Retour sur la Vierschanzentournee (3/3)

Cette année, on a décidé d’aller découvrir la Vierschanzentournee pour la première fois. On se doutait bien qu’un truc avec des mecs venus pour voir du sport et se démonter la tête sur de la Schlager, on allait adorer. On n’a pas été déçus. Retour sur cet événement magique avec quelques considérations sportives, descriptions d’ambiance et anecdotes aux forts relents de Tüte, de bières et de Glühweine.

Innsbruck

Le Bergisel, cela se mérite car l’ascension menant au stade est plutôt escarpée. L’ambiance est très différente de Garmisch-Partenkirchen. Certes, la bière coule autant à flot, c’est d’ailleurs un brasseur local qui distribue généreusement les drapeaux autrichiens, mais les fans sont avant tout là pour voir gagner les Aigles. Je m’en aperçois rapidement puisque mon drapeau suisse, qui avait fait Garmisch sans souci, est interdit d’entrée, au motif que la hampe mesure plus d’un mètre de long. En arrivant dans le stade, je constate toutefois que le mètre autrichien et le mètre suisse ne doivent pas avoir tout à fait la même longueur… Le jour des qualifications, on se faisait même allumer à chaque saut moyen d’un Suisse par un gamin de sept ans vêtu aux couleurs de la Wunderteam. Autre exemple : à Garmisch, le speaker présentait Simon Ammann comme « le quadruple champion olympique », à Innsbruck comme « celui qui peut contrecarrer nos plans ». Révélateur. Attention, cela reste bon enfant, rien à voir avec certains stades ou patinoires mais on sent que les mecs ne sont pas là que pour rigoler mais bien pour voir une victoire, si possible écrasante, des leurs. Et après le saut d’essai, on n’en menait pas large car l’armada autrichienne, portée par cette ambiance survoltée, avait été impressionnante. Mais la tendance s’est inversée en première manche, avec des Autrichiens un peu en retrait et un Simon Ammann excellent deuxième derrière l’inattendu Finlandais Anssi Koivuranta. Malheureusement, la très prometteuse deuxième manche sera arrêtée par le vent après 21 coureurs, validant le résultat de la première. 

Annulation

Si on a un regret sur cette 62e Vierschanzentournee, c’est bien l’annulation de la deuxième manche à Innsbruck, neuf sauteurs avant la fin. Certes, on peut déjà s’estimer heureux d’avoir vu un concours car, durant les deux jours précédents, les autochtones nous affirmaient que la tempête de foehn annoncée rendrait impossible le moindre saut ce jour-là sur le Bergisel. Mais c’est rageant que ça se soit arrêté si près du but. Surtout qu’on sentait que Simon Ammann, après avoir maté les Aigles autrichiens en première manche, avait la victoire au bout des spatules. Et on rêvait d’entendre résonner l’hymne suisse au milieu des 20’000 drapeaux autrichiens et des milliers de Tüte réduites au silence dans cette énorme arène. Peut-être même que la tournée aurait pris une autre tournure si Simi avait pu reprendre la tête du général au Bergisel. On ne va pas polémiquer, la sécurité des coureurs prime et il est vrai que certains sauteurs ont méchamment dévié de la trajectoire. D’un autre côté, il m’a semblé que les organisateurs n’ont pas beaucoup insisté pour attendre une éventuelle accalmie, alors que, si cela avait fait les affaires autrichiennes… Bref, tant mieux pour nos potes supporters finlandais, même si ceux-ci étaient dans un état tel qu’ils ont dû autant comprendre la victoire d’Anssi Koivuranta que moi celle de Simi à Oberstdorf.    

Points

Pour calculer les points en saut à ski, il faut déjà connaître la longueur du point K à partir duquel seront ajoutés ou soustraits des points en partant d’un chiffre X en fonction de la distance parcourue. Puis tu ajoutes trois des cinq notes du jury après avoir enlevé la meilleure et la pire avant d’additionner ou soustrait le coefficient de vent. Enfin, il faut encore tenir compte des bonus/malus en cas d’éventuel changement d’élan et tu multiplies le tout par le nombre de disques d’or de DJ Ötzi. Easy. Il nous a fallu attendre le troisième concours pour capter. Il faut dire qu’à Garmisch, le speaker était plus enclin à chauffer un public qui ne demandait que ça qu’à expliquer le système de notation au dit public qui s’en contrefichait éperdument. A Innsbruck, l’ambiance était plus studieuse et le speaker s’est lancé dans une explication détaillée qui nous a permis de comprendre. Mais au final, que tu piges ou pas, tu attends l’annonce sur l’écran pour exulter ou larmoyer. 

