La marche triomphale

En ce week-end de carnaval, en lieu et place d’un cortège, c’est à une marche triomphale que l’on a assisté, celle du Borussia Dortmund vers le titre de champion d’Allemagne. Le BVB s’est approché un peu plus du sacre en dominant Köln, malgré un exceptionnel Michael Rensing dans les buts de Geissböcke.

Ce Westderby entre Dortmund et Cologne marquait le retour des héros au Westfalenstadion. Les héros ? Ces jeunes joueurs du BVB qui, une semaine auparavant, avaient surclassé le vice-champion d’Europe en titre du Bayern Munich sur sa pelouse de l’Allianz-Arena dans ce qui était peut-être le meilleur match vu cette saison en Europe, pour la 1ère mi-temps en tous les cas, avec un rythme incroyable (seulement 15 fautes en 90 minutes). Et ce avec la plus jeune équipe jamais alignée en Bundesliga puisqu’à part les vétérans Barrios (26 ans) et Piszczek (25 ans), tous les joueurs dortmundois alignés au coup d’envoi à Munich étaient âgés de 23 ans ou moins.

Le LHC rhénan

L’adversaire du jour, c’est le 1. FC Köln qui est à la Bundesliga ce que le Lausanne Hockey Club est à la ligue nationale suisse de hockey. Les deux villes ont en commun d’être célèbres pour leur cathédrale, les deux clubs partagent leurs couleurs rouges et blanches, leur propension à faire l’ascenseur entre première et deuxième division et une immense ferveur populaire mal exploitée par un management souvent calamiteux. Quant à l’emblème du club, le bouc de Cologne n’est pas sans rappeler les chèvres de Malley. Mais là où la comparaison vire au mimétisme, c’est lorsque le 1. FC Köln a voulu engager cet hiver l’attaquant d’Hambourg Eric Maxim Choupo-Moting mais que le transfert a avorté en raison d’un fax défectueux qui a fait parvenir la demande de qualification hors délai à la ligue. Bref, à la prochaine pitrerie des dirigeants du LHC, attends un peu avant de lancer le traditionnel «il n’y a qu’à Lausanne que l’on voit des choses pareilles», il est tout à fait possible que le 1. FC Köln ait connu pareille mésaventure.

Karneval in Westfalenstadion

Et, à l’instar du LHC, le 1. FC Köln semble monter en puissance en cette fin d’hiver. Relancés par les nombreuses arrivées du mercato et le retour en forme des attaquants Podolski et Novakovic, les Geissböcke figurent même parmi les meilleures équipes d’Allemagne depuis le début de l’année 2011. Et sont donc bien décidés à venir réussir un truc au Westfalenstadion pour lancer idéalement le week-end du carnaval. Historiquement, le week-end du carnaval ne réussit guère au 1. FC Koln mais il y a deux ans les Domstädter avaient mis fin à la malédiction avec un succès historique, en plein carnaval, à Munich contre le Bayern, l’idée est donc de rééditer pareil exploit. La plupart des supporters colonais débarquent costumés (et passablement éméchés, cela va sans dire) à Dortmund, le match va donc se jouer encore plus que d’habitude dans une ambiance d’immense kermesse populaire.

De chômeur à sauveur

La rencontre va rapidement tourner au monologue du BVB contre un Cologne recroquevillé en défense. Il y a toutefois un homme, qui pointait il y a encore quelques mois au chômage, qui va longtemps retarder l’échéance, le gardien du FC Michael Rensing. Sans club depuis son éviction au Bayern, il s’entraînait avec un club de 7e division jusqu’au moment où Köln, qui cherchait un gardien pas cher pour remplacer Mondragon, parti outre-Atlantique, l’a relancé. Pour l’instant, c’est une réussite totale et Rensing, avec moins de pression qu’au Bayern, s’affirme comme un bon gardien de Bundesliga. Vendredi soir, il a été le meilleur homme sur le terrain et il a évité à ses coéquipiers une dérouillée monumentale. Il s’est ainsi interposé brillamment sur des frappes de Subotic (10e) et Santana (31e). Et lorsqu’il était battu, après une percée de Bender et une conclusion un peu maladroite de Barrios et Lewandowski, c’est son coéquipier Pezzoni qui a sauvé sur la ligne (18e).

Lewandowski, enfin…

Avec son intense pressing offensif, Dortmund ne laisse aucun répit à ses adversaires et c’est l’une de ses grandes forces. La décision va tomber au moment où Cologne commençait à entrevoir l’éventualité d’arriver miraculeusement à la pause sans dommage : cela part d’une balle en cloche de Nuri Sahin, Robert Lewandowski est le plus prompt à réagir et arme une demi-volée parfaite dans le petit filet opposé, cette fois-ci Rensing n’a eu aucune chance. Voilà un but qui va faire du bien au joueur polonais, présenté comme un grand espoir du foot européen, mais qui peine à trouver ses marques dans le 4-2-3-1 du BVB en évoluant à un poste de numéro 10 qui n’est pas le sien. Mes voisins polonais dans la SüdOstTribüne sont aux anges, eux qui parcourent 960 kilomètres toutes les deux semaines pour venir voir le BVB depuis Katowice (avec seulement 720 kilomètres, je fais presque figure de supporter local, du moins tant que je n’essaie pas de parler en allemand).

