Voir Helsinki et mourir

La Suisse n’ira donc pas en quart de finale des Championnats du monde de hockey sur glace 2012. Les joueurs et l’entraîneur se sont complètement plantés et aucune excuse ne sera accordée à ceux dont l’histoire retiendra qu’ils ont été battus pas la France. Il ne nous reste donc plus que nos bouches pour râler. Et ça tombe bien, puisque c’est encore ce que CartonRouge.ch fait de mieux. Petit bilan à chaud d’une compétition ratée.

Et dire que la non-qualification n’est même pas ce qui est le plus décevant dans cette sordide histoire ! Il faudrait en effet être bien prétentieux pour s’offusquer de terminer un tournoi derrière des nations comme le Canada, les Etats-Unis, la Finlande et la Slovaquie, toutes intrinsèquement supérieures à notre équipe nationale, aussi talentueuse que sa cuvée 2012 puisse être. Contrairement à ce que la presse romande a laissé entendre dernièrement plus souvent qu’à son tour, finir à l’une des quatre premières places de ce groupe H n’aurait pas constitué «la moindre des choses», mais bien une performance remarquable. Néanmoins, l’excellente mais vaine résistance de notre Nati contre le champion du monde finlandais, puis surtout contre un Canada composé quasi entièrement de joueurs évoluant dans la Ligue nationale, laissait supposer qu’une participation aux quarts de finale n’était en aucun cas un objectif utopique. Malheureusement, les promesses nées de ces belles prestations ont été tuées dans l’œuf par une défaite inadmissible contre la France, l’ennemi honni. Une nouvelle fois, l’impression prédomine que notre équipe nationale a causé sa propre perte en s’avérant incapable d’assumer son statut de favori.Tout n’a pourtant pas été à jeter durant ce tournoi. La Suisse a impressionné en faisant jeu égal avec des grandes nations du hockey, enchaînant des mouvements de jeu magnifiques dans des situations de pression adverse intense. Le duo Damien Brunner – Kevin Romy s’est notamment distingué à plus d’un titre : l’incroyable passe du patin de ce dernier pour son compère à un moment crucial du match contre la Finlande aurait pu changer la destinée de l’équipe nationale si le meilleur joueur de notre championnat avait gagné son face-à-face avec Kari Lehtonen. A l’image de cette action rondement menée, c’est finalement la capacité de conclure qui aura fait défaut à nos attaquants. Encore et toujours la même rengaine.

(La plupart des) attaquants à la rue

Mais est-ce finalement si surprenant que cela ? L’entraîneur Sean Simpson a sélectionné et conféré de grandes responsabilités offensives à des joueurs en manque total de réussite. Prenons par exemple la fameuse «Ligne NHL» (© RTS) composée de Nino Niederreiter, Andres Ambühl et Roman Wick. Séduisante durant les derniers matches de préparation, elle est passée complètement à travers les vraies échéances, au point que le jeune attaquant des New York Islanders a fini le tournoi rétrogradé dans la checking-line. Cette ligne besogneuse est habituellement vouée à effectuer des tâches défensives, à l’image de celle dans laquelle il a évolué durant toute la saison avec son équipe de NHL et avec qui il a inscrit un seul misérable point pour un +/- de -29. Pas vraiment le profil du sauveur. De son côté, Wick sort d’une saison moyenne et n’a pas su être décisif en play-off avec Kloten. Quant à Ambühl, son excellente forme durant les séries a mené son équipe au titre mais n’a manifestement pas suffi à galvaniser ses coéquipiers.
Et pour le reste ? Ça ne casse pas non plus des briques. Malgré son étiquette de buteur, Matthias Bieber n’a trouvé que neuf fois le chemin des filets cette année, Trachsler, avant tout un joueur à vocation défensive, n’a dans sa carrière jamais passé la barre des 10 buts sur une saison, Rüthemann a disputé son moins bon championnat depuis des lustres et Benjamin Plüss est un néophyte isolé de ses coéquipiers fribourgeois blessés. Même si on est toujours plus intelligent après, le choix de Simpson de se passer de jeunes prometteurs tels que les Bernois en pleine bourre que sont Pascal Berger et Joel Vermin, de l’excellent Davosien Gregory Sciaroni, de la révélation zurichoise Luca Cunti, voire du toujours efficace Daniel Steiner peuvent laisser perplexe. De même, on regrettera la sous-utilisation de Thibaut Monnet, pourtant décisif à plus d’un titre dans le sacre des ZSC Lions. Au final, les seules satisfactions offensives seront venues de joueurs ayant fait une très bonne saison en club : Damien Brunner, Kevin Romy, Simon Moser, et le jeune Denis Hollenstein, pétri de talent et de culot et pourtant à deux doigts d’être renvoyé au pays par l’entraîneur canadien lors du dernier cut de sélection.

