Dresde, un lundi soir

Quand le seizième rencontre le dix-septième du classement de deuxième division un lundi soir, ça donne quoi ? Des Biergarten archicombles, des supporters survoltés, plus de 22’000 spectateurs et une ambiance de feu. Là-bas, c’est Dresde et c’était assez mythique.

Entre un week-end de Bundesliga et un match de Ligue des Champions le mardi, cela ne valait pas trop la peine de rentrer au pays. Du coup, j’avais un lundi à occuper en Allemagne et un rapide coup d’œil au calendrier me permet de constater que le seul match à voir ce jour-là avait lieu à Dresde, à plus de cinq cent kilomètres de mon camp de base de Dortmund, pour de la deuxième division. Mais tu sais bien que ce ne sont pas quelques malheureux kilomètres qui vont nous retenir, surtout que les supporters du Dynamo Dresde sont réputés parmi les plus chauds, pour ne pas dire turbulents, d’Allemagne. Et puis, accessoirement, j’avais honte d’aller voir l’affiche phare de la première journée de la Ligue des Footix, alors il fallait bien compenser avec quelque chose de plus authentique au fin fond de l’ex-Allemagne de l’Est.

Dresde est magique

Le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’ai pas regretté le déplacement. Le stade, flambant neuf, est magnifique et situé aux abords d’un énorme parc. Tu marches dans la forêt et, aux détours des arbres, tu tombes sur quelques Biergarten assez imposants. Et le fait que l’on soit lundi soir ne semble pas inciter les fans à une quelconque modération. La bière locale, c’est la Feldschlösschen, mais rien à voir avec celle que l’on connaît par chez nous, c’est une authentique Dresdner Pilsner, bien meilleure que la nôtre.
Quant aux supporters du Dynamo, ils n’usurpent pas leur réputation. Derrière un but, il y a un mur jaune assez sympa (tu sais que ça me plaît, les murs jaunes) et les chants se succéderont durant nonante minutes, avec des chorégraphies originales et impressionnantes, c’était vraiment magnifique. Quand on voit l’ambiance de plus en plus formatée dans les stades de certains des plus grands clubs d’Europe, ça fait vraiment plaisir de retrouver ce genre de passion-là.

Kellerduell

Pourtant, le Dynamo Dresde ne va pas très fort. Néo-promu en juin dernier après une remontée fantastique et un barrage épique contre Osnabrück, Dresde connaît un destin un peu similaire à celui du LS, avec la perte de plusieurs héros de la promotion et des renforts qui tardent à trouver leurs marques. Mais l’espoir reste de mise, puisque le club continue à accueillir de nouveaux joueurs, comme le Bosniaque Subasic ou le Slovène Dedic, qui fêtaient leurs débuts sous le maillot jaune et noir lundi.
L’adversaire du jour est encore plus mal en point, le VfL Bochum. Après avoir manqué la promotion de justesse contre Mönchengladbach au printemps dernier, le club de la Ruhr misait sur la continuité pour tenter l’ascension. Mais l’échec contre les Fohlen a laissé des traces et le VfL, il est vrai diminué par quelques blessures, ne réussit rien de bon depuis le début de la saison. Et débarque au Glücksgas Stadion auréolé d’une peu glorieuse avant-dernière place au classement. Pas terrible pour un candidat déclaré à la promotion.   

Le tournant du match

Tu te doutes sûrement qu’un match de la peur de Zweite Liga, ça ne débouche pas forcément sur du football champagne. Bochum domine légèrement, se crée quelques occasions par son buteur nord-coréen Chong Tese, de retour de blessure, mais c’est Dresde qui est le plus dangereux, sur balles arrêtées, notamment deux coups de tête du Fussballgott saxon, le capitaine Robert Koch, et une frappe de Zlatko Dedic. Le match va basculer en fin de 1ère mi-temps avec l’expulsion du Japonais Takashi Inui, pour un deuxième avertissement consécutif à faute offensive inutile. Sur le coup, on dira que le meilleur Bochumer de ce début de saison n’a pas fait preuve d’une intelligence inouïe (ok, elle était facile). Je pensais qu’on allait en rester là pour cette première mi-temps mais l’arbitre a prolongé et du coup j’étais déjà à la buvette lorsque Dresde a ouvert le score sur un coup franc de Filip Trojan repris par la tête de Muhamed Subasic. C’est quand même ballot d’aller assister à un match à plus de mille kilomètres de chez soi et de rater un but que j’aurai pu voir tranquillement sur Sky, dans mon salon. Enfin, ce sont les joies du foot en live, j’échangerai ça pour rien au monde contre un match à la télé.

