Le grand bingo Pascal Droz

Notre appareil auditif à court de compétition ayant péniblement cicatrisé après s’être infligé les retours simultanés du LHC et de Laurent Bastardoz sur les ondes il y a huit jours, c’est le tympan encore hésitant que l’on s’est risqué sur l’antenne de la RTS pour notre troisième bingo, après ceux consacrés à MySports et à John Nicolet. Cette fois c’est le tennis et son cortège de lieux communs plus savoureux les uns que les autres qui est à l’honneur via son commentateur vedette du côté encore un tant soit peu civilisé de la Sarine, Pascal Droz.

Nous jouons avec cette SPLENDIDE grille tout le week-end. Voilà qui est franchement de toute beauté. Oh c’est tout simplement remarquable ce qu’a réussi le docte préposé aux innovations technologiques de la rédac’ à partir de notre misérable document Word. Un vrai régal.

Bref, on vous les place tous ici puisque Jennifer Brady et Daniil Medvedev se sont très peu prêtés au jeu du commentaire dithyrambique tout au long de deux formalités administratives dont la durée totale a péniblement dépassé la moitié du fameux Djokovic-Nadal de 2012. 3 heures et 10 petites minutes cumulées. Tiens, d’ailleurs, au passage, c’est probablement aussi le temps passé par l’Avorton de Manacor à se décoller les rideaux des fenêtres pendant cette partie homérique de 5 heures 53.

Samedi, 9h30: Après avoir loupé absolument tous les grands chocs de la quinzaine (eh non, pas de télétravail à la rédac’ de CR !), c’est pas peu dire qu’on se réjouit de ce week-end de finales. On a presque la larme à l’œil en écoutant la chanteuse Sophie Payten – alias Gordi – entonner l’hymne australien a cappella

9h43: Alors qu’on allait se résoudre à regarder ce Osaka-Brady sans commentaires, la voix de Marc Gisclon, qui avait probablement dû laisser le Maestro Lorenzi passer en premier à la machine à café de la tour RTS, se matérialise soudain au milieu de l’échauffement. Sera-t-il à la hauteur du bingo de son collègue et mentor ?

9h47: « Osaka qui, on l’imagine, essaie d’éviter un petit peu les doubles fautes en ce début de partie. » Voilà une introduction qui aurait mérité une place de choix dans notre grille. Ça tombe bien, la Japonaise les a plutôt bien évitées et même au-delà du début de la rencontre (2 en tout) malgré une prise de risques plus importante que ce que cette sortie désormais légendaire laissait présager (48% de premières balles seulement).

9h48: C’est l’heure d’un bulletin météo de l’Etat de Victoria fort exhaustif. Gisclon a décidé d’être très agressif d’emblée en pointant quelques faiblesses criardes de notre bingo et en les suivant au filet pour conclure. Toujours aucune case cochée donc.

10h21: Naomi Osaka sauve une balle de break à 4-4 d’une « balle mal cadrée », expression chère aux commentateurs de football, de hockey sur glace et donc l’un des idiomes favoris de Pascal Droz. Une sorte d’expression valise réunissant les plus sémantiquement adaptées « cadrée » et « mal centrée », au moment de définir un projectile aussi éloigné du centre que l’UDC. Et c’est la première case qui tombe !

10h35: 4 jeux plus tard, la future quadruple lauréate en Grand Chelem obtient à son tour deux balles de break grâce à « un revers de toute beauté » ! Et de deux !

10h54: Gisclon a disparu des radars depuis plusieurs minutes. On commence à s’inquiéter. Pascal Droz aurait-il décidé de débrancher un câble pour se garder quelques cases pour dimanche ?

10h59: Marc Gisclon est de retour et il le fait savoir à 6-4 5-2 30A: « Le point suivant est important. » On parcourt rapidement la grille avec une fébrilité digne de Grigor Dimitrov face à un point penalty, mais le bougre nous a possédé une nouvelle fois.

Dimanche, 9h30: C’est le grand jour. Cette fois c’est bien Pascal Droz qui devrait être de la partie pour un Djokovic-Medvedev qui s’annonce monumental.

9h39: On commence avec une minute sanitaire en guise de préliminaires. Medvedev entre sur le court avec un masque soigneusement ajusté sous le nez. Dans les tribunes, on se rend compte qu’on n’a pas encore tout à fait assimilé l’utilisation de cet objet forcément proscrit en temps normal au sein de la cellule coaching de Djokomplotiste. Ce dernier fait d’ailleurs son apparition sous les vivats de la foule… sans masque. Ben oui, on vous rappelle que les règles ne s’appliquent pas à Sa Majesté. En parlant de règles, on vous avoue volontiers que comme depuis mars 2020, on n’y comprend rien non plus. Entre Goran Ivanisevic qui semble traiter sa protection faciale comme s’il s’agissait du fameux sparadrap du Capitaine Haddock et le port complètement aléatoire voire inexistant dudit masque au sein du reste du public, on laisse rapidement tomber. Est-il obligatoire ? Facultatif ? Est-ce bien utile d’entrer masqué sur un court désert en plein air ? Quel effet a bien pu avoir un confinement de 5 jours sur la situation générale de Melbourne ? Bref, à ce stade on s’en fout.