(Toute) la défense à la rue

Après les malheurs offensifs, le marasme défensif. La seconde grosse contre-performance de la sélection nationale réside bien sûr dans le comportement de ses défenseurs, dont pas un seul ne sera sorti du lot au sens positif du terme. Evidemment, la déception est d’autant plus forte que les renforts de NHL que sont Mark Streit, Luca Sbisa et Roman Josi étaient attendus au tournant. Le premier nommé n’a pas su faire parler ses indéniables qualités offensives et d’organisation du jeu alors que le second est passé complètement à côté de son tournoi, multipliant les errements et les pénalités stupides. Quant au troisième, son arrivée tardive aura surtout profité à Tatar, le bien mal nommé attaquant slovaque. Sans vouloir accabler ce pauvre Josi, était-ce vraiment un cadeau de la part de Sean Simpson de lui demander de rejoindre un groupe au terme d’une saison harassante, la première pour lui à un tel niveau ? A part casser la dynamique du groupe et contraindre Mathias Seger à jouer aux attaquants pour faire le nombre, le choix de Simpson n’aura servi absolument à rien puisqu’il apparaît comme évident que le problème de nos défenseurs était plus d’ordre organisationnel que causé par un déficit de joueurs talentueux. En effet, en dépit d’un excellent match contre le Canada, l’arrière-garde helvétique a été à la ramasse avec une régularité remarquable, le sommet du ridicule ayant été atteint lors du match contre la France lorsqu’elle a trouvé le moyen de céder trois fois en infériorité numérique. Que reste-t-il de cette remarquable organisation défensive qui avait assuré les succès de la Nati sous la houlette de Ralph Krueger ?

La faute à Simpson ?

En manquant pour la seconde année consécutive les quarts de finale des Championnats du monde, Sean Simpson est en train d’échouer dans ses fonctions à la tête de l’équipe de Suisse. Ce constat est très embêtant, car voir jouer la sélection nationale n’a jamais été aussi intéressant que depuis l’arrivée de l’ancien coach des ZSC Lions. En alignant les performances de choix – certes pas toujours ponctuées d’une victoire – contre des cadors du hockey mondial, la Suisse semble avoir bien progressé par rapport à l’époque de Krueger où elle construisait ses exploits autour d’un jeu de contre-attaques basé exclusivement sur la défense et l’espoir d’un grand match de son gardien. Et pourtant, quel est le sens de faire jeu égal avec des stars de la NHL si c’est pour ensuite devoir courber l’échine devant la France ? A une époque où le hockey helvétique semble ne jamais s’être aussi bien porté et où de plus en plus de ses joueurs font le choix de traverser l’Atlantique pour tenter leur chance au plus haut niveau, notre sélection nationale se complaît dans le ventre mou des nations du hockey, laissant des sélections traditionnellement jugées plus faibles comme la France, la Norvège, l’Allemagne ou la Lettonie menacer dangereusement sa position dans la hiérarchie mondiale. Le hockey suisse ne peut pas se permettre de se reposer sur des lauriers tressés à la va-vite. Malgré tous ses progrès, la Suisse n’est désormais plus la seule nation désireuse de s’approcher du top-7. Elle doit se remettre en question, et vite.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

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16 Commentaires

  1. Joli papier. Sérieux mais critique, pas mal…

    Ce qui a été peu dit je trouve c’est que la performance suisse s’est brisée en même temps que les 3 ligaments de Moser. Sa ligne tournait à plein régime. Bon même si c’était contre le Kazakhstan et la Biélorussie…

    Mais si on avait pu bénéficier de cette vraie ligne de parade durant tous les matchs, nul doute que le match de mardi ne serait pas qu’un match comptant pour 2014…

  2. Très bonne analyse.

    La question qu’il faut se poser pour l’avenir: ne faut-il pas pratiquer un système de jeu plus défensif pour obtenir de meilleurs résultats ? La clé par le passé c’était d’avoir un super bloc qui plante (ici on l’avait au début avec Romy – Moser – Brunner) et qui marque sur les PP. Et les autres lignes doivent verrouiller, comme ZSC ou SCB en PO. Il faut aussi que les suisses montent en puissance durant un tournoi, au lieu de s’étioler.
    Et faut pas oublier que si le tir de Monnet rentre au lieu de toucher la latte juste avant la pen de Bezina, la Suisse ne ferait pas déjà ses valises

