Des nouveaux amis

Trois semaines avant la finale de Wembley, la répétition générale entre les deux meilleures équipes du monde n’a pas livré d’enseignements majeurs mais a renforcé l’antagonisme entre les deux clubs. Dortmund a joué au foot, le Bayern a cogné et provoqué, au final le choc s’est soldé par un score nul frustrant pour le BVB.

A la fin du mois de juin, lorsque paraît le calendrier de la Bundesliga, la première chose que je regarde, c’est la date des derbies entre Dortmund et Schalke. La deuxième chose, la date des duels BVB – Bayern. Cette saison, quand j’ai découvert que le Borussia recevait le Rekordmeister lors de l’antépénultième journée, j’ai fait un rêve : fêter le titre à domicile lors de la 32e journée face aux Bavarois, comme en 2011 contre Nürnberg et 2012 contre Mönchengladbach. Si tu m’avais demandé en juillet dernier quel était mon souhait ultime pour la saison 2012-2013 du BVB, c’est cela que je t’aurais répondu, il n’aurait nullement été question de Ligue des Champions. Les choses ne se sont pas tout à fait passées comme espéré et la conservation du titre à Dortmund est rapidement devenue une vue de l’esprit, tant la supériorité du Bayern Munich étant patente sur cette saison de Bundesliga. Du coup, mon rêve de fêter le titre lors de l’antépénultième journée s’est évanoui. Par contre, que ce Dortmund – Bayern, bien que comptant pour beurre, puisse servir de répétition générale pour la finale de la Ligue des Champions, cela je n’aurai pu l’imaginer, même dans mes rêves les plus fous en début de saison, puisque le Borussia ne faisait même pas figure d’outsider en C1 après son parcours misérable de l’an dernier dans la compétition. Alors, bien sûr, si l’on aurait volontiers fêté le titre en ce samedi 4 mai, une finale de Ligue des Champions comme lot de consolation, on accepte volontiers.

La joyeuse époque de l’ignorance

Si tu as la patience de me lire régulièrement, tu sais que je me suis souvent offensé du peu de considération et d’attention dont jouissait la Bundesliga en dehors des frontières allemandes, en particulier en terres francophones. Depuis dix jours, c’est l’excès inverse : tout le monde veut absolument dresser l’éloge du foot allemand. On lit ou on entend des théories moisies de mecs qui n’ont rien compris aux codes, traditions, valeurs et principes de la Buli et qui, pour compenser leur méconnaissance du sujet, lui appliquent des standards tout droit tirés du foot anglais ou espagnol, complètement dénués de pertinence. J’ai lu tellement de bêtises depuis une semaine et demie que j’en viens déjà à regretter l’époque où le Footix moyen n’avait d’yeux que pour Barcelone, Real et Manchester et se contrefichait de la Bundesliga, qui restait réservée à un cercle fermé d’initiés et de connaisseurs.

La pire hérésie que j’ai lu c’est cette phrase selon laquelle entre le Dortmund – Bayern du Westfalenstadion et celui de Wembley, la seule chose que l’on regrettera, c’est la Krombacher ! De la Krombacher au Westfalenstadion ??? Quelle aberration ! Dans la capitale allemande de la bière (Munich, c’est pour les touristes), les dirigeants qui s’aviseraient de remplacer une bière locale (Brinkhoff’s, précédemment DAB) au stade par une bière passe-partout comme la Krombacher finiraient lynchés à un arbre de la Borsigplatz. Une autre sottise vue et entendue, c’est que ce Dortmund – Bayern, trois semaines avant la finale de Wembley, n’avait pas d’enjeu. Même si effectivement le résultat n’avait guère d’incidence au classement, il y a toujours un enjeu entre les deux clubs : le prestige. Je me souviens d’une époque pas si lointaine où le BVB ne militait pas du tout dans la même catégorie que le Bayern et squattait la deuxième moitié du classement, on avait des mecs comme Kringe, Degen, Kruska ou Brzenska, eux ils alignaient Kahn, Lucio, Sagnol, van Bommel ou Makaay, une autre planète, mais dans les confrontations directes, surtout au Westfalenstadion, joueurs et supporters dortmundois s’arrachaient toujours pour tenter de dialoguer d’égal à égal avec le Rekordmeister.

