À Zug on sort du train-train quotidien

Malley 2.0 c’est bien sympa, mais on sentait qu’en tant que Cultivateur Culturiste de la Gagne amateur, il en faudrait un peu plus pour optimiser notre appréhension de ce concept aussi novateur que complexe. Quoi de mieux donc qu’un petit voyage à la Bossard Arena, superbe écrin du EV Zoug, pour mieux comprendre comment un club qui… n’a pas gagné grand chose non plus (et même rien du vivant d’Axel Simic, si l’on excepte la Coupe dont tout le monde se tamponne le coquillard au lustre) se prépare à empiler les trophées avec un coach dont le CV tient sur un post-it et des joueurs dont la réputation de légèreté “là où ça fait mal” en playoffs n’est plus à faire. Tour d’horizon des ingrédients nécessaires à la domination sans partage de l’Helvétie hockeyistique dans un futur proche.

Le cadre

Après avoir passé les épreuves ferroviaires nous menant à Zoug (les supporters du FC Lucerne entre Sursee et la destination préférée de la diaspora japonaise, les policiers anti-fans bâlois trop excités en gare de Lucerne et les expats britanniques intellos adeptes de Martin Scorsese et surtout hyper bruyants dans le Lucerne-Zoug), on s’était dit qu’on méritait bien un petit remontant dans un décor idyllique au bord du Zugersee. Les anglophones semblent être monnaie courante ici si l’on se fie à notre ouïe et au fait que, comme tout Londonien qui se respecte, les Zougois semblent passer la journée partiellement dévêtus dans les parcs au moindre rayon de soleil accompagné d’une température non négative. D’ailleurs, si on ne savait pas que c’était probablement le pollen printanier, on aurait juré que l’odeur du pognon véhiculée par les décapotables et autres berlines nous piquait les yeux. Et pourtant on était loin, très loin d’avoir tout vu.

A Zoug, on se prend pour Genève pour provoquer l’adversaire vaudois.

Le stade

Bon, comme les animations au cœur de la cité des milliardaires une fois le soleil couché n’avaient pas l’air ébouriffantes, on avait fini par se diriger assez tôt vers la patinoire via le quartier défavorisé de la ville, le seul où on a l’impression d’être plus riche que l’habitant (un terrain de basket et le seul mur tagué du lieu). Et il faut dire que la Bossard Arena, c’est la classe. C’est pas la patinoire du Voyeboeuf si vous voyez ce qu’on veut dire. Elle a son panneau routier “Playoff City” flanqué de deux taureaux (le logo de Zoug n’était donc pas une antilope) au sommet d’un giratoire, sa tour et son immense file de badauds dont on ne sait pas s’ils sont là pour un billet, pour entrer ou si c’est juste la queue pour les chiottes. Ça, c’était la partie sympa. La prochaine étape est l’entrée dans la prison lausannoise. C’est là qu’on passe au présent pour vous faire vivre ces événements au plus proche du live, chers lecteurs. L’immigration américaine a encore beaucoup à apprendre : carte d’identité, photo pour la banque de données des hooligans plus si anonymes que ça et fouille excessivement approfondie. Et nous qui pensions que le prix du billet et la dégelée qui allait suivre faisaient déjà office de toucher rectal.

Pas mal ce petit stade…

Le public

La Bossard Arena, c’est le show du Hallenstadion couplé à l’impressionnant mur de supporters de la PostFinance Arena, le tout avec l’ambiance acoustique en plus (en gros sans le tintement des coupes de champagnes de Zurich et le silence assourdissant de Berne). Joli. Du côté visiteur, la SO semble avoir boycotté le contrôle d’identité, du coup ça manque un peu d’organisation mais on s’en sort pas trop mal quand même (en tout cas mieux que nos poulains sur la glace). Pour le confort, on repassera par contre. Notre enclos est d’une taille aussi réduite que la marge de manœuvre du box play du LHC et la hauteur (sic !) des marches n’a pas grand chose à envier à Malley 2.0. En plus on tombe sur les deux seuls Bourbines à partager notre cage (à en juger par leur air de biches dans les phares d’un poids lourd les pauvres ont dû se perdre). On regretterait presque l’hospitalité de la Tissot Arena avec tout ça. Non, aucune de ces marques n’a de partenariat avec Carton-Rouge, c’est encore plus beau quand c’est gratuit.