Muhamed Subasic ce héros

En crise, réduit à dix et mené au score, Bochum était bien mal barré. Et ne s’est presque pas créé d’occasions de revenir. Il n’y a guère que l’ancien Paul «Slawo» Freier, reconverti en latéral, qui a amené un peu de danger pour une défense dresdoise parfaitement organisée autour du Français Romain Brégerie, lequel ne doit pas trop regretter les ambiances calfeutrées du championnat de France. Le Dynamo a donc parfaitement géré son avantage et sa supériorité numérique, même s’il a dû attendre une balle arrêtée pour doubler la mise, un magnifique coup franc flottant de Muhamed Subasic dans le petit filet. Le mec, il vient de débarquer de Bosnie, il joue latéral gauche, il dispute son premier match avec Dresde et il claque deux buts, il y a pire comme entrée en matière, on connaît des latéraux gauches qui ont joué dix ans dans un club et n’ont jamais marqué. En plus, c’était une bonne idée d’en mettre deux car, en toute fin de match, Bochum a fini par réduire le score sur une belle frappe du joker Mirkan Aydin.

Europapokal, Europapokal !

Cette nouvelle défaite va enfoncer Bochum un peu plus dans la crise et l’entraîneur Friedhelm Funkel sera licencié deux jours plus tard. Le Dynamo lui remonte un peu au classement et devrait pouvoir assurer sans trop de problèmes le maintien une fois qu’il aura intégré ses nouveaux renforts. Les supporters eux sont déchainés, notamment les fameux Elb Kaida (!), et ont des ambitions plus élevées pour leur club, puisqu’ils entonnent des «Europapokal, Europapokal» dès la victoire acquise. La disparition de la RDA a pourtant  limité la possibilité d’un club comme Dresde de jouer la Coupe d’Europe. A moins que, par le biais de la Coupe… Le Dynamo a déjà éliminé Leverkusen en août 4-3 après avoir été mené 0-3 et jouera à Dortmund au prochain tour. Huit mille fans du Dynamo ont déjà acquis leur billet, bien que le match se jouera un soir de semaine. BVB – Dresde en 16ème de finale de la Coupe d’Allemagne, ce n’est peut-être pas l’affiche la plus prestigieuse de l’histoire du foot, par contre niveau ambiance je ne pense pas que tu trouveras beaucoup mieux en Europe cet automne.

SG Dynamo Dresden – VfL Bochum 2-1 (1-0)

Glücksgas Stadion, 22’604 spectateurs.
Arbitre : M. Schmidt.
Buts : 45e + 2 Subasic (1-0), 85e Subasic (2-0), 91e Aydin (2-1).
Dresden : Eilhoff; Gueye, Brégerie, Jungwirth, Subasic; Koch, Solga, Kegel (80e Papadopoulos), Trojan (75e Heller); Poté (75e Fort), Dedic.
Bochum : Lüthe; Freier, Maltritz, Acquistapace, Ostrzolek; Dabrowski, Kramer; Ginczek (68e Aydin), Vogt (79e Kefkir), Inui; Tese.
Cartons jaunes : 14e Inui, 31e Trojan, 35e Maltritz, 49e Jungwirth, 62e Freier, 81e Papadopoulos.
Carton rouge : 45e Inui (deuxième avertissement).

Écrit par Julien Mouquin

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3 Commentaires

  1. J’ai aussi eu la chance de voir le match, affalé sur un vieux tabouret en bois d’un Kneipe de Berlin-est. Mais je confirme: la Zweite Bundesliga vaut bien toutes les ligues des champions du monde! (sauf si on droit à un fianle Dynamo Zagreb vs. Trabzonspor :-))

  2. Oui, Mouquin, fais-nous une série !!

    Dresde un lundi soir, Cracovie un mardi soir, Lovech un mercredi soir, Makhatchkala un jeudi soir, Astana un vendredi soir et Echallens un samedi soir pour finir !

    Tu deviendrais une légende !!!

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