La sélection All-Buse 2009/2010

La finale de Madrid approchant à grands pas, c’est l’heure du désormais immuable All-Buse de la Ligue des Champions. Bien évidemment toujours aussi scandaleusement partial et subjectif. Avec toutefois une vérité : si leur club respectif ne sera pas en lice samedi à Bernabeu, c’est que les joueurs et l’entraîneur retenus n’ont pas tout fait tout juste.

Gardien : Steve Mandanda (Marseille)

J’aurai pu mettre Guatelli ou Leoni mais cela aurait manqué de panache, j’ai préféré sélectionner le gardien le plus surfait du foot européen. Steve Mandanda me fait un peu penser à Pascal Zuberbühler : il n’a aucun esprit de décisions dans les sorties aériennes et de la peine à apprécier les trajectoires. Toutefois, dans un soir de baraka, il peut tout sortir et, à l’instar de Zubi à son époque bâloise, comme il joue dans le club le plus médiatisé de son pays, ça ne passe pas inaperçu. Dans un mauvais soir, il peut couler son équipe à lui tout seul. C’est ce qui est arrivé lors du match décisif contre le Real Madrid où les approximations de son dernier rempart ont anéanti les très maigres chances de qualification de l’OM.

Latéral droit : Sergio Ramos (Real Madrid)

Sergio Ramos constitue l’une des dernières incarnations des «pavones», ces joueurs du cru censés assurer les arrières des superstars du secteur offensif recrutées à coup de millions. Comme d’habitude, la politique galactique a fait un flop d’autant plus retentissant que cette année le Real Madrid voulait absolument jouer sa finale à domicile. Mais Sergio Ramos et compagnie ont démontré, une fois de plus, qu’il était illusoire d’espérer dépasser les 1/8e de finale avec des latéraux qui font du marquage à l’extérieur, comme sur le but décisif de Pjanic, voire pas de marquage du tout, et un collectif déséquilibré où l’essentiel des investissements a été consenti dans le secteur offensif.

Défenseur central : Mikaël Silvestre (Arsenal)

L’un des meilleurs transferts réussis ces dernières saisons par Manchester United, c’est d’avoir réussi à refiler Mikaël Silvestre à un adversaire direct, Arsenal. Pourtant, l’ancien Rennais a largement démontré ne pas être concurrentiel au plus niveau de la Premier League et de la C1 mais Arsène Wenger engagerait sans doute les frères Degen s’ils étaient Français. La sanction n’a pas tardé : alors que la maladresse des attaquants barcelonais et quelques largesses arbitrales avaient miraculeusement permis aux Gunners de se retrouver en tête après 108 minutes à l’addition des deux matchs, Mikaël Silvestre a instantanément redonné l’avantage au Barça avec une affreuse relance dans l’axe. Avant de sombrer corps et âme face aux assauts de Messi et consorts. Tellement prévisible.

Défenseur central : Fabio Cannavaro (Juventus Turin)

On ne remerciera jamais assez Fabio Cannavaro de mettre autant de zèle à démontrer à quel point son Ballon d’Or en 2006 était une imposture. Discréditant ainsi encore un peu plus une institution déjà largement décrédibilisée par la présence de Pierre-Alain Dupuis dans le panel de journalistes spécialisés. Pourtant, la Juve n’avait besoin que d’un point pour se qualifier et menait 1-0 contre le Bayern. En d’autres temps, le match aurait été verrouillé sur ce score mais là Cannavaro et consorts ont volé en éclat contre des Rekordmeister sans Ribéry ni Robben (jusqu’à la 73e). Au final, un 4-1 encore flatteur pour les Turinois. Cannavaro exportera ensuite sa perméabilité en Europa League où son expulsion précipitera une nouvelle défaite bianconeri 4-1 à Fulham. Décidemment, le druide Lippi aura bien du travail pour en refaire un défenseur crédible d’ici la Coupe du Monde.

Latéral gauche : Laszlo Bodnar (Debreceni VSC)

J’étais un peu emprunté pour trouver un latéral gauche alors je me suis tourné vers la pire défense de cette Ligue des Champions 2009-2010 : celle du Debreceni VSC, 19 goals encaissés en six matchs (et encore, heureusement qu’ils avaient Liverpool dans le groupe pour adoucir la moyenne). Joueur le plus expérimenté et capitaine de l’équipe, le latéral gauche Laszlo Bodnar a participé à tous les naufrages des Hongrois dans la compétition. Voilà qui méritait bien une sélection.

Milieu droit : Lucas Leiva (Liverpool)

Liverpool constitue l’un des gros flops de cette saison de Ligue des Champions (et pas qu’en Ligue des Champions d’ailleurs…), il se devait d’être représenté. Lucas représente l’un de ces transferts foireux dont Rafa Benitez a le secret. Et pourtant, après le départ de Xabi Alonso et la déception Aquilani, le Brésilien s’est retrouvé promu titulaire, en dépit d’un impact physique proche du néant à mi-terrain et d’une technique qui n’a rien de Brésilien. Les Scousers auraient mieux fait de le remplacer par un gamin de 18 ans sorti du centre de formation, prêt à bouffer du gazon et à tacler dans tous les sens. C’est sûr qu’avec des joueurs aussi transparents que Lucas, Liverpool n’avait guère de chance de faire une remontée fantastique du style Istanbul 2005.

