Faites-vous pas de Sotchi, tout sera cool !

Certains de nos concitoyens à croix blanche, bien trop occupés à réviser leurs classiques alpins en vue des ridicules JO d’hiver, ont certainement oublié l’Assemblée Extraordinaire des Nations Unies qui va se tenir durant la prochaine quinzaine dans le cocasse Caucase, au lieu dit du «Sotchi». Dans un devoir d’instruction publique et vu que dans un précédent post on nous reprochait de ne pas faire assez de politique sur CartonRouge.ch, on s’est lancé pieds et poings liés sur le tremplin politico-olympique. Vertigineux et beau à la fois!

Sea, Sex and… sport

Le très influent Ban Ki-moon, Secrétaire Général de la très respectable ONU à ses heures perdues, ne s’y trompe pas. L’enjeu de cette rencontre sur les bords de la Mer Noire est crucial pour l’avenir de l’humanité. Il faut en effet absolument mettre le gouvernement russe en face de ses responsabilités afin qu’il traite les émérites sociétaires des différents groupes des LGBT en conformité à l’alinéa 2 (article 1) des Droits de l’Homme. En sus des efforts onusiens, on ne peut que se féliciter des fréquentes interventions de politiciens visionnaires et autres medias internationaux en faveur des mouvements homosexuels martyrisés dans les contrées de cette méprisante Russie. Force est d’admettre que leaders politiques et autres formeurs d’opinion (bienvenue à Google) ont sur choisir le sujet qui embarrasse au plus au degré le gouvernement de Vladimir le Grand.

En laissant de coté les sujets absolument triviaux qui n’ont aucune influence sur le quotidien des buveurs de vodka tels que l’oppression des minorités caucasiennes, géorgiennes et tchéchènes, l’emprisonnement d’opposants politiques (Khodorkovski), la corruption et pots-de-vin (Arkady Roterberg) à grande échelle, un déséquilibre démographique avec une population vieillissante, la spoliation de biens publiques (Abramovich, Usmanov…), la liberté d’expression bafouée (Nadya et Masha des «chatonnes agitées»), la pollution à grande échelle de villes dans le cercle Arctique, la dilapidation en masse d’argent public pour l’érection de Jeux Olympiques, les politiciens et journalistes ont décidément fait le bon choix.
Il y a juste un insignifiant petit reproche que je ferais à toutes ces têtes fort bien pensantes : ne pas avoir associé le mot Sotchi avec sport. Car après tout, quand on a des sportifs de l’acabit de Défago, Murisier, Lerjen et Anthamatten qui débarquent après quatre ans de préparation méthodique, on devrait tous louer le «Citius, Altius, Fortius» de Pierre de Coubertin.

Faites Lioubov, pas la guerre

 Comme on pouvait s’y attendre, cette 22ème cérémonie d’ouverture des JO d’hiver est parti en couilles dès les premières minutes. Avec un Poutine aussi coincé qu’un Suisse allemand devant les urnes et un alphabet cyrillique qui causait moult problèmes à la RTS, le stade du Fisht ressembla tout à coup à la Pontaise à mi-décembre. Heureusement, quelqu’un songea à y déverser de la Lioubov (de l’amour pour ceux qui n’auraient pas suivi) afin d’emmener les téléspectateurs à travers neuf paysages russes en suspension et ce à travers neuf fuseaux horaires ornés par neuf animaux empaillés (les Russes, la symbolique simpliste, ça les connait!). Mais quand ça ne veut pas, ça ne veut pas. Après un chœur d’homme qui nous chanta un air caucasien dans un playback digne d’un Patrick Juvet des mauvaises années, voilà t’y pas que le KGB de Poutine nous combina une attaque en règle sur le pays d’Obama en ne dépliant pas le flocon représentant l’anneau rouge américain. Kissinger nous avait prévenu: la guerre froide pointerait à nouveau son nez rougit par les éclatantes bourrasques sibériennes.

Qu’à cela ne tienne, il fallait absolument ramener de la chaleur dans ce stade, alors quoi de mieux que de faire défiler huitante-huit nations en commençant par un pays alpin par excellence, la Grèce. Ayant revêtu un vieux training Adidas Rom 1980, les Hellènes firent honneur à leur économie en déliquescence. Les Irlandais quant à eux, décidèrent de faire un clin d’œil sanglant à leurs amis de l’IRA en revêtant une combinaison camouflage fort mal à propos. Plus inattendu à ce niveau de la compétition, le Togo fit son apparition dans l’arène caucasienne. Donc c’en est fini des quolibets à deux balles sur CartonRouge.ch sur cette nation qui porte véritablement le futur du ski alpin sur ses frêles épaules. Finalement, on vit débouler les nôtres au fond du tremplin, emmenés par un Simon Amman en position relevée pour une fois. Burkhalter applaudit…et notre Stan national pensa alors que lui aussi aurait mérité la présence du Président de tous les Suisses à Melbourne. Soupir.

