Alex Frei héros d’un Revierderby de légende

Le 132e derby de la Ruhr entre le Borussia Dortmund et Schalke 04 va entrer dans l’Histoire. Le meilleur derby de tous les temps, a-t-on même lu dans la presse allemande. Mené 0-3 à vingt-cinq minutes de la fin, Dortmund arrache l’égalisation à la 89e dans une ambiance de folie. Avec deux buts et un assist, Alexander Frei a été le héros du match.

Borussia Dortmund – Schalke 04, c’est l’une des plus grandes rivalités d’Europe : ce sont  deux villes situées à une cinquantaine de kilomètres l’une de l’autre au cœur d’une région qui vit pour et par le foot, deux clubs disposant des meilleurs publics du continent qui se détestent, une rivalité ancestrale. Gagner le Revierderby est tout aussi important que gagner le championnat. Le 12 mai 2007, Dortmund, dans un match qui comptait pour beurre pour lui, avait battu Schalke 2-0 et ainsi privé les Knappen d’un titre qui fuit Gelsenkirchen depuis 1958. Dans les travées du Westfalenstadion, tu trouveras plus de maillots commémorant cette victoire que le succès en Ligue des Champions en 1997. Malgré cet antagonisme, les supporters cohabitent pacifiquement avant le match dans les Biergarten bordant le stade. A ce niveau-là, l’Allemagne c’est vraiment l’exemple à suivre.

Une première depuis 1979

Il y a une saveur toute particulière à ce 132e Revierderby entre Dortmund et Schalke. Ou plutôt, pour parler local, au Derby (comme s’il pouvait y en avoir d’autres…) entre Lüdenscheid-Nord et Herne-West, les supporters des deux camps s’interdisant de prononcer le nom du club rival. En effet, pour la première fois depuis le 3 novembre 1979, la tête du classement est l’enjeu du Derby. A l’époque, Dortmund, 1er, recevait Schalke, 3e à deux points, avec Hambourg intercalé entre les deux. Cette année, Dortmund, 3e, accueille Schalke, 1er, avec toujours Hambourg au 2e rang, les trois équipes étant à égalité de points. Cette situation augmente encore l’engouement pour ce 132e Revierderby. Les dirigeants dortmundois affirment qu’ils auraient sans problème rempli un stade de 150’000 places. Nous ne sommes finalement que 80’552 mais ça fait déjà beaucoup de bruit.

 

Le combat attendu

Rayon ambiance, le Revierderby c’est pas loin d’être le must absolu. Niveau football, cela débouche rarement sur des matchs d’une grande qualité technique, ce n’est pas très académique, cela vaut davantage par l’engagement et l’émotion. Car le Revierderby c’est avant tout un combat, le match qu’aucun joueur ne veut perdre. Et en plus, il reste pas mal de contentieux entre les joueurs datant des précédents derbies. Le combat attendu va donc bel et bien avoir lieu ; les actions de jeu sont rares, c’est âpre, haché, tendu, chaque duel gagné, chaque ballon récupéré provoquent une immense clameur dans le stade, c’est le foot dans la Ruhr et j’adore ça.

Et 1, et 2 et 3-0

Il faut un penalty pour lancer le match. Au duel avec Kuranyi, Subotic touche le ballon avec la main. Sur le moment, on a hurlé au scandale avec les 80’000 spectateurs du Westfalenstadion, mais, après avoir revu les images, il y a bien une main, certes involontaire mais décollée du corps, donc la sanction n’est pas injustifiée. Le Péruvien Jefferson Farfan transforme sous la bronca du Westfalenstadion. Schalke va doubler la mise sur un contre rondement mené par l’excellent Heiko Westermann et conclu par Rafinha qui profite d’un angle bien mal fermé par le gardien du BVB Weidenfeller. Un but cruel pour Dortmund car le Brésilien aurait dû être expulsé dix minutes auparavant pour un coup au visage de Valdez. Schalke va, pense-t-on alors, définitivement tuer le match sur une nouvelle erreur de Weidenfeller, une sortie ratée, qui permet à Westermann d’inscrire le 0-3. De retour de blessure, le gardien du Borussia n’a rien perdu de son irrégularité. La faiblesse de ses gardiens sera incontestablement un frein aux ambitions du BVB cette saison.

