Surprise : c’est Petkovic !

Juste avant les Fêtes, les Papas Noël de l’ASF nous ont sorti de leur hotte un nouveau sélectionneur pour l’équipe de Suisse en la personne de Vladimir Petkovic (enfin on savait déjà qu’on allait recevoir ça, il avait été choisi sur le catalogue de jouets bien à l’avance).

On pourra débattre encore des mois (sept pour être exact) sur la question de savoir si ce choix est le bon ou non. Tant que l’homme n’aura pas été concrètement mis à l’épreuve, il n’est pas possible d’en juger. Cependant, il est déjà admis qu’il n’est guère enthousiasmant. Un entraineur qui n’a pour seul fait de gloire une Coupe d’Italie, il serait difficile d’y voir un argument qui aurait pu faire pencher la balance pour l’actuel-futur-ex-coach de la Lazio. Et c’est là où la question devient dérangeante. Pas dans le choix lui-même d’engager le triple national mais dans les motifs de ce choix. 
Le premier et le plus imbécile étant cette idée de vieux con à ras les pâquerettes que «comme il est d’origine balkanique ça va bien aller avec les joueurs d’origines balkaniques». Il est édifiant d’imaginer que de telles considérations aient pu être prises en compte. On est là dans une conception du monde tellement simpliste voire méprisante que l’on n’ose penser que cela soit le critère majeur de ce choix (malgré certaines déclarations de l’ASF).
Alors on peut en chercher ailleurs. Le Crédit Suisse, sponsor toujours très influent, notamment lors de la reconduite du contrat d’Hitzfeld en 2010, a sans doute eu une part de responsabilité dans le choix. Il lui fallait un personnage ayant quand même un minimum d’envergure internationale pour faire bien dans les pubs (les «publicités» donc… pas que les mecs du Crédit Suisse veulent trouver un bon pote pour aller boire des chopes dans des bars anglais). Pierluigi Tami a sans doute payé son manque de notoriété en dehors des frontières des amateurs de foot suisse. Il aurait pu profiter pourtant d’un profil qui rappelait quelque peu Köbi Kuhn mais, dans le contexte d’une succession du sélectionneur le plus cher de l’histoire du pays, cela paraissait un peu mince. Et puis il y a un détail non négligeable. C’est que la Fédération s’est retrouvée quelque peu empruntée devant le manque d’enthousiasme que suscitait son offre d’emploi. Outre Favre et Koller qui étaient dans des projets qu’ils n’avaient pas envie d’abandonner, personne ne semblait accourir pour prendre le job.
Un sacré bon job pourtant. Devenir sélectionneur d’une équipe nationale touchant une de ses meilleures générations, dans un contexte où le prochain Euro à 24 sera marqué par des qualifications bien péjorées en termes de difficulté, pour un salaire sans doute très acceptable et le tout dans un pays où le foot n’est pas roi et ne vous écrasera pas d’une pression invivable comme en Italie ou en Angleterre.

