Certains ont évité la sortie de piste, d’autres pas…

Ce mois, nous te proposons un duel football – Formule 1 arbitré par un représentant du monde de la petite balle jaune, également à l’aise en boxe. Entre un dirigeant en proie au fisc, The Special One, un as du coup de coude, un défenseur aux pieds carrés, un cogneur australien et deux coéquipiers qui s’aiment autant que Fillon et Copé, la lutte promet d’être serrée. A qui le volatile doré ? Tu as jusqu’au dimanche 2 juin à minuit pour te décider !

Uli Hoeness

Uli Hoeness dans le So Foot du mois d’avril : «J’espère qu’un jour un grand se fera attraper. Et le plus tôt sera le mieux». Il aura été exaucé mais pas forcément dans le sens souhaité : le président du Bayern Munich faisait allusion au fair-play financier et aux grands clubs européens endettés et/ou exclusivement dépendants d’un mécène étranger mais, finalement, le premier à tomber, ce ne sera pas un grand mais plutôt un gros : lui-même, non pas en raison du fair-play financier mais pour fraude fiscale, en raison d’un compte en Suisse non déclaré avec lequel il boursicotait frénétiquement. En soi, dissimuler une partie de sa fortune à un fisc trop gourmand sur les hauts revenus en Allemagne n’est pas si blâmable que cela et a souvent fait l’objet d’une certaine compréhension auprès du public. Le problème, c’est qu’ici le fraudeur donne des leçons de morale et d’éthique au monde entier depuis trente ans, alors forcément ça passe mal.
Avec son arrogance habituelle, Uli Hoeness a espéré s’en tirer avec quelques vagues excuses et regrets pseudo contrits, tout en créant une diversion avec l’annonce prématurée du transfert de Mario Götze. Mais la manœuvre a échoué : à part quelques fans du Bayern Munich égarés (pléonasme) qui soutiennent aveuglément les moindres faits et gestes de leur président, les condamnations et appels à la démission pleuvent, en particulier dans la classe politique. Les capitaines de la grande industrie allemande qui composent le directoire du Rekordmeister ont promis de se pencher sur le cas Hoeness dès la saison terminée. Et il n’est pas impossible que le verdict soit défavorable à celui qui a toujours considéré que «le Bayern Munich, c’est moi». Cruel, au moment même où sa gestion exemplaire du club bavarois est consacrée tant sur le plan sportif qu’économique. Ou comment expérimenter l’expression la Roche Tarpéienne est proche du Capitole, juste pour s’être montré un peu trop gourmand. Tu me diras, normal pour un marchand de saucisses.  

Leonardo

Le PSG de Leonardo a atteint ses deux principaux objectifs cette saison : gagner le titre de champion et faire bonne figure en C1. Même si une coupe nationale aurait été la bienvenue dans l’armoire à trophées, la saison peut être considérée comme pleinement réussie par les milliardaires qataris. Malgré tout, le club de la capitale n’a pas séduit les foules et possède une bien triste étiquette : celle de l’équipe la moins fair-play du championnat. Leonardo n’est évidemment pas sur la pelouse à récolter des cartons, provoquer des bagarres et faire des high-kicks, il n’empêche que son comportement agressif hors du terrain porte largement à controverse. Nul doute que le Brésilien n’est pas le genre de personne à calmer un vestiaire, malgré sa large expérience internationale.
Tantôt à se plaindre des arbitres et d’un complot anti-PSG, tantôt à dénigrer le championnat de France et les adversaires du Grand Paris, Leonardo a réussi à se faire haïr par l’ensemble de la Ligue 1 en moins de temps qu’il ne faut à 100 racailles pour gâcher une fête sur la place du Trocadéro. Accessoirement, le vainqueur de la Coupe du Monde 1994 a ravi à Jean-Michel Aulas le titre de personnage le plus antipathique du football français, si tant est que Joey Barton est hors-concours. Son dernier coup d’éclat est indigne d’un directeur sportif : un coup d’épaule à l’arbitre Alexandre Castro après le match PSG – Valenciennes, durant lequel ce dernier a eu l’outrecuidance d’expulser la star Thiago Silva. Ce geste inadmissible, filmé en direct par les caméras de Canal+, lui vaudra assurément une lourde suspension. Espérons même qu’elle soit carrément d’un an, histoire qu’on n’entende plus les paranoïas et les théories à deux balles du Brésilien qui est parfaitement à l’image de son club : riche et arrogant. Et carrément détestable. 