La magie du Westfalenstadion

On pense le match plié car Dortmund  n’est guère dangereux, malgré une légère domination territoriale. Le meneur de jeu Hajnal est très discret, les attaquants Valdez, puis Frei, entré à la mi-temps, rarement servis dans de bonnes conditions, il n’y a guère que l’Egyptien Zidan qui bénéficie de deux occasions : sur la première il rate son contrôle, sur la deuxième il tire sur le gardien Fährmann. Maladroit dans toutes ses tentatives, le malheureux Zidan, qui avait été si bon contre le Bayern, sortira sous les sifflets du public. C’est un peu dur mais maintenant il saura que perdre un ballon pour l’avoir attaqué avec un peu de nonchalance, cela ne se fait pas dans un Revierderby. Schalke passe même tout près du 0-4 mais Kuranyi rate l’immanquable avec un coup de tête à côté du but vide ; on ne voit donc pas comment ce Dortmund là va pouvoir mettre trois buts à l’une des meilleurs défenses de la Bundesliga. Sauf que l’on est au Wetsfalenstadion, un stade dont il se dégage quelque chose de très particulier et où tout peut basculer très rapidement.

Le déclic

Il va suffire d’un petit but pour que le match bascule dans vingt-cinq minutes de folie et d’hystérie collective. A l’origine on trouve Alexander Frei, qui, sur un corner sortant de la droite, trouve la tête de Neven Subotic. Le jeune défenseur du BVB inscrit là son troisième but de la saison en plaçant la balle hors de portée du tout aussi jeune gardien Ralf Fährmann. En l’absence du titulaire Neuer et de son remplaçant Schober, ce jeune homme de 19 ans jouait son premier match de Bundesliga. Dans la furie d’un Revierderby et avec le mur jaune de la Südtribüne dans le dos en 2e mi-temps ! Il s’en est plutôt bien tiré. On ne peut en tous les cas rien lui reprocher sur le 2-3 d’Alex Frei : le buteur suisse décroche une frappe somptueuse du pied gauche en pleine lucarne. Celui à qui on peut faire des reproches, c’est le juge de touche qui a omis de signaler une position de hors-jeu de Frei au départ de l’action.

Schalke craque

En quatre minutes, Dortmund a refait les deux tiers de son retard et c’est le délire dans le Westfalenstadion. Sous la pression, les Knappen craquent. En l’espace de trois minutes, Pander, pour un deuxième avertissement entièrement justifié, puis Ernst, pour un vilain tacle (même si le carton rouge paraît sévère) vont être expulsés, laissant leurs coéquipiers à 9. Malgré cette double supériorité numérique, Dortmund peine à se montrer dangereux. Jusqu’à la 89e. C’est alors que M. Wagner dicte un penalty sur un ballon qui vient heurter le bras de Krstajic qu’il avait collé au corps. Normalement, critiquer l’arbitre de Dortmund – Schalke, ça devrait provoquer moins de réactions indignées que pour d’autres matchs, alors je profite de dire que, si M. Lutz Wagner a pris des mauvaises décisions des deux côtés, les Knappen peuvent tout de même davantage se sentir floués par son arbitrage.

Frei le héros

Le stade est en apnée, Alexander Frei s’élance et prend le jeune Fährmann à contre-pied pour l’égalisation, un déluge de bière vole dans la Südtribüne. A 11 contre 9, on se dit que le BVB pourrait aller chercher la victoire pour définitivement faire chavirer le Westfalenstadion dans une autre dimension. Mais, malgré les nombreux accrochages de la 2e mi-temps, M. Wagner décide de n’accorder que 30 secondes d’arrêts de jeu. C’est donc sur ce match nul que se sont quittées les deux équipes au terme d’un Revierderby que l’on n’est pas prêt d’oublier.

Borussia Dortmund – Schalke 04 3-3 (0-2)

Signal Iduna Park, 80’552 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Wagner.
Buts : 20e Farfan (penalty, 0-1), 39e Rafinha (0-2), 54e Westermann (0-3), 67e Subotic (1-3), 71e Frei (2-3), 89e Frei (penalty, 3-3).
Dortmund : Weidenfeller ; Rukavina, Subotic, Hummels, Lee ; Blaszczykowski, Hajnal (68e Tinga), Kehl, Kringe ; Zidan (64e Klimowicz), Valdez (46e Frei).
Schalke : Fährmann ; Rafinha, Bordon, Krstajic, Pander ; Westermann, Jones, Ernst ; Asamoah (79e Kobiashvili), Kuranyi, Farfan (75e Höwedes).
Cartons jaunes : 16e Hajnal, 20e Subotic, 27e Rafinha, 69e Pander, 85e Hummels.
Cartons rouges : 73e Pander (2e avertissement), 76e Ernst (tacle dangereux).
Notes : Dortmund dans Dede ni Owomoyela (blessés), Schalke sans Schober (blessé), Neuer ni Engelaar (convalescents).

