Schade Pep, alles ist vorbei !

Le premier match officiel de Josep Guardiola à la tête du Bayern Munich consacre déjà le fiasco retentissant de la première saison de l’Espagnol à la tête du Rekordmeister. Quoiqu’il advienne du reste de la saison, le Bayern de Guardiola ne parviendra pas à défendre tous les titres détenus par le Bayern d’Heynckes. Porté par l’ambiance incandescente, quoiqu’un peu amoindrie, du Westfalenstadion, et aidé par les choix tactiques ubuesques des Bavarois, Dortmund remporte la Supercup au terme d’un match de très haut niveau entre les deux meilleures équipes d’Europe. Geil !

La Supercup, c’est nul ! C’est en substance ce que j’écrivais après les défaites du Borussia Dortmund dans cette compétition en 2011 contre Schalke 04 et en 2012 contre le Bayern Munich. Aujourd’hui, alors que mon équipe favorite triomphe dans cette Supercup, je devrai venir t’expliquer que c’est le trophée le plus prestigieux de la planète football et que rien n’a plus d’importance que la Supercup d’Allemagne. Mais je ne serai pas très crédible, surtout que, dans les deux heures précédant le coup d’envoi de ce Dortmund – Bayern, j’ai bien dû répéter dix fois « la Supercup, c’est nul ». Car la soirée n’était pas partie sous les meilleurs auspices pour mon retour au Westfalenstadion après une interminable pause estivale : quelques-uns de nos Biergarten préférés sont fermés, je ne retrouve pas mes potes aux traditionnels points de rencontre pour les apéros réglementaires, mes amis des Borussenstern ne sont pas sur le terrain avec leurs drapeaux, les abonnements n’étant pas valables, le Westfalenstadion est envahi par les touristes et on n’est pas à nos places habituels, on se retrouve dans un bloc dont la buvette accuse un débit beaucoup plus lent que dans notre Block 85 chéri. Du coup, je suis encore en quête de bières au moment du Never Walk Alone et donc d’humeur assez maussade au coup d’envoi. Heureusement, le scénario du match va rapidement me redonner le sourire. 

Les curieux choix de Guardiola

Le Bayern avait fait forte impression lors de la Telekom Cup dans son nouveau dispositif en 4-1-4-1 (qu’on peut aussi interpréter en 4-3-3), Josep Guardiola l’a donc reconduit. Mais un système qui a fonctionné dans le contexte de matchs amicaux sans grand rythme, va vite s’avérer inopérant face au pressing infernal imposé par une équipe dortmundoise portée par ses 80’000 fans, même si l’ambiance n’était pas tout à fait aussi bouillante qu’elle peut l’être pour un match de Buli. Il y a un certain panache, ou une certaine arrogance, c’est selon, de la part de Guardiola à faire table rase du passé, à jeter aux orties un 4-2-3-1 qui a permis au Bayern de tout rafler la saison passée et à vouloir réinventer la roue en imposant un système qui n’est absolument pas dans les gênes ni du Bayern ni du foot allemand.

Bien sûr, il est normal qu’une équipe qui joue avec le même entraîneur depuis cinq ans soit mieux disposée sur le terrain au mois de juillet qu’un adversaire qui joue son premier match officiel avec son nouveau mentor. Néanmoins, il faudra que Guardiola comprenne qu’il n’est plus dans un championnat en carton comme en Espagne : ici, il ne s’agira plus d’aligner les matchs exhibition contre des adversaires résignés dans des ambiances de cathédrale, le Bayern sera attendu partout dans des atmosphères survoltées et avec des adversaires surmotivés qui tenteront de profiter de la moindre faille pour s’offrir un succès de prestige contre l’effectif le plus onéreux de l’histoire du foot allemand. Et dans ce contexte, certains choix de l’Espagnol nous paraissent sans avenir : il est suicidaire d’arriver à Dortmund sans demi défensif de métier en sachant la pression que ne manqueront pas de mettre les Bubis, Shaqiri n’est pas un centre-avant, Mandzukic ne pèse absolument pas sur la défense adverse en évoluant ailier, alors que personne, à commencer par les principaux intéressés eux-mêmes, n’a vraiment compris quel était le rôle de Kroos et Müller. Clé de voûte théorique du système, Thiago Alcantara s’est fait manger par Bender (puis Kehl) et Sahin et tout l’édifice bavarois s’est mis à chanceler. L’an passé, le manque de mobilité de la charnière centrale bavaroise était masqué par la protection du duo Schweinsteiger – Martinez (ou Gustavo) et l’axe central pouvait jouer dans un fauteuil, sur son placement, sans jamais affronter des adversaires lancés. Samedi, privés de leurs anges gardiens, les camions van Buyten et Boateng ont dû faire face à la course des avions Reus, Kuba ou Aubameyang et ce n’est évidemment pas une très bonne nouvelle pour eux. L’an passé, en cinq matchs contre le Bayern (deux en Bundesliga, Coupe, Supercup et Ligue des Champions), Dortmund n’a marqué que quatre fois, en ayant parfois ressenti une certaine impuissance offensive ; samedi, en un seul match, le BVB marque aussi quatre buts avec l’impression de pouvoir mettre hors de position le Rekordmeister à chaque accélération…       

