Et si le virus jouait les prolongations ?

Il y a maintenant deux mois, le sport s’est arrêté brusquement en même temps que tout autre activité réunissant des gens à moins d’un Marc Rosset. On se rend compte que ça nous manque comme en témoigne le bel article paru il y a quelques jours. Mais alors qu’on se demande comment finir cette saison, on a l’impression que la suivante va démarrer normalement. Malheureusement, ce con de virus ne respectant décidément rien, il est fort probable que la reprise ait un peu plus d’accroc qu’un pet sur une toile cirée. 

Soyons clair, tout le monde en a marre, à commencer par Monsieur Tulemondt. A la recherche de petits shots d’adrénaline (à défaut de ceux du Bamee Bar), la moitié de la population française a soudain trouvé des gènes de Kenenisa Bekele enfouis dans son petit corps. Le jogging est devenu le 2ème sport national juste après conspuer les politiques et les grands patrons. Mais il manque tout de même cette émotion par procuration et malgré les nombreuses rediffusions de la RTS sur les exploits helvètes et les différentes déclinaisons de e-sport, l’attente de revoir un direct sportif se fait ressentir. Les sportifs professionnels doivent aussi en avoir marre de tourner en rond à part peut-être les cyclistes sur piste, à commencer par Arnaud Tournant. Les businessmen du sport doivent quant à eux avoir les fesses qui font bravo car la petite affaire qui tournait bien a pris un joli coup de frein. Pensée toute particulière à M. Collet qui doit plutôt être au Xanax en ce moment. Bref, on veut du sport, aussi vite que possible et aussi rapidement que nécessaire.

Mais ne nous réjouissons pas trop vite car malgré le déconfinement qui a pointé le bout de son nez, l’espoir de retourner au stade est encore loin. On devra certainement faire face à une « nouvelle normalité » du sport pour reprendre les mots de la nouvelle star romande, Alain Berset, qui pique le titre du chauve suisse le plus connu à Didier Cuche. A quand le bonnet Ovomaltine ? Mais la vraie question est quelle sera cette nouvelle normalité ? 

Tous supporters du FC Huis-Clos ! Il paraît invraisemblable que nous puissions retourner boire des bières dans les stades en 2020. Le Clasico aura autant de saveur et de ferveur qu’un Malte-Andorre et les joueurs de Liverpool risquent bien de marcher seuls un moment. Du Jean-Jacques Goldman à Anfield, qui l’eut cru ! On aura certainement de la peine à vibrer de la même manière. Dépendant beaucoup des droits télévisés, les gros championnats vont certainement survivre mais notre pauvre Super League va tirer la langue. CC se traduira peut-être rapidement par caisse de compensation. Et Lausanne qui devait inaugurer son nouveau stade, ça sent le pétrole cette histoire ! On pourra peut-être contenir les joueurs dans des hôtels dédiés au football mais les voyages n’étant plus garantis, les compétitions internationales risquent d’être annulées. Adieu la Ligue des Champions ! Évidemment, on peut mettre tous les sports de ce type dans le même panier, basket compris.

Affluence classique durant la saison 2020-2021

Quant au tennis, les joueuses et joueurs participants à des tournois internationaux et voyageant sans cesse, cela risque d’être encore plus  compliqué. On devra peut-être créer une ligue fermée avec uniquement les Masters 1000 et les Grands-Chelems, et des avions spéciaux pour les joueurs. Cela paraît complètement utopique évidemment mais ne plus jamais voir Roger n’est pas envisageable non plus.

Et si le virus restait plus longtemps que prévu ?

En 2030, on ne peut toujours pas se réunir à plus de 1000 personnes. Les grands stades sont toujours fermés et on s’est tournés vers les équipes locales. Ainsi, le championnat de 4ème ligue est populaire. Tout le monde connaît l’avant-centre de Poliez-Pittet, l’arrière gauche de Genolier-Begnins. Les petits terrains de football sont vite pris d’assaut. La population s’est donc tournée vers d’autres sports. Ainsi, le championnat de tennis de table (exemple pris complètement au hasard évidemment) est très suivi et passe tous les dimanches à la RTS. 

Au tennis, les voyages ne sont toujours pas possibles, les meilleurs joueurs de la planète évoluent dans un format style interclubs. L’ATP a dû choisir un pays pour réunir les meilleures équipes de la planète et c’est de toute évidence la Suisse qui a été choisie. Federer n’ayant toujours pas pris sa retraite, il continue à terrasser ses adversaires en jouant n°1 dans son club de cœur le TC Old Boys de Bâle. Stan Wawrinka est entraîneur-joueur au Stade-Lausanne qui compte un bar tenu par Benoît Paire. Côté féminin, c’est Bacsinszky qui tient la baraque. Marc Rosset est capitaine de l’équipe des Eaux-Vives mais aime étonnamment beaucoup les rencontres à Lausanne. Nick Kyrgios est aux Isles de Sion, club très connu pour ses whiskies, servis à la cuillère. 

Carton-Rouge est bien entendu devenu le média sportif romand n°1, cela va sans dire !

Ces scénarios sont évidemment farfelus et il y a de bonnes chances qu’on trouve un vaccin d’ici là mais cette crise nous aura démontré à quel point le sport, au même titre que la culture, a une place importante dans la société. On a besoin de sport, c’est presque vital. Et s’il faut se rabattre sur de la 4ème ligue, on le fera.

Elle met également en lumière la folie du sport international. La mondialisation est partout et le sport n’y échappe pas. Alors qu’on a honte de prendre l’avion une petite fois dans l’année pour aller voir sa grand-mère en Italie, on se rend compte de l’ampleur des déplacements des sportifs et des supporters. On a beaucoup entendu le souhait d’un nouveau départ post-COVID, plus écologique, plus humain, plus local, moins capitaliste. Mais le sport n’a rien de tout ça. Pourtant, on veut du sport et nous sommes prêts à payer le prix. On aime les Jeux Olympiques, les Coupes du Monde et autres grandes fêtes du sport. C’est tout le paradoxe de l’être humain. Il veut du local mais se plaint s’il y a plus d’avocat et de banane le jeudi à 15h à la Migros. Il se fout de la gueule de Roselyne Bachelot et de ses vaccins contre le H1N1 mais crie au scandale parce que Macron n’avait rien prévu pour le coronavirus.

Loin de moi l’idée de faire des leçons de morale, je fais partie du lot, comme tout le monde. J’espère de tout cœur pouvoir vibrer à nouveau sur des revers de Stan, m’énerver sur les fautes bêtes de Roger (et inversement), espérer une victoire de la Suisse avant de la voir perdre face à la Suède. Je me surprends même à vouloir accompagner mon coloc voir le LS tous les week-ends. Mais je prends conscience qu’on avait de la chance et à quel point c’était génial. Rien ne semblait pouvoir arrêter le monde et un petit truc d’à peine quelques nanomètres en a été capable. Alors je me réjouis déjà des premiers sons de balle dans ma raquette et des cris de joie ou de désespoir devant ma télé. Vive le sport !

 

Crédits photographiques :

Lausanne vs Sion 27 february 2013 – Jean-François Collet: Ludovic Péron / CC BY-SA / Wikimedia Commons
https://commons.wikimedia.org/wiki/User:Ludo29

A propos Valentin Henin 67 Articles
Je raconte des trucs, je fais des vidéos, tout ça, tout ça...

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