Ça, c’est du derby !

Le rheinische Derby entre Mönchengladbach et Köln fait partie des grandes rivalités du football allemand et même européen. Malheureusement, la situation précaire des deux équipes au classement a débouché sur un match plutôt insignifiant.

On poursuit notre tournée des rivalités légendaires du foot allemand : après le plus grand derby d’Allemagne il y a un mois, le Revierderby entre Dortmund et Schalke, nous enchaînons avec ce qui est sans doute le deuxième derby du pays, le rheinische Derby entre Mönchengladbach et Köln. Evidemment, pour celui qui ne connaît le foot qu’à travers les soirées formatées de la Ligue des Champions, le Borussia Mönchengladbach et le 1. FC Köln, ça n’évoquera pas grand-chose : «C’est quoi ces clubs ? Ils passent jamais à la télé et en plus ils ont même pas Cristiano Ronaldo et Lionel Messi.»

Un passé glorieux

Ceux qui connaissent le foot se souviendront eux que Mönchengladbach et Köln firent jadis partie des grands d’Allemagne et même d’Europe. Les Fohlen (poulains) de Mönchengladbach ont disputé quatre fois la finale de la Coupe UEFA (deux victoires) et une fois celle de la Coupe des Champions (1977, défaite contre Liverpool) ; mais c’est peut-être en 1971-1972 que les Fohlen auraient eu le plus de chances de remporter la C1 puisqu’ils avaient atomisé l’Inter Milan, futur finaliste, 7-1 au 2e tour dans le mythique stade du Bökelberg. Las, un Italien a simulé une blessure (ça ne s’invente pas) suite à un objet soi-disant reçu des tribunes et le match a été rejoué sur terrain neutre avec une qualification intériste. Les Geissböcke (boucs) du 1. FC Köln ont eux laissé passer leur chance de remporter la plus prestigieuse compétition de club du monde en 1979, lorsqu’ils étaient allés chercher le nul 3-3 à l’aller en demi-finale sur la pelouse du futur vainqueur, Nottingham Forest. Mais les Anglais l’avaient emporté au retour au Müngersdorfer Stadion et s’étaient ainsi ouvert la voie de leur premier sacre européen contre Malmö.

Un vrai derby

Fatalement, lorsque deux clubs situés à quelques dizaines de kilomètres l’un de l’autre se retrouvent en même temps au sommet de la hiérarchie, cela ne manque pas d’engendrer une rivalité légendaire. Aujourd’hui, on prend prétexte d’une vague proximité géographique ou linguistique pour nous vendre des derbies qui n’en sont pas et qui ne représentent rien pour personne. Mais un vrai derby n’existe qu’après des décennies de légendes, de rivalité, et d’anecdotes ; le vrai derby, c’est le match qui peut permettre de sauver une saison ratée s’il est gagné ; le vrai derby, c’est celui qui divise toute une région en deux camps opposés durant les semaines suivant et précédant la rencontre ; le vrai derby c’est lorsque les supporters s’interdisent de porter des vêtements aux couleurs du rival honni. Mönchengladbach – Köln appartient incontestablement à cette catégorie.

Les inséparables

Mönchengladbach et Cologne sont tellement inséparables qu’ils ont plus ou moins simultanément régressé dans la hiérarchie, connaissant même quelques escapades en 2. Liga, avant de retrouver la Bundesliga conjointement en 2008. Pour leur retour dans l’élite, les deux clubs ont connu des fortunes diverses : Cologne a vécu, malgré une petite crise au printemps, une bonne première saison et assuré tranquillement son maintien L’annonce du retour de l’enfant prodige Lukas Podolski l’été dernier avait même suscité bien des espoirs mais les Domstädter ont en même temps perdu leur autre figure emblématique, l’entraîneur Christoph Daum, parti chercher fortune en Turquie. Son successeur, l’inexpérimenté Zvonimir Soldo, peine pour l’heure à répondre aux attentes démesurées qu’a suscité le retour de Prinz Poldi. Comme en plus, le calendrier du 1. FC Köln était plutôt gratiné en début de saison, les Geissböcke se trainent en queue de classement.
Le tableau est encore moins réjouissant du côté des Fohlen : pour son retour en Bundesliga, Gladbach avait échappé de justesse à la relégation. On avait donc été un peu surpris que le Borussia engage un entraîneur, Michael Frontzeck, qui restait sur deux relégations en trois ans avec Aachen et Bielefeld. Sans doute que les 238 matchs joués par l’ancien international pour les Fohlen ont poussé les dirigeants mönchengladbachien à occulter ce CV peu engageant. Pour l’instant cela ne se passe pas trop bien puisque les Fohlen restent sur six défaites consécutives avant ce Derby.


Quoi ?!? Alkohol-Verbot !