José Mourinho

Ainsi donc, José Mourinho quittera le Real Madrid sans avoir rempli l’objectif pour lequel il avait été engagé : gagner la dixième Coupe/Ligue des Champions de l’histoire du club. Certes, le bilan du Portugais à Bernabeu n’est pas complètement négatif. Avec un titre et une voire deux Coupe du Roi en trois ans, il aura fait vaciller la suprématie nationale du FC Barcelone, surtout que les duels entre les deux mastodontes ont de plus en plus souvent tournés en faveur des Merengue. En Ligue des Champions, le Special One aura ramené dans le dernier carré un club qui ne passait plus les huitièmes de finale avant son arrivée. Mais il aura toujours buté sur l’avant-dernière marche avant l’objectif suprême, cette Decima qui aurait fait entrer aussi bien le Real que Mourinho dans la légende. Et si le Portugais peut faire valoir des circonstances atténuantes (notamment l’arbitrage) pour l’échec de 2011 face à Barcelone, les éliminations contre un Bayern à bout de souffle en 2012 et contre un Dortmund beaucoup moins expérimenté et au budget nettement inférieur en 2013 lui sont largement imputables.
Si l’entraîneur Mourinho ne laissera pas un souvenir impérissable à la Maison Blanche, l’homme lui s’en ira sur une impression carrément exécrable. Le Special One s’est complaît dans le rôle du seul contre tous : seul contre les adversaires, seul contre les arbitres, seul contre les dirigeants, seul contre les supporters et seul contre ses propres joueurs. S’il s’est aliéné depuis longtemps les cadres du vestiaire comme Casillas ou Ramos, le Portugais semble même s’être attiré les foudres de son compatriote Cristiano Ronaldo. José Mourihno espérait quitter Madrid en héros après une victoire en Ligue des Champions en forme de pied de nez, histoire de démontrer au monde qu’il pouvait gagner dans l’hostilité ambiante et avoir raison seul contre tous. Son nouvel échec en demi-finale le contraint au contraire à une sortie par la toute petite porte. 

Ibrahim Tall

L’agonisant Lausanne-Sport se devait d’avoir un représentant dans cette brochette des Pigeons. En l’occurrence, c’est Ibrahim Tall qui paie pour les autres, même si des joueurs comme Moussilou, Chakhsi ou autre Facchinetti n’auraient pas fait tache dans cette sélection, sans oublier l’entraîneur Laurent Roussey dont les choix et le recrutement sont plus que discutables. A l’image du reste de l’équipe, l’ex-joueur de Heart of Midlothian a touché le fond ces dernières semaines et n’a affiché que nullité, maladresse et manque de révolte. Une faute professionnelle couplée à un magnifique je-m’en-foutisme.
Plus faible équipe (et de loin) du second tour avec le total rachitique de 6 points, le LS a sombré corps et âme ce printemps. La responsabilité du Franco-Sénégalais dans cette débâcle est immense, notamment lors des naufrages contre Thoune, Young Boys et Sion où le «défenseur» aura signé un triste record en provoquant 3 penalties. A chaque fois, la faute est stupide, commise en première période et a anéanti les maigres espoirs des joueurs des Plaines-du-Loup. Les trois équipes précitées en rigolent encore ; Servette aussi…
En un mot comme en mille, Tall est le symbole de ce Lausanne-Sport sans envie ni volonté, se dirigeant tout droit dans le mur. C’est à se demander pourquoi Laurent Roussey a autant fait confiance à ce joueur qui est tout sauf un guerrier. Une question qui restera probablement sans réponse, comme celle de savoir ce qui est arrivé au LS séduisant de l’automne 2012…

