50’000’000 de footballeurs, et nous et nous et nous ?

Pour sortir de la déprime post-Jamaïque, je me suis lancé à corps perdu dans le suivi des qualifications de l’Euro Ridiculo-Ridiculique (je voulais dire : Austro-Helvétique). Entre une jolie série de matches samedi et l’Italie-Ecosse de mercredi soir, seule la mascarade de dimanche contre la Colombie aura eu le pouvoir de me sortir de mon euphorie. Parce que cette campagne de qualifications est depuis ses premiers matches phénoménale : des grands en difficulté, des petits qui se rebellent, des nobodies en tête de groupe, des vieux souvenirs qui remontent à la surface, des buts à interpeler Fox Mulder… Dieu que le football est beau ! Tour d’horizon.

Groupe A

Avant ces deux dernières journées, le classement était très surprenant dans ce groupe, avec la Finlande en tête devant la Serbie, la Pologne et le Portugal. Il faut signaler que les Hodgson’s Boys avaient commencé la campagne très fort, en s’imposant 1-3 en Pologne. C’est donc un sacré coup de tonnerre qui a zébré le ciel mercredi : une défaite 1 à 0, à Bakou. Ça ne vous rappelle rien ? Rolf Fringer pourrait au moins envoyer une carte au Roy pour le remercier : la Nati n’est donc pas la seule équipe à s’être couverte de ridicule en Azerbaïdjan. Et la Pologne n’en demandait pas tant : après avoir justement laminé cette même équipe d’Azerbaïdjan 5-0 samedi, elle a écarté l’Arménie et occupe maintenant solidement la tête de son groupe.
L’autre tremblement de terre est survenu à Almaty, où le Kazakhstan a fêté samedi sa première victoire officielle depuis son adhésion à l’UEFA. Contre qui ? Rien moins que la grande Serbie, qui a dû pour le coup revivre un calvaire à la hauteur de la fessée 6-0 concédée face à l’Argentine en phase finale de la dernière Coupe du Monde. C’est tout de même assez peu fréquent qu’une grande nation du foot européen perde contre un pays qui vaut quarante au Scrabble…
La dernière passe d’arme très digne d’intérêt dans ce groupe ma foi passionnant a opposé une Belgique à la rue (qui avait justement concédé d’entrée de jeu un piteux 0-0 à domicile contre les Kazhaks) au fringant Portugal. Le très peu futé gardien belge Stijnen aurait mieux fait de se taire, quand il déclara dans la semaine précédant la partie que le meilleur moyen de battre les Lusitaniens était de s’arranger pour mettre Cristiano Ronaldo sur une civière après deux minutes de jeu… Résultat : 4-0, deux buts de qui vous savez, et une Belgique qui n’a pas touché la balle. Les Diables Rouges font aujourd’hui moins peur que certaines chansons de DJ Bobo, c’est dire.

Groupe B

S’il faut un «groupe de la mort» dans chaque compétition qui se respecte, ce sera celui-ci : un Champion du monde, son Vice, un quart de finaliste (oui mais bon, aux penalties…) et une équipe qui ne lâche jamais rien… L’Italie, la France, l’Ukraine et l’Ecosse ne vont laisser que des miettes aux faire-valoir géorgiens, lituaniens et féringiens.
Le classement devrait être serré jusqu’au bout (dernier match de l’Ecosse contre l’Italie… dernier match de la France en Ukraine…) mais force est d’avouer que la Squadra a marqué des points mercredi, face à une Ecosse qu’on espérait moins limitée. Voilà donc une équipe au repos samedi qui a vu ses trois principaux contradicteurs faire le plein (trois points pour la France en Lituanie, pour l’Ecosse contre la Géorgie et pour l’Ukraine contre les Féroés), qui reçoit les leaders en comptant cinq points de retard, et qui rend une copie maîtrisée de bout en bout, avec un jeu agréable (donc pas vraiment à l’italienne), modèle de patience et de sérénité. Après un début calamiteux (match nul à domicile contre la Lituanie avant de perdre en France), l’Italie se replace dans la roue des leaders. Les places seront chères…
A noter que l’Ukraine occupe la tête du classement à égalité avec la France, avant le prochain… France-Ukraine du 2 juin. C’est vrai que dans ce coin de pays, on n’aime pas trop les Français. Mais on se rappelle tous du huitième en Allemagne contre l’Ukraine… Je crois que je vais regarder Lituanie-Géorgie.

