Berne est bâti pour les play-offs, pas Fribourg…

Lors des play-offs, c’est une nouvelle saison qui commence : les supporters bernois l’avaient appris à leurs dépens dans un passé récent, puisqu’en 2006, 2008 et 2009, leur équipe avait perdu en quart de finale, après avoir dominé le tour qualificatif. Ce matin, c’est les supporters de Fribourg-Gottéron qui se réveillent avec cette dure réalité à l’esprit, eux qui se retrouvent brutalement éliminés, qui plus est par leurs frères ennemis moins bien classés qu’eux, mettant fin à une saison prometteuse suite à leur troisième place du classement.

Cependant, afin de pouvoir briguer ce titre tant convoité de champion, il est essentiel de gérer la saison dans la perspective des finales, afin obtenir le maximum du rendement de son équipe pendant les play-offs. Le Kloten de Hollenstein, Wäger et Eldebrink l’avait bien compris, eux qui avaient remporté quatre titres d’affilée dans les années nonante, en militant en milieu ou en bas de classement pendant la saison pour exprimer leur plein potentiel lorsqu’arrivait la fin du mois de février. Jean-Pierre Dumont, à l’interview post match hier soir, expliquait que le CP Berne avait rebâti son équipe à la fin de la saison régulière en vue des séries. Avec quel résultat !

La victoire de Berne sur Gottéron ne souffre en effet d’aucune discussion. Berne était l’équipe qui était «play-off ready» et qui avait plus envie de gagner. Elle formait 4 blocs équilibrés, impressionnante dans sa discipline et sa cohésion. Et contrairement aux Fribourgeois, pour qui on a constaté le phénomène inverse, les Bernois ont individuellement tous élevé leur niveau du jeu lors de cette série, tant les vétérans (Rüthemann, Gardner, Plüss, Dumont, Bührer) que les jeunes comme Froidevaux, Vermin, Bertschy (un peu perdu il est vrai en début de série) ou Pascal Berger, auteur des deux buts décisifs hier soir. Et que dire de la performance d’un joueur comme le défenseur Philippe Fürrer, d’habitude relativement ordinaire, qui a marqué le pénalty final et crucial lors de l’acte II et qui a ensuite régné magistralement en patron de la défense, cela en l’absence du Canadien Travis Roche blessé. 
Tout au long de la série, les Fribourgeois attendaient un déclic, un tournant qui pourrait faire basculer la série. On aurait pu penser que la victoire inespérée samedi à Berne l’était. Mais au fur et à mesure qu’avançait l’acte V, on se rendit peu à peu compte que Gottéron n’avait simplement pas les moyens de prendre l’ascendant sur son adversaire, car c’était au contraire la domination de l’Ours bernois qui était de plus en plus marquée, asphyxiante. Huet a sauvé la baraque aussi longtemps qu’il le pouvait, mais finalement, c’était trop lui demander de reproduire le blanchissage qu’il avait réussi lors de prolongations de samedi, et c’est logiquement que Berger a ouvert la marque à la mi-match. De plus, pour créer un déclic, il faut gagner les duels et peaufiner les détails qui sont souvent déterminants. C’est précisément ce que n’a pas fait Shawn Heins lors du 0-1, lui qui, au lieu de neutraliser physiquement Berger devant les buts lors du tir de Furrer, comme le manuel d’instruction l’enseigne, s’est tourné vers Huet pour admirer son éventuel arrêt, laissant ainsi l’attaquant bernois s’emparer du rebond favorable, en toute impunité.

