LHC : le cirque continue

C’est devenu une mauvaise habitude : le Lausanne Hockey Club a une nouvelle fois limogé son entraîneur. S’il n’est pas accompagné d’un changement des mentalités, ce neuvième (!) changement d’entraîneur depuis novembre 2003 sera aussi infructueux que les huit précédents.

Ainsi donc, Dany Gélinas n’aura pas survécu à une effroyable série de 8 matchs / 19 points, marquée par un piteux succès 6-1 contre le leader Chaux-de-Fonds, montrant bien que l’entraîneur ne parvenait pas à trouver des solutions avec cette équipe. Sans doute Dany Gélinas n’a-t-il pas tout fait tout juste depuis le début de la saison. Car, n’en déplaise à nos amis ajoulots ou chaux-de-fonniers, le contingent du LHC est largement supérieur à celui de ses adversaires de LNB et devrait lui permettre de sa balader en tête du classement, malgré ses problèmes d’étrangers. Comme tel n’est pas le cas, l’entraîneur porte forcément une part de responsabilité, que ce soit par l’absence relative de schémas, l’impuissance du power-play, la mise à l’écart de certains éléments, quelques problèmes relationnels ou le brassage des lignes  (même si celles-ci n’ont pratiquement plus bougé depuis le retour de Tremblay fin décembre). D’un côté, il est difficile d’imputer au seul Dany Gélinas la gestion erratique du dossier étranger, le manque de rendement des mercenaires et de certains joueurs clés, les problèmes de cohésion dus notamment à des renforts genevois imposés ou encore le dilettantisme de l’équipe dans quelques approches de match.

Un éternel recommencement

Car finalement, les problèmes qu’a rencontré Dany Gélinas sont les mêmes qui ont causé la perte de ses prédécesseurs récents Mike McParland, Riccardo Führer, Gary Sheehan, Andreï Khomutov, Bill Stewart, Heikki Leime, Paul-André Cadieux, Kevin Ryan et Paulin Bordeleau : une certaine inconstance, des joueurs qui oublient leur hockey dès qu’ils revêtent le maillot du LHC, un manque de sérieux dans la préparation des matchs, des clans qui se forment dans l’équipe qui finit par ne plus adhérer au discours de l’entraîneur… Depuis Mike McParland en 2001-2002 (lors du retour en LNA), aucun mentor des Lions n’est parvenu à tirer la quintessence du contingent à disposition.

Et à chaque fois, le même schéma se répète : on pense que le licenciement de l’entraîneur résoudra tous les problèmes, le nouveau venu provoque en effet une certaine embellie, mais l’équipe retombe rapidement dans ses vieux travers, jusqu’au limogeage suivant et ainsi de suite depuis presque six ans. Le LHC a tout essayé sur son banc : des Suisses, des Canadiens, un Russe, un Scandinave, des gentils et des méchants, des autistes autoritaires et des potes qui boivent la bière après l’entraînement, des routiniers du hockey suisse et des néophytes dans notre pays, une légende du hockey mondial et un transfuge de 1ère ligue, un ami des bêtes et un chasseur d’ours, tous ont essuyé le même constat d’échec à la tête du Lausanne Hockey Club. Ne serait-il pas temps de se demander si le problème n’est pas ailleurs ?

Quelles leçons de l’an passé ?

Il y a un an presque jour pour jour, Kevin Ryan avait été licencié après une défaite à Bienne (3-0), rappelant étrangement celle d’Olten jeudi : un match au sommet dans une ambiance confidentielle et un LHC pas ridicule mais assez nettement dominé. Après un début de saison tonitruant, les joueurs ne supportaient plus les méthodes autoritaires de leur entraîneur et avaient fini par avoir sa tête. Manifestement sans qu’on ne leur rappelle leurs responsabilités. On se souvient de la suite : après avoir débuté par 13 victoires d’affilé, Paulin Bordeleau avait assisté impuissant au bradage de la série contre la Chaux-de-Fonds, perdue bien davantage dans les boîtes de nuit les veilles de match que sur la glace contre un adversaire pourtant inférieur. Manifestement cette sinistre mascarade n’a pas servi de leçon car l’inconstance de l’équipe depuis le début de la saison et le manque de concentration, d’implication et de combativité lors de certains matchs montrent que rien n’a vraiment changé. Les joueurs passent, les trois quarts de l’équipe changent chaque saison, on a l’impression que le seul élément stable, c’est cet état d’esprit qui ne paraît guère différent de celui de l’équipe qui, au soir d’une relégation mortifiante contre Bâle, s’était précipitée dans une discothèque de la ville pour célébrer l’événement en compagnie de nombreux anciens joueurs du club.

Quel soutien pour l’entraîneur ?

Bien sûr, inculquer discipline, rigueur et constance à une équipe est en premier lieu l’apanage de l’entraîneur. Mais à Lausanne, sa marge de manœuvre est très étroite. Quelle autorité pouvait avoir Dany Gélinas en sachant que, s’il était trop strict, il suffisait à ses joueurs de perdre trois matchs de suite pour lui faire subir le même sort que ses prédécesseurs ? Quelle autorité pouvait avoir Dany Gélinas alors que le partenaire presse du club s’est lancé dans un lynchage médiatique acharné et injustifié à son encontre, sans réaction de ses dirigeants ? Quelle autorité pouvait avoir Dany Gélinas, lorsque ces mêmes dirigeants le maintiennent en admettant s’être posé la question de son départ ? Dans ces conditions, difficile de parvenir à diriger d’une main de fer un effectif réputé instable. Et comme si le rôle d’entraîneur du LHC n’était pas assez difficile comme cela, Dany Gélinas s’est encore vu affublé d’un grand nombre d’autres casquettes, d’entraîneur adjoint à directeur sportif en passant par responsable des juniors. Si Dany Gélinas a sans doute commis des erreurs et si l’on n’a pas souvent été satisfait du jeu proposé, tout a aussi été fait pour lui savonner la planche. Et à l’impossible, nul n’est tenu. On ne peut donc que remercier Dany pour le travail accompli et lui souhaiter bonne chance pour la suite de sa carrière, dans un contexte un peu moins agité que Malley.

