TSR sports, le feuilleton : 3. Une journée dans la vie de Pascal Droz

Bonjour à tous !

C’est marrant parce que plus le temps passe et plus je remarque un changement d’attitude de la part de mes collègues. J’ai l’impression qu’ils ont commencé à se disputer mes faveurs. Hier, Jean-François m’a demandé si je voulais un peu de son bulgur au tapioca qu’il avait assaisonné à l’huile de flétan. M’expliquant qu’il était toxique de se nourrir à la cantine et me montrant, pour m’en convaincre les faiblesses d’attention de la jeune génération. J’ai du refuser car comme je vous l’ai expliqué, je ne veux pas que l’on croie que je préfère un plutôt que l’autre. Ce que Jean-François a compris et il m’a dit que je pouvais compter sur lui pour être discret quant à notre bonne entente et qu’il avait lui-même quelques petits problèmes d’entente avec certains collaborateurs et qu’il était en conséquence nécessaire de rester prudent.

Et hier, alors que j’étais sur le point de rentrer chez moi en transports publics, Pascal, qui passait par hasard par ici en voiture s’est arrêté à ma hauteur et nous avons échangé les propos suivants :

Pascal : Tu vas dans quelle direction ?
JBCL : Je rentre sur Lausanne.
Pascal : J’te pousse ?
JBCL : Ca te dérange pas ?
Pascal : Non non, sûr monte.
© TSR

Alors, je suis monté à la place du mort. Là, Pascal a appuyé un bon coup sur l’accélérateur de sa voiture – une sportive – et on s’est retrouvés les deux le nez dans le pare-brise au feu rouge 50 mètres plus loin. Pascal m’a dit qu’avec ces radars fixes sur l’A1 sa voiture avait commencé à toussoter au démarrage et qu’il était obligé de la faire tourner à haut régime au début, sans quoi elle lui jouait tout de sorte de tours dont il se passerait bien, avec déjà ces bouchons et cette circulation calamiteuse. Pascal, il parle pas beaucoup, mais il parle pas pour rien dire. Vers Nyon, à peu près, il m’a dit : «tu vois, ici ils en ont foutu un, je suis obligé d’aller plus mollo». On est arrivés assez vite à Lausanne. Et au moment de me déposer, il vint une idée à Pascal :

Pascal : T’as le temps de prendre un verre ?
JBCL : Euh, ben j’ai rien de prévu de spécial pour ce soir, donc a priori oui… Tu aimerais aller où ?
Pascal : J’ai des potes qui viennent d’ouvrir un bar, tu verras, c’est bien cool, ils ont tout décoré avec des coupes et des maillots de sportifs.
JBCL : C’est pas trop loin d’ici ?
Pascal : Non non, mais faut juste que je parque. Si je commence à biberonner, j’ai pas envie que les gendarmes me choppent. Tu me verrais aller en train au travail. Eh non quand même…

Après un créneau réalisé dans les règles de l’art, nous avons rejoint l’établissement dont Pascal semble à première vue être habitué, puisque tout le monde le tutoie. Et là, la discussion finit par reprendre après un court moment de silence.

Pascal : Tu bois quoi ? C’est la mienne…
JBCL : Ben, je sais pas, qu’est-ce que tu me conseilles ?
Pascal : Je te dirais les cocktails, plutôt. La bière, je suppose que tu connais…
JBCL : Oui, bon, alors euh, c’est bon le Challenger ?
Pascal : Ouais, pas mal. Disons que moi, je préfère le Play-Out.
JBCL : Il y a quoi dedans ?
Pascal : C’est un mélange Gatorade Tequila, avec des rondelles de concombre.
JBCL : Et dans le Challenger ?
Pascal : Secret du patron mon gars… Hé Miguel (il s’adresse à celui qui doit être est le gérant du bar) y’a quoi dans le Challenger ?
La musique s’arrête, les gens se taisent, regardent en direction de notre table.

Miguel : Ca mon p’tit gars, c’est un secret.

La musique reprend (il doit s’agir de Modern Talking, mais je ne suis pas certain de bien identifier car me retrouver sous le feu des projecteurs, comme ça, m’a donné quelques sueurs froides). Je ne perds pas de vue mes objectifs. Si je veux faire parler Pascal et qu’il me fasse confiance, il faut impérativement que je le fasse boire et que la soirée s’enflamme un peu. Alors, j’ai dit à Miguel :

«Tu m’en mets un double !»
Cela a dû impressionner son monde car Pascal a directement commandé un Play-Out, accompagné d’un Bobsleigh Hanté (c’est un Power Bar que tu trempes dans l’absinthe, que t’as plus qu’à laisser quelques instants dans de la poudre d’Isostar, avant de le gober sec).

