Ça c’est du 0-0 !

Parfois, il y a des bons 0-0. Mais il existe aussi des scores nuls et vierges qui sont parfaitement conformes à la physionomie de matchs où il ne s’est strictement rien passé. Et j’ai parcouru 1485 kilomètres pour aller voir ça…

Lorsque le calendrier de la Bundesliga est sorti l’été dernier, on avait coché ce week-end du 21-22 novembre dans l’agenda car tous les clubs qui constituent nos destinations favorites outre-Rhin, Dortmund, Schalke, Francfort et Cologne, jouaient à domicile. Malheureusement, la Ligue a eu la mauvaise idée de fixer tous les matchs qui nous intéressaient le même jour. Du coup, il n’était plus question de faire l’un de ces week-ends mythiques où l’on sillonne la Rhénanie du Nord-Westphalie et la Hesse pour enchaîner à un rythme effréné Biergarten, stades, bars, galeries d’art et discothèques (biffez l’intrus), il restait juste un match au Westfalenstadion. Enfin, ce n’est jamais juste un match au Westfalenstadion car un après-midi dans le plus beau stade du monde reste toujours un moment privilégié

La révélation Mainz

L’ambiance est au rendez-vous, surtout que l’adversaire du jour, le FSV Mainz, est venu avec plus de 6’000 supporters en rouge. Le Karnevalsverein vit actuellement les heures les plus glorieuses de son histoire plus que centenaire, ça valait bien un pèlerinage de masse dans le temple ultime du foot allemand. Lors des trois seules saisons où il a évolué en Bundesliga (entre 2004 et 2007), le modeste Mainz n’avait jamais fait mieux que 11e. Avant cette 13e journée, le néo-promu mayencennois occupe la 6e place du classement, à seulement deux points de la Ligue des Champions et devant le grand Bayern Munich !

Pourtant, en début de saison, on en faisait un relégué en puissance : la campagne de transferts semblait poussive, la préparation avait été catastrophique avec une quinzaine de joueurs blessés, la star de l’équipe, le Burkinabé Bancé, squattait la rubrique faits divers des journaux, l’entraîneur de la promotion, le Danois Andersen, a été viré avant même le début du championnat après une défaite infamante en Coupe à Lübeck (4e division) et son successeur, Thomas Tuchel, qui n’avait jamais entraîné que des équipes juniors, ne paraissait pas avoir l’expérience nécessaire pour faire gagner cette équipe plutôt faible sur le papier. Mais le miracle s’est accompli : le Karnevalsverein accumule les bons résultats, dame le pion aux ténors de la ligue et révèle presque chaque week-end des joueurs jusqu’alors inconnus. La révélation la plus spectaculaire est celle de l’Autrichien Andreas Ivanschitz. On savait que l’ancien pensionnaire du Panathinaikos était considéré comme l’un des joueurs les plus doués du foot autrichien. «Pas difficile, vu le niveau du foot autrichien», dira-t-on avec l’arrogance dont on fait désormais preuve vis-à-vis de notre voisin de l’est, maintenant que l’on appartient au cercle très fermé des grandes nations du foot. Toujours est-il que l’Autrichien cartonne et occupe même la première place du classement des compteurs (buts + assists) de la Bundesliga.

Séquence émotion

Il y a un homme pour qui ce Dortmund – Mainz représentait quelque chose de particulier, c’est l’actuel entraîneur du BVB Jürgen Klopp, l’homme qui a fait progresser Mainz dans la hiérarchie du foot allemand en onze ans comme joueur et sept comme entraîneur, avec à la clé la première promotion mayencennoise en Bundesliga en 2004. Nonobstant un Never Walk Alone repris par les fans des deux camps, avec 65’000 écharpes jaunes et noirs et 6’000 écharpes rouges qui se tendent, l’avant-match est tout en retenue, puisque c’est la première journée de Bundesliga depuis le décès de Robert Enke. La Bundesliga est une institution en Allemagne et fait l’objet d’une couverture médiatique intensive. C’est tout un pays qui tourne au ralenti durant la grande messe du samedi après-midi et les stars de la ligue s’invitent quotidiennement dans les foyers de millions d’Allemands. Alors quand l’un de ces acteurs, et non des moindres, disparaît à peine 48 heures après avoir joué son dernier match, c’est comme de perdre un personnage familier. Ajoute à cela le destin tragique de cet homme et tu comprendras l’immense émotion qui étreint tout un pays.