  3. c’est le pompom de se demander s’il ne faudrait pas jouer plus défensif quand la plupart des gens dégueulaient dans le dos du père Krüger précisément pour cette raison…bref…
    Pour le reste, bonne analyse. La Norvège, outre la 12 buts contre les teutons, ont eux de vrais talents offensifs avec des gars comme Thoresen ou Skroder. Et en plus de bien s’en tirer contre les grandes équipes, ils gagnent ce qu’ils doivent gagner (Italie, Lettonie, Allemagne)… De quoi se faire pas mal de souci pour la fameuse place de 8ème nation au monde

  4. éternelles excuses … on a l’habitude .
    le hockey suisse( championnat) n’existe que grâce aux étrangers qui marquent la plupart des buts.
    Bezina aurait pu et dû éviter le choc , il ne l’a pas fait , il y avait donc bien intention de faire mal…

  5. @EDLT

    Ca s’appelle un open ice hit…va regarder le 90% des charges de Phaneuf et tu me diras combien ont été sanctionnées…le fait qu’il décolle les patins est dû au choc, le reste il laisse les bras le long du corps…keep your head up…voilà ce que les commentateurs nord-américains auraient dit…

  6. Faut arrêter les commentaires à la Viola sur Streit.. 22min par match, doit déjà essaier de tenir derrière avant d’avoir plus d’apport offensif.. Faut pas croire que le gars y va se promener et gagner des matchs à lui seul. Pis avant lui y en a d’autres chargé d’animer l’offensive…vous allez me dire ouais mais aux isles y fait 48 points, etc.. masi dans chaque equipe situation/rôle différent. Pis y fais au mieux y doit aussi arriver sec..Si on attends tout d’un (ou 3) joueurs c’est une erreur.

  7. Sympa l’article… On critique par ci, on critique par là… Des noms sont cités (Streit, Josi, Brunner et compagnie), avec la critique qui va avec ! (et même les excuses en passant)

    Mais comment écrire un résumé du parcours de la Suisse aux mondiaux en oubliant de parler de Bezina ?

    Ce mec a une responsabilité ENORME dans la débâcle… (Finlande, France…)

    Hein? On me fait signe que CR va sortir un article rien que pour lui ? Ha? Ben ok alors.. j’attends de voir…

    Non mais sérieux? Faut arrêter de faire dans la demi-mesure et clairement nommer le ou les responsables…

    (ouai ouai, je sais, j’suis par impartial, j’aime pas le GSHC et Bezina et voilà… n’empêche qu’il a bien merdé le Berezina)

  8. Ptain, pour mettre la faute de la débacle de ces championnats du monde sur un seul mec comme tu le fais, soit tu comprends rien au hockey, soit tu n’as vu aucun match pour ne pas voir la prestation des 20 autres joueurs, soit tu t’es fait sodomisé par Bezina. J’aime pas le GSHC ni Bezina, mais il a été à l’image de cette équipe entière. La défaite contre la slovaquie c’était sa faute? Son +/- est à +1, contrairement à celui de Sbisa et Nino qui est à -5. La défense a été très moyenne, pourtant quand on voit les noms, ce sont les meilleurs défenseurs de suisse et ailleurs…Y a pas mieux en défense que ces 9 là. Ca manque de mordant, de gniak, les mecs s’arrachent pas, ils sont suffisants contre les nations moins bien classées que la notre. Le boxplay est nul à chier. Les goalies n’ont pas sorti des super match(à part Stephan contre le canada). Des mecs comme Pluess en Nati sont inutiles sans ses 2 copines fribourgeoises fragiles. Wick, Bieber et Nino ont été constant dans la médiocrité. Seul Brunner et Romy sortent la tète de l’eau.

  9. @virez machin qu’y disaient là…

    J’ai nommé Bezina parce qu’il porte le poids de beaucoup de chose sur l’élimination. J’ai aussi écrit « les responsables », mais comme tu dis, j’y connais rien au hockey… Sean Simpson en a pour sa part, les perles de la NHL aussi (nino a juste prouver qu’il pouvait gratter des pucks dans la bande, mais niveau compteur c’est zéro), mais bon, j’y connais rien au hockey. Les blessures de Sprunger et Bykov (un peu avant) aussi ont porté sur l’élimination, mais bien sur…

    Quand Messi rate un pénalty en demi-final de la ligue du pognon, l’élimination elle est pour lui, et il le sait. Il a bien joué, donné de bons ballons, etc. Mais ce pénalty, il doit être au fond, c’est tout. Lui même en est conscient.