Écrit par Julien Mouquin

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17 Commentaires

  1. Alex Frei tétanisé avec la Nati mercredi…décisif (2 buts, 1 assist) ce week-end avec Dortmund…on appelle ça remuer le couteau dans la plaie…ça fait mal…

    A part ça, Julien, ça devait en effet être magique ce match, cette ambiance, tu me racontera 😉

  2. Bon, ben je vais dire tout haut ce que (il me semble) beaucoup de monde pense tout bas :

    –  » Alexander Frei, nous prends-tu pour des cons ?  »

    Mis a part ca, en effet, 80000 spectateurs, 3-3, ca a du etre assez intense de vivre ca en direct au stade…

    @ Christophe Logoz : lambiance, qui jen suis sur, na rien a envier a celle du derby entre Le Talent et Villars-le-Terroir, nest-ce pas ?

  3. magnifique week end avec la victoire DU FCE contre BENFICA Lausanne et cerise sur le gateau
    splendide victoire 4 0 de lEintracht Braunschweig , a la Hamburger strasse devant 13 000fans , qui a atomisé Kikers Offenbach et quitte ainsi la zone de relegation Bonne journee a tous

  4. @ Sathip-le-sage (dixit Fabio) :

    Lambiance au Stade des Condémines à St-Barthélemy devait être à mi-chemin entre lambiance du Westfalenstadion de Dortmund et celle quon peut observer à Albacete ESP

    P.S.(soyons prudent) : je plaisante, les amis espagnols du site, je plaisante 😉

  5. ..wouaye.. Zavez-vu Barnetta, Frei et Abddi ont marqué.. Inler a joué tout le match.. Ils se sont payés notre bobine lautre soir ces glands. Par contre pas de Magnin..

  6. @ Ch. Logoz

    Oui, il est vrai que dans les stades espagnols, les specateurs restent vétus, ne hurlent pas la mort à lentrée des joueurs, nentonnent pas de chants ayant pour thèmes: leur amour et dévouement total au club (style « LHC,c est ma vie et le kop ma famille »… impensable ici!), la supériorité intergalactique de ce dernier ou la médiocrité de ladversaire.

    Ici, on se rend au match comme on va au théâtre. On apprécie le beau jeu, on vibre, sans pour autant sexciter tels des fans prépubères qui assistent à un concert dHélène Segara.

    On a le meilleur championnat du monde (ok, à égalité avec langleterre pour certains… moi aussi jaime bien le Rugby et son influence sur le jeu à langlaise…).

    Du beau jeu, de beaux stades (plein),un climat agréable tout au long de la saison, bcp de buts, du suspense, pas de violence…

    En bref, tout linverse de ce quon peut trouver en Suisse.

  7. Hier soir le menu aux Condémines cétait ramon à los et radin dauphinois !!! Même supporter du Talent, jai pèdzé, un moment en compagnie de Christophe, avec les comitards de Villars et on a bien rigolés. Et pour la cervoise, cétait de la feld, vu quils leurs en restaient un fût suite à la fête organisée en lhonneur de Stan. Désolé, mais le père Magnin nétait pas là, alors impossible de te donner des nouvelles de ton ami !

  8. @ Fabio : BOXER… Voila un bon compromis :))

    @ Petit v : «  » »Autant vous dire quon la, une fois nest pas coutume, pas entendu la ramener!!!!! » » » Ben ca alors !?!?!? Ca doit faire vachement du bien ca, lol

  9. Le magazine allemand Kicker qui donne la note maximale (1 = classe mondiale) à Alex Frei pour son match contre Schalke !!

    Pu****, mais que se passe t-il dans la tête des joueurs suisses lorsquils revêtissent le maillot de la Nati ?? Dun seul coup ils ne savent plus jouer !!??!! Je crois que les dégats psychologiques sont profonds malheureusement !!

  10. Il me semble pour ma part que le championnat d Allemagne nest pas aussi bon que le niveau de leur équipe nationale, vu que nos joueurs sy trouvent relativement à laise. Combien de grands footballeurs allemands depuis 50 ans: Beckenbauer, Maier, Sammer, Matthäus et Ballack.

    Alors bien sûr dans les grands tournoirs, leur jeu fait de puisance, de volonté, dabnégation etc etc, ça marche très bien sur la longueur dun tournoi, mais cest quand même pas un championnat(nen déplaise à Julien Mouquin) qui nous fait rêver !

    A lépoque ou Chappi jouait à Dortmund, Beckenbauer avait déclaré quil était le seul attaquant de classe mondiale du championnat dAllemagne, ce qui, nenlevant rien au talent de Steph, voulait tout dire.

    Mais bon il ya lair davoir une sacrée ambiance dans les stades, et autour, même entre supporters de deux clubs différents, festive comme je les aimes.

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