Les taquins de Pâques

Cela fait de longs mois que l’on a compris que le Borussia Dortmund allait perdre son Meisterschale au profit du Bayern Munich. Mais, en s’imposant à Stuttgart au terme d’un match intense, les Bubis de Jürgen Klopp auront au moins eu la satisfaction d’empêcher le Rekordmeister de célébrer son titre à domicile en ce week-end pascal (ricanement sardonique). On se console comme on peut.

Neckarstadion, dimanche 29 août 2010 : c’est sans grande conviction que je me rends à ce Stuttgart – Dortmund comptant pour la deuxième journée de la Bundesliga. Les quelques bouteilles de vodka de la veille au Cocoon Club d’Offenbach ne sont pas encore tout à fait digérées et la saison qui débute ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices pour le BVB, auquel la plupart des observateurs promettent une place entre la 5e et la 8e. Le premier match, une défaite 0-2 à domicile contre Leverkusen, semblait corroborer ces augures négatifs. Mais, en ce dimanche d’août, le Borussia, emmené par un gamin de 18 ans que l’on commençait à peine à découvrir, Mario Götze, s’impose 3-1 en terres souabes et, on ne le savait pas encore ce jour-là, lance une marche en avant qui débouchera sur deux titres de champion et une Coupe d’Allemagne. Hasard du calendrier, c’est dans ce même stade où la renaissance du Borussia Dortmund s’était amorcée que le règne jaune et noir sur le Bundesliga pouvait se terminer (provisoirement) puisque tout autre résultat qu’une victoire dortmundoise samedi aurait permis au Bayern Munich de devenir officiellement champion d’Allemagne en battant Hambourg quelques heures plus tard. Ironie du sort, depuis cette victoire à Stuttgart initiant son règne, le BVB a tout balayé sur son passage en Allemagne sauf… le VfB Stuttgart puisque les quatre duels suivants entre les deux clubs se sont soldés par autant de matchs nuls (1-1, 1-1, 4-4, 0-0).

Ein, zwei, drei (Biere) Polizei !

Un match au Neckarstadion, cela débute toujours par une visite à la police. Ce n’est pas qu’on a joué les hooligans et finit en cellule mais le Biergarten derrière le Gästeblock est tenu par l’association sportive de la maréchaussée. Laquelle sert abondamment la Stuttgarter Hofbraü aux fans des deux camps, le tout dans des choppes en verre bien sûr, histoire de fournir des projectiles en cas d’échauffourées entre fans ivres. Définitivement, on préfère les flics de Stuttgart à ceux qui sévissent à la Pontaise. Et le taux d’alcoolémie maximum autorisé pour pénétrer au Neckarstadion est d’un virgule quatre pour mille, je devais être dans la norme. En arrivant au stade du moins…
Le VfB Stuttgart connaît une saison plutôt médiocre. En fait, le seul truc qu’ont vraiment réussi les Souabes cette saison, ce sont les tirages au sort : en Europa League, le VfB a profité d’adversaires plutôt modestes pour se hisser en huitième de finale où il a sombré lamentablement contre son premier contradicteur un tant soit peu consistant, la Lazio Roma. En Coupe d’Allemagne, le sort a également été clément avec Stuttgart qui accède en demi-finale juste en ayant battu une équipe amateur et trois formations de Zweite Liga à domicile (St. Pauli, Köln et Bochum). Avec en plus la chance de recevoir le SC Freiburg pour une demi-finale sur laquelle les Souabes vont jouer une bonne partie de leur saison et de leurs chances d’être européens la saison prochaine car, en championnat, ils n’ont plus grand-chose à espérer.

Le fin nez de Jürgen Klopp

Malgré une kyrielle de blessés, le VfB entendait bien se réconcilier avec son public en créant l’exploit contre le champion en titre. Niedermeier et Traoré se créent les premières occasions mais se heurtent à Weidenfeller alors qu’en face c’est Reus qui échoue à deux reprises devant Ulreich. Jürgen Klopp avait un peu fait tourner son effectif en prévision du match de Ligue des Champions à Malaga, laissant notamment Lukasz Piszcek sur le banc. Mais la sortie de Marcel Schmelzer, nez fracturé sur un pied levé d’Harnik, va contraindre le Polonais à faire son entrée. Involontairement, Kloppo a donc eu le fin nez car c’est justement Lukasz  Piszczek qui va ouvrir le score en déviant de la tête un coup franc de Marco Reus. Après avoir manqué le but du break sur des essais contrés de Lewandowski et Sahin, le BVB va subir la pression adverse : Götze sauve sur sa ligne devant Gentner et Traoré mais cela ne faisait que retarder une égalisation que l’on sentait arriver. Et qui va finir par tomber sur une frappe du nouveau renfort roumain du VfB Alexandru Maxim. A ce moment-là, on n’en menait pas large et on voyait déjà le Bayern Munich officialiser son Meisterschale quelques heures plus tard.