Teigneux Bayern

Ceci dit, c’est vrai qu’on arrive au stade moins tendus que lors du mythique BVB – Bayern d’avril 2012 décisif pour le titre. Moins de vingt-quatre heures après avoir grelotté sous le déluge de LS – Zurich, on découvre avec plaisir que l’été s’est installé sur la Ruhr. Le froid, la pluie, la neige ou le vent ne nous ont jamais empêchés de sacrifier au rituel de la tournée des Biergarten mais c’est quand même plus sympa sous le soleil, au son des Clash qui, depuis mardi dernier, sont redevenus à la mode à Dortmund, va savoir pourquoi. Mais pas question de céder au farniente, on avait un combat à mener dans les tribunes et c’est un Westfalenstadion surchauffé qui accueille deux équipes fortement remaniées par rapport à leurs exploits européens et par rapport aux onze de base qui débuteront la finale de Wembley. Mais peu importe qui se trouve sur la pelouse : un Klassiker, cela se gagne. Le Bayern place d’ailleurs d’emblée les débats sous le signe de l’agressivité déplacée et de la provocation. Le Rekordmeister a-t-il recouru à cette bonne vieille tactique des hockeyeurs consistant à envoyer des seconds couteaux abîmer les meilleurs éléments adverses ? En voyant l’attentat initial de Tymoshchuk sur Lewandowski, on n’est pas loin de le penser. Un club dont le président fraude allégrement le fisc n’en est pas une bassesse près, surtout quand il a fait de la victoire en Ligue des Champions une obsession. Et qu’un troisième échec en quatre ans en finale, surtout contre un rival national qui l’a tellement humilié lors des deux années écoulées, serait dramatique et pourrirait irrémédiablement une saison jusque-là grandiose.

Kevin Grosskreutz est magique

A l’agressivité bavaroise, le BVB va répondre par le jeu. Jakub Blaszczykowski centre pour Kevin Grosskreutz qui fusille Manuel Neuer pour l’ouverture du score. Avec mon maillot floqué Grosskreutz, je pavoise en Block 85 où l’on réussit le plus grand renversé de bières de la saison. Le BVB aurait pu classer l’affaire quelques instants plus tard si l’arbitre n’avait pas oublié un pénalty pour une faute de Contento sur Lewandowski. Et au lieu de 2-0, cela allait être 1-1 suite à une erreur de marquage de la défense dortmundoise sur un centre de Rafinha repris par Mario Gomez. Lequel avait par le passé souvent vendangé une kyrielle d’occasions dans des matchs décisifs au Westfalenstadion. Fidèle à sa réputation, l’avant-centre bavarois retrouve son efficacité lorsque l’enjeu est moindre. Lewandowski et Gomez ont l’occasion de donner l’avantage à leur équipe avant la pause mais ils se heurtent au gardien adverse.

Le pénalty raté de Lewandowski

Les choses s’enveniment encore après la mi-temps. On parle encore de pénaltys : l’un refusé au Bayern pour une intervention litigieuse de Subotic sur Pizarro, l’autre accordé au Borussia pour une main peu évidente de Boateng. Las, Manuel Neuer détourne magnifiquement l’envoi de Robert Lewandowski et prend un petit avantage psychologique en vue de la finale. Ceci dit, le gardien du Bayern va devoir prouver qu’il est capable de réussir une finale sans faute, ce qui n’avait pas été le cas l’an passé, ni contre Dortmund en Coupe d’Allemagne ni contre Chelsea en Ligue des Champions. Le Bayern finira à dix après un très vilain coup de coude sur Kuba signé Rafinha qui tenait absolument à démontrer qu’il était toujours aussi infect que lors de son passage à Schalke. Jürgen Klopp s’embrouille avec le traître Mathias Sammer et la fin de match n’est pas vraiment glorieuse. Dortmund ne parviendra pas à exploiter sa supériorité numérique, Julian Schieber galvaudant les dernières occasions, et le match se termine sur un nul frustrant, on quitte le stade déçus et fâchés (et accessoirement assez ivres).

On les déteste !

Le Bayern Munich n’a plus été capable de battre Dortmund en Bundesliga depuis trois saisons. Néanmoins, en 2012-2013, les confrontations directes parlent en faveur du Rekordmeister avec deux nuls en Buli mais deux victoires bavaroises à l’Allianz Arena en Supercup (2-1) et en DFB-Pokal (1-0). Néanmoins, ce duel de prestige aura au moins permis à tous les fans dortmundois de se rappeler une chose : on déteste le Bayern Munich, son pognon, sa vision mercantiliste du foot, ses supporters arrogants et opportunistes, son stade pour VIP, ses divas capricieuses, ses dirigeants à l’égo boursouflé et le pillage de Mario Götze. Gagner la Ligue des Champions contre eux n’en sera que plus savoureux. On fera le nécessaire dans les tribunes pour que cette finale se transforme en match à domicile et nos Jungs feront le reste. Je refuse ne serait-ce que de concevoir une autre issue à cette finale.