Milieu central : Andrea Pirlo (AC Milan)

Il fut un temps pas si lointain où l’AC Milan était un grand d’Europe, il ne l’est plus aujourd’hui : perdre à domicile contre Zurich passe encore, mais encaisser 7 buts en 180 minutes contre Manchester, voilà qui cadre mal avec la gloire passée des Rossoneri. Symbole de ce déclin milanais, Andrea Pirlo, qui a traversé cette Ligue des Champions 2009-2010 comme un zombie. Inexistant sur le plan défensif, incapable de donner des impulsions offensives, même plus décisif sur balles arrêtées, le vainqueur de la Ligue des Champions 2003 et 2007 n’est plus que l’ombre du grand joueur qu’il fut jadis. Et en plus, il donne l’impression de s’ennuyer à mourir sur le terrain.

Milieu central: Tico Okonkwo (FC Zurich)

Ce n’est pas forcément le Zurichois qui sautait le plus aux yeux mais Tico Okonkwo paie pour les soixante-deux fois où il a failli me faire jeter ma TV par la fenêtre lors du match Zurich – OM. Que le Nigérian ait du talent, personne n’en doute, reste encore à le mettre au service de l’équipe. Tico a manifestement vu la Ligue des Champions avant tout comme une occasion de se faire remarquer et, plutôt que de jouer simple, il a multiplié les tentatives de transversale de quarante mètres de l’extérieur du pied et autres fioritures qui ont invariablement fini en touche ou dans les pieds de l’adversaire. Dommage car avec un peu plus de discernement, on a vraiment l’impression que Zurich avait les moyens d’au moins souffler la troisième place à un OM bien pâle à ce moment-là de la saison. 

Milieu gauche : Tiago Dutra (Maccabi Haifa)

Six matchs, six défaites, zéro but inscrit, le Maccabi Haifa méritait un strapontin dans cette sélection. Tiago Dutra n’est pas pour grand-chose dans les contre-performances de son équipe puisqu’il n’a joué que douze minutes dans cette Ligue des Champions, mais quelles douze minutes ! Introduit à la 56e du match Juventus – Maccabi, il fracturait la cheville de son compatriote Felipe Melo quatre minutes plus tard (ça a dû faire tout bizarre au soigneur de la Juve d’intervenir pour une blessure réelle). Echappant à la sanction sur ce coup-là, il était expulsé huit minutes plus tard pour une agression sur Chiellini. C’est ce qu’on appelle une entrée fracassante !

Attaquant : Grafite (VfL Wolfsburg)

Meilleur buteur de la Bundesliga 2008-2009, Grafite devait confirmer, aussi bien en Allemagne que sur le plan international. C’est raté. Auteur d’une saison moyenne en Bundesliga, le Brésilien est passé complètement à côté de sa Ligue des Champions. Tout avait pourtant bien commencé avec un triplé contre le CSKA Moscou mais ensuite, alors que la qualification tendait les bras à Wolfsburg, Grafite a ruiné les chances de son équipe avec une expulsion stupide contre le Besiktas puis, après son retour de suspension, un match anonyme contre Manchester. Peut-être le résultat du conflit ouvert qui l’opposait à son entraîneur Armin Veh. Toujours est-il que la sélection de Grafite dans le cadre brésilien pour la Coupe du Monde demeure une énigme.

Attaquant : Didier Drogba (Chelsea)

Didier Drogba est définitivement l’attaquant le plus inutile du monde pour un club qui veut gagner la Ligue des Champions. Impérial dans les tours préliminaires, l’Ivoirien se démonte dès le début des choses sérieuses : finale UEFA transparente en 2004, expulsion contre Barcelone en 2005, expulsion en finale contre Manchester en 2008, balles de match galvaudées et fucking disgrace contre Barcelone en 2009… Didier Drogba a ajouté une nouvelle ligne à son palmarès cette saison en se montrant incapable de transpercer la muraille mise en place par José Mourinho et en écopant d’une nouvelle expulsion. C’est à se demander si un joueur qui est au mieux un poids mort, au pire un handicap, pour son équipe dans les matchs décisifs, est vraiment à sa place dans un club qui court désespérément après une victoire en C1. Il serait sans doute plus utile dans un club comme Bâle ou Marseille qui fêterait comme un titre de champion du monde une accession en 1/8e de finale et n’aurait plus guère d’ambition par la suite.

Entraîneur : Arsène Wenger (Arsenal)

Comme à chaque sélection All-Buse, il se trouvera l’un ou l’autre ado, ulcéré par la sélection de son joueur favori, pour venir me dire : «T’es trop naze, ton équipe elle gagne facile la Champions League». Alors le meilleur moyen pour prémunir cette sélection contre tout risque de victoire, c’est de la confier à un entraîneur dont la spécialité est, depuis cinq saisons, de ne rien gagner, à tout jamais le plus grand loser de l’histoire des Coupes d’Europe puisque le seul à avoir perdu les trois finales, C1 (2006), C2 (1992) et C3 (2000) : Arsène Wenger. On dit que les gens intelligents apprennent de leurs erreurs ; du coup, l’entraîneur des Gunners ne doit pas être super malin ou alors trop imbu de lui-même pour être capable de la moindre autocritique car on a l’impression qu’Arsenal commet chaque année les mêmes erreurs. Mais Arsène Wenger préfère invoquer la malchance ou des complots imaginaires plutôt que de tenter d’y remédier. Tant mieux, ça garantit une certaine stabilité dans cette sélection All-Buse en conservant le même entraîneur année après année.

Écrit par Julien Mouquin