10h03: Toujours rien à signaler sur notre grille de bingo, du coup on s’occupe avec un double Djokosmash du plus bel effet pour offrir un débreak à Medvedev à 3-2.

10h21: SUPERBE coup droit du Russe qui revient à 5-5. On ne le sait pas encore, mais c’est la fin du match à proprement parler. Ce qu’on réalise surtout, c’est l’oubli impardonnable que constitue le terme « superbe », répété à peu près 20 fois par match de qualité décente (donc environ 10 fois moins lors de ce Djokovic-Medvedev), dans notre grille. Ce sera pour la prochaine fois.

10h28: Fin du premier set, et même pas de petit détour par Genève pour se remettre. C’est à croire que quelqu’un l’a prévenu…

11h01: Medvedev est mené 7-5 5-2 et sa raquette n’y survit pas. Pascal Droz nous explique que « comme la 2CV de Bourvil dans Le Corniaud, elle va moins bien marcher maintenant. » Au vu des trésors de poussivité déployés par le possesseur de ce qui reste de son outil de travail dans cette finale, la comparaison est drôlement bien sentie.

11h18: Droz évite toujours soigneusement de se livrer en nous proposant un détour par Genève ou une page de réclame. Il se contente d’un « à tout de suite » réitéré plusieurs fois et suivi d’un « on se quitte quelques instants et on se retrouve pour la remise du trophée » à 11h43. Tant pis. On se dit qu’on mérite quand même un lot de consolation et on coche la case.

11h21: 7-5 6-2 3-0. Premier échange spectaculaire du match ! C’EST SP… eh bien pas du tout. Notre compagnon de supplice reste désespérément coi.

11h39: 7-5 6-2 5-2 15-30. Medvedev sort enfin de ses gonds et lance un « Shut up, man ! » à un Djokofan légèrement aviné qui ne peut retenir quelques éructations intempestives entre les deux services du Moscovite. On se dit que tout va basculer et qu’on aura deux heures de rab pour compléter notre grille au cours d’une remontada qui restera dans les annales. Moins d’une minute et deux points plus tard, Djokovic et son faire-valoir se serrent la paluche au filet. Qu’à cela ne tienne, la cérémonie protocolaire à tiroirs et donc fidèle à sa réputation nous réserve les moments les plus intenses de cette quinzaine.

11h44: Début du festival: « Djokovic est capable Daniiler les premières balles adverses », nous annonce Droz sans avoir l’air d’y toucher au milieu de son hagiographie de celui qui va battre le record de longévité de Roger Federer à la première place mondiale le 8 mars prochain. Et dire qu’à 8-7, 40-15… enfin bref.

11h53: Jayne Hrdlicka, native de Wichita au Kansas, CEO de Virgin Australia Airlines et – ah oui ! – présidente de Tennis Australia termine un discours pour le moins lunaire au cours duquel la mention du vaccin est copieusement huée par une assistance enivrée par la consécration de celui qui maîtrise l’art de transformer l’eau en remède miracle par la grâce de la prière et de la gratitude. La brave Jayne, un peu déstabilisée, se met donc à applaudir elle-même les 112 mentions de sponsors et autres bienfaiteurs qui suivent histoire de garder contenance et nous surprend ensuite à sortir de son script (probablement co-écrit par KIA) avec un « When you’re finished… » un tantinet agacé glissé entre deux quolibets et une conclusion agrémentée d’un fort flegmatique « You’re a very opinionated group of people ». Finalement c’était quand même pas si mal le huis clos, non ? 

11h58: L’intervenant suivant, dont on n’a même pas eu le temps de lire le nom, se contente de quelques mots clés en style télégraphique avant de vider les lieux, probablement effrayé par l’accueil réservé à sa collègue. Place aux discours des protagonistes. Nul besoin de leur offrir des chaises pour survivre aux 7 heures de monologues convenus qui suivent habituellement une finale comme cela avait été le cas après le duel légendaire de 2012 mentionné plus haut. On se demande même s’ils ne risquent pas le claquage en se présentant face au micro après un échauffement si court. La caméra s’attarde sur Gilles Cervara, l’entraîneur français de Medvedev dont la présence sur tous les vecteurs médiatiques d’Hexagone depuis plusieurs mois fait trembler Patrick Mouratoglou comme une feuille. Pascal Droz, qu’on avait presque oublié avec toutes ces émotions, nous lance: « Son entraîneur qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Michel Polnareff jeune ». Comme vous pouvez le voir ci-dessous, cette version est controversée.

12h05: Il est temps de conclure. « N’oubliez pas Sport Dimanche à 18h25 sur RTS1. »

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Voici donc notre bilan. On espère que celles et ceux (ça doit être un truc du genre « ciel » en langage inclusif) d’entre vous qui ont réussi à regarder les quelques morceaux de bravoure de cet Open d’Australie hors week-end auront eu l’occasion de remplir quelques cases supplémentaires et ainsi surpasser notre performance pour le moins médiocre.

P.S. Rendons à notre ami Blaise ce qui lui appartient, avouons qu’il avait fait bien mieux que nous dans un registre similaire après la victoire de Federer face à Nadal au même endroit en 2017 (eh oui, 4 ans déjà *soupir*):

A propos Raphaël Iberg 174 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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