Un sacre qui en appelle d’autres

Le football est un sport qui se joue à 11 et où à la fin ce sont toujours les Allemands qui gagnent. La célèbre phrase de Gary Lineker avait un peu perdu de sa pertinence ces dernières années mais elle pourrait redevenir d’actualité. L’Allemagne est devenue lundi championne d’Europe M-21 en atomisant l’Angleterre 4-0 en finale à Malmoe. La revanche en finale de la Coupe du Monde dans douze mois ?

On peut comparer le foot allemand avec le ski alpin suisse dans la foulée du triomphe de Crans-Montana en 1987 : après la réunification et le titre mondial en 1990, l’Allemagne s’est endormie sur ses lauriers, négligeant le relève en pensant sa suprématie acquise, alors que dans le même temps les rivaux humiliés d’alors, l’Autriche en ski, la France ou l’Italie en foot, développaient des concepts de formations novateurs et performants. Du coup, les Allemands ont pris un gros retard et ont eu de plus en plus de peine à rivaliser au plus haut niveau, alors que leurs équipes juniors n’arrivaient même pas à se qualifier pour les phases finales des différentes compétitions européennes ou mondiales.Certes, l’Allemagne étant ce qu’elle est, même en période de vaches maigres, il y a eu quelques succès, le titre européen en 1996, la finale mondiale en 2002, les Ligues des Champions de Dortmund (1997) et du Bayern (2001) mais ces succès étaient plus dus à la légendaire rage de vaincre allemande et à la résistance de quelques vieux dinosaures des années glorieuses qu’à la qualité intrinsèque des joueurs. L’Allemagne a touché le fond en 2004 avec une équipe nationale qui quittait l’Euro par la toute petite porte après un nul contre la Lettonie et une défaite contre la Tchéquie B, alors que les résultats des clubs allemands en Coupe d’Europe avaient été tellement médiocres que la Bundesliga se retrouvait derrière la Norvège ou la Hongrie au coefficient UEFA !

Une première historique

La perspective de la Coupe du Monde à domicile a poussé l’Allemagne à redresser la barre et à rattraper son retard. Aujourd’hui, l’Allemagne a comblé une bonne partie de ses lacunes. Certes, le joueur moyen de Bundesliga aujourd’hui âgé entre 25-30 ans appartenant à cette génération sacrifiée présente un déficit tactique et technique patent par rapport à son homologue français, italien ou espagnol. En revanche, la nouvelle génération n’a plus rien à envier à ses congénères étrangères, bien au contraire.
Tous les voyants sont au vert aujourd’hui outre Rhin : la Bundesliga connaît un engouement populaire sans précédent et devrait piquer une place en Ligue des Champions à l’Italie en 2010 ou 2011, les clubs professionnels germaniques sont globalement bénéficiaires et n’hésitent pas à lancer des jeunes, les équipes nationales volent de succès en succès… Certes, la relative modestie des droits TV et les rigueurs du système fiscal allemands ne permettent pas de rivaliser avec l’Espagne ou l’Angleterre pour attirer les meilleurs joueurs du monde, ce qui rend assez aléatoire des grandes performances en Coupes d’Europe. En revanche, au niveau des équipes nationales, il faudra sans doute s’habituer à revoir l’Allemagne systématiquement s’inviter dans le dernier carré de toutes les grandes compétitions : la Nationalmannschaft est vice-championne d’Europe en titre chez les actifs et championne d’Europe en titre en M-17 (2009), M-19 (2008) et, depuis lundi, M-21. C’est la première fois que le même pays détient les trois titres continentaux majeurs du football espoir.