Groupe C

Dans un groupe qui comprend la Grèce, la Turquie et la Norvège, personne n’attendait la Bosnie-Herzégovine aussi haut. Et pourtant, une victoire surprenante (1-2) samedi en Norvège leur permet d’occuper la troisième place du groupe ! Ceci dit, les places qualificatives semblent jouées : la Turquie et la Grèce fouleront les pelouses de par chez nous en 2008.
La Turquie sort grande gagnante de ces quatre jours. Après s’être imposée samedi en Grèce, dans le jardin de son meilleur ennemi et néanmoins champion d’Europe en titre, sur la marque sans appel de 1-4, elle a joué son troisième match en terrain neutre et à huis clos (suite aux événements que vous savez) à Francfort, arrachant à l’ultime minute l’égalisation face à la Norvège (2-2, Altintop). A noter que le gardien norvégien Thomas Myhre, sur les deux goals, a prouvé être une espèce d’hybride entre Arconada, Zuberbühler et un bandit manchot (il faut le voir pour le croire : http://www.dailymotion.com/tag/football/video/x1ko2p_euro-2008-qualifiers-turkey-v-norwa).
J’en profite pour pousser un énième coup de gueule contre la sanction inique que représente un match à huis clos : aucune autre mesure ne punit à ce point le 99,9% des gens pour les agissements de quelques voyous. Quelle responsabilité pour les événements d’après match lors du fumeux Turquie-Suisse endossent les supporters turcs ? Aucune, et ne roulez pas des yeux : j’y étais. Ce sont certains joueurs et l’encadrement turcs qui devraient être sanctionnés, et pas leurs supporters. Et d’ailleurs, quelle responsabilité pour les fans norvégiens ? Pour quelle raison débile sont-ils privés de suivre ce match autrement qu’à la TV, quand on voit que ce salopard de Fatih Terim est toujours à gesticuler sur son banc ? Honte à l’UEFA pour son mépris chronique du public en général, et des supporters en particulier.
Les Turcs seront donc en Suisse l’année prochaine. Prions pour que la rencontre entre les plus excités d’entre eux et les plus nationalistes de chez nous ne tourne pas en émeute. Je suis assez pessimiste. Quand il s’agit de montrer au monde que nous ne sommes pas moins cons que les autres, il y a généralement des compatriotes pour répondre «Présent !».

Groupe D

Ah ! ce match ! Ah ! ce Tchéquie-Allemagne, à faire vaciller la foi du plus endurci des footballophobes… Quel régal ! La Tchéquie de Galasek, Rosicky, Baros, Koller, en tête du groupe à la différence de buts, qui recevait l’Allemagne de Mertesacker, Frings, Podolski et Kuranyi, deuxième… Quand cette équipe d’Allemagne se met à jouer, dans la lignée de ses prestations à domicile lors de la dernière Coupe du Monde, elle est enivrante. Avec une moyenne d’âge qui leur permet d’aborder confiant l’Euro 2008 et, surtout, le Mondial 2010, les Allemands ont rendu une copie digne du match presque parfait qu’ils avaient disputés en juin dernier, contre la Suède, en huitième de finale.
Cette victoire 1-2 (les buts de Kuranyi, c’est comme les cacahouètes. Quand tu y goûtes, tu ne peux plus t’arrêter) devrait suffire à nos voisins pour se qualifier. Pendant ce temps, l’Irlande essaye d’effacer une ahurissante défaite 5-2 à Chypre en octobre dernier, suivie d’une ubuesque victoire 1-2 à Saint-Marin, but victorieux marqué à la 94e minute ! En battant en quatre jours le Pays de Galles et la Slovaquie, l’opération de rachat a bien commencé, mais elle ne suffira probablement pas.
Salutations au passage à Saint-Marin, cinq matches, autant de défaites et trente buts encaissés. S’ils veulent se relancer, ils peuvent me contacter : je les mettrai en contact avec Köbi Kuhn.