Lewa raus !

Insuffisant sur le plan collectif, le Bayern a aussi été trahi par des erreurs individuelles, comme cette mauvaise relance puis ce centre de Lewandowski relâché par le gardien Tom Starke pour offrir le 1-0 à Marco Reus. Le Bayern aurait pu égaliser lorsque Weidenfeller a sauvé devant Shaqiri ou Müller mais il aurait aussi pu encaisser un deuxième but, lorsque Lewandowski s’est vu annuler une réussite pour un hors-jeu inexistant puis s’est heurté au réflexe de Starke. S’il n’est pas à créditer d’un mauvais match, en étant impliqué sur trois buts, je ne vais pas pouvoir supporter toute la saison la nonchalance du Polonais et encore moins ses jérémiades sur son transfert avorté. C’est vrai, c’est affreux, il va devoir repartir pour une saison avec un salaire de miséreux à un million d’euros et demie, alors qu’il pourrait en gagner douze ailleurs. Mais il ne peut s’en prendre qu’à lui-même (et à son détestable agent) : personne ne lui a demandé de signer dans un club qui ne veut pas vraiment de lui et qui ne daigne pas faire d’offre pour lui racheter sa dernière année de contrat. Il n’en demeure pas moins que la situation actuelle et les états d’âme de Lewa peuvent être une source de déstabilisation pour le Borussia Dortmund et que les dirigeants seraient bien inspirés de régler le problème avant la fin du mercato, quitte à brader cette dernière année de contrat et à engager un joueur peut-être moins bon mais plus concerné par l’avenir du club.

La magie du Westfalenstadion

Déjà de haute tenue en première mi-temps, le match va devenir complètement fou après la pause. En difficultés sur le plan collectif, le Bayern peut toujours compter sur ses individualités, Philipp Lahm au centre et Arjen Robben à la reprise de la tête, pour l’égalisation. C’est alors que Guardiola va découvrir un phénomène dont il ne pouvait pas avoir conscience en Espagne, un moment d’hystérie collective au Westfalenstadion qui fait basculer le match. C’est tout d’abord Daniel van Buyten qui propulse un centre d’Ilkay Gündogan dans ses propres filets, avant que Lewandowski et Kuba ne lancent Ilkay Gündogan qui profite de l’absence de filtrage devant la défense pour parcourir trente mètres balle au pied, éliminer Müller et ajuster le petit filet. Superbe ! Le Bayern reviendra grâce à l’inévitable duo Lahm-Robben, passera tout près de l’égalisation lorsque Thomas Müller trouve la transversale mais c’est Dortmund qui aura le dernier mot : après un énième ballon perdu par Alcantara (Willkommen in Deutschland, Thiago !), Lewandowski lance Aubameyang lequel sert Reus pour un 4-2 validé malgré une position de hors-jeu. Marco Reus, tout un symbole, lui qui, contrairement à son pote Götze, lorsqu’il a dû choisir entre le Bayern et Dortmund, avait privilégié l’aspect affectif et sportif aux considérations financières. Blessé, Götzinho lui a eu l’interdiction de se rendre samedi au Westfalenstadion, par crainte des réactions véhémentes des supporters… 

