Le lundi noir de Mauro Lustrinelli

Lorsqu’il s’est blessé aux ligaments externes de la cheville gauche lors d’un match à Zurich le 16 mai dernier, Mauro Lustrinelli pensait bien manquer la finale de Coupe de Suisse entre Bâle et Lucerne. Une tuile pour un joueur qui comptait sans doute sur cet événement pour se relancer après une saison en demi-teinte. Et ce d’autant plus que cette finale se jouait au Stade de Suisse, là même où l’attaquant tessinois avait écrit quelques-unes des plus belles pages de sa carrière lors de l’épopée thounoise en Ligue des Champions, avec notamment ce but d’anthologie contre les Suédois de Malmö FF.

Finalement, Lustrigol est revenu juste à temps pour figurer dans le cadre lucernois appelé à défier les favoris bâlois, après avoir longtemps été incertain. Dans le cadre certes mais pas sur le terrain dès le coup d’envoi, plutôt comme joker.A la 72e, l’entraîneur Ciriaco Sforza sent que son équipe a un bon coup à jouer face à des Bâlois qui piétinent et lance son attaquant international. Le pari sera tout près d’être payant à la 86e : toujours aussi opportuniste, Mauro Lustrinelli anticipe la mauvaise passe en retrait de Reto Zanni (en fait, c’est assez prévisible avec le latéral bâlois), parvient à toucher le ballon mais se heurte au portier rhénan Costanzo, promptement sorti. Lucerne et Lustrigol étaient tout près de réussir le hold-up en concrétisant ce qui était pour ainsi dire leur première occasion du match. On est cependant persuadé qu’à sa grande époque au FC Thoune, le transfuge du Sparta Prague aurait eu ce soupçon de vivacité qui lui aurait permis d’arriver quelques dixièmes plus vite sur le ballon et de piquer celui-ci au-dessus du portier argentin du FCB. Le Tessinois deviendra définitivement le héros malheureux de cette finale trois minutes plus tard : alors qu’il hérite d’un ballon de contre à mi-terrain, Lustrinelli expédie sa passe en retrait directement dans les pieds de Chipperfield. L’Australien transmet à Ergic qui, bien qu’accroché, résiste et parvient à glisser pour Petric dont la passe aveugle (de toute façon, il ne devait pas voir grand-chose avec son masque…) retrouve Chipperfield qui s’en va seul affronter Zibung et s’effondre.


Y avait-il penalty ? Les avis divergent…

D’où nous étions situés dans le stade, la décision de Mme Petignat d’accorder le penalty nous est apparue pleinement justifiée. En revoyant les images à la TV, on sera moins catégoriques. Aucun angle de vue des nombreuses caméras ne permet d’affirmer avec certitude que Zibung a bien touché le milieu de terrain bâlois. Cela démontre, si besoin était, les limites de l’usage de la vidéo dans l’arbitrage : sur la base des mêmes images, certains crient au scandale, d’autres estiment la décision discutable, alors que d’aucuns la trouvent parfaitement justifiée. Ce qui est certain, c’est que Chippy en a passablement rajouté. Zibung a lui très sportivement admis avoir touché l’Australien, je serai donc enclin à penser que la décision était justifiée. Tout comme celle d’expulser le valeureux portier lucernois. Rappelons que le règlement ne prévoit pas de sanctionner différemment une faute de dernier recours si elle débouche sur un penalty ou un coup franc, pas plus qu’il ne prescrit une punition différenciée selon que le fautif est gardien de but ou joueur de champ. Ce qui est finalement assez logique : ce n’est pas tout à fait la même chose de glisser le ballon dans le but vide ou de devoir tirer un penalty avec un gardien en face.
En l’occurrence, ce gardien, après l’expulsion de Zibung, s’appelle Besnik Zukaj, 28 ans, Serbe d’origine, arrivé en début de saison du FC Hochdorf, et affiche à son palmarès un seul match de LNA sans enjeu à Sion. L’anonyme par excellence, qui se voit offrir une occasion unique d’entrer, sur un seul ballon, dans la légende. Le (malheureusement) défunt trophée Aurèle Sandoz regorgeait de ce type de joueur dont on ne se souvient, de toute leur carrière, que d’un seul match, une finale mémorable, comme Stefano Crescenzi ou David Orlando. Attention, je ne suis pas en train de te dire que cette finale 2007 a été mémorable, loin s’en faut, mais elle aurait pu le devenir si le portier remplaçant du FCL avait stoppé le penalty et qu’ensuite Lucerne s’était imposé. Un peu comme Manchester – Bayern en 1999 : après le but de Basler en début de match, il ne s’était quasiment plus rien passé jusqu’à la 90e, c’était presque aussi ennuyeux que le récent Milan – Liverpool. Et pourtant, on parle de cette finale de 1999 comme l’une des plus grandes de l’histoire, uniquement grâce à ses deux dernières minutes. Malheureusement, le tir au ras du poteau de Majstorovic n’a laissé aucune chance à Zukaj. La logique a été respectée, le favori bâlois l’a emporté, sauve en partie sa saison et cette finale 2007 ne restera pas dans les annales.


