24 heures avec… Fabrice Santoro

Wimbledon oblige, CartonRouge.ch se met à l’heure du gazon (non, je ne suis pas lesbienne) et rend hommage à un grand (par le talent) bonhomme du tennis. Fabrice Santoro dispute sa dernière saison sur le circuit ATP et ton site préféré a profité de la quinzaine londonienne pour se glisser dans son quotidien.

Il a 36 ans, toutes ses dents et toujours autant la main verte. En tournée d’adieux cette saison, le vétéran français en a toutefois encore fait voir de toutes les couleurs à certains de ses adversaires. C’est peut-être en raison de son «vrai» nom – Fabrice Vetea Santoro – que son jeu ressemble plus à celui d’une athlète du circuit féminin avant que la WTA ne ressemble plus à un concours d’haltérophiles bulgares qu’à celui des cogneurs de l’ATP Tour. Toujours est-il que le natif de Tahiti a encore gagné huit matches sur 17 disputés en 2009.

Putain, 20 ans !

Demi-finaliste à Eastbourne, Santoro a courbé l’échine à «Wimbo» dès le deuxième tour. Il faut toutefois avouer que tout terrien de base qu’il soit, l’ex-numéro un mondial Juan Carlos Ferrero est au jour d’aujourd’hui bien plus habile sur gazon que sur les autres surfaces. Notre Français préféré a quand même auparavant renvoyé Nicolas Kiefer à ses chères études au premier tour. C’est le lendemain de ce succès que nous avons pu nous glisser dans son sac, pour mieux comprendre la vie d’un champion qui a passé plus de vingt ans chez les professionnels.
Le joueur aux 767 (!) semaines passées dans le top 100 de l’ATP ne se réveille déjà pas comme un être humain normalement constitué. Alors que son réveil sonne à dix heures – il fallait bien fêter son succès la veille -, il ne se lève ni du pied gauche, ni du pied droite. Il se jette sur ses deux jambes et se rend compte qu’il était seul dans son lit. «Pourtant, je suis bien meilleur en double», marmonne-t-il, déçu de sa virée à Camden de la nuit dernière.
Le citoyen genevois empoigne alors sa tasse de café à deux mains et d’un geste extrêmement bien maîtrisé, il retourne la vaisselle qu’il a empognée tout en y engouffrant au vol deux sucres sans toucher les bords de la sucrière, bluffant ainsi son coach du moment (le Français a décidé d’être entraîné cette année sur les divers tournois par tous les hommes qui l’ont suivi au cours de sa longue carrière). Il réussira un nouvel exploit technique dans la foulée, en parvenant à lancer son ustensile dans la machine à laver d’un geste précis, pris depuis le canapé du salon de l’appartement loué aux alentours de la Mecque du tennis.

La Maison de l’ambidextre

Santoro décide ensuite d’aller faire quelques emplettes dans le centre londonien. Il faut dire qu’avec 9’619’111 dollars gagnés sur le circuit, qui en font le joueur français le plus riche de l’histoire, il a de quoi voir venir. Et quand, en plus, on habite à Genève histoire de payer moins d’impôts, l’affaire est belle… Bref, Fabrice décide d’aller à la Maison du gaucher pour voir si enfin un magasin a été créé pour lui. Non pas qu’il souhaite acheter des produits là-bas, mais simplement, il souhaite se renseigner sur l’existence, ou non, d’une Maison de l’ambidextre. Et ça fait longtemps qu’il l’attend cette échoppe ! Mais à voir, seuls ceux qui se servent uniquement de leur main gauche ont droit à cette facilité. Une sorte de racisme des temps modernes.
Vexé, le Tahitien rentre dans son pied-à-terre anglais pour se concocter un repas énergétique avant l’entraînement de l’après-midi. Il empoigne la poêle d’une main, deux saucisses de l’autre, et il répète son geste du service. Pendant que les aliments sont en l’air, il saisit l’huile, en badigeonne la poêle qu’il pose ensuite sur la plaque chauffante. Trois millièmes plus tard, les bangers and mash atterrissent et commencent immédiatement à griller. Lucky Luke n’a qu’à bien se tenir. La gestuelle pour mettre les pâtes à cuir est tout aussi impressionnante. Les nouilles sont sur la table et dans un geste rappelant cruellement le service à la cuillère de Michael Chang à Roland Garros, Santoro récolte dans un même mouvement le sel, l’eau et l’huile d’olive.
L’heure de passer à table est encore plus cocasse. Il ne se souvenait plus pourquoi il avait banni spaghetti et nouilles de son répertoire… Et à l’heure d’enrouler les pâtes entre sa fourchette et sa cuillère, il se rend compte de son erreur. Vous pouvez l’essayer chez vous à votre guise, quand on a pris la fourchette à deux mains, il n’en reste plus pour l’autre service ! Bref, après avoir bataillé pendant vingt minutes avec les aliments, Fabrice décide qu’il est l’heure d’une bonne sieste réparatrice et néanmoins digestive.