La fin d’une époque

Vladimir arrivant avec son staff, ce bon vieux Michel Pont est donc prié de se trouver un nouveau poste (sans doute qu’après un job d’été au FC Sion, on le retrouvera du côté de Servette ou comme consultant régulier à la RTS comme à l’époque où il commentait les matchs de la Nati aux côtés de PAD). La bonne petite âme qui nous pousse à aider les vieux messieurs à traverser la route ou à prendre les auto-stoppeuses même quand celles-ci n’ont pas de mini-jupe, nous influence dans le fait d’être triste pour lui. Mais pas longtemps. Car malgré tout son capital sympathie, même en Suisse allemande, n’en déplaise au Blick, force est de constater que c’est la meilleure chose qui pouvait lui arriver. Continuer à être entraineur assistant encore des années, ça aurait commencé à être un peu embarrassant quand même. Après une dizaine d’années, il a fait son temps. Rien à dire de vraiment grave sur son travail, on n’a de toute façon jamais vraiment su quel était son influence sur l’équipe, sans doute plus importante sous Köbi que sous Ottmar. Alors oui, on a évoqué qu’il prenne les rennes de la Nati mais soyons sérieux, c’était un choix absolument impossible. De manière générale, un mec, dans une entreprise, qui brigue le poste de son chef juste parce qu’il est assistant depuis des années alors qu’il n’a ni les papiers ni l’expérience ça passe déjà rarement. Et Pont se serait fait assassiner par l’ASF au premier conflit, il n’aurait jamais eu ni le poids ni la crédibilité pour assumer un statut de successeur à Hitzfeld. Et malgré son côté «on en boirait bien une à l’apéro avec lui», on aurait, nous aussi, très vite retourné notre veste si les résultats ne suivaient pas. Surtout s’il continuait à faire des déclarations comme celles du 6 décembre dernier, juste après le tirage au sort pour le Brésil, où, sur BFM TV, il offrait une belle satisfaction aux journalistes en affirmant son immense peur d’affronter la France. Dans le genre glorieux conquérant, ce n’était pas terrible.

Certes, on a, par-ci par-là, évoqué le cas de la France en 2000 qui mit à sa tête, notamment sur la demande des joueurs alors champions du monde, l’assistant d’Aimé Jacquet, Roger Lemerre. L’idée étant qu’il n’y avait pas grand chose à changer avec une équipe qui fonctionnait et qui avait ses automatismes, il fallait juste apporter une continuité et ne pas modifier la structure. Ça a marché, avec un titre européen, puis ça a foiré méchamment deux ans plus tard en Corée du Sud. Accessoirement, le cas suisse est quand même très différent (enfin non, je ne parle pas d’un titre de champion du monde, on est bien d’accord). Certes, une forme de consensus nous pousserait à penser que l’équipe actuelle doit être laissée à sa propre évolution et maturation et qu’il n’est pas temps de tout bousculer. Des joueurs tels que Behrami ont été dans ce sens par leurs déclarations. Mais les joueurs savent aussi que quand on ne change rien, on ne risque pas de perdre sa place. Et qui sait si fin juin, nous n’aurons pas finalement envie que tout change.

Ottmar va nous faire faire des économies

Juger la légitimité du choix de Petkovic pour prendre la succession de Hitzfeld n’est pas non plus vraiment possible car ce dernier n’est pas encore parti justement.  Et en termes de bilan franchement, on ne sait que penser. C’est justement quand un nouveau coach prendra les rênes que l’on pourra juger si les résultats de l’Allemand sont issus de son influence ou s’ils sont le résultat d’un talent intrinsèque de l’équipe que même Artur Jorge aurait su gérer (bon ok pas Jorge, disons plutôt Bernard Challandes). Car peut-être bien qu’il a osé faire confiance à la jeunesse, mais avait-il le choix ? Qui aurait écarté Xhaka ou Shaqiri ? Il n’a même pas choisi le départ de Frei et Streller, ce sont eux qui sont partis. Et, en terme de bilan, si l’on décide d’être un tant soit peu critique, on peut quand même dire que l’ancien coach du Bayern n’a pas fait non plus dans la magie : en gros, deux qualifications pour des Coupes du Monde avec des adversaires comme la Grèce, Israël, la Norvège ou l’Islande, un Mondial africain raté (ne parlons plus de cette victoire contre l’Espagne, c’était raté dans l’ensemble) et une campagne pour l’Euro 2012 navrante. Ce n’est pas le bilan le plus minable de l’histoire mais il n’y a pas non plus de quoi justifier une statue de bronze.

Est-ce qu’on va vraiment regretter Hitzfeld ? Il n’y a rien que l’on espère davantage que regretter son départ cet été suivant les résultats de l’équipe suisse…
Photos de Pascal Muller, copyright EQ Images
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