Le football terroir, tout naturellement meilleur

Fort heureusement, le foot ne se résume pas à la Coupe du Monde. Sinon, Messi ne serait pas le meilleur joueur du monde, le Servette FC la prochaine équipe à monter en Super League. Oui, je chambre mes amis lausannois. Mais de toute évidence, le duel à la montée s’annonce plus épique que les épreuves reines de la discipline. Petit retour sur une soirée magique à la Praille.

Tu as attendu 4 ans pour voir le meilleur sport du monde au zénith de son art. Voir ton équipe préférée emballer le match, avoir la maîtrise du jeu de la première seconde à la dernière. Cependant, tu as peut-être été déçu. Les matchs furent bien souvent tronqués par des erreurs d’arbitrage, joués avec des organisations de jeu prudentes dans les deux camps. Patati patata. Bref, ce mois de Coupe du Monde en Afrique du Sud t’a probablement laissé sur ta faim. Pire, il te semble que le football a perdu de sa superbe, de sa magie. Et bien, si c’est le cas, c’est que tu mérites qu’une main te «correctionne» chacune de tes deux fesses bien dodues. Vlan douing douing… Vlan douing douing… Vilain petit garnement ! Tu dois apprendre la patience. A force, tu finiras comme Tonton CC, toujours à se plaindre, jamais satisfait de sa place en fin de saison.
Si tu avais attendu exactement 40 jours, 22 heures et 39 secondes seulement après la finale de la Coupe du Monde, tu aurais vu ton savoureux souhait se réaliser. Un soir apparemment anodin, un certain Servette-Kriens à la Praille.

Comme à son habitude depuis que Servette enchaîne les victoires, le peuple grenat a répondu présent. Une fois que le club sera monté, le vrai supporter devra bien se déculpabiliser en se disant qu’il venait au stade aussi bien dans les bons moments que dans les mauvais. Selon l’annonce officielle, il y a eu 5’104 vrais «socios» grenats. Ne vous inquiétez pas ! J’ai bien soustrait le groupe de 30 allumés tout de vert vêtu assis en tribune principale, chantant dans la «langue des chevaux». Ce n’est pas que je n’aime pas l’allemand et ses locuteurs, mais il paraît que c’est comme ça que la désignait Charles Quint, ancien archiduc d’Autriche. Excusez-moi du peu.
Avant le coup d’envoi, certains avaient peut-être perdu la sérénité qui les habitait habituellement. Avec une série d’invincibilité, la surprenante défaite à Winterthour a eu l’effet d’une douche froide pour les supporters genevois (3-1). Le doute ne demandait qu’à grandir. Après les années folles de 1920, il y a bien eu les années de la Grande Dépression. Mais c’était oublier qu’un «S» même à l’envers reste un «S». Servette will never die. Ce fut donc une soirée Servettienne Superbe Splendide Sensationnel. Le score fut sans appel. Servette 6, l’autre équipe 0.
C’est vrai, j’abuse sur les superlatifs. Mais j’assume. Le doute d’avant match fut dissipé dès les premiers contacts. Servette était physiquement présent et agressif sur chaque ballon. Au bout de 2’40 déjà, Pizzinat toucha la barre. Devant l’intensité qu’impose le Servette, Kriens excella dans le jeu de passes entre défenseurs. A chaque tentative de construction de jeu, les Lucernois perdirent rapidement le ballon. On a senti tous les joueurs servettiens impliqués dans la récupération du ballon. Le premier but vint naturellement d’un duel gagné par Vitkieviez. Celui-ci remit le ballon à Eudis qui fut fauché en dernier recours par le gardien lucernois. Résultat : pénalty et expulsion du gardien. De Azevedo transforma le pénalty que je n’osa pas regarder, pensant à celui raté par Eudis lors du match contre Bienne à la Praille.
Réduits à 10, les visiteurs se recroquevillèrent en défense. Pour autant, Servette ne relâcha pas la pression. Il continua à chercher des solutions offensives en jouant intelligemment au sol. Il paraît qu’en 2020 Servette gagnera la Ligue des Champions. Cette soirée a donc servi aux spectateurs de se sentir déjà comme une grande équipe, comme le Barça qui fait tourner le ballon autour d’une équipe venue pour perdre.

