Le mur de Brême est tombé

Le Borussia Dortmund a eu besoin de tirer 32 fois au but pour venir à bout du Werder Brême et de sa nouvelle défense de fer (!). S’il est toujours en rodage, le BVB assure le minimum vital et conserve la première place du classement.

Au cours de mes innombrables pérégrinations footballistiques, j’ai déjà vécu pas mal de trucs plutôt insolites. Mais s’il y a bien quelque chose que je ne pensais avoir jamais l’occasion de connaître de mon vivant, c’est bien de voir le Werder Brême se pointer affublé du titre de meilleure défense de la ligue et d’unique club de Bundesliga à ne pas avoir encore encaissé de but depuis le début de saison. Oui, le Werder Brême, ce club qui a longtemps été une référence en Europe pour son football offensif et sa capacité à jouer les premiers rôles au classement malgré une défense en carton. Mais, avec le temps, l’usure du pouvoir a fait son œuvre, la défense brêmoise est devenue de plus en plus perméable, alors qu’une série de campagnes de transferts ratées ne permettait plus au club d’avoir la puissance offensive pour compenser les errements de son arrière-garde. Si bien qu’après quatorze ans de bons et loyaux services, il a été décidé durant l’été de se séparer de l’entraîneur emblématique Thomas Schaaf. Pour le remplacer, les Brêmois ont décidé de miser sur Robin Dutt, en faisant confiance non pas à l’entraîneur qui avait échoué à assumer les ambitions élevées du Bayer Leverkusen mais bien plus à celui qui avait réussi des miracles avec peu de moyens à Freiburg.

La nouvelle muraille

Car aujourd’hui, financièrement, le Werder ne fait plus vraiment partie des ténors de la ligue. Et il n’est plus question de jouer l’offensive à outrance mais bien de retrouver une certaine crédibilité défensive. On n’a pas perdu de temps à s’en rendre compte : lors des deux premiers matchs de la saison, face à des adversaires modestes, Braunschweig et Augsburg, contre lesquels le Werder de Schaaf se serait rué à l’attaque la fleur au fusil, les Werderaner ont laissé l’initiative du jeu et la possession du ballon à leur adversaire pour carotter deux victoires 1-0 contre le cours du jeu avec deux blanchissages à la clé. Une révolution ! On s’attendait donc à voir une équipe prudente débarquer au Westfalenstadion et on n’a pas été déçus. Disposé très bas sur le terrain, ultra-attentiste, le Werder était venu d’abord pour ne pas prendre de but. Le Borussia Dortmund s’est donc vu contraint d’assumer une possession de balle et une domination territoriale qu’il n’apprécie pas plus que cela dans ce qui s’est résumé à une séance d’attaque-défense.

La surprise Arnautovic

Toutefois, contrairement à la semaine précédente contre Braunschweig où il avait peiné à se montrer dangereux, le BVB parvient à se créer des occasions à la pelle, c’est plutôt à la concrétisation que cela a pêché. Le gardien Mielitz réalise plusieurs parades, notamment sur une frappe de Lewandowski, alors qu’un obus de Kuba ne trouve que la transversale. Dans une ambiance des grands soirs, le temple jaune trépigne d’impatience et de dépit devant le peu de réalisme de ses protégés. Brême n’est pas loin de réussir le hold-up sur sa seule incursion dans le camp adverse avant la pause mais le tir d’Arnautovic est juste trop croisé. Marko Arnautovic, c’était la surprise de l’entraîneur Robin Dutt. Ecarté du cadre brêmois pour raisons disciplinaires en fin de saison dernière, le fantasque autrichien ne s’est pas vraiment amendé en rentrant de vacances avec une condition physique précaire. Une entrée en jeu catastrophique lors de l’élimination en Coupe à Saarbrücken semblait l’avoir définitivement écarté des plans de l’entraîneur Dutt et le Werder cherchait à le vendre pour remplir un peu des caisses peu garnies. Mais comme il conserve une assez haute opinion de son talent, l’ancien joueur de l’Inter a, au grand dam se ses dirigeants, snobé les clubs intéressés par ses services, Dynamo Kiev, West Ham ou Celtic Glasgow. Pas assez bien pour lui. On a donc été surpris de le voir sur le terrain ; après, on ne sait pas si Robin Dutt compte vraiment sur lui ou s’il voulait profiter du déplacement contre un adversaire médiatique pour mettre en valeur son joueur et lui trouver un club. Réponse dans les prochains jours.