John Tomic

Damir Dokic, Stefano Capriati, Jim Pierce, Youri Sharapov ; la liste des pères psychopathes qui gangrénaient – et gangrènemt encore – le monde du tennis féminin est longue. Le tennis féminin qui, en plus d’être grotesque, a mis un temps fou à cerner les problèmes causés par ces dangereux paternels vivant par procuration. Obnubilés par la gloire soudaine et l’évolution exponentielle du compte en banque de leur progéniture, ces psychopathes avaient contribué à inplanter une notion qui semblait être incompatible avec le tennis : la violence sous toutes ses formes.
Désormais, la WTA n’a plus le monopole des abrutis géniteurs. Sans doute frustré de ne pas voir poindre l’explosion – comprenez le retour sur investissement – de son prodige de fils, John Tomic n’a rien trouvé de mieux à faire que de fracasser le pif du sparring-partner du fiston le 4 mai dernier. Jusque-là, tout est normal. Seulement voila, le sanguin Australien a osé plaider la légitime défense. «Je ne me sens pas coupable, je n’ai rien fait de mal» a vociféré John Tomic. Evidemment. Thomas Drouet marchait bien tranquillement dans la rue lorsqu’il a délibérément foncé contre un poteau placé en plein milieu du trottoir. Perdre lamentablement au 1er tour contre le vétéran tchèque Stepanek n’est pas très brillant et nous pouvons aisément comprendre l’ire du père. De là à s’en prendre physiquement au partenaire d’entraînement de sa marmaille, le précédent est dangereux en plus d’être résolument con. En attendant son procès ainsi qu’interdiction d’accréditation à vie, il serait bienvenu d’accorder un titre pigeonnissime à John Tomic, le seul qu’il ne pourra jamais remporter.

Sebastian Vettel

En dépit de la débilité sans limites de cette activité pétrolière surmédiatisée, il est toujours aussi stupéfiant de voir à quel point la Formule 1 génère de l’intérêt – du moins chez la frange la moins instruite de la population. Alors que dans toute épreuve sportive chaque tricherie ou arrangement effectué est sanctionné de la manière la plus efficace possible, il n’en est rien dans le cas de cette vaste farce.
En Formule 1, les directeurs d’écuries peuvent choisir à leur guise leur vainqueur au gré de leurs propres intérêts en influant directement sur le déroulement de la course, et ce sans susciter le moindre scandale. Dans cette discipline où l’éthique, le fair-play et la logique sportive ont été balancés depuis belle lurette aux chiottes, une nouvelle démonstration a été faite lors du Grand Prix de Malaisie : afin d’assurer le doublé, les pontes de l’écurie Red Bull ont imposé à leurs pantins sur roulettes de ne tenter sous aucun prétexte le moindre dépassement. Partant du principe que les sacrosaintes consignes priment sur tout le reste, le récalcitrant Vettel a snobé les ordres avant d’être à deux doigts d’envoyer son tacot ainsi que celui de son coéquipier Webber dans les décors.
Le débat stérile pour déterminer les responsabilités entre un Webber se réfugiant sous des consignes et un Vettel coupable de les avoir ignorées reste ouvert. Cela dit, en zappant délibérément la volonté de ses intouchables patrons, l’Allemand a failli faire coup double en vertu d’un dépassement téméraire mais prohibé, risquant donc un zéro pointé pour son écurie. En F1, on ne badine pas avec les décideurs et Sebastian Vettel pourra toujours se consoler avec un volatile doré, une récompense qui, elle, se gagne à la régulière.

Mark Webber

Officiellement, les consignes d’équipe sont interdites en Formule 1 et l’écurie Red Bull s’est toujours insurgée contre les directives que Ferrari impose à ses pilotes. On comprend donc que Sebastian Vettel ait refusé de se plier à la consigne de son patron lors du Grand Prix de Malaisie lors duquel on lui enjoignait de rester derrière son coéquipier Mark Webber. Certes, la manœuvre était un peu aventureuse et aurait pu mettre le doublé des Red Bull en péril mais l’Allemand y est allé au panache et a fait triompher la logique sportive et la loi du plus fort. Dès lors, on comprend mal la colère et les jérémiades de Mark Webber. S’il méritait sa victoire, il n’avait qu’à résister aux assauts de son coéquipier, plutôt que d’aller parader dans la presse en photo avec la concurrence. Autant on peut comprendre le courroux d’un Massa qui doit régulièrement s’effacer devant un Alonso incapable de passer à la régulière, autant l’attitude d’enfant gâté de l’Australien qui pleurniche qu’on ne lui a pas offert une victoire qu’il n’a pas été capable d’aller chercher par lui-même est indéfendable.
Si vraiment Mark Webber voulait prouver qu’il était mieux qu’un second couteau juste bon à aller chercher quelques points pour assurer le titre des constructeurs, il ne tenait qu’à lui de le prouver lors des Grand Prix suivants ; or il a été battu à plate couture par son équipier. Bon prince, Sebastian Vettel s’est fendu de quelques excuses pour arrondir les angles mais il n’en pensait sans doute pas un traître mot. Car, en fin de saison, alors que Mark Webber aura été écarté depuis longtemps de la course au titre mondial et que Sebastian Vettel aura été sacré avec deux points d’avance sur Fernando Alonso, il faudra se souvenir du coup de panache de l’Allemand en Malaisie pour aller chercher une victoire et des points précieux au mépris d’une consigne d’équipe illicite et antisportive.