Le réalisme était allemand

Ceci dit, l’équipe d’Allemagne n’a pas toujours été flamboyante dans ce tournoi suédois. D’ailleurs, le jeu présenté par l’équipe d’Horst Hrubesch a suscité pas mal de critiques outre Rhin avant la finale. Il est vrai que le futur duo de choc du Werder Brême Marko Marin – Mesut Özil a souvent déçu, les deux joueurs apparaissant bien émoussés après une longue saison en Bundesliga. Si le jeu offensif allemand n’a pas toujours été convaincant, en revanche la défense s’est montrée très solide, avec le gardien Manuel Neuer (Schalke 04) et les défenseurs Andreas Beck (Hoffenheim), Benedikt Höwedes (Schalke 04), Jerome Boateng (Hambourg) et Sebastian Boenisch (Brême). De tout le tournoi, la Nationalmannschaft n’a encaissé qu’un but, sur corner, mais aucun sur une action de jeu.
Les Allemands ont même réussi à donner une leçon de réalisme à l’Italie en demi-finale. Non pas que les Transalpins se soient montrés particulièrement brillants, c’est pas le genre de la maison, mais ils ont été très dangereux sur leurs deux armes offensives dans cette compétition : les frappes lointaines et les balles arrêtées. Auteur d’un match remarquable, le portier Manuel Neuer a réussi trois arrêts délicats sur des tirs longue distance de Balotelli et Giovinco, alors que sur corners il a réalisé une parade miraculeuse et a été suppléé une fois par la latte et deux fois par des défenseurs sur la ligne. Guère dangereuse, la Nationalmannschaft a réussi un petit hold-up en inscrivant l’unique but du match sur un tir surprise du latéral Andreas Beck, l’une des révélations de la saison avec Hoffenheim et déjà appelé trois fois en équipe A.

La démonstration en finale

L’Allemagne a réussi de très loin sa meilleure performance lors d’une finale magnifique et disputée dans un excellent état d’esprit. Inspirée en attaque, intraitable en défense, la Nationalmannschaft a réussi le match parfait pour atomiser le grand favori du tournoi, l’Angleterre, 4-0. S’il a parfois déçu dans le tournoi, Mesut Özil a été le match winner avec la passe géniale pour le 1-0 de Gonzalo Castro (Leverkusen), le coup franc flottant du 2-0 qui a surpris le gardien Loach en début de 2e mi-temps et le service pour le 3-0 de Sandro Wagner. L’attaquant du MSV Duisburg s’offrira le doublé avec un tir enroulé en fin de match pour un retentissant 4-0. Pénalisée par l’absence de son gardien Hart et de ses attaquants Agbonlahor et Campbell (tous suspendus), l’Angleterre n’a que rarement inquiété une défense allemande parfaitement protégée par un monstrueux Mats Hummels (Dortmund) en libéro devant la défense. Theo Walcott décevant, James Milner était un peu seul pour tenter de fomenter la révolte anglaise, même si Lee Cattermole (tir sur la latte puis reprise sauvée sur la ligne) a été bien près de relancer le match en début de 2e mi-temps. Mais au final, le succès allemand ne souffre d’aucune discussion.

Un Angleterre – Suède d’anthologie

L’autre moment fort de cet Euro M-21 2009 restera la demi-finale hallucinante entre le pays organisateur, la Suède, et l’Angleterre. Assommés par un but concédé à la 1ère minute, les Suédois ont complètement raté leur première mi-temps et ont atteint la pause avec un sévère 0-3, sur trois buts presque identiques, avec des corners mal dégagés et repris par les défenseurs anglais Martin Cranie et Nedum Oduhoa, ainsi que par le capitaine suédois Mattias Bjärsmyr pour un autogoal. On ne pensait pas les Scandinaves capables de revenir et d’inquiéter l’impressionnante charnière centrale de Manchester City Micah Richards – Nedum Onuhoa mais cette équipe suédoise a montré des ressources morales et des qualités de jeu insoupçonnées.
Grâce à un collectif très inspiré sur les ailes, les Nordiques sont revenus à 3-3 entre la 67e et le 75e, avec une belle action collective conclue par Marcus Berg, un superbe coup franc d’Ola Toivonen et un troisième but d’anthologie avec une remise en aile de pigeon de Robin Söder (sans ling…) et une volée de l’inévitable Marcus Berg. Avec sept buts en quatre matchs, l’attaquant du FC Groningue a pulvérisé le record de buts marqués dans cette compétition, qui était jusque là de trois ! Le brave Henrik Larsson peut gentiment penser à la retraite, avec Marcus Berg et Ola Toivonen la relève paraît assurée. Les Suédois ont laissé passer leur chance dans les prolongations, à 11 contre 10 après l’expulsion stupide de Fraizer Campbell, avec notamment une tête sur la latte de Berg.
La séance de tirs au but a été l’image du match, complètement folle. Le meilleur Anglais, James Milner, que Fabio Capello présente comme le futur meneur de la Three Lions, a commencé par rater son penalty en faisant une John Terry. Puis vint le show Joe Hart : le portier de Manchester City a sorti le penalty de Marcus Berg, inscrit lui-même le premier but de la série, puis écopé d’un avertissement sévère (synonyme de suspension pour la finale) pour avoir joué les Bruce Grobbelaar de service. Finalement, tout s’est joué au 12e penalty avec le tir sur le poteau de Guillermo Molins, qui avait été l’un des inspirateurs de la folle remontée suédoise. C’était très cruel pour la Suède, qui aura toutefois illuminé son Euro en présentant le jeu le plus spectaculaire des huit participants.