Rien à signaler

On parle du match ? En fait, il n’y a pas grand-chose à en dire. Deux occasions pour Mainz, un tir trop enlevé de Bancé et un sauvetage de Schmelzer après une sortie hasardeuse de Weidenfeller (pléonasme, les sorties de Weidi sont toujours hasardeuses). Dominateur, Dortmund a eu un peu plus d’occasions mais aucune vraiment nette : cinq parades du remarquable gardien Heinz Müller sur des tirs plus ou moins lointains de Sahin, Hummels, Schmelzer, Subotic et Zidan, une tête de Subotic au-dessus et un sauvetage de Soto sur sa ligne devant Subotic, pour lequel le Borussia vient de repousser une offre de 22 millions d’euros de Manchester City.

Si Mainz réussit d’excellents résultats avec des moyens modestes, ce n’est bien évidemment pas en partant à l’offensive la fleur au fusil mais en s’appuyant sur une bonne organisation défensive et une grosse solidarité. Manifestement, le FSV est venu au Westfalenstadion pour prendre un point. Et actuellement, Dortmund n’a pas les moyens d’emballer un match contre ce genre d’équipe. Toujours privé de son meneur de jeu Hajnal et avec un Kuba en petite forme, le BVB est apparu sans rythme, sans idée, sans percussion et n’a jamais donné l’impression de pouvoir mettre hors de position la solide défense adverse.

Même Barrios n’a pas marqué

Pourtant, les quatre millions et quelques d’euros payés par le FC Bâle pour le transfert d’Alex Frei ont permis au BVB de se doter de l’arme nucléaire, avec l’arrivée du phénoménal Lucas Barrios, plébiscité meilleur joueur de Bundesliga au mois d’octobre. Mais maîtriser l’atome est une chose, encore faut-il disposer des vecteurs pour envoyer la bombe chez l’ennemi. Et quand les missiles balistiques se nomment Nelson Valdez, Mohamed Zidan ou Markus Feulner, il y a de fortes chances pour que cela débouche sur un pétard mouillé. Lucas Barrios ne recevra  qu’un ballon potable de tout le match mais s’est heurté à la bonne sortie de Müller. Pour la première fois depuis le 26 septembre dernier, la Pantera a quitté un terrain de foot sans avoir marqué. Et quand Barrios est muet, c’est tout le BVB qui reste aphone, perdant ainsi le bénéfice du très bon match nul décroché sur la pelouse du Werder Brême juste avant la trêve dévolue aux équipes nationales.
N’eussent été les trois heures de Biergarten d’avant match, le Glühwein du marché de Noël et une excellente boîte nommée Anton’s Bierkönig, on aurait presque failli regretter le déplacement. Cela ne nous empêchera d’être présents pour le prochain match du BVB à domicile contre Nuremberg. Le dernier Dortmund – Nuremberg auquel j’ai assisté s’était fini sur le score de 0-0 ; ça promet…

Borussia Dortmund – FSV Mainz 05 0-0

Signal Iduna Park, 74’600 spectateurs.
Arbitre : M. Weiner.
Dortmund : Weidenfeller ; Owomoyela, Subotic, Santana, Schmelzer ; Hummels, Sahin ; Blaszczykowski (88e Götze), Feulner (62e Zidan), Valdez (70e Grosskreutz) ; Barrios.
Mainz : Müller ; Bungert, Svensson, Noveski, Heller ; Hoogland, Karhan, Soto (57e Schürrle) ; Ivanschitz (92e Polanski), Amri (93e Grimaldi) ; Bancé.
Carton jaune : 88e Schmelzer.
Notes : Dortmund sans Rangelov, Dede, Tinga, Kehl, Hajnal, LeTallec, Öztekin ni Bender (tous blessés) ; Mainz sans Wache, Kirchhoff (blessés), van der Heyden, Bogavac, Borja (malades) ni Löw (suspendu).

Écrit par Julien Mouquin

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3 Commentaires

  1. Je me suis décidé à poster mon premier commentaire sur cartonrouge pour remercier Julien Mouquin des récits de ses nombreuses pérégrinations germaniques. Toujours aussi sympa à lire, une bonne raison d’attendre avec impatience les lundis!

  2. Mouais Loz, moi j’dis il baisse le Mook… il n’a même pas expliqué pourquoi il a déserté l’excellent Bierhaus pour l’inconnu « Anton’s Bierkönig » (situé à quelques centaines de mètres de là si c’est bien celui que je connais) après un match de ses mous-du-classement du BVB..

    Cordialement
    ES

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