Les autres transformations servettiennes sont faites avec brio et panache.
2-0. Grâce à une passe lumineuse de Karanovic, Eudis reçoit le ballon. Il efface le défenseur et le gardien. L’action est fluide. Eudis n’a plus qu’à diriger le ballon en direction du but. But !
3-0. Eudis, à l’arrêt à l’entrée des 16 mètres, deux défenseurs devant lui, enrobe en douceur le ballon. Personne ne croit à sa frappe jusqu’à ce que le ballon fasse trembler le petit filet. But !
4-0. Coup franc de De Azevedo. Frappe sèche et forte. Elle flotte légèrement au dessus de l’herbe. But !
5-0. Cafouillage dans la surface de Kriens. Malgré 10 joueurs lucernois dans cette zone, Esteban en profite et marque. But !
6-0. Coup franc de Ruefli qu’on pense inutile vu le score. Il se situe à 25-30 mètres. Course de frappe exemplaire, trajectoire de balle gracieuse, pleine lucarne. Le gardien est encore en l’air pour la photo quand les filets tremblent. But !
Nonantième minute pile, pas d’arrêt de jeu, l’arbitre arrête le calvaire des Lucernois.
Après cette brillante victoire, on peut facilement oublier les absents. D’une part, Baumann fut remplacé par Schneider en défense centrale en raison d’une grippe. Mais il y a aussi un grand absent en ce début de saison. Tibert Pont qui fut le héros, le porte drapeau à «l’ère paléolithique» du club regardait le match le regard livide. Notre rencontre m’a touché. Il n’a pas touché de ballon depuis sa blessure. Soit depuis presque 1 mois et demi. Il lui reste encore 3 semaines avant de reprendre l’entrainement. Alors que ses coéquipiers s’amusent habilement au ballon à un niveau jamais atteint depuis la faillite, l’ancien capitaine devra non seulement retrouver son meilleur niveau, mais aussi s’élever au diapason de l’équipe. Courage Tibert !
En zappant leur équipe régionale, les amateurs de foot qui ne suivent uniquement les événements majeurs type Coupe du Monde ne savent pas tout ce qu’ils ratent. Ce samedi fut un show. Malheur aux absents pour les prochains matchs !
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Servette FC – SC Kriens 6-0 (2-0)

Stade de Genève, 5’134 spectateurs.
Arbitre : M. Hänni. 
Buts : 14e De Azevedo (pénalty) 1-0. 39e Eudis 2-0. 52e Eudis 3-0. 60e De Azevedo 4-0. 73e Esteban 5-0. 90e Ruefli 6-0. 

Écrit par Hervé Debon

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5 Commentaires

  1. Merci pour cet article qui rappelle que le vrai foot reste le foot « local »…. et non, les paillettes et bling-bling de la ligue des champion ou autre….

  2. Plus de 5100 spectateurs! La classe! On a largement la meilleur moyenne de challenge league, et plus de spectateurs que certain club en superleague!
    Allez les grenat!

  3. C’est vrai qu’après l’expulsion, Servette a dû un peu se réorganiser. Mais après, quel festival!!!! Les absents ont eu tord. Il risque d’y avoir bien du monde fin septembre pour la venue du LS…

    A part ça, super article mon cher Hervé…

  4. Le Servette FC renaît pour de bon, c’est certain. On sent qu’il y une mise en place de structures solides et une réelle volonté de refaire de ce club un des joyaux du football hélvètique. Les fans sont là, le stade, bien malgré lui, est là aussi, l’argent, semble t-il, n’est plus vraiment un problème, alors qu’est-ce qu’il manque? Bah une petite promotion pour la route ça passerait bien, et puis avec une telle dynamique, comment s’arrêter en si bon chemin?

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