Immer wieder Rensing

Cette ouverture du score ne va pas changer la physionomie du match, bien au contraire : face à une Südtribüne comme d’habitude survoltée, la domination du BVB est encore plus écrasante. Cologne, diminué par la sortie sur blessure de Podolski, ne se créera qu’une seule occasion d’égaliser lorsque Milivoje Novakovic est parti seul au but mais le Slovène a tiré à côté (56e). Dortmund continuera toutefois de buter sur l’incroyable Michael Rensing, qui réussira cinq nouveaux miracles devant Grosskreutz (51e, 57e), Subotic (57e), Santana (71e) et Lewandowski (74e). Et comme tout grand gardien, la chance était avec lui puisque Lucas Barrios (79e) et Nuri Sahin (85e) tireront eux sur la transversale. C’est dire si la victoire du BVB ne souffre pas de la moindre discussion.

C’est pour quand le titre ?

C’est donc dans une incroyable communion que joueurs et supporters pouvaient célébrer un nouveau pas vers la conquête du septième titre de l’histoire du club. Jusqu’à la victoire à Munich, le titre était un sujet tabou dans l’entourage du club, désormais le sujet commence à être évoqué. Il a ainsi été révélé qu’une immense fête est prévue en ville le 14 mai pour l’éventuelle remise du Meisterschal après le dernier match de la saison contre Francfort, 300’000 personnes sont attendues, si tu es nostalgique de Suisse – Togo, tu sais quoi faire ce jour-là (et si tu aimes le camping, tous les hôtels de la région affichent complet à cette date…). Reste que, vu son avance au classement, Dortmund pourrait bien fêter le titre avant l’ultime journée, on espère juste que cela ne tombera pas sur un match à l’extérieur ou, pire, sans jouer, par un revers de son poursuivant. Mais bon, avoir comme principale crainte pour la fin de saison de fêter le titre à Hambourg en même temps que Lausanne – Servette, cela devient des soucis de nantis. Pendant ce temps-là, avec un budget trois fois supérieur, la meilleure équipe d’Allemagne (© Uli Hoeness), celle qui n’a pas d’adversaire à sa hauteur en Bundesliga (© Christian Nerlinger), tremble à l’idée de se faire ravir sa place en Ligue des Champions par le terrifiant Hanovre, l’année même où la finale de la C1 se jouera à Munich. Décidément, cette saison 2010-2011 de Bundesliga n’a pas fini de nous faire rêver.

Borussia Dortmund – 1. FC Köln 1-0 (1-0)

Signal Iduna Park, 80’720 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Perl.
But : 44e Lewandowski (1-0).
Dortmund : Weidenfeller; Piszczek, Subotic, Santana, Schmelzer; S. Bender, Sahin (90e Kehl); Götze (92e da Silva), Lewandowski, Grosskreutz (73e Blaszczykowski); Barrios.
Köln : Rensing; Brecko, Mohamad, Pezzoni, Eichner; Lanig, Petit (76e Ionita); Jajalo, Podolski (54e Ehret), Clemens (81e Freis); Novakovic.
Cartons jaunes : 62e Petit, 64e Ehret, 80e Lanig.
Notes : Dortmund sans Hummels, Kringe, Kagawa, Zidan (blessés) ni Owomoyela (convalescent, avec la 2e équipe), Köln privé de Geromel, Chihi, Matuschyk, McKenna et Schorch (blessés).

Écrit par Julien Mouquin

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4 Commentaires

  1. Et bien, je dois avouer qu’après la blessure de Kagawa, je ne voyais pas le BVB maintenir à ce point le cap. Chapeau !

  2. Merci pour ces magnifiques reportages.

    Une question à Julien Mouquin : est-ce que le BVB a des chances de garder ses joueurs ou va-t-il se faire plumer à l’entre-saison ?

  3. ‘Quant à l’emblème du club, le bouc de Cologne n’est pas sans rappeler les chèvres de Malley’

    des comme ca, on en redemande….!

  4. @carlos:
    c’est la grande question, tous les jours des rumeurs envoient la moitié de l’équipe aux quatre coins de l’Europe.
    Tous les titulaires ont des contrats jusqu’en 2013, 2014, voire 2016 et les dirigeants affirment que le club n’est pas vendeur mais qu’il y a des offres qui ne peuvent pas être refusées (sans doute à partir de 30 millions d’euros).
    Donc a priori, il y aura 2-3 départs mais pas d’hémoragie. Ceux qui seront le plus dur à conserver c’est Subotic (Manchester City avait fait une offre à 22 mio l’hiver dernier et la valeur du joueur a encore monté depuis) et surtout les deux meilleurs éléments de l’effectif Sahin et Hummels, qui ont des contrats jusqu’en 2013 que le club aimerait bien prolonger mais pour l’instant aucun accord n’a été trouvé (et des rumeurs, plus ou moins démenties, font état de clauses libératoires dans les contrats actuels inférieures à 10 millions).
    On verra bien, il faut déjà finir cette saison.

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