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13 Commentaires

  1. Putain il y a du beau monde ce mois… je dois avouer que j’hésite… j’hésite… autant de têtes à claques et un seul vote possible… pffff on peut pas voter blanc ou voter pour tous?

  2. Je vote Mourinho pour l’ensemble de son œuvre !
    Il a réalisé l’improbable exploit, car il est le seul individu dans le monde du sport qui est parvenu à se faire détester simultanément par : les journalistes + les fans du club + ses adversaires + ses joueurs.
    De plus, en constatant ses résultats de cette saisons, il est le SPECIAL ZERO !

  3. En voilà des vrais pigeons, vous voyez quand vous voulez.

    Je donne ma voix à John Tomic ce mois, un vrai pigeon qui fait rêver!

  4. Ah là là, enfin Mourinho est sélectionnable… Depuis le temps que je l’attendais! Cela dit, John Tomic est un candidat particulièrement intéressant! Choix difficile…

  5. Leonardo pour moi. Et c’est surtout pour le charme de la ville de Paris! Les milliardaires quataris dans un océan de pauvreté économique et culturelle rendant le contraste entre la situation de la capitale d’un pays au bord de l’explosion et le monde du foot totalement répugnant. Et que dire des images après leur titre…
    Bref Leonardo résume, réduit et incarne la puanteur du football moderne.
    J’ai beaucoup hesité avec Hoeness mais les débiles du Trocadéro m’ont scotché. Quand on coupe les frais pour l’éducation depuis 30 ans dans un pays, voilà ce que ça crée. CQFD

  6. Mourinho est LE pigeon par excellence !
    Ce mec n’est vraiment pas intelligent, il s’est attaqué aux trois chouchous des fans du Réal : Ramos, Casillas et Ronaldo. Et tout ça pour gagner quoi ? 2 titres en 3 ans !

  7. Sur Vettel je vous trouve pas très cohérents… On critique (à juste titre) le système pourri et antisportif des consignes et on voudrait pigeondoriser Vettel pour ne pas les respecter, tout en disant bien sous l’article de Webber que Vettel y est allé au panache…Comprenne qui pourra.

    Pour ce qui est des valeurs sportives bafouées avec des dirigeants qui choisissent à leur guise le vainqueur, je dirais que c’est devenu un peu le problème de ces sports « d’équipe-individuels ». Si l’on prend le cyclisme, il se passe exactement la même chose.

  8. Mourinho, parce que quand on a son arrogance, qu’on dirige ce club avec ce budget c’est une plaisanterie de réaliser une saison sans titre. Surtout alors que le Barca n’a pas été flamboyant. Et puis ses démêlés avec la presse, ses jérémiades et j’en passe en font un candidat parfait. Il y a d’autres bons candidats mais Mourinho c’est un cran en dessus.

  9. @Sly
    C’est vrai que pour l’histoire de la ville et de son architecture c’est un peu malhonnête de ma part… 😉
    Par contre je ne retirerai pas que cette ville a moins de charme qu’hier.

  10. Bon, tu me rajoutes encore la production culturelle de la ville dans le pack histoire-architecture et je signe! Parce que pour la décadence de la France, je crois que c’est évident..

    Jolie lutte pour ce Pigeon ceci dit, pour une fois que c’est serré!!!

  11. Très bien très bien, j’accepte, ma mauvaise foi n’a pas de limite je sais! (bien que du centre Pompidou au plus grand cabaret du monde il y a quand même un gouffre… bon je sors)

    Sinon oui, belle lutte! Néanmoins je me sentais au début bien seul en lisant les commentaires…

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