Et maintenant ?

Le changement d’entraîneur apportera sans doute une embellie passagère, certains joueurs retrouveront probablement un niveau de jeu plus en rapport avec leur standing. Mais si l’on se contente d’un changement d’entraîneur en pensant tout résoudre, le LHC va au devant d’une nouvelle désillusion : une victoire en ¼ de finale pour sauver les apparences, une défaite sans gloire en ½ et tout le monde se retrouve pour la grande fiesta de fin de saison à la Zapoff pour célébrer le début de vacances. Avec, pour les supporters, comme l’an passé, le sentiment d’avoir laissé passé une belle occasion de tenter un retour en LNA. Tout le monde loue le professionnalisme que le LHC a introduit dans ses structures administratives mais cette professionnalisation ne semble malheureusement pas encore s’étendre au domaine sportif. Aujourd’hui, il manque un homme fort au Lausanne Hockey Club. Jim Koleff aurait dû être celui-là mais sa maladie et son décès en ont malheureusement décidé autrement. Il faut aujourd’hui un entraîneur ou un directeur sportif qui soit capable de résister aux pressions, capable de placer les joueurs devant leurs responsabilités, avec une personnalité et un palmarès qui lui permettent d’imposer ses choix aux joueurs, au public et aux médias. Car actuellement, sans directeur sportif, avec des propriétaires présents seulement quelques jours par année, des entraîneurs en sursis dès le jour où ils signent leur contrat, entamant chaque match avec une épée de Damoclès sur la tête, et un contingent qui change de fond en comble chaque saison, le LHC ne va nulle part. Et la désaffection du public constatée cette saison montre que les supporters commencent à en avoir plus qu’assez de voir les mêmes erreurs inlassablement répétées.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Écrit par Julien Mouquin

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27 Commentaires

  1. Joli article. Je reste quand même déçu de ce nouveau changement d’entraineur. L’année Passé le PSG était très mal en point. Ce n’est pas pour autant que Paul LeGuen a été viré. Et on voit cette saison que la stabilité prote ces fruits.

    Kaitra

  2. AIE AIE AIE

    Désespérant, ce LHC que j’aime depuis maintenant 40 ans ne changera jamais…
    Quel gàchis!
    Bon courage au prochain entraineur

  3. Apparemment, l’objectif des dirigeants du LHC est d’être champion de LNB, pas d’être promu en LNA. Dans ce cas, Gélinas a failli. La sanction est logique…

  4. Pathétiques dirigeants. C’est les joueurs-noceurs qu’il aurait fallu punir, pas l’entraîneur.

    Comme J. Mouquin, je vois le LHC sortir piteusement en demi…

    Dommage car il y a tellement mieux à faire avec club, géré de façon clownesque depuis tant d’années…

  5. Question sarcastique puisque l’on est sur CartonRouge:

    M. Gelinas a-t-il été congédié pour un motif sportif ou un motif juridique (site officiel: « a été démis de ses fonctions »)

    Pour ceux qui comprennent l’anglais, M. Gélinas tenait parait-il des propos publics (intérieur de la patinoire de Malley) envers ses joueurs que l’on pourrait qualifier de « mobbing ».

  6. Faire du 2ème degré c’est intéressant, mais lire le vendredi : « Le LHC aura réussi à entretenir l’illusion d’un involontaire hold-up durant 50 minutes. Ayant à peu très tout tenté pour encaisser un maximum de buts, leurs efforts auront finalement été récompensés en fin de match » et le samedi « Ainsi donc, Dany Gélinas n’aura pas survécu à une effroyable série de 8 matchs / 19 points, marquée par un piteux succès 6-1 contre le leader Chaux-de-Fonds, montrant bien que l’entraîneur ne parvenait pas à trouver des solutions avec cette équipe. », c’est vraiment d’une stupidité affligeante…
    Dommage, j’aime bien le ton de vos articles, mais là c’est vraiment écrire du n’importe quoi.

  7. non… Barry Alter assisté de Ken Lockett et Scheidegger entraîneur des gardiens!!
    Non, sérieusement, je suis fan du LHC depuis des années mais là, franchement, ils commencent à me les gonfler!!! Comme si les changements d’entraîneurs avaient fait du bien!!! Chers dirigeants du LHC rentrez chez vous vous ne vallez rien de bon

  8. Et si la seule chose à changer était d’arrêter de se croire systématiquement supérieur ?

    Il est vrai que les résultats et le classement ne valent jamais « une bonne vieille analyse », n’est-ce pas ?

  9. C’est à chaque fois pareil la moitié des joueurs dès qu’ils enfilent le maillot du LHC deviennent lent et feignant (sauf pour boire des verres). y Faudrait 20 Staudenmann dans cette équipe prêt à cracher leur tripes et leur déjeuner sur la glace

  10. @ Mistral :
    L’article de vendredi concernait le match à Olten : largement en dessous des attentes que l’on pouvait avoir, notamment au niveau de l’engagement et de la qualité de jeu. Cela dit, ça n’empêche pas que, globalement, à la fin du 4è tour (présent article), le bilan comptable soit très bon, même si la manière n’était pas toujours au rendez-vous. Comme contre Olten par exemple.

    A bien relire les 2 articles, je ne crois pas qu’il y ait de contradiction 😉

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