Hédonisme pur

Comme le dit si bien Jürgen Klopp, la Supercup elle fait plaisir à celui qui la gagne et n’affecte pas trop celui qui la perd. On ne va donc pas tirer de conclusions péremptoires sur ce match. Cet échec met toutefois déjà la pression sur un Bayern qui prétendait tout gagner cette saison. L’an passé, le Rekordmeister d’Heynckes avait remporté les quatre compétitions officielles (Supercup, Bundesliga, DFB-Pokal et Ligue des Champions) qu’il avait disputées, cette saison il peut encore faire mieux en jouant la Supercoupe d’Europe et la Coupe du Monde des clubs en plus mais Guardiola n’arrivera pas au 100% de compétitions remportées de Don Jupp. Au-delà de la défaite, ce sont surtout les choix étranges de Josep Guardiola qui commencent déjà à susciter incompréhension et critiques, à commencer par celles de l’icône Bastian Schweinsteiger, qui ne voit pas trop quelle place pourrait être la sienne si le Bayern continue à jouer de la sorte.
De notre côté, on ne va pas s’enflammer après cette victoire ni préjuger de la capacité du BVB à contrecarrer la machine à pognon bavaroise sur la seule base de ce match qui reste de préparation, malgré son caractère officiel. Si l’on n’a évidemment pas vécu les mêmes émotions que lors des titres ou de la victoire en Coupe de 2011 ou 2012, on a savouré dans une optique purement hédoniste le plaisir d’une magnifique soirée de football dans le décor enchanteur et l’ambiance enflammée du plus beau stade du monde, avec en prime une victoire de prestige savoureuse contre un adversaire qui, depuis quelques mois, multipliait les agressions verbales et financières contre ce BVB qui l’avait tant humilié en 2011 et 2012. Et accessoirement, quand je compare le bonheur simple et joyeux qui irradiait des tribunes du temple jaune pour cette coupe en bois avec les timides célébrations bavaroises dans l’ambiance aseptisée de Wembley soixante-trois jours plus tôt en finale de C1, j’ai de plus en plus tendance à plaindre les supporters bavarois et à me réjouir de m’être entiché du club qui me correspondait le mieux.   

Borussia Dortmund – Bayern Munich 4-2 (1-0)

Signal Iduna Park, 80’645 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Drees.
Buts : 6e Reus (1-0), 54e Robben (1-1), 55e van Buyten (autogoal, 2-1), 57e Gündogan (3-1), 64e Robben (3-2), 87e Reus (4-2).
Dortmund : Weidenfeller ; Grosskreutz, Hummels, Subotic, Schmelzer; Sahin, Bender (46e Kehl); Blaszczykowski (72e Aubameyang), Gündogan (88e Papastathopoulos), Reus; Lewandowski.
Bayern : Starke; Lahm, Boateng, van Buyten, Alaba; Müller, Alcantara, Kroos (86e Dante); Robben, Shaqiri (67e Schweinsteiger), Mandzukic (75e Pizarro).
Carton jaune : 90e Boateng.
Notes : Dortmund sans Mkhitaryjan ni Piszczek (blessés), le Bayern privé de Neuer, Badstuber, Götze et Ribéry (blessés).

Écrit par Julien Mouquin

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3 Commentaires

  1. Guardiola va effectivement ruiner l équipe à mon avis. Je pense que le Bayern ne va remporter qu un seul trophée voir aucun… Mais dans les saisons à venir, ça sera comme la saison passée et on aura à nouveau le droit aux articles de frustration 😉

  2. Superbe partie de la part de Dortmund qui est l’équipe la plus plaisante à voir jouer d’Europe .
    Je sens que cette année , je vais essayer de mater un max de leurs matches .
    Pour la PepTeam , je ne suis pas inquiet : avec les moyens dont elle dispose et la différence avec ses rivaux en Allemagne , je vois mal comment elle ne pourrait pas remporter une compétition à 34 matches comme la Bundesliga .
    Il faut se rappeler que l’an dernier , elle a fini avec 25 points d’avance .

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