Borussia Dortmund – Bayern Munich 1-1 (1-1)

Signal Iduna Park, 80’645 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Gagelmann.
Buts : 11e Grosskreutz (1-0), 23e Gomez (1-1).
Dortmund : Weidenfeller ; Grosskreutz, Subotic, Santana, Schmelzer; Kehl (71e Reus), Sahin; Blaszczykowski (84e Bender), Gündogan (14e Leitner), Schieber; Lewandowski.
Bayern : Neuer; Rafinha, van Buyten, Boateng, Contento; Shaqiri, Tymoshchuk, Luiz Gustavo, Alaba (92e Hojbjerg); Pizarro (76e Müller), Gomez (67e Can).
Cartons jaunes : 10e Tymoshchuk, 39e Luiz Gustavo, 45e + 1 Boateng, 62e Rafinha, 64e Blaszczykowski, 85e Can.
Carton rouge : 64e Rafinha (deuxième carton jaune).
Notes : Dortmund sans Götze ni Piszczek (blessés), le Bayern privé de Kroos, Badstuber, Lahm, Ribéry, Schweinsteiger ni Mandzukic (blessés).

Écrit par Julien Mouquin

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12 Commentaires

  1. Je me réjouis tellement de voir Lewandowski signer après la finale, après le 0-4 que vous allez prendre.

    La petite cerise sur le gateau.

    Parce que le beau jeu, l’eau fraiche et les millions de copains qui se tiennent la main en chantant le générique d’Arnold et Willy, ça va un moment.

  2. Je constate que ce Mouquin est toujours si peu partisan et tellement objectif dans ses commentaires.
    Comme il n’y a plus le Barça à attaquer, alors autant s’en prendre au nouveau roi du foot mondial : le Bayern.
    Décidément Mouquin, tu nous fatigues à la longue.

  3. Je viens défendre le pére Mouquin qui a fait un post de vrai fan de la Bundesliga qui donc déteste le sur-puissant Bayern tout comme le vrai fan de la Liga que je suis déteste le Barça et le Real , ces multinationales qui détruisent le football .
    Ca vous fait plaisir d’assister à des compétitions dont le nom « championnat » est usurpé ?
    Aujourd’hui , on a un championnat de clubs européens disputé toujours par les mêmes en semaine , transformant leur match du week-end en entrainement .
    A quoi ça rime des équipes qui terminent avec 90 points , 2 défaites et 100 buts ?
    Où est le mérite de finir devant des équipes au budget 20 fois moindre ?
    Vous ne voyez pas qu’on veut nous fourguer une Euroligue par la force ?
    L’équipe de notre bled aprés 50 saisons de D1 n’aura pas d’autre choix que de redevenir amateur faute d’avoir un président Qatarien .
    Bandes de cons !

  4. Julien, écoute pas ces aigris, toujours à râler tels des femmes frustrées qui n’ont pas baisé depuis la chute du Mur de Berlin.

  5. Julien, je suis un grand fan de tes articles et j’admire ta passion! Et j’adore le paragraphe « La joyeuse époque de l’ignorance »! (T’en fait pas le footix moyen s’en retournera toujours au PSG, ManU, Chelsea, mancity, Real ou Barça… Les authentiques vrais fans du BVB, qui connaissent le club depuis 12 jours vont disparaître avec Götze, d’ailleurs, j’ai bien ri:
    https://twitter.com/BVBfansFF/status/328229108892962816 )
    Mais, tu en fais trop, le Bayern fait partie intégrante de la Bulli et si tu ne pouvais pas les détester, elle perdrait de la saveur(c’est un peu le LHC de la LNB et tu te fouttais des Ajoulots frustrés;-))…
    Sinon, bon match, bonne chance pour obtenir un billet et cette fois on va accrocher cette 5ème étoile, après on vous laisse la suivante et on partagera la 4ème au Brésil!

  6. @JC. Le Bayern a remporté 5 des 10 derniêres éditions de Bundesliga, ce n’est pas non plus une domination totale et implacable.

    Et je suis pas loin de penser que si les clubs qui ont remportés les-dits trophées avaient un brin de direction, ils auraient pu rivaliser quelques années.