Lewandowski évidemment

Mais l’expulsion justifiée de Niedermeier va changer la donne. A onze contre dix et dans une ambiance un peu houleuse, le BVB va faire le forcing pour arracher cette victoire qui nous permettra de chanter une dernière fois « Deutscher Meister steh auf » samedi prochain au Westfalenstadion contre Augsburg. Toutefois, lorsqu’Ulreich sauve devant Piszczek et Subotic, on commence presque à désespérer. Mais c’était oublier qu’en ce moment, il y a dans le football un truc encore plus rare qu’un club anglais en quart de finale de Ligue des Champions : une rencontre du Borussia Dortmund sans but de Robert Lewandowski. Le Polonais a enchaîné son neuvième match consécutif en marquant au moins au but en convertissant un caviar de son compère providentiel Lukasz Piszczek. On allait en rester là. Du coup, le Bayern Munich, malgré le carton réussi contre Hambourg, n’a pas pu célébrer officiellement le titre devant son public avec la perspective du lundi de Pâques pour se remettre, il va probablement devoir le fêter samedi prochain dans un anonymat relatif à Francfort. C’est plutôt mesquin comme réflexion et, au final, ça ne changera rien à l’issue de ce championnat mais cela nous fait quand même bien plaisir d’avoir un peu gâché la fête du Bayern. Nous, au moins, avec le BVB, on avait eu le bonheur d’assurer mathématiquement les titres 2011 et 2012 un samedi à domicile…  

Et maintenant Malaga

Accessoirement, cette victoire bétonne un peu plus la deuxième place du classement et la qualification pour la prochaine Ligue des Champions. Le BVB va donc pouvoir consacrer toute son énergie sur l’édition actuelle de la Coupe aux grandes oreilles et sur le quart de finale contre Malaga. Si ce tirage au sort est généralement considéré comme plutôt favorable, il a un inconvénient : la faible capacité du stade de la Rosaleda. Comme l’UEFA ne garantit que 5% du stade aux supporters visiteurs, les Andalous n’ont envoyé que 1500 malheureux billets au Borussia Dortmund, une misère pour le club le plus populaire du monde. Les dirigeants dortmundois ont décidé de réserver ces précieux sésames aux fidèles qui ont accompagné leur club à Donetsk mais le problème c’est que l’on était plus que 1’500 en Ukraine. C’est donc avec un certain soulagement que j’ai découvert, dans la camionnette du BVB stationnée devant le Neckarstadion, qu’il y avait une enveloppe à mon nom avec dedans un ticket que je n’ai même pas encore payé pour le Gästeblock à Malaga. Où j’aurai la lourde tâche d’être le seul représentant du Confoederatio Helvetica Borussia Fanclub, c’est flippant toutes ces responsabilités. Mais je ne vais pas me plaindre : avec une victoire, un billet récupéré pour Malaga et quelques Jägermeister ramenés à mon rédacteur en chef, ce voyage sur les bords du Neckar a été plutôt fructueux.

VfB Stuttgart – Borussia Dortmund 1-2 (0-1)

Mercedes-Benz Arena, 60’000 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Aytekin.
Buts : 29e  Piszczek (0-1), 63e Maxim (1-1), 82e Lewandowski (1-2).
Stuttgart : Ulreich; Rüdiger, Lopes, Niedermeier, Sakai; Gentner, Boka (89e Macheda); Harnik, Maxim (73e Röcker), Traoré; Ibisevic.
Dortmund : Weidenfeller; Grosskreutz, Subotic, Santana, Schmelzer (24e Piszckek); Bender, Sahin; Götze (83e Schieber), Gündogan (60e Leitner), Reus;  Lewandowski.
Cartons jaunes : 23e Harnik, 33e Niedermeier, 70e Götze, 81e Boka, 84e Grosskreutz.
Carton rouge : 69e Niedermeier.
Notes : Stuttgart sans Kvist, Molinaro (suspendus), Tasci (malade), Bah, Didavi, Cacau, Okazaki ni Torun (blessés). Dortmund sans Owomoyela, Hummels ni Blaszczykowski (blessés).

Écrit par Julien Mouquin

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