Mmmh, Sharapova…

Pendant son heure passée dans les bras de Morphée, le joueur aux vingt  participations à Roland Garros rêve. Il se voit gagner Wimbledon en double-mixte avec Maria Sharapova. Mais bien vite, cela tourne au cauchemar. Sa copine Astrid Veillon est dans les tribunes, aux côtés de Guy Forget, l’homme qui l’a bouté hors de l’équipe de France de Coupe Davis, avec laquelle il avait pourtant gagné le Saladier d’Argent en 2001. «Battling Fab’» se réveille en sursaut et en nage. Le temps de se remettre de ses émotions, il se dit que ses partenaires de double sont à l’heure actuelle Michael Llodra ou Arnaud Clément… Pour être honnête, il avait bien envie de se masturber en pensant à la grande poupée russe. Mais après la vision d’horreur de ses deux compatriotes, doublé du fait que son pénis est bien trop court pour se branler à deux mains, il opte finalement pour la douche froide.
Un peu frustré, il prend le chemin de l’entraînement aux alentours de 16h. Il n’y est pas allé avant, car la canicule sévit ces jours sur Londres. Et comme son pharmacien lui a dit qu’à son âge, ce n’était pas recommandé, il fait attention… En route, il se rend compte qu’il n’a pas vraiment envie de torturer la petite balle jaune aujourd’hui. La lassitude de l’âge peut-être. Bref, au détour d’un court verdoyant, il croise une bande d’enfants en train de s’adonner aux joies du football. Joueur dans l’âme, le Français jette son sac et court au milieu des bambins.
Très vite, il tente sa spécialité. Une «Blanco», qui consiste à tenter de dribbler son adversaire en bloquant le ballon entre ses deux pieds et en effectuant un saut de cabri. Pas de chance pour le lilliputien des terrains de tennis, il tombe en face d’un jeune Anglais de dix ans, nourri au petit déjeuner anglais. Le matin même, ce rouquin aux ascendances irlando-galloises avait englouti des toasts avec du beurre, de la marmelade, des oeufs à la coque, frits et brouillés, du bacon, une saucisse grillée, des tomates cuites, des champignons frits, quelques haricots blanc, du boudin noir, un certain nombre de pommes de terre sautées, de la purée aux choux et à la viande. Le tout arrosé de ketchup et de sauce brune, bien entendu.

Gigantic Wheel

Taclé à hauteur de rotule, Fabrice s’envole littéralement et atterrit 22 mètres plus loin. C’est toujours pareil se dit-il… Déjà à l’école, quand il jouait au rugby ou au basket, il finissait soit écrasé par un camarade plus gâté par la nature, soit en train de pleurer dans les jupons du professeur tellement les grands ils sont pas gentils et ils lui donnent pas le ballon. C’est à cause de cette immense frustration que «Fab’» a dû développer un jeu différent des standards actuels. Rien que de voir une grande gigue s’écraser dans le filet après lui avoir envoyé une amortie de fond de court le fait jouir intérieurement. Mais là, se faire ridiculiser au foot par des gamins de onze ans et déjà plus grands que lui, c’en est trop.
Fabrice pète un plomb. Dans la cohue des travées de Wimbledon, il prend à partie tous les gens qui dépassent le mètre 62. Autant dire tout le monde. Dans son anglais châtié, il éructe : «iou hare a feuquingue bigue boille ! Ail foque iou verri muche !!». C’est alors qu’il a le malheur de croiser la Duchesse de Kent. Sous le coup de l’énervement, il lui vole son chapeau. Il tente de le déchirer en deux, mais la toile est résistante et ses biceps trop chétifs. Il s’acharne et c’est le drame. Une rafale de vent venue du nord avec flux ascendant s’engouffre dans le couvre-chef. Fabrice ne lâche pas le morceau et il s’envole. Dix mètres, trente mètres… Cent mètres bientôt ! Guère habitué à dépasser le double-mètre malgré sa détente d’athlète, il est terrorisé et ferme les yeux afin de ne pas être victime du vertige.
Dans son malheur, le Tricolore a finalement eu de la chance, puisqu’il s’est retrouvé accroché à la Gigantic Wheel, la grande roue qui permet aux touristes de voir Londres par en-dessus. Secouru par une bande de touristes japonais, certains d’avoir trouvé là un des lutins du Père Noël, il est photographié sous toutes les coutures. «Un nem vivant, un nem vivant !», crient les Asiatiques. C’en est trop pour Santoro, qui craque. Il est alors recueilli par une ambulance et conduit directement dans un hôpital psychiatrique de la capitale anglaise. Plongé d’emblée dans un sommeil artificiel, Fabrice évacue toute sa rage grâce aux médicaments. Fatalement, sur le court le lendemain, il n’était pas en mesure de défendre ses chances et courbe l’échine contre Ferrero… Le pire ? Il a essayé de jouer avec des tallonnettes qui ont totalement faussé son jeu et sa géométrie du court.

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6 Commentaires

  1. C’est le moment de ressortir le calembour suivant: « Un central sans Fabrice c’est comme une arène sans taureaux ».
    Moi qui aime bien défendre nos chers commentateurs de la TSR et bien hier j’ai quand même failli m’étrangler avec mon yogourt mocca; PAD à osé le mot magicien en parlant de Murray….(c’est vrai qu’il a sorti quelques coups extraordinaires mais la décence à des limites qu’il ne faut pas franchir)
    Merci pour ces quelques instants passés avec un joueur qui nous est bien sympathique, avec Notre petit magicien préféré. Beau travail Gary.
    Et maintenant tous en choeur la chanson de Lily Allen en espérant que Roger pourra la fredonner dans sa tête après sa victoire sur Murray dimanche, in front of the Queen;)
    P.S. En fait Elisabeth a enfin trouvé une excuse pour venir voir ce joueur suisse exceptionnel dont on parle depuis si longtemps:)
    P.P.S. Moi je l’aime bien la Queen!

  2. Merci beaucoup pour ce superbe article.

    Simone…

    PS : Je signe Simone, car sous lulu, la rédac me fait jamais de commentaire… Bande de sexiste va 😉

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