 

Rencontres

A part quelques fans bavarois, l’ambiance est extrêmement conviviale dans cette Vierschnanzentournee. On s’est fait un nombre incroyable de nouveaux amis et de rencontres improbables en une semaine. Cela commence dans le train de l’aller avec des Nyonnais ayant la même destination que nous (enfin, presque, leur hôtel était moins bien situé, leur GO était moins bon que le nôtre) et ensuite cela n’a pas arrêté. Un coup de blanc avec des Allemands dans la train blindé montant à Oberstdorf, des Polonais par-ci, des Allemands par-là, des Finlandais, les potes du bar du Schattenbergschanze, Sylvain Freiholz dans la boîte du Nouvel-An, les serveurs du Treff à Garmisch, Ronan Lamy-Chapuis, l’ours armé d’un lance-flamme qui a terminé la combustion du maillot Götze, Jakub Janda, les responsables des transports du concours d’Innsbruck dans une brasserie, les cousins de Vince et le sosie de Goran Bezina à la Mausefalle, les ados autrichiens à torse nu du Bergisel, les mecs qu’on croise le lendemain qu’on a l’impression de n’avoir jamais vu mais qui nous font de grandes tapes dans le dos et tous ceux que j’oublie… Bref, si comme moi, tu pars avec un groupe d’amis plutôt dispersés qui ne reste pas un groupe très longtemps, sois tranquille : tu ne marcheras jamais seul à la Vierschanzetournee. Et accessoirement, pas souvent droit.  

Diethart

Simon Ammann n’a pas vraiment de chance. Alors qu’il semblait en mesure de gagner sa première tournée, il a fallu que ce Thomas Diethart, nouveau venu en Coupe du monde, sorte de nulle part pour venir lui damer le pion. J’ai pensé que le jeune Autrichien était en train de craquer sous la pression lorsqu’il a raté ses deux sauts d’essais des qualifications d’Innsbruck. Mais il s’est magistralement repris en qualifications puis en concours, avant de conclure sans trembler à Bischofshofen. Chapeau.

Schlager

Si tu n’aimes pas la Schlagerparade, c’est déjà que tu ne sais pas ce qui est bon mais surtout qu’il te faut éviter la Vierschanzentournee. Car il est difficile d’échapper aux Axel Fischer, Tim Toupet, Höhner, Mickie Krause et compagnie : avant, pendant et après les concours, à l’après-ski et en boîte jusqu’au bout de la nuit. Cela tombe bien, j’adore ça. Mais après une semaine, je t’avouerai que je vais quand même presque être content de passer quelques jours sans entendre Heut ist so ein schöner Tag – la, la, la, la, la, Und ich flieg, flieg, flieg, wie ein Flieger bin so stark, stark, stark, wie ein Tiger und so groß, groß, groß, wie ne Giraffe so hoch uoh-oh-oh.

Bischofshofen

Pour des raisons professionnelles, on avait décidé de faire l’impasse sur le quatrième et dernier concours à Bischofshofen, estimant aussi que, pour une découverte, trois concours suffiraient amplement. J’ai failli changer d’avis en voyant Simon Ammann en position de gagner mais cela aurait été compliqué. Et finalement, vu le résultat final et le doublé autrichien, je n’ai pas trop de regrets. De toute façon, Simi ou pas, après une semaine de compétition, j’arrivais un peu au bout physiquement car les journées sont longues à la Vierschanzen : entre les déplacements et les concours, la première bière ou le premier Glühwein intervient généralement assez tôt et après tu restes tout le temps dans l’ambiance jusqu’au bout de la nuit. Et le lendemain, ça repart et ainsi de suite. Je suis rentré au bercail en mode « je serai mort idiot si je n’avais pas vécu cela une fois dans ma vie, c’est chose faite mais plus jamais » et il m’a fallu trois jours pour récupérer, d’où la rédaction un peu tardive de cet article dont tu voudras bien m’excuser. Mais là, je suis déjà passé au mode « la Vierschanzen c’est magique, pourquoi pas une prochaine édition ? » 

Écrit par Julien Mouquin

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