Si la plupart du temps les cartons rouges sont distribués à l’encontre de sinistres défenseurs inconnus évoluant dans les rangs d’équipes africaines ou sud-américaines, il arrive parfois que ce soit une star absolue qui en soit victime. En 1998, la future grande star du football et de la mode s’est fait évincer du terrain suite à un geste qui avait choqué une bonne partie de l’opinion publique. Retour sur un carton rouge qui a sans doute aidé un mec à vous vendre des slips.
Lieu : Geoffroy Guichard, St-Etienne
Date : 22 juin 1998
Match : Angleterre – Argentine en huitièmes de finale
Fautif : David Beckham
Victime : Diego Pablo Simeone
Le contexte :
Argentine-Angleterre, un choc rempli d’histoire. Depuis la Guerre des Malouines de 1982, les deux pays sont ennemis intimes. Aujourd’hui, on se demande encore comment il est possible de se brouiller pour des îles qui comptent plus d’otaries que d’habitants. D’ailleurs, un ami argentin m’a secrètement confié vouloir se venger et aller planter le drapeau de sa patrie sur une île perdue du Lac Léman offerte à la Couronne Anglaise au XIXe siècle (au large de Villeneuve pour ceux qui connaissent). Comme quoi le conflit est latent mais toujours vivant. Pour rajouter de l’huile sur le feu, tout le monde se souvient de ce match entre Anglais et Argentins de 1986, le fameux match de la Main de Dieu qui avait forcément déclenché une série de polémiques Outre-Manche et un peu partout d’ailleurs. En 1998, lorsque les deux pays s’affrontent en huitièmes de finale, le climat est inévitablement tendu.
Le meilleur slalomeur anglais de l’histoire.
Une affiche absolument royale se déroulant dans le mythique Chaudron Vert de Saint-Etienne qui a l’honneur de voir s’affronter deux grandes nations du football. Ayant remporté le tout pourri groupe H, l’Argentine part légèrement avec les faveurs des pronostics. Elle a tout de même réussi à se défaire de la Croatie, dans ce qui était peut-être le seul vrai match de football du groupe. En effet, les deux autres adversaires du groupe, les deux J (Japon et Jamaïque), comptabilisaient avant la compétition autant de participations à une Coupe du Monde que le Bangladesh, le Lesotho et le FC Sion réunis. De son côté, l’Angleterre a connu plus de difficultés à se sortir d’un groupe pas beaucoup plus compliqué. Après avoir cassé du Tunisien à Marseille (malheureusement au propre comme au figuré), les Anglais se brûlent les doigts contre une de leur bête noire, la Roumanie. Une défaite à la dernière minute sur un but de Dan Petrescu. Les Anglais doivent s’imposer ou obtenir le nul face à la Colombie pour se qualifier à une modeste deuxième place. Et là, c’est le match où David Beckham sort le grand jeu. Il y inscrit notamment un superbe coup-franc, son premier but en sélection nationale. Becks (re)devient une véritable idole au pays du Fish and Chips, en plus à ce qu’il paraît il est beau.
Deuxième du groupe G, l’Angleterre doit affronter l’Albiceleste dans ce qui constitue le choc du premier tour de la phase à élimination directe. Le dernier des huitièmes de finale de l’édition démarre à toute allure puisqu’un premier pénalty est sifflé par Kim Milton Nielsen après 5 minutes de jeu seulement. David Seaman sort de manière inopportune et fauche (un peu) Diego Simeone qui commence déjà son cirque, en réclamant un pénalty et un carton jaune avant même d’avoir atteint le sol. Peu importe, le spécialiste des pénaltys en force, Batipenalty se charge d’ouvrir la marque. A peine cinq minutes plus tard, l’arbitre danois siffle un second pénalty absolument inexistant sur le nouvel attaquant prodige anglais Michael Owen. Sans doute une mesure de compensation d’arbitre qui n’assume pas ses choix. Le bon vieux Alan Shearer transforme et égalise pour l’équipe aux trois lions.
Le joueur qui proteste plus vite que son ombre et Becks au sol.