Angleterre – Allemagne, la revanche ?

Quant à l’Angleterre, malgré la déroute en finale, elle peut aussi voir l’avenir avec optimisme. A l’instar de l’Allemagne, la Three Lions a longtemps été écartée de ces compétitions juniors, elle fait un retour en force. On s’est beaucoup gaussé de l’invasion étrangère en Premier League mais force est de constater que cela n’empêche pas les clubs de lancer des jeunes, y compris dans des clubs ambitieux comme Arsenal, Manchester City, Aston Villa ou Manchester United. Les places sont peut-être plus rares qu’ailleurs mais les jeunes qui parviennent à s’imposer bénéficient de l’apport de joueurs et entraîneurs étrangers, ce qui est un avantage considérable par rapport à d’autres pays très réticents à admettre des mentors venus d’ailleurs et qui persistent avec les mêmes schémas de jeu depuis trente ans.
On a beaucoup parlé de la domination du football latin au début du siècle, avec l’avènement d’équipes comme le Turquie ou le Portugal et les succès en actifs ou en juniors de la France, l’Italie ou l’Espagne. On assiste peut-être à un renversement de tendance avec le retour au sommet de l’Angleterre, l’Allemagne ou la Hollande. Si le tirage au sort le permet, on parie sur une finale de Coupe du Monde Angleterre – Allemagne le 11 juillet 2010 à Johannesburg ?

Écrit par Julien Mouquin

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18 Commentaires

  1. L’italie méritait à 400% elle a fait un match magnifique malheureusement elle n’as pas eu de chance c’est ça le foot. l’italie a encore une fois montré qu’elle a les meilleures jeunes.

    A+

  2. non j crois pas…(pr la rancoeur)

    c’est comme si j’écrivais pour la 168’476 ème fois que l’Angleterre n’ira nulle part tant qu’elle ne nationalisera pas un gardien étranger…(mais que fait Capello…!)

    peut-être la lassitude…

  3. Ah mouquin!!!
    « C’est pas le genre de la maison ».
    J’ose pas imaginer si l’Italie avait joué cette demi-finale de la façon dont a joué l’Allemagne ce que t’aurais balancé sur la squadra!!!!
    Et là, stupeur c’est ta 2ème patrie donc c’est solide défensivement et tu nous sors qu’Heuer et Beck ont excellé!!!
    Les Transalpins pas particulièrement brillants? Tes gars méritaient d’en prendre 4 et en plus ils nous ont montré un grand CATENACCIO!!!!

  4. Joe Hart le gardien de la sélection anglaise a été prêté pour la saison complète à Birmingham City, ça lui donner du temps de jeu et c’est un gardien prometteur au même titre que Ben Foster.
    Wait and see

  5. La Mannschaft, toujours drivée de main de maître par Jogi Löw, ne s’est pas essoufflée après l’Euro et sa finale perdue et assure de belle manière sa qualif’ pour l’Afrique du Sud.
    Ajoutons quelques uns de ces M-21 Champions d’Europe, un Ballack cuvée 2002 et un bon « Stamm » dans les buts (Neuer ou Adler)… et vivement juin 2010 !!!

    LG

  6. C’est rigolo comment mr Mouquin met tjrs la France et l’Italie comme les moutons noirs quand on sait que ses amis sont à l’origine du match de la honte Autriche-Allemagne de l’assassinat de Battiston en 82 et du match truqués en corée (USA-Allemagne) but imaginaire

  7. C’est pas les moutons noirs des affiches udc ahuri va !!! Alors quand tu vois certains commentaires tjrs sur les même nationalité ou quand certains autres crie au scandale quand on parle de Turquie en EU par contre quand il font gagner l’Allemagne alors la tout va bien non ???

  8. @ La redac,

    En parlant de racisme il faudrait peut-être balayer devant votre porte, merci.

    En tout cas j’ai pas le profil moi, au plaisir de ne plus consulter ce site, tschüss.

  9. « …quand on sait que ses amis sont à l’origine du match de la honte Autriche-Allemagne de l’assassinat de Battiston en 82 et du match truqués en corée (USA-Allemagne) but imaginaire… »

    magnifique ! moi je pense que tu devrais rester.. t’es un tout bon !

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