Deux favoris et un outsider

La plupart des observateurs s’attendent à un duel au sommet pour le titre de champion d’Allemagne entre le tenant du titre Borussia Dortmund et son prédécesseur Bayern Munich. Peu nombreux sont qui estiment que l’éternel perdant Schalke 04 puisse venir jouer les arbitres. Premier élément de réponse dès ce soir avec un très attendu Borussia Mönchengladbach –Bayern Munich (live sur ARD).

FC Schalke 04 (3e, 34 points)

Avec le Bayern, Schalke est l’autre FC Hollywood de la Bundesliga : il ne s’y passe pas une saison sans que le club ne soit agité par des polémiques en coulisses. Cet automne, c’est l’entraîneur Ralph Rangnick qui en a fait les frais. Malgré le répit qu’aurait dû lui conférer la victoire en Supercup contre l’ennemi Dortmund en juillet, l’ancien mentor d’Hoffenheim a rapidement été mis sous pression en raison de résultats en dents de scie et d’un conflit avec Raul, pas satisfait de sa position sur le terrain. Comme la pression, il n’aime pas trop ça, Rangnick a fini par faire un burn-out et démissionner. Cela s’est avéré être une aubaine pour les Knappen qui ont pu rappeler leur entraîneur historique Huub Stevens, celui-là même qui les avaient conduit à la victoire en Coupe UEFA 1997, en Coupe d’Allemagne 2001 et 2002 et au titre de champion d’Allemagne en 2001… pendant quatre minutes. Incontestablement, l’arrivée du Hollandais a donné une nouvelle dynamique, à l’image d’un Raul retrouvé et désormais motivé à l’idée de continuer l’aventure du côté de Gelsenkirchen. A tel point que les Königsblauen ont fini le premier tour à seulement trois points du Bayern et à égalité avec le rival de toujours Dortmund.
Dès lors, Schalke peut-il aller enfin chercher ce titre qui fuit Gelsenkirchen depuis 1958 ? Si l’on regarde le contingent offensif, clairement oui. Klaas-Jan Huntelaar (15 buts au 1er tour) en pointe avec Raul (10 buts) en soutien, c’est du très lourd pour la Buli. Sur les côtés, la qualité est également là avec l’arrivée d’Obasi, le retour de Farfan après un énième feuilleton «je pars, je reste», la révélation finlandaise Pukki (prononcer Poooouuuuuuuuki), l’espoir Draxler ou les fantasques Jurado et Baumjohann. Et en milieu relayeur, Lewis Holtby commence à confirmer les espoirs placés en lui. C’est défensivement que Schalke n’est pas à la hauteur. Dans les buts, le titulaire Fährmann a enchaîné le pire et le meilleur, avant de se blesser. Pour le remplacer, les Knappen ont été chercher l’ex-successeur désigné d’Oliver Kahn en équipe d’Allemagne, Timo Hildebrand, mais celui-ci n’a pas eu droit à la moindre minute de jeu en Bundesliga. L’entraîneur Stevens lui a en effet préféré le jeune Unnerstall, lequel n’a pas démérité mais n’a pas non plus été une assurance tous risques. C’est donc avec un point d’interrogation dans les buts que Schalke entame son 2e tour.
En défense, Metzelder n’a pas retrouvé son meilleur niveau et chauffe le banc ; du coup, ce sont les jeunes Matip, Höwedes, Höger et Papadopoulos qui tiennent la baraque (aux côtés du latéral autrichien Fuchs). C’est bien léger pour un prétendant au titre. D’ailleurs les chiffres ne trompent pas : Bayern, Dortmund et Gladbach en sont respectivement à 10, 11 et 12 buts encaissés cette saison, Schalke à 22. En plus, les Knappen ont été largement dominés dans les chocs contre les deux principaux prétendants au titre, Bayern et Dortmund (à chaque fois 2-0). C’est pour cela qu’on ne voit pas Schalke venir s’immiscer dans la course au titre ; par contre une troisième place, synonyme de qualification directe pour la prochaine Ligue des Champions, ça paraît largement jouable. Avec en prime un bon coup à jouer en Europa League, avec un seizième à jouer contre Pilsen puis un éventuel huitième contre le vainqueur de Twente-Steaua.
Départ : Moravek (Augsburg).
Arrivée : Obasi (Hoffenheim).