Comme pour contrebalancer ces deux pénaltys absolument infects, le Bon Dieu Football nous fait cadeaux de deux sublimes buts avant la mi-temps. Le premier signé Michael Owen, alors à peine en âge de prendre légalement ses premières cuites à l’alcool fort, qui réalise un des plus beaux slaloms de l’histoire du football. Passage que l’on recommande fortement à l’équipe suisse masculine de slalom en passant. Le second signé Javier Zanetti suite à une magnifique combinaison sur coup-franc qui surprend tant la défense anglaise que le téléspectateur. Et pourtant le plus facile à surprendre n’est pas forcément celui que l’on pourrait croire.
Les faits :
Le score à la mi-temps est donc de deux partout et le moins que l’on puisse dire c’est que cette première mi-temps est digne des plus grands matchs de football. Malheureusement, la deuxième mi-temps sera de moins bonne facture. La raison de ce soudain revirement est bien entendu à mettre à l’actif du fait de jeu de ce match. Celui qui va passionner la planète entière, l’expulsion de David Beckham. Nous sommes deux minutes après le retour des vestiaires, suite à un contact et une intervention un peu musclée de Diego Simeone, David Beckham termine au sol. C’est logiquement que Monsieur Nielsen siffle une faute à mi-terrain en faveur des Anglais. Mais sous ses airs de gendre idéal, Becks est dans la réalité un véritable rebelle. Il décide donc de la jouer subtile et de se venger personnellement de cette vieille charrue provocatrice de Simeone en lui tendant un petit croche-patte. Monsieur Slip couché sur le ventre lève la jambe et frappe d’un petit coup de chaussure le mollet droit du Cholo Simeone, et cela pratiquement sous les yeux du grand Danois qui officie en tant que juge de la partie.
En même temps heureusement que c’est pas Seaman ou Scholes qui
allaient nous vendre des slips.
Le problème est que Simeone est une vraie pute sur un terrain. Un mec qui n’hésite pas à utiliser tous les subterfuges possibles pour faire basculer un match. Ainsi, aussitôt percuté par le pied du Spiceboy, le capitaine argentin tombe en arrière de façon assez pathétique tout en regardant dans les yeux Monsieur Nielsen. Avant même de se retrouver au sol, l’actuel entraîneur de l’Atletico commence déjà à réclamer auprès de l’arbitre. Un coup de maître dont Romario aurait à son époque été très fier. S’ensuit une petite escarmouche, les Argentins dans la plus pure tradition de leur pays viennent entourer l’arbitre de la rencontre, Shearer tente de les repousser. Le suspense demeure un court instant l’arbitre va-t-il expulser le bellâtre idole de tout un peuple (on parle bien sûr du peuple japonais) ? La réponse tombe après quelques secondes de palabres. Becks est prié de rejoindre les vestiaires tandis que Simeone n’écope que d’un avertissement, sanction somme toute logique. Il est vrai que ce genre de petit coup se donne volontiers dans le monde du football, mais le moindre bon sens veut qu’on ne le fait pas juste devant le méchant arbitre, même en juniors D.
A dix, les Anglais perdent finalement la partie dans la plus pure tradition anglaise, aux pénaltys. L’Angleterre se fera même voler en se faisant refuser un but de Sol Campbell manifestement valable. Les mangeurs de roastbeef en sont persuadés à onze sur le terrain les Three Lions aurait passé le tour pour affronter les Pays-Bas en quarts de finale. Dès lors, un coupable est tout désigné pour expliquer l’élimination prématurée de l’équipe également chère aux Valaisans et pour une fois ça n’est ni l’arbitre, ni David Seaman ! Les tabloïds anglais tireront à boulets rouges sur le joueur qui change plus vite de coupe de cheveux que de slip. Il recevra, comme la tradition le veut en Angleterre, des menaces de mort. Mais peu importe, Beckham saura rebondir, bien jouer au football, marquer de somptueux coup-francs, plaire à toutes les gonzesses et surtout devenir un véritable people. Au point de se demander si finalement cette expulsion n’a pas été bénéfique pour sa carrière. En plus elle aura inspiré Wayne Rooney face au Portugal en 2006. Enfin espérons que lui il ne finisse pas en slip!
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