Zukaj n’est pas entré dans la légende…

Il faut dire que ce n’était pas parti sous les meilleurs auspices avec le retour inopiné de l’hiver. C’est triste une finale sous la pluie et le froid, on regrette avec nostalgie quelques  pèlerinages passés dans la capitale, avec apéro prolongé sur une place fédérale inondée de soleil. Par rapport à l’époque, l’avantage en cas de pluie, c’est que le Stade de Suisse est couvert, ce qui n’était pas le cas d’une grande partie de l’antique Wankdorf. Sauf que l’on découvre, non sans un certain déplaisir, qu’au 4e rang, derrière les bancs des joueurs, on n’est pas abrités. Heureusement que la pluie s’arrêtera assez rapidement de tomber…
La pluie, le froid, les séquelles d’un week-end prolongé éprouvant et encore des souvenirs lumineux d’une finale de Coupe d’Allemagne vécue moins de 48 heures auparavant, mon enthousiasme n’est pas débordant au coup d’envoi. Heureusement, l’ambiance est haute en couleurs dans les tribunes du Stade de Suisse, les supporters bâlois et lucernois comptent assurément parmi les plus fervents du pays et ont donné pas mal de vie à un match qui en a cruellement manqué sur le terrain. Et puis, avec 30’000 spectateurs, force est de constater que cette finale de Coupe de Suisse enregistre une meilleure affluence que celle, retour, d’Italie entre les deux meilleures formations du pays cette saison dans l’immense San Siro…
Bâle partait nettement avec les faveurs de la cote mais on se doutait bien que Lucerne montrerait un tout autre visage que l’équipe qui a complètement soldé sa fin de championnat. D’ailleurs l’équipe de Suisse centrale s’était payée le luxe d’aller éliminer le futur champion Zurich sur «sa» pelouse du Hardturm en demi finale après plusieurs contre-performances en championnat. Les Lucernois entament d’ailleurs le match sans complexe et adressent quelques frappes lointaines en direction du fébrile Costanzo, qui fera quelques frayeurs à ses supporters tout au long du match. Bâle débute avec une équipe un peu inattendue : on n’est pas surpris par la non titularisation de Petric, toujours légèrement blessé mais on s’étonne de l’absence de Sterjovski et Eduardo, buteurs lors du dernier match contre YB. Christian Gross a misé sur la jeunesse en attaque, avec une seule pointe, Derdiyok (18 ans), et sur les côtés Caicedo (18 ans) et Rakitic (19 ans). Sans génie, les vice-champions suisses prennent le match en main mais se heurtent à un excellent Zibung, lequel aurait sans doute mérité une nomination dans cet absurde cadre de 40 joueurs supervisé en vue de l’Euro. Quand on voit que Nef ou Regazzoni y figurent… Et ce n’est pas comme si la Suisse comptait cinq portiers de niveau international.


Ergic soulève l’horrible coupe

Le gardien lucernois a réussi une superbe claquette sur une volée de Rakitic (19e, la plus belle action du match), une bonne sortie face à Chipperfield (29e) et un double arrêt miraculeux devant Ba (31e). Et a vu une tête trop piquée d’Ergic (32e) et un tir de Ba (38e) passé à côté du cadre. La deuxième mi-temps est plus rythmée et plus intense mais encore plus pauvre en occasions de but. Malgré une certaine domination territoriale, Bâle ne parvient plus à se montrer dangereux. Lucerne doit lui se contenter d’un semblant d’occasion sur une tête de Bader contrée par Majstorovic, juste au dessus de la transversale. Le FC Lucerne aura d’ailleurs été à l’image de son attaquant n° 3 : courageux, volontaire mais passablement limité. Il n’empêche que les hommes de Ciriaco Sforza n’ont pas été loin de réussir leur coup, il leur a juste manqué un Mauro Lustrinelli un peu plus en réussite.

Bâle – Lucerne 1-0 (0-0)

Stade de Suisse : 30’000 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : Mme Petignat.
But : 93e Majstorovic (penalty, 1-0)
Bâle : Costanzo; Zanni, Majstorovic, Smiljanic, Nakata; Rakitic (75e Sterjovski), Ergic, Ba, Chipperfield, Caicedo; Derdiyok (58e Petric).
Lucerne : Zibung; Diethelm (72e Lambert), Mettomo, Dal Santo, C. Lustenberger; Paquito (72e Lustrinelli), Cantaluppi, F. Lustenberger (92e Zukaj), Makanaki; Bader, Tchouga.
Cartons jaunes : 34e Diethelm. 74e Majstorovic.
Carton rouge : 91e Zibung.
Note : Bâle au complet, Lucerne sans Seoane (blessé).

Écrit par Julien Mouquin

Commentaires Facebook

7 Commentaires

  1. Faut-il rappeler quun gardien ou un défenseur ne doit pas obligatoirement briser la cheville ou la jambe dun adversaire pour quil y ait pénalty? La décision de Madame Petignat était logique (par contre, elle aurait pu expulser Diethelm quand elle voulait…)A croire que certains journalistes pseudo-spécialiste de foot, nen ont jamais pratiqué dans leur vie..
    Sforza ne doit sen prendrequà lui-même au lieu de fustiger larbitre. Cest bien lui qui a refusé que Lucerne prenne le moindre risque en ce lundi. Dommage pour Lucerne…

  2. Ben cest bien ce que dit M.Mouquin, non ??

    Il dit juste que cest pas évident-évident au vu des images et cest difficile de lui donner tort !

  3. Je ne vise pas M. Mouquin, seulement les quelques journalistes ou joueurs lucernois qui contestaient le péno.! Cest déjà assez dur darbitrer, alos si on commence à contester ce genres dactions…

  4. Ouais, zavez tous raison 🙂
    Je trouve juste que cest une des plus chiantes finale de coupe quon ai vue ces dernières années… Pas de magie, pas de risques, peu doccasions…Enfin, cette profonde réflexion nengage que moi 🙂

  5. La saison était aussi déplaisante que la finale, le titre a été donné à Zurich sur une stupidité qui va couter des points au classement FIFA pour la Suisse (laffaire Muntwiller, affaire complètement truquée, pour résumé cétait 3 points accordés à Zurich gratuitement et sans raison puisque lasf cétait trompé). Alors au moins que le meilleur club en Suisse gagne un titre cest un minimum.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.