Borussia Dortmund (2e, 34 points)

Champion sans lendemain, comme Stuttgart ou Wolfsburg, ou réémergence d’une puissance du foot allemand capable de concurrencer sur la durée le Bayern ? C’était la grande question concernant le Borussia Dortmund. A l’exception d’une entrée en matière grandiose contre Hambourg, le début de saison semblait confirmer la première hypothèse. Avec le départ de Sahin, la blessure de Barrios et la méforme de certains héros du titre comme Kagawa ou Grosskreutz, le BVB a raté son début de championnat. La crise n’était pas loin après deux défaites contre Hertha et Hanovre. Mais une victoire chanceuse à Mainz a provoqué le déclic et le Borussia a bouclé son 1er tour avec 11 matchs sans défaite. On a même par moment retrouvé le BVB irrésistible de l’automne 2010, avec notamment une semaine magique marquée par deux succès probants contre le Bayern et Schalke qui ont permis de reprendre la tête du classement. Une cascade de blessure en fin de 1er tour et deux nuls concédés un peu bêtement contre Mönchengladbach et Kaiserslautern n’ont pas permis un nouveau titre de champion d’automne mais le BVB peut toujours espérer conserver son Meisterschal, malgré un passif de 9 points à Noël par rapport au total stratosphérique de la saison dernière.
Sans être exceptionnel, le bilan satisfaisant de ce 1er tour en championnat ne saurait occulter le fiasco de la Ligue des Champions où le BVB n’a fait que de la figuration dans un groupe pourtant peu relevé. Cela pourrait toutefois s’avérer un mal pour un bien puisque Dortmund pourra désormais se concentrer sur les compétitions indigènes, la défense du titre donc, mais aussi la Coupe, avec un quart de finale à jouer sur la pelouse du sympathique pensionnaire de Regionalliga Nord (4e division) Holstein Kiel. En tous les cas, le BVB a marqué les esprits durant la trêve hivernale en engageant, pour juin prochain, Marco Reus, pourtant convoité par le Bayern, le Real et Arsenal. En payant une somme trois fois supérieure (17,5 millions d’euros) à tous les transferts réalisés par le club ces dernières saisons, le Borussia montre qu’avec une santé financière retrouvée (9,5 millions de bénéfice en 2011), il renaît à l’ambition. Reste à être à la hauteur sur le terrain. Avec le retour des blessés, tous les postes sont doublés, l’entraîneur Jürgen Klopp va devoir faire preuve de tact pour gérer tout cela, certains, comme Barrios ou Kuba, n’étant guère satisfaits de leur temps de jeu. Même si le départ de Nuri Sahin n’a toujours pas été compensé, le BVB ne part pas sans atout dans la défense de son titre, avec la meilleure charnière centrale du pays et un potentiel offensif considérable (Götze, Kagawa, Perisic, Grosskreutz, Kuba, Lewandowski, Barrios). Il est clair qu’avec les ambitions retrouvées du club et pour avoir une chance de conserver ses jeunes stars si convoitées, une place dans les trois premiers est un impératif. Ce qui viendra en plus, titre ou coupe, sera du bonus. Mais ça ne paraît pas complétement utopique. Comme d’habitude, j’aurai l’occasion de te faire vivre tout ça d’assez près.
Départ :
Arrivée :

FC Bayern Munich (1er, 37 points)