Les Zougois sont des Bernois avec des cordes vocales en somme.

Le contingent

Vu de Lausanne, et sans même jeter un œil à la feuille de match, l’équipe du EV Zoug a vraiment de la gueule pour une simple et bonne raison : Sandro Zangger n’y figure plus. Il aura fallu deux ans à leurs adversaires du jour pour en tirer les conclusions qui s’imposent et refiler cet authentique concentré d’adrénaline à leur bête noire luganaise qui fait décidément tout pour surtout éviter de se qualifier pour les playoffs la saison prochaine (et Arno Del Curto sera probablement bientôt libre donc il ne perd rien pour attendre). Blague à part, la triplette Martschini-Roe-Klingberg (souvent assistée de Junland), c’est pas trop mal non plus. Et du côté du kop vaudois, c’est facile, on a donné à tous les joueurs de Suisse centrale un nom de famille commun à scander pour des raisons pratiques. Si vous avez déjà suivi une rencontre d’un club romand depuis notre position privilégiée, vous connaissez sûrement ce sobriquet affectueux.

Partanen et Bertschy, aussi transparents que le double plexi qui nous sépare.

Le panache

Comment vous dire. D’un côté, la garnison du camp retranché de Petibonum se préparant à encaisser l’attaque du gros de la troupe d’irréductibles zougois (“Qui est gros ???”) cachés derrière un mur de boucliers (“Engagez-vous, qu’ils disaient…”). De l’autre, des morts de faim qui poussent le vice jusqu’à forechecker dans la zone adverse même lorsqu’ils sont en infériorité numérique et qui gagnent chaque duel. Même leur Zamboni est plus rapide qu’à Lausanne pendant les pauses, c’est vous dire l’écart entre les forces en présence.

Une occurrence rare : le LHC en power play.

L’intendance

À Zoug, il n’y a pas que les impôts qui sont bas. Le prix de la bière est également divisé par deux. Pour leur défense, personne dans la bourgade sous-taxée ne pensait qu’un Vaudois aurait encore les moyens de s’offrir une pinte après avoir déjà renoncé à payer son loyer pour s’assurer son sésame du soir. Et comme leur saucisse carbonisée assaisonnée au cancer ne nous disait pas grand chose, le choix était vite fait.

Une mousse zougoise en mode duty free.

Le slogan

On vous gardait le meilleur pour la fin. On pensait avoir tout vu avec le fameux #EncorePlusFort lausannois, la beatbox des Vernets et la chenille de Saint-Léonard, mais c’était avant que les responsables de la com’ de la nouvellement renommée “Playoff City” ne nous décoiffent avec leur #YesWeFan. Au niveau aération, on vous avait prévenus, Zoug c’est pas du vent et on n’y manque pas d’air.

A Zoug, on se la pète et on assume.

Le match

Il y avait un match ? Malheureusement Jan Alston, debout et ivre de rage dans la tribune de presse pendant les 60 minutes de jeu, était bien trop haut pour faire part de cette information aux 20 victimes expiatoires (et Tim Traber) sur la glace. Un 5 et un 0 sonnants et trébuchants, c’est le tarif. Comme le prix du billet d’ailleurs. La boucle est bouclée.

A propos Raphaël Iberg 174 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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8 Commentaires

  1. C’est toujours amusant de lire des lausannois se plaindre de l’accueil des supporters à Zoug..

    Guantanamo de Malley, No man’s land de Malley 2.0…

    • C’est toujours éminemment sympathique d’avoir des lecteurs qui perçoivent l’ironie, merci pour votre retour! 🙂

  2. Oui tu peux causer à Lausanne les transports communs puent l’urine et pour voir du paysage merci, pas de jet d’eau juste la grande caricaie et le zoo de Servion!! Quant au secteur visiteur tu peux causer à Lausanne on est soit en cage comme des chèvres (en même temps normal c’est Lausanne!) soit entouré d’un cordon de sécu merci le meilleur public du monde lol

    • Merci Neymar Jr pour ce commentaire d’une subtilité non feinte, dans la veine de vos simulations dans les 16 mètres. Il faudra que vous me disiez quel bus vous prenez quand vous visitez notre magnifique ville, il me tarde de l’essayer!

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