Chacun sa croix…

Si Brême doit se coltiner Arnautovic, Dortmund a également son propre boulet : Robert Lewandowski. A mon grand désarroi, le Polonais est toujours à Dortmund et ne semble pas décidé à bouger cet été. Après avoir pleurniché pendant des mois sur ses méchants dirigeants qui s’opposaient à ses velléités de départ, Lewa s’est vanté d’avoir personnellement refusé et opposé une fin de non recevoir au Real Madrid, à Chelsea, à Manchester United et Manchester City… J’ai de l’ad miration pour le footballeur, aucun respect pour l’homme et son entourage et ce n’est pas son but de vendredi soir qui va changer mon opinion. Car oui, l’honni Lewandowski a joué les sauveurs contre le Werder en inscrivant l’unique but du match après la pause, même si tout le mérite en revient à Marco Reus qui a délivré une véritable offrande au Polonais qui n’avait plus qu’à pousser la balle au fond. Le Westfalenstadion pouvait respirer, même si le BVB est resté sous la menace jusqu’au bout, faute d’avoir inscrit le numéro deux. Ce n’est pas pourtant pas faute d’avoir essayé mais Aubameyang a échoué seul devant Mielitz alors que Hunt a sauvé sur sa ligne devant Hummels. Du coup, on s’est offert un ultime frisson sur un tir du nouveau venu Di Santo détourné par Weidenfeller mais finalement le plus grand moment de frayeur de la soirée, cela aura été cette guêpe qui s’était perfidement infiltrée dans ma Brinkhoff’s dans le parking lors de l’apéro avec les Borussenstern ; heureusement que mon pote Stefan avait l’œil, qu’il soit remercié pour son intervention salvatrice : malgré mon amour du jaune et noir, je ne suis pas spécialement pressé de finir étouffé par une piqure de guêpe au fond de la gorge sur un parking du Westfalenstadion.

Le premier vrai test

Trois matchs, trois victoires, aucun carton reçu, le bilan dortmundois est positif en ce début de saison. On ne va cependant pas s’enflammer : le BVB a joué jusque là contre les trois équipes que, dans mes pronostics d’avant-saison, je destinais aux trois dernières places du classement et ne nous a pas franchement bluffé par la qualité du jeu présenté. Il n’y a guère que la deuxième période à Augsburg que l’on peut véritablement considérer comme aboutie. Mais le Borussia a fait le boulot, c’est l’essentiel ; après tout l’an passé, il n’avait inscrit que quatre points sur neuf à domicile contre les trois derniers du classement (Hoffenheim, Düsseldorf et Fürth)… Dimanche prochain, les Schwarzgelben passeront un premier vrai test avec un déplacement à Francfort, sixième la saison dernière et toujours soutenu par un public assez chaud ; cela devrait être pas mal et je ne vois pas d’objection majeure à ce que le BVB ne continue pas sa sympathique escapade en tête du classement. Car si un match au Westfalenstadion demeure toujours quelque chose d’exceptionnel, ça l’est d’autant plus lorsque Dortmund occupe la première place du classement, si ça pouvait perdurer quelques temps, on est preneurs.

Borussia Dortmund – Werder Brême 1-0 (0-0)

Signal Iduna Park, 80’645 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Zwayer.
But : 55e Lewandowski (1-0).
Dortmund : Weidenfeller ; Grosskreutz, Hummels, Subotic, Schmelzer; Kehl, Sahin; Blaszczykowski (69e Aubameyang), Mkhitaryan (81e Hofmann), Reus (88e Bender); Lewandowski.
Bremen : Mielitz; Gebre Selassie, Prödl, Lukimya, Caldirola; Yildirim (76e Elia), Junuzovic, Makiadi, Ekici (66e Kroos); Arnautovic (66e Di Santo), Hunt. 
Carton : aucun.
Notes : Dortmund sans Piszczek ni Gündogan (blessés), Breme privé de Schmitz, Pavlovic, Bargfrede ni Trybull (blessés).

Écrit par Julien Mouquin