On s’est retrouvés une petite demi-heure après à refaire le monde. Mais Pascal, il était plus axé sur le présent et le futur que sur le passé. J’ai bien essayé de le lancer quelques fois sur le sujet de ses collègues, j’ai même fait quelques remarques désobligeantes sur Bizut, mais il m’a dit : «Ecoute, pas de ça. Entre le travail et le reste, il y a une frontière qu’il ne faut pas dépasser. Sinon, tu ne t’en sortiras jamais, écoute bien ce conseil, petit.» Puis, il a ajouté : «Bon, si tu veux savoir, elles sont toutes folles de moi à la rédaction. Suffit que j’en lâche une bonne pour emmener n’importe laquelle.»

Cela m’a un peu agacé ce ton donneur de leçon si sûr de lui et de son sex appeal, mais d’un autre côté, je me suis dit que cette frontière pouvait devenir assez floue puisque j’étais en ce moment avec lui et qu’il me semblait être plutôt de l’autre côté. Alors je me suis simplement dit qu’il faudrait peut-être lancer un peu mieux la soirée. Et j’ai fait signe à Miguel que je voulais la même chose. Pascal s’est enflammé et il a commandé un Fuentes, breuvage qui semblait être constitué de jus d’orange sanguine et de lait (c’est censé représenter les globules blancs). J’ai fait remarquer qu’il n’y avait pas d’alcool à l’intérieur. Ce à quoi Pascal m’a répondu : «Non, mais tu veux essayer de le boire sans tout relâcher ?»

Cette dernière réplique allait nous faire passer à un autre sujet, mais c’est à ce moment que Pascal s’est senti assez décontracté pour aller danser. Je dois avouer que c’est impressionnant. Car même s’il avait le vieux jeans délavé et troué qu’il porte habituellement sous son costume de présentateur, il a pu montrer quelques combines apprises ici et là sur les pistes de danse. Je dois dire que c’était assez impressionnant comme tout le monde le regardait reprendre parfaitement la chorégraphie des Village People en solo.

J’ai alors compris que travailler dans un domaine où l’on est sur le devant de la scène, ça aide pour se lâcher en boîte. Ensuite, on est sorti et il a fallu prolonger la soirée dans un des nombreux lieux de la vie nocturne lausannoise. Pascal m’a dit qu’il suivait, mais qu’avant il fallait vite passer à sa chiotte récupérer sa fiole de Williamine, histoire qu’on se fasse pas vider le crapaud par ces crapules de tenanciers de bouibouis nocturnes. Une fois le récipient récupéré, la langue de Pascal s’est déliée. Il m’a expliqué qu’il plaisait tellement à certaines téléspectatrices que lorsqu’il s’était coupé le mulet il y a quelques temps, il avait même été victime de harcèlement de la part d’une présidente d’un club d’aviron féminin. Mais il me disait aussi bien le provoquer car l’année passée, il avait suivi un groupe dont faisait partie le n° 57 du Servette au carnaval de Monthey et ils avaient mis le feu, déguisés en Chippendale. Il avait emballé une équipe de hockey féminin tout entier. Pour finir, il avait dû se faire admettre dans un hôpital sur les hauts de la ville pour éviter la meute en chaleur…

Pascal m’a aussi dit que la fameuse boisson de Miguel était composée de tests avérés positifs de l’Agence Mondiale contre le Dopage dont les athlètes avaient payé le prix fort pour les faire disparaître. Miguel était dans ce commerce car les nombreux VIP de son bar ne lui permettaient pas de vivre dessus.

Ensuite, et je pense que c’est assez compréhensible pour tous, on a passé la soirée à donner à manger aux renards. Moi, pour mes Challengers et Pascal pour ses Carambars qu’il avait mélangé avec sa précieuse eau de vie.

Compte tenu de la fin peu glorieuse, à nous deux de notre soirée et de la frontière entre vie professionnelle et le reste, on s’est promis de ne rien dire aux collègues, surtout pas à Pierre-Alain qui serait jaloux comme un pou s’il apprenait que Pascal avait fait le coup des Village People sans lui.

Aujourd’hui, j’ai encore la tête dans le cul, mais au moins, je sais que Pascal est de ce type d’hommes dont on apprécie la présence. Il vit sa vie, pleinement. Je crois qu’il a toujours rêvé d’avoir un «sparring partner» comme moi et, même si je sais que mon travail consiste à noter les moindres faits et gestes de ces gens, j’en suis bien fier.

On ne sait pas encore si Pascal va présenter tout à l’heure. Il leur a dit à tous qu’il avait mangé du poisson avarié…

Écrit par Jean-Boris Cochet-Lamouche

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6 Commentaires

  1. assez d’accord avec Bob Robert.

    Pascal Droz, avec son regard vide et ses épaules coincées en pilier de bar? Plutôt un chat sur les genoux et un verre de lait!

    Mais c’est très, très drôle. Maintenant on veux du PAD du PAD….

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