Après une saison ratée – et la saison 2010-2011 l’était – le Bayern a toujours la volonté d’écraser le championnat suivant pour montrer qu’il reste le patron en Allemagne. Les recettes sont immuables : des dépenses importantes sur le marché de transfert (par exemple, Toni et Ribéry en 2007, Robben en 2009) et l’arrivée d’un entraîneur prestigieux pour laver l’affront (Hitzfeld en 2007, van Gaal en 2009). Cette saison n’a pas fait exception à la règle, avec des gros investissements en défense et le retour de la légende Jupp Heynckes. A l’exception d’un couac en ouverture contre Mönchengladbach, le début de saison bavarois a confirmé cette volonté de ne laisser aucune chance à l’adversité, avec une équipe qui survolait les débats, tant en championnat qu’en Ligue des Champions, en n’encaissant quasiment aucun goal. Puis il y a eu ce contact un peu musclé entre Gökhan Inler et Bastian Schweinsteiger en C1, qui a provoqué la blessure du second nommé et la belle mécanique bavaroise s’est enrayée. Avec le retour de Robben et l’absence de Schweini, Heynckes a décidé de reculer Toni Kroos, éblouissant en début de saison comme meneur de jeu, en demi défensif afin de faire glisser Müller dans l’axe pour laisser les ailes à Robben et Ribéry ; et d’un coup, le jeu des Rekordmeister a perdu beaucoup de sa superbe.
Le Bayern a notamment connu une semaine noire avec deux défaites d’affilée, sur son terrain contre Dortmund sur lequel il rêvait pourtant tellement de prendre sa revanche, et sur la pelouse du mal-classé Mainz, perdant même la tête du classement. En d’autres temps, cela aurait provoqué une crise majeure au FC Hollywood mais le prestige et l’expérience du Don Jupp ont permis de surmonter l’épreuve et de récupérer la tête du classement pour fêter un titre de champion d’automne.
Avec son budget et son effectif largement supérieurs à la concurrence, le Bayern reste le principal candidat au titre. Mais il n’est pas à l’abri d’une mauvaise surprise. Heynckes va devoir effectuer quelques choix difficiles, notamment pour la ligne des trois milieux offensifs avec l’épineuse question de savoir s’il faut sacrifier Ribéry, Müller ou Robben pour laisser la place de numéro 10 à Kroos ou continuer à aligner l’ancien joueur de Leverkusen en demi défensif. Malgré l’incroyable Manuel Neuer dans les buts, la défense n’est pas complétement rassurante, surtout lorsqu’Heynckes aligne une charnière centrale Badstuber-van Buyten. Et on l’a vu avec la blessure de Schweinsteiger, le contingent n’est rien de trop étoffé pour une équipe qui va jouer sur trois tableaux, championnat, coupe et Ligue des Champions. Il n’y a notamment pas de véritable plan B en cas de blessure de Mario Gomez (24 buts au 1er tour, toutes compétitions confondues). Cela pourrait être handicapant pour un club qui a fait de l’accession à la finale de la Ligue des Champions, qui aura lieu à Munich, une priorité absolue. C’est dire qu’il apparaît peu probable que le Bayern s’envole en tête du classement pour assurer son titre bien avant la fin du championnat comme il en avait initialement l’intention.
Départ :
Arrivée :

Écrit par Julien Mouquin

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4 Commentaires

  1. « leur entraîneur historique Huub Stevens, celui-là même qui les avaient conduit […] au titre de champion d’Allemagne en 2001… pendant quatre minutes.  »

    génial 😀

    superbe série d’article, comme d’habitude, vivement la reprise.
    merci

  2. Jolie série d’articles au second degré sur la Bundesliga! Avec ces papiers interminables tous les deux jours et leur ton faussement sérieux, vous allez bientôt passer maîtres dans le comique de l’absurde.

    Le personnage du rédacteur fictif « fan » du Borussia est également très réussi.

    Avec tant de finesse, j’ai par contre juste peur que vous ne perdiez une partie de votre lectorat en route.

    Mais peut-être que ça aussi vous l’avez diaboliquement prévu afin de faciliter l’abandon du site?

    Définitivement trop malins ces vaudois!

  3. Tiens, on a trouvé le Coluche de 2012. Continue comme ça Expert indépendant, tu nous fais rêver.

    Jolies présentations ! Je serai devant ARD ce soir pour le premier exploit de la bande à Lulu de l’année.

  4. pigeon d’or pour expert independant?

    Belle presentation comme d’habitude, en esperant que le borussia finisse a nouveau premier devant l’arrogance de ces munichois, ca devient meme pathetique

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