Groupe E

A l’instant du tirage au sort, les dirigeants anglais étaient sûrement relativement satisfaits de leur sort. Certes, la Croatie, la Russie et dans une moindre mesure Israël ne peuvent pas être snobés, ceci dit il y avait clairement la place de passer. Mais tout est allé de travers pour les coéquipiers de Rooney. Il aura suffit d’un pitoyable 0-0 à domicile contre la Macédoine pour gripper la machine, suivi d’une défaite 2-0 en Croatie. Lors de ce match, le gardien Robinson semblait d’ailleurs en mesure de postuler pour devenir deuxième portier de Norvège, derrière Myhre.
Ainsi, samedi dernier, les toujours très arrogants «inventeurs du football» ont été tenus en échec en Israël, prouvant que la troupe de McLaren n’est plus qu’une pâle copie de la bande de Gazza (jeu de mot en abîme au 18e degré, j’ai besoin de repos). Et de se retrouver à mi-parcours virtuellement quatrièmes de leur groupe ! C’est que les autres équipes ne se posent pas de questions : la Croatie et la Russie sont toujours invaincues, et Israël, qui a balayé l’Estonie 4-0 mercredi soir, entend bien avoir son mot à dire. D’autant plus que lors de la prochaine journée, les Anglais seront au repos…
Dans ce groupe, tout pourrait bien se jouer le 17 octobre, à l’issue de la double confrontation Croatie-Israël et Russie-Angleterre. Et à ceux qui estiment qu’il est impensable de vivre un Euro sans l’Angleterre, je répondrai avoir vécu une World Cup 94 sans la France, pis ça allait très bien aussi.

Groupe F

L’Angleterre à la peine dans son groupe, et l’Irlande du Nord en tête du sien, il y a de quoi se taper le cul par terre sur l’air de la traviata. Avant cette double journée, les Irlandais étaient troisièmes, à cinq points d’une flamboyante Suède (quatre matches, douze points, dont une démonstration contre l’Espagne). Après une mise en bouche contre le Liechtenstein, les verts ont simplement bouffé du viking pour s’installer tranquillement en tête (2-1). L’attaquant Healy, qui n’est même plus titulaire dans une équipe de Leeds qui flirte pourtant avec la relégation, survole les débats pendant ces qualifications : 9 buts marqués sur les 10 de son équipe, et en tête des buteurs de cette campagne devant Podolski ! Un triplé contre l’Espagne, un autre à Vaduz, les deux buts contre la Suède… S’il jouait contre la Belgique, je connais un gardien qui lui promettrait la civière !
La Suède, avec un match en moins, semble être en mesure de surmonter la déception et de se qualifier, mais les places seront disputées depuis la résurrection de l’Espagne. Sans vraiment convaincre, les Ibères ramènent six points de leurs deux derniers matches à domicile contre le Danemark (2-1) et l’Islande (1-0). Le très détesté Aragonés pourra donc continuer à s’accrocher à son poste de sélectionneur comme le père Vinas à un billet de mille. La double confrontation du 17 novembre Espagne-Suède et Irlande du Nord-Danemark sera à tous les coups décisive…
Petit bisou au Lichtenstein de Bidu Zaugg qui a battu la Lettonie 1-0. Si la Lettonie cherche à se relancer, j’aurai bientôt le numéro du sélectionneur de Saint-Marin, un peu de patience.

Groupe G

La Bulgarie avait un bon coup à jouer mercredi, en recevant l’Albanie. En effet, la Roumanie avait quatre jours plus tôt contraint la Hollande au nul (0-0) à Rotterdam. L’occasion était belle de s’installer dans le duo de tête. Et voilà que les Albanais, qui n’avaient pas brillé jusqu’ici, tiennent le nul (0-0 également)… Belle occasion ratée donc, même si la deuxième place reste accessible : on voit mal la Biélorussie ou une Slovénie en chute libre venir se mêler à la lutte.
La Hollande semble pour sa part avoir les moyens de sortir en tête de ce groupe, probablement le plus faible des sept. A titre tout à fait personnel et à contre courant de l’élan de sympathie inexplicable dont bénéficie cette équipe, je demande à les revoir après le match de la honte Hollande-Portugal en huitième de la Coupe du Monde, 12 cartons jaunes, quatre rouges, et un attentat de Boulahrouz sur Cristiano Ronaldo que je ne suis pas prêt d’oublier.

A propos Yves Martin 247 Articles
Cette Nati a deux vertus : celle de faire rêver quasi tout son peuple, et celle d'emmerder les connards de la fachosphère. Longue vie à elle.

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