Le scandale

Ces résultats médiocres ne réfrènent guère le formidable engouement que suscitent les deux clubs, avec les risques de débordement que comporte ce genre de derby. Les Allemands ont largement prouvé qu’ils peuvent, sinon bannir, du moins contenir la violence avec des mesures ciblées mais peu contraignantes pour la majorité. Malheureusement, il se trouvera toujours des politiciens, généralement de gauche, comme le maire SPD de Mönchengladbach, pour se donner bonne conscience en adoptant des mesures comme l’interdiction d’alcool dont l’inutilité, voire la contre-productivité, n’est pourtant plus à prouver. En ce samedi de Derby, la ville de Mönchengldbach est donc déclarée sans alcool de 9h à 15h30 (ce qui exclut la vente d’alcool au stade et en ville mais aussi la détention et la consommation d’alcool sur la voie publique). Triste. Bon, vu notre état, ça ne nous a pas gêné plus que ça, même si la veille on avait fini la soirée à la flotte ; sauf que Flotte, c’était le nom du bar et non des boissons ingurgitées.

Première mi-temps médiocre

Du coup, on arrive juste à l’heure au Borussia-Park pour le très rock’n roll die Elf vom Niederrhein, l’hymne des Fohlen. L’ambiance est bien entendu surchauffée dans ce magnifique Borussia-Park (malgré un nom usurpé : es gibt nur ein Borussia, et il est à Dortmund). Malheureusement, l’équation derby + équipes en crise + contingents limités débouche sur un match médiocre. Nonobstant le cadre somptueux du Borussia-Park, on se serait presque ennuyé. Avant la pause, les deux formations rivalisent de maladresse et l’on ne retiendra qu’une occasion de la 1ère mi-temps, la seule du match pour Cologne : à la 43e, une passe géniale de Podolski décale Ishiaku seul devant Bailly mais le Nigérian croise trop son tir.

Deuxième mi-temps aussi

Le scénario est différent après la pause mais ce n’est pas bien meilleur : Gladbach pousse alors que Cologne se contente d’assurer le 0-0 et multiplie les pertes de temps. On veut bien admettre que l’équipe est mal classée mais ce 1. FC Köln a quand même suffisamment de qualité dans son effectif pour proposer autre chose. On espère que les Geissböcke mettront un peu plus d’ambition dans leur jeu pour les prochains matchs, j’ai prévu de les voir encore trois fois avant Noël : si c’est pour assister à ce genre de spectacle, il faudra pas mal de Gaffel Kölsch pour supporter ça. L’attentisme colonais aurait mérité d’être sanctionné par une défaite. Mais ce Gladbach en crise n’avait guère d’atout offensif : le duo d’attaque Colautti-Bobadilla n’a rien réussi de bien, alors que le joueur le plus doué de l’effectif des Fohlen, le Vénézuélien Arango n’a pas connu beaucoup de réussite dans ses frappes. Malgré leur domination territoriale, les Fohlen n’ont guère été dangereux que sur balles arrêtées mais se sont heurtés au meilleur homme du match, le gardien vétéran de Cologne Faryd Mondragon, qui a sauvé sur un coup franc d’Arango, une tête contre son camp de Novakovic, et un tir de Bradley. Et lorsque le Colombien n’était pas à la parade, c’est son défenseur Brecko qui sauvait sur la ligne après un essai de Brouwers. On a bien cru au but, et une bonne partie du Borussia-Park avec nous, à la 91e mais la volée de Bradley est passée juste à côté. Il devait être écrit que ce derby se terminerait sur un score nul et vierge assez conforme à la physionomie du match. Dommage car ce derby légendaire et les formidables fans des deux camps auraient mérité un tout autre spectacle.

Borussia Mönchengladbach – 1. FC Köln 0-0

Borussia-Park, 54’057 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Kircher.
Mönchengladbach : Bailly ; Levels, Brouwers, Dante, Jaurès ; Reus (88e Matmour), Bradley, Marx, Arango ; Bobadilla (76e Neuville), Colautti (76e Friend).
Köln : Mondragon ; Schorch (35e McKenna), Mohamad, Geromel, Brecko ; Podolski, Petit, Pezzoni, Ehret (77e Freis) ; Ishiaku, Novakovic (92e Matip).
Carton jaune : 23e Ishiaku.

Écrit par Julien Mouquin

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2 Commentaires

  1. Merci pour ce reportage très intéressant.

    Sinon, j’ai toujours cru que la plus grosse rivalité pour Cologne était celle avec le Fortuna Düsseldorf. Elle est d’autant plus forte que Cologne et D’ dorf sont rivales d’un point de vue économique et culturelle pour déterminer laquelle des deux villes est la capitale de la Rhénanie.

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