L’imposture était presque parfaite

Malgré un contingent limité, une trésorerie à sec et une qualité de jeu assez quelconque, Schalke 04 a bien failli être sacré champion d’automne de la Bundesliga. Felix Magath est vraiment un magicien.

Felix Magath avait surpris son monde au printemps dernier en quittant un Wolfsburg en pleine euphorie avec la perspective de jouer la Ligue des Champions pour rejoindre un Schalke 04 alors en crise et privé de toutes compétitions européennes. On pensait que, pour rejoindre Gelsenkirchen, l’ancien entraîneur du Bayern Munich avait reçu de solides garanties quant à l’enveloppe à disposition pour sa campagne de transfert. Mais la crise est passée par là, les pétrodollars (ou plutôt les gazoroubles) sont venus moins nombreux que prévus, des années de gestion calamiteuse et d’investissements inconsidérés, ainsi qu’un stade certes magnifique mais très onéreux à l’emploi, ont sérieusement plombé les comptes du FC Schalke 04. Du coup, les ultimes deniers à disposition des Knappen ont passé dans les émoluments sans doute conséquents de Felix Magath mais il ne restait plus rien pour une éventuelle campagne de transfert.

Felix Magath le magicien

Dès lors, Felix Magath a dû faire avec les moyens du bord en s’appuyant sur les quelques stars encore restées du côté de Gelsenkirchen (en particulier Neuer et Westermann), en relançant quelques carrières enlisées (Bordon, Farfan, Rakitic et surtout Kuranyi) mais principalement en lançant des gamins qui, pour la plupart, n’avaient jamais foulé une pelouse de Bundesliga avant cette saison (Matip, Mortiz, Schmitz, Kenia, Moravek, Holtby, Pliatsikas). Le pari paraissait osé, surtout dans un club qui restait sur un championnat calamiteux et où le public, exigeant et impatient, est assez prompt à siffler son équipe au moindre revers.

Mais, ô miracle, la mayonnaise a pris et cette équipe faite de bric et de broc squatte les premières places depuis le début de la saison et s’est réconciliée avec son public, très courroucé en fin de saison dernière. C’est rarement flamboyant, Schalke n’a pas souvent déclassé ses adversaires mais une bonne organisation, une grosse solidarité et pas mal de réalisme ont permis aux Königsblauen d’engranger les victoires, souvent poussives, comme les hold-up réussis à Dortmund et Stuttgart, mais des victoires quand même. Du coup, Schalke est encore en lice pour un titre honorifique de champion d’automne à l’aube de cette ultime ronde du 1er tour. Felix Magath, qui a promis qu’il ramènerait ce titre (le vrai, celui du mois de mai) qui fuit Gelsenkirchen depuis 1958, d’ici à l’expiration de son contrat en 2013, est vraiment un magicien.

Vive le foot en salle !

Cela fait plusieurs années que l’on vient régulièrement dans cette superbe Veltins-Arena mais l’on n’avait jamais eu l’occasion de voir un match entier avec le toit fermé. Cette fois, c’était la bonne : on ne s’était pas coltiné un trajet dantesque avec la neige, un réseau autoroutier congestionné et des pseudos-raccourcis à travers des vallées qui n’étaient pas sans rappeler l’enfer de Choindez (© Marc-Olivier Reymond) pour être privés de toit par une subite accalmie. Et effectivement, d’accalmie il n’y eut point et c’est donc bien en indoor que s’est joué ce dernier match du 1er tour. Pour notre plus grand bonheur, on a bien aimé le concept d’une patinoire avec 60’000 fans, dont la majorité est bien décidée, comme toujours le vendredi soir à la Veltins-Arena, avec ou sans toit, à vouloir se mettre sur le toit. Le match débute traditionnellement par le fameux «Blau und Weiss, wie lieb ich Dich», la chanson qui ferait sans doute bêler quelques politiciens par chez nous car considérée comme islamophobe par certaines organisations musulmanes, qui ont demandé (en vain) son interdiction ou du moins un changement de paroles. L’objet du délit ? Un couplet explique que Mahomet n’avait rien compris au foot mais qu’il avait inventé le bleu et blanc.

1-0 puis plus rien

Schalke avait absolument besoin des trois points pour espérer ravir le titre de champion d’automne à Leverkusen. Les Knappen partent donc rapidement à l’assaut de la défense renforcée de Mainz et, après deux premières tentatives infructueuses, vont trouver la faille sur une ouverture inspirée de Lewis Holtby pour Jefferson Farfan qui devance la sortie un peu hésitante du gardien Müller. On jouait la 12e et on aurait pu s’arrêter là car il ne s’est pas passé grand-chose par la suite. Schalke a avant tout géré ce 1-0 et ne s’est pas montré très inspiré au moment d’inscrire le but de la sécurité, avec notamment trois grosses occasions galvaudées par Kevin Kuranyi. En face, Mainz semblait satisfait du meilleur premier tour de son histoire et ne paraissait pas très intéressé par la perspective de ramener quelque chose de la Veltins-Arena. Même menés au score, les Mayencennois n’ont strictement rien tenté et le gardien le plus convoité d’Europe, Manuel Neuer, a passé une soirée très tranquille. Pourtant, face aux Knappen (mineurs, pour les non-germanophones), on aurait pu penser que l’entrée en jeu de Polanski pouvait faire des dégâts mais il n’en fut rien.

Presque l’imposture

Cette victoire méritée mais sans panache, à l’image du premier tour des Knappen, n’a pas permis à Schalke de devenir champion d’automne, honneur revenu le lendemain à Leverkusen, après sa victoire contre Mönchengladbach. Et, si l’on doit confesser une certaine admiration pour ce que Magath a réussi avec sa jeune équipe, on dira que le sacre du Bayer est entièrement mérité, le jeu proposé par la troupe de Jupp Heynckes étant bien plus enthousiasmant que celui du Schalke de Magath, qui n’est toutefois pas passé loin de l’imposture. Nous non plus d’ailleurs : après le match, on sympathise avec un couple de fans de Schalke, ils étaient tellement gentils que l’on n’a pas osé leur exposer notre but principal du week-end (les 100 ans de l’ennemi juré, Dortmund) ; on s’est toutefois fait démasquer lorsque nos ex-nouveaux amis nous ont demandé si l’on avait déjà vécu la folie d’un Revierderby et que j’ai mentionné un peu trop spontanément un 3-3 de sinistre mémoire pour tout fan des Knappen, mais surtout lorsque mon pote Denis, interrogé sur quel était le plus beau stade du monde, a fait la même réponse qu’Henry Rollins dans Six Pack de Black Flag (ça, c’est de la référence culturel !) : «La réponse t’aurait vexé.»

Schalke 04 – FSV Mainz 05 1-0 (1-0)

Veltins-Arena, 60’852 spectateurs.
Arbitre : M. Aytekin.
But : 12e Farfan (1-0).
Schalke : Neuer ; Zambrano, Westermann, Bordon, Schmitz ; Höwedes, Matip ; Farfan (83e Moravek), Rakitic (75e Sanchez), Holtby (54e Moritz) ; Kuranyi.
Mainz : Müller ; Heller, Bungert, Noveski, Löw ; Karhan, Pekovic (46e Baljak) ; Soto (75e Polanski), Hoogland, Amri (62e Schürrle) ; Bancé.
Carton jaune : 88e Polanski.

Écrit par Julien Mouquin

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4 Commentaires

  1. Ouah, terrible, je l’avais même pas relevé de suite ! 🙂
    héhé, j’attends avec impatience le résumé des « 100 ans de Dortmund » ! 😉

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