La parenthèse enchantée est refermée

En s’inclinant en quart de finale de la Coupe d’Allemagne de manière bien plus nette que ne l’indique le score de 1-0, le Borussia Dortmund n’a pu que constater que sa domination sur le football allemand est bel et bien terminée. Impressionnant, le Bayern Munich a récupéré sa suprématie nationale. En attendant l’Europe ?

Pendant deux saisons, le Borussia Dortmund a régné sans partage sur le football allemand, au détriment du grand Bayern Munich, malgré un budget plus de deux fois inférieur à celui de son rival bavarois. A la clé, deux titres de champion, un record de points en Bundesliga, une Coupe d’Allemagne et cinq victoires d’affilé contre le Rekordmeister, quatre en championnat et un 5-2 en forme d’apothéose en finale de DFB-Pokal. Evidemment, cette suprématie n’a été que modérément appréciée du côté de l’arrogant Bayern et, en début de saison, la priorité a été clairement fixée du côté de la Säbener Strasse : la Ligue des Champions n’est que secondaire, l’objectif suprême est de récupérer l’hégémonie nationale. Des moyens conséquents ont été déployés à cette fin avec un effectif qui est tout simplement le plus onéreux de l’histoire du football allemand.

La reconquête est en marche

Et force est de constater que l’opération reconquête est en marche : cela a débuté en août par une victoire – certes anecdotique – en Supercup contre le rival dortmundois. Cela s’est poursuivi en championnat avec une domination implacable, un Meisterschale d’ores et déjà assuré et probablement un nouveau record de points en fin de saison. Mais il manquait une grande victoire dans une confrontation directe pour concrétiser ce retour du Rekordmeister au sommet car, jusque-là, le rouleau compresseur bavarois avait été mis en échec en Bundesliga à domicile par ses deux dauphins au classement, Dortmund (1-1) et Leverkusen (1-2), ainsi que par son autre bête noire de la saison passée, Mönchengladbach (1-1). Cette revanche référence, c’est un Schalker qui va en offrir l’occasion au Bayern Munich. Dès qu’on a vu que c’est Olaf Thon, figure emblématique du rival Schalke 04, qui procéderait au tirage au sort des quarts de finale de la Coupe d’Allemagne, on s’est bien douté que cela ne présageait rien de bon pour le Borussia Dortmund. Et cela n’a pas raté : le champion du monde 1990 nous a réservé la pire affiche possible, le Bayern Munich à l’Allianz Arena.

Et pourtant nous partîmes confiants…

Malgré ce Hammerlos, c’est plein d’espoir et de confiance que nous somme partis pour la Bavière enneigée. Mon fan’s club avait été généreusement doté en billets pour ce sommet du football allemand et c’est donc une très joyeuse équipée qui a quitté la Suisse en direction de Munich pour un trajet en car particulièrement festif. Peut-être qu’une psychanalyse de groupe expliquerait qu’inconsciemment on pressentait le naufrage qui allait survenir et qu’on a profité de fêter pendant qu’il en était encore temps, anticipant sur un retour des plus moroses. Mais cela on ne le savait pas encore lorsque l’on s’est retrouvés à 10’000 fans jaunes et noirs à investir le tombeau de l’Allianz Arena, tous persuadés que l’on allait une fois de plus savourer un triomphe éclatant contre notre victime préférée.

Impuissants

Mais il a rapidement fallu déchanter. Rarement, je n’ai ressenti un tel sentiment d’impuissance pour mon équipe favorite. Même si le score est resté indécis jusqu’au bout, le Bayern Munich n’a jamais donné l’impression d’être en danger. Il se dégageait d’un côté un tel sentiment de confiance, de puissance et d’invulnérabilité, de l’autre d’impuissance, de fébrilité et de fragilité, qu’à aucun moment l’on a pu ne serait-ce qu’entrevoir l’éventualité d’une victoire. Après, bien sûr, on peut revenir sur l’un ou l’autre fait de jeu qui aurait pu changer bien des choses. Même si son remplaçant Felipe Santana n’a pas démérité, l’absence de dernière minute de Mats Hummels a considérablement fragilisé l’arrière-garde dortmundoise et privé le dispositif de Jürgen Klopp de sa traditionnelle rampe de lancement. Le but, tombé juste avant la pause, était largement évitable car résultant d’une relance hasardeuse de Santana et d’une mésentente entre Schmelzer et Gündogan. S’il ne jouait pas dans les rangs du surprotégé FCB, Javi Martinez aurait dû voir rouge pour son attentat de la 63e sur Lewandowski (le Polonais purge d’ailleurs actuellement trois matchs de suspension en championnat pour une faute bien moins grave). Et Julian Schieber aurait pu arracher une égalisation miraculeuse à la 87e si son coup de tête n’était pas passé juste au-dessus – la seule occasion du BVB. Mais, à ces quelques petits détails près, Dortmund a tout simplement été surclassé par trop fort pour lui.

