Leuenberger; L.Gerber, Birbaum; Loeffel, Collenberg; Voisard; Ouellet, Mowers, Lakhmatov; Casutt, Jeannin, Knoepfli; Sprunger, Aubin, B.Plüss; Leblanc, Botter, Lauper; Hasani.
Notes : Kloten Flyers sans Du Bois, Hamr, Welti, Steiner, Zeiter, Rothen, Wick ni Füglister (tous blessés) ; FR-Gottéron sans Heins, Bykov, Wirz ni Abplanalp (tous blessés). Tir sur le poteau: Hollenstein (55e). Temps mort: Kloten Flyers (56e).

Écrit par Vincent Keller

Commentaires Facebook

5 Commentaires

  1. C’est qui ce Marc Leuenberger de Kloten sur lequel Ngoy fait une agression et qui fait la triangulation avec von Gunten et Santala?

  2. Voilà un article de belle facture, Vincent, bien écrit (j’dis ça alors que je ne connais absolument rien que dalle nada niet aux finesses du hockey), mais, et c’est là ou je voulais en venir, article qui fait enfin sortir du bois notre cher Chrimani après une longue hibernation. Ouf, on était presque inquiets 😉

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.