Piotr, Basil et Vladislav Aleksandrovich Tretiak

Revigorée par tant d’athlètes élégamment vêtus, la cérémonie du Fisht prit de la hauteur. On nous amena alors un gros poisson déguisé en bourgade médiévale qui se transforma en cathédrale Sainte Basil; joli. Puis le bateau de Pierre le Grand arriva accompagné des fifres et tambours de Grimentz; vraiment joli. Le show froid se poursuivit avec un spectacle de danseurs du Bolchoï qui nous firent des triples Salchow et autres «pointes» que Béjart en pleurerait d’envie; vraiment très joli. Paradoxalement, la séquence suivante présentant les années 60 marquées du sceau communiste sous fond de Pravda fut édulcorée avec des pousses-pousses rouges militants et danses frou-frou très Offenbach; vraiment superbe.

Alors que la cérémonie nous avait réconciliés avec ce beau pays russe, les organisateurs du CIO nous forcèrent à écouter les âneries de Thomas Bach. Ce dernier ne put s’empêcher de venir faire la morale au gouvernement russe sur l’importance de la diversité et de la non-décimation dans une société civile. Venant d’une organisation empêtrée dans des affaires avérées de corruption et d’omerta sur les affaires de dopage, on se rangera pour une fois (et une fois seulement) du coté du camarade Poutine.
Après tant d’explosions artistiques réussies, la belle cérémonie se termina par l’allumage d’un vieux chaudron gazier récupéré sans doute à Tchernobyl. Certes, tout comme vous, on aurait aimé que les affriolantes Yelena Isinbayeva et Maria Sharapova nous fassent un remake des «Femen en folie», mais que nenni. Qu’à cela ne tienne, Vladislav Aleksandrovich Tretiak, le Olivier Anken local, vint nous rappeler des fabuleux souvenirs de l’équipe soviétique aux Olympiades d’Innsbruck et de Sarajevo. En allumant cette flamme olympique, il souligna une fois de plus que le plus beau sport de ces JO d’hiver, c’est le hockey sur glace.

On s’en faisait du souci pour cette cérémonie, mais bien que mécanique et fonctionnelle, elle fut émouvante et humaine. Allez, un bon 8 sur 10.

On a aimé

– Le petite Lioubov

– Le concert d’ouverture des T.a.t.u
– Les chorégraphies tridimensionnelles
– L’équipement Charles Vögele et H&M des Suisses et Suédois
– Les shorts des Bermudiens (ils ont osé les cons !)
– Les nus-pieds des Caimanais
 – Le boxon du défilé des Ritals et l’attirail des pulpeuses Néo-Zélandaises
– Les manteaux de ces demoiselles russes

On n’a pas aimé

– Le degueuli de Lagerfeld qui équipait les Allemands

– Le gris-beige Lacoste des Frocards
– Les pullovers étoilés des Américains 
– La clique du CIO
– La techno russe
– Les sourires de Poutine
– La Potiche assise à coté de Vladimir le Grand
Photos Pascal Muller, copyright EQ Images
A propos Paul Carruzzo 207 Articles
Elle est pas un peu belle notre Nati et tout le bonheur qu’elle nous amène ? Alors, Rickli et compagnie, si vous ne vibrez pas devant cette équipe, vous n’êtes pas non plus monstrement obligés de regarder. Profitez d’un bon match de hornus et foutez la paix à nos joueurs, qui comme vous, ont un joli passeport rouge à croix blanche.

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4 Commentaires

  1. Même si je ne suis pas pour la politique sur ce site, c’est un très bon article, bien moqueur comme on les aime. Mention spéciale pour les « on a aimé/pas aimé »

  2. On a pas aimé :

    – le gros plan de notre fossoyeur-président de la Confédération et de sa greluche pseudo First Lady au nom à la con…

  3. Très très joli article, M’sieur Paul !

    Ma mention spéciale à moi est double et va à (or) :
    « Ayant revêtu un vieux training Adidas Rom 1980, les Hellènes firent honneur à leur économie en déliquescence » .

    ainsi qu’à (argent) :

    « …la belle cérémonie se termina par l’allumage d’un vieux chaudron gazier récupéré sans doute à Tchernobyl »

    Délicieux tout ça !

    Et un p’tit cocorico helvétique pour Dario, tant qu’à faire…en attendant Simon, ce soir (vole, Simon, vole…) !
    (Ouais, parce que Def’ ce matin, y a quelqu’un qui y croyait vraiment, par ici ? non, sérieux… 😉

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