La revanche d’Arjen Robben

En fait, on a rapidement eu l’impression que la question n’était pas de savoir si le Bayern allait marquer mais quand il allait marquer. Un excellent Roman Weidenfeller a longtemps retardé l’échéance, dans un premier temps pour maintenir le score nul et vierge, dans un deuxième temps pour empêcher le Rekordmeister de faire le break. Mais à l’impossible nul n’est tenu. Si l’écrasante domination bavaroise n’a finalement pas débouché sur une pléthore d’occasions de but, elle allait bien finir par payer. Et le but est tombé comme un fruit mûr juste avant la pause sur un ballon bêtement perdu à l’orée de la surface dortmundoise qui permet à Arjen Robben d’enrouler une superbe frappe dans la lucarne. Souvent relégué sur le banc des remplaçants cette saison mais titularisé en raison de la suspension de Franck Ribéry, le Hollandais prenait là une éclatante revanche, lui le symbole du Bayern qui perd tout du printemps 2012, le héros malheureux du match décisif  pour le titre à Dortmund et de la finale de la Ligue des Champions. Même si le BVB a été un peu moins submergé après la pause, ce petit but suffira à envoyer le Rekordmeister en demi-finale.

Pas le temps de pleurer

C’est désormais officiel : le Borussia Dortmund perdra les deux trophées nationaux qu’il détenait, le Meisterschale et la DFB-Pokal. Je ne t’explique pas la déprime dans le bus du retour… Mais, joueurs comme supporters, on s’en remettra. Et assez rapidement si possible car la semaine à venir est riche en échéances importantes : la venue d’Hanovre au Westfalenstadion pour tenter de bétonner une place pour le prochaine Ligue des Champions, le huitième de finale retour de la C1 contre Donetsk et le Derby à Gelsenkirchen pour tenter de prendre la revanche du match aller contre Schalke. Soit autant d’occasions d’oublier cette funeste soirée sur les bords de l’Isar.

Qui pour arrêter le Bayern ?

Le Bayern Munich lui peut avoir le sourire. Il a retrouvé les clés du succès contre le Borussia Dortmund, le titre est assuré et une voie royale s’ouvre devant lui en Coupe d’Allemagne car ni Wolfsburg ni Freiburg et encore moins Stuttgart ne paraissent de taille à rivaliser avec l’ogre bavarois. Assurés de leur triomphe au plan national, les Bavarois pourront même refaire une priorité de la secondaire Ligue des Champions. Jusque-là, le Rekordmeister vivait avec la crainte de croiser la route de sa Némésis dortmundoise en Coupe d’Europe mais, maintenant que le signe indien a été vaincu, c’est plutôt le BVB qui, en cas de qualification contre Donetsk, doit redouter un quatrième déplacement cette saison à l’Allianz Arena, qui nous déplairait souverainement. Car, malgré la victoire jubilatoire contre le Borussia, l’ambiance n’a jamais décollé dans le tombeau munichois. Pour reprendre une terminologie chère au président Uli Hoeness, le Bayern Munich n’a pas de supporters, juste des clients bons à engraisser le club le plus rentable du monde. Et, mercredi soir, les clients en ont eu pour leur argent et l’ont fait savoir en claquant des mains mais rien de plus. Au moins, au niveau des tribunes, le Borussia Dortmund est toujours numéro 1 en Allemagne et, cette suprématie là, le Bayern Munich n’a aucune chance de pouvoir la contester un jour. On se console comme on peut.

FC Bayern Munich Borussia Dortmund 1-0 (1-0)

Allianz Arena, 71’000 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Kircher.
But : 43e Robben (1-0).
Bayern: Neuer; Lahm, van Buyten, Dante, Alaba; Martinez, Schweinsteiger; Müller (78e Luiz Gustavo), Kroos (94e Boateng), Robben; Mandzukic (91e Gomez).
 
Dortmund: Weidenfeller; Piszczek, Subotic, Santana, Schmelzer; Bender, Gündogan; Grosskreutz (62e Blaszczykowski), Götze, Reus (81e Schieber); Lewandowski.
Cartons jaunes: 63e Martinez, 67e Kroos, 78e Mandzukic.
Notes: Bayern sans Badstuber (blessé), Rafinha (malade) ni Ribéry (suspendu), Dortmund sans Owomoyela (blessé) ni Hummels (malade).

Écrit par Julien Mouquin

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1 Commentaire

  1. C’est toujours un immense plaisir de te lire après une victoire du club cher à mon coeur contre le club dépositaire mondial de la Passion©!
    Ne te méprend pas, ton travail et ta ferveur sont admirables… Et ton analyse est presque objective, n’en déplaise à tes détracteurs!
    Merci de nous faire partager ta passion et félicitations pour tes déplacements, c’est juste énorme

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