    Donc Bezina a peut être bien joué, peut être fait de bonnes passes, etc, mais n’empêche que les deux « fautes », il ne doit pas les faire, et il le sait, il en est conscient.

    Mais bon, j’y connais rien au hockey…

    Allez, à l’année prochaine, je vais tâcher de comprendre les règles comme ça j’aurais l’air moins con sur ce forum ou je donne mon avis et je me fais incendier… mais bon, j’y connais rien au hockey…

  10. « Les 2 fautes il ne doit pas les faire »…MDR! Je vais éviter de te demander d’analyser ses 2 fautes, leur sévérité, la responsabilité et la position de chaque acteur(arbitre, et les 2 fautifs), si ses 2 fautes là sont siffléés à chaque fois ou pas etc etc etc…On va en rester là hein…Change surtout pas, j’ai bien ri, et je suis impatient d’être à l’année prochaine pour lire tes analyses. 😀

  11. @ Bof

    J’adore ton français! As-tu arrêté l’école après 3 ans seulement?

    Et effectivement, tu ne connais rien au hockey. Le simple fait de faire porter le chapeau à un joueur dans la débacle d’une équipe montre bien ton niveau de connaissance du sport.
    Si le Barça ne passe pas, c’est pas le péno de Messi, c’est avant tout une équipe à bout de souffle, une fatalité et un manque de réussite, qui est refleté par le manqué de Messi.
    Bezina est un c**, on le sait (désolé je suis pour Fribourg ;-), mais de là à le descendre pour une faute quasi inexistante….

    Enfin bref, t’es rigolo, alors reviens l’an prochain! Je rejoins « Fallait virer Krueger… »…..CHANGE PAS

  12. Aujourd’hui on est un peu tous Lausannois…en effet, que de points commun entre l’équipe de Suisse et le LHC…de grandes ambitions, on fait miroiter monts et merveilles aux supporters…et soudain on se réveille un peu cocu. Notre belle équipe à gagner s’est prise les patins dans la carpette d’une petite équipe avec un coeur gros comme ça. Bravo!!!
    Aller quoi, c’est CR, du second degré, mais aujourd’hui je ressens ce qu’un LHC fan endure depuis si longtemps…

  13. Pour moi, la plus grande erreur de ces Mondiaux aura été de garder une place pour Josi. Pas qu’il ne la mérite pas, mais quand, en cours de championnat, vous perdez 2 attaquants (Moser et Rubin) et que vous avez Liniger disponible, vous n’allez pas chercher un défenseur, même s’il vient de NHL. Surtout que ce pauvre Josi devait être bien fatigué après sa saison.

    Si on est toujours plus intelligent après, je m’étonne que chaque année, on laisse de côté des joueurs en forme et qui sont des finisseurs (P. Baertschi, 9 buts en 17 matchs de PO – Stancescu, 23 goals) pour sélectionner des Hollenstein (0 buts cette saison !!) ou Bieber (9 goals en 50 matchs) alors qu’on sait que le gros problème de cette équipe a toujours été la concrétisation.

    Bref, les joueurs ont leur (très grosse) part de responsabilité, mais Simpson aussi. Il est également temps maintenant d’arrêter avec ces joueurs qui ont plus de 200 sélections etqui n’amènent plus grand chose à l’équipe nationale. Il est temps de repartir de zéro, comme avait su le faire R. Krueger lors de son intronisation.

  14. Et si on acceptait une fois pour toute que la Suisse est vraiment une nation moyenne voire moins que ca?En tout cas au niveau des championnats du monde ou JO.Ils ont atteint quoi de bien ces 20 dernières années?Une demi-finale sur 20 ans non?Malheureusement la Suisse ne sera probablement jamais championne du monde ou d’europe que ce soit en hockey .en football ou en basket,volley,handball.Comme nous n’aurons jamais un Suisse blanc qui fasse 9.60 sur 100 mètres….Il ne faut jamais dire jamais,un exploit monumentale,un miracle est toujours possible mais ca ne serait qu’un fait extraordinaire dans l’histoire du sport!Ils faudrait que tellement de paramètres soient différents afin que nous puissions atteindre les sommets!C’est déja super d’etre dans le top 20 de la FIFA et le top 10 de l’IIHF mais pour un proche avenir ca ne suffira jamais afin d’etre sacré!soyons réalistes et humbles:-)

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