En définitive, l’entraîneur finlandais Antti Törmänen a conduit Berne en finale en appliquant – paradoxalement – une recette à succès on ne peut plus canadienne : sortir les pucks de la zone défensive, verrouiller la zone neutre, se battre sur chaque puck, gagner les duels, aller au contact, lancer la rondelle au filet et ne pas avoir peur de se salir les mains, ce qui se traduit par aller se positionner devant le but pour masquer le gardien, bousculer le défenseur et être prêt à saisir les rebonds. Les deux buts de Berger ont illustré l’application parfaite de ces principes. On ne saurait cependant pas qualifier, au vu du verrou défensif en zone neutre, le jeu bernois comme étant inintéressant. En effet, une fois le puck récupéré, les Bernois ne se contentent pas de balancer le puck au fond et d’aller faire du «cycling» dans les coins, comme ils le faisaient durant la triste ère Van Boxmeer. Au contraire, les quatre lignes d’attaque créent un jeu collectif direct certes, mais collectif et marqué de grande intelligence et d’efficacité, à l’image du vieux renard de NHL Dumont.  
Larry Huras, dont tant Törmänen que Kossman ont été les assistants au SCB, avait d’ailleurs pressenti la force des Ours en prédisant de manière courageuse au début de la série que Fribourg n’avait aucune chance face à Berne.
Enfin, il serait dangereux pour les Fribourgeois de justifier leur élimination par l’explication simpliste d’un manque de réalisme ou de réussite, comme certains l’ont fait. Il est vrai que Gottéron a frappé plusieurs fois les montants des buts de Bührer durant la série (latte de Sprunger à l’acte II, latte et poteau à la dernière minute du temps réglementaire de l’acte IV, poteau de Barinka à 0-1 hier soir) ; mais ce n’était que des occasions isolées, dans le cadre de matchs dominés dans la majeure partie par une équipe bernoise – qui elle aussi a eu sa part de poteaux et d’occasion nettes – nettement meilleure et mentalement mieux préparée. Et sans les prestations exceptionnelles de Huet lors des matchs 4 et 5, la facture aurait été beaucoup plus salée. Non, Fribourg-Gottéron doit, dès aujourd’hui, tirer les enseignements de cet échec pour commencer à préparer une équipe, une mentalité et un style de jeu qui leur permettront de briller non seulement pendant la saison régulière à venir, mais pendant les play-offs 2013.

Et la finale ? Elle s’annonce passionnante car ce qui a été dit dans cet article sur les Bernois s’applique d’autant plus aux Zurich Lions, 7ème de la saison régulière, mais qui n’ont perdu aucun match lors des séries contre Davos (2ème) et Zoug (1er). De manière inespérée et pour la première fois des séries, le SCB aura cependant l’avantage de la glace. Cette finale entre le club de la plus grande ville du pays et celui de la capitale – sauf erreur et de manière surprenante inédite depuis l’introduction des play-offs il y a 25 ans – sera ainsi un clash entre deux équipes au sommet de leur forme au moment le plus important de l’année.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Écrit par Andy Tschander

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5 Commentaires

  1. Surtout on a vu à quel point la défense de FR était légère sur la glace…comme sur le papier !

    Ceux qui disaient qu’ils étaient solides derrières ne doivent pas voir les mêmes joueurs que moi.

    Loeffel : Ok
    Heins : lent (depuis bien longtemps)
    Ngoy : lent et brouillon
    Birbaum : petit, stupide et dangereux avec le puck
    Barinka : Ok
    Collenberg : travailleur mais relance limites
    Abplanalp : mouais…un bon plombier mais limité techniquement…

    Bref, pas de quoi inquiéter une équipe comme Davos, Zürich, Berne ou Zoug sur une série de 7 MATCHS !

  2. Bon article qui dit des choses très justes. Mais ………. où est le 2e degré CR ? Je préfèrerais lire ce genre d’article dans La Liberté ou sur Le Matin (je sais, j’en demande peut-être trop), mais je m’attendais à un peu plus de piques contre Gottéron.

    See you in september.

  3. Bon article et très bonne analyse du hockey et de la tactique de jeu employée par les deux équipes. Avec de l’histoire en plus pour nous mettre les choses en perspectives, c’est excellent ! A voir si le SCB arrivera a rompre la discipline défensive des ZSC. Espérons que les Ours mangeront du Lion !

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