    Pis bon, comme le dit Cocolet Jones, il faut bien un boss de fin de niveau sinon ça ne serait pas drôle. Méchant de fin de niveau, tellement méchant qu’il a filé du pognon à Dortmund le club des gentils bisounours ( qui n’a jamais versé à la mode des transferts surtaxé hein 🙂 ) histoire qu’il ne passe pas l’arme à gauche.

    Méchant de fin de niveau qui organise des matchs contre/pour aider financiêrement des équipes menacées.

    Ouais au final, il y’a sans doute pire comme méchant. Bah, on contineura à lire tes articles, puisqu’entre les deux ou trois paragraphes de supporteur bas du front, il y’a tout de même des points intéresants.

    @François Fellay ( si c’est ton vrai nom ). C’est toi le mur de Berlin.

  7. « …Dans la capitale allemande de la bière (Munich, c’est pour les touristes)… »

    Moi, j’aime bien faire le touriste pendant quatre jours tous les deux ans à Munich ! Pas toi, Julien ? 😉

  8. @captainKahn :
    ne me fais pas passer pour un affreux marxiste qui critique la richesse des clubs .
    Ce qui me dérange c’est l’attitude des instances du football qui laissent leurs compétitions devenir une mascarade .
    Même les Américains , c’est à dire les capitalistes les plus forcenés , ont compris que ce n’était pas viable en terme d’interêt et de spectacle .
    D’accord avec toi cependant pour dire que des 4 grands la Bundesliga était encore récemment le plus ouvert avec des champions comme Stuttgart et Wolfsbourg .
    Mais il faut bien constater que c’est bel et bien fini : le Bayern veut dominer en Europe et va donc tout écrabouiller en Allemagne nottament en pillant son seul rival .

  9. Idéalement, je trouverais aussi tout chou que Dortmund puisse conserver Gotze et Lewandowski – que je ne vois pas arriver à Munich, d’un très bon oeil dans le sens où … Ouais c’est des *ennemis* – et en conséquence voir une véritable bataille sur x années entre les deux clubs.

    Car mater le Bayern gagner match sur match, sans vaciller, ouais ça va un moment. ( Bon cette année je prends, après les désilusions de ces deux derniêres saisons )

    Seulement, la situation actuelle fait que c’est difficile, économiquement et au niveau de l’image. Cela dit, je ne vais pas les pleindre, ils vont recevoir suffisament pour pouvoir recruter du nouveau/investir dans le club.

    Ce dont j’imagine ils sont conscient, et veulent bien voir venir malgré les effets de manche de Watzk. C’est pas comme si ils faisaient la même chose avec les plus petits clubs qu’eux hein ( cf. Reus piqué à Glabach ). The Game is the Game, comme ils disent dans The Wire.

    Et c’est ce qui me « dérange » un peu dans l’article de Mouquin. Pour moi être supporteur, ce n’est pas forcèment devoir laisser son cerveau et un minimum de recul au vestiaire lorsqu’on parle ou écrit pour son club.

  10. Ca pour sûr , il y’aura toujours des clubs plus riches que d’autres .
    Ca n’empéche pas de mettre en place des garde-fou pour préserver un minimum d’interêt aux compétitions .
    Pourquoi ne pas revenir sur l’arrêt Bosman au nom du particularisme du football ou plafonner les salaires et les budgets ?
    L’année prochaine la série B met en place le « salary cap » .
    Ce sera interéssant à observer .
    Quoi qu’il en soit , je considére qu’etre supporter du Bayern , du Barça ou du Real ne rime à rien aujourd’hui surtout au niveau national .
    Le sport existe à travers les exploits .
    Ils sont où là ?

  11. Alors oui, je suis complètement pour qu’une solution comme un salary cap ou que quelque chose soit mis en place pour permettre un étalement des forces en présence. Je ne milite pas du tout, loin de là, pour des championnats à deux ou trois niveaux.

    Je soulignais juste les arguments de Mouquin sur le Bayern qui joue de son argent et de sa puissance pour récupérer les bons joueurs de Dortmund, un peu facile alors que Dortmund fait de même avec les clubs en dessous d’eux. ( Rien que cette semaine, à voir la sortie du président de Schalke sur Draxler )

    Une solution doit être trouvée mais au niveau des organisateurs, pas des clubs. Eux ne font ( enfin on se comprend, ce n’est pas des saints ) que de profiter du système.

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