Alayah’vait un coup à jouer

Pendant que la Belgique (non qualifiée pour la Coupe du monde) tapait les Pays-Bas dans le plus grand des calmes et que l’Ecosse (aussi absente cet été aux antipodes) menait la vie dure aux Anglaises vice-championnes du monde à Sunderland, le derby des Alpes accouchait d’une souris anémique entre deux escouades pourtant bien présentes au Mondial (sur un malentendu). Bienvenue au Kybunpark de Saint-Gall pour la première journée de la toute nouvelle Women’s Nations League. On vous explique tout juste après (désolé et bon courage).

Le match en deux mots

Null-eins.

Mais surtout nul(l).

La femme du match

Alayah Pilgrim. Retenez bien son nom. Celle dont la mère lui interdisait de jouer enfant et qui avait failli accepter une sélection en équipe du Maroc en 2022 risque de faire les beaux jours de la Nati dans les années à venir. Sans compter son importance aux environs de Thanksgiving (non, nous ne la traitons pas de dinde, cette vanne est bien plus pédante que ça).

Prenez une photo mentale de notre nouvelle numéro 20 dont c’était la première sélection.

L’attaquante du FC Zurich (20 ans) et accessoirement copine d’Elijah Okafor (croisé en tribune), lui-même jeune frère de Noah, en a fait plus en 17 minutes depuis son entrée que toutes ses coéquipières combinées sur l’ensemble du match: un tir sur le poteau à la 82ème minute, un déboulé dans les 16 mètres qui débouche sur un corner 2 minutes plus tard et un débordement tout en puissance suivi d’un centre qui avait le poids d’un assist dans les arrêts de jeu. Comme quoi Bachmann et un joker peuvent parfois faire équipe. 

La buse du match

Inka Grings. On a beaucoup entendu la sélectionneuse helvétique s’époumoner dans sa zone technique. Elle aurait peut-être conservé un peu de voix si elle n’avait pas attendu les 63ème et 80ème minutes pour introduire les seules joueuses avec Ramona Bachmann capables de percuter en zone offensive (Alisha Lehmann pour Meriame Terchoun puis Pilgrim pour Seraina Piubel). Comme il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, on s’attend à des modifications drastiques dans le 11 de base mardi face à l’Espagne.

Entre Inka et Cantore, de quoi rester sans voix.

Le tournant du match

63ème minute: entrée de Lehmann sous les vivats de ses 15,2 millions de followers des 6452 spectateurs du Kybunpark.

15 secondes plus tard: ouverture du score somptueuse d’Arianna Caruso pour l’Italie.

Blague à part, Alisha a démontré qu’elle méritait une place de titulaire par simple contraste avec le désert offensif qui l’a précédée sur le terrain. Grings continuera-t-elle d’ignorer la réalité au grand dam du fan club juvénile de la Bernoise d’Aston Villa qui s’est évertué à hurler son prénom sans relâche pendant 97 minutes d’une voix à la fréquence proche de l’ultrason ? Nos tympans meurtris ne savent qu’en penser.

L’aVARie qui aurait pu couler le match

On va peut-être virer cette rubrique car figurez-vous qu’il n’y a pas de VAR en Women’s Nations League (comment ça « encore une compétition au rabais » ?).

Parlons d’avaries en minuscules du coup. L’absence d’Ana-Maria Crnogorčević. Mais non, on déconne, ça n’a rien changé du tout. Un rythme de sénateur pendant 80 minutes, une vitesse d’exécution comparable à celle d’une enquête interne de l’Eglise catholique, quasiment aucune velléité offensive, et une certitude au niveau du parti pour lequel les Suissesses ne voteront pas en octobre: le Centre. Tout comme au Mondial, que de difficultés à réaliser un geste aussi basique à ce niveau !

Non, la vraie avarie est venue de la sono qui a complètement caviardé le Cantique suisse. Pas moyen de critiquer qui que ce soit pour son manque de patriotisme sur ce coup puisque le stade entier, joueuses comprises, a dû entonner l’hymne a cappella. Déjà que le contraste rythmique avec Fratelli d’Italia n’est pas vraiment à notre avantage, on n’est pas aidé…

Le chiffre à la con

17. Comme le nombre de minutes effectivement jouées par Ramona & Cie hier soir dans un match qu’il fallait absolument gagner face au seul adversaire prenable de leur groupe. Et l’état déplorable du champ de patates de Suisse orientale qui leur servait de terrain de jeu n’excuse que partiellement le niveau technique abyssal de la partie. Personne n’a dû leur expliquer que les matches amicaux insipides ont été remplacés par la Women’s Nations League. On les invite donc à lire attentivement la rubrique suivante.

L’anecdote L’explication barbante au long cours

Ça fait 5 ans qu’on essaie de capter les tenants et les aboutissants de la Ligue des Nations masculine et voilà qu’on doit tout recommencer. Bon, heureusement la formule est on ne peut plus simple. 41 pays répartis dans 3 ligues (A, B et C) selon leur coefficient UEFA. Les Ligues A et B comptent 16 équipes réparties en 4 groupes alors que la Ligue C en répertorie 19 au sein de 5 groupes de tailles inégales. Ça va, vous respirez encore ?

Santé Marion !

Bon, alors on part pour une phase aller-retour entre toutes les équipes de chaque groupe pour se qualifier pour des phases diverses et variées. En Ligue A, les 4 premiers de groupe se qualifient pour les demi-finales qui auront lieu en février, tout comme la finale et le match pour la troisième place. En Ligue B et C, les premiers de groupe seront automatiquement promus dans la ligue supérieure. Les derniers de groupe de Ligue A et B et le pire troisième de Ligue B seront relégués dans la ligue inférieure. Facile, non ? C’est parce qu’on ne vous a pas encore parlé des playoffs (ben oui, qu’est-ce que le foot sans des playoffs à la con de nos jours ?): les troisièmes de Ligue A affronteront les deuxièmes de Ligue B pour une place en Ligue A et les troisièmes de Ligue B feront la même chose avec les deuxièmes de Ligue C. Tous les autres (il en reste ?) ne changent pas de ligue. On vous le disait, simple comme bonjour. Oui, mais « bonjour » traduit en mandarin.

Prenez un chocolat, ça ira mieux.

Bon OK, mais pourquoi on fait tout ça au juste (à part pour éviter de jouer des matches amicaux) ? Eh bien pour se positionner (on dit bien se positionner et non pas se qualifier, on entend déjà David Lemos vociférer en réexpliquant tout ça pour la millième fois cet hiver) dans la course à la qualification pour l’Euro 2025. Eh oui, car figurez-vous que les qualifications s’effectueront à travers des… ligues (oui oui, A, B et C) cette année. Donc en gros on finit la Ligue des Nations en février et on recommence tout un mois plus tard avec des positions déterminées par les résultats obtenus en… Ligue des Nations évidemment. On vous épargne les détails car ça devient complètement folklorique à ce stade (et on sent l’AVC tout proche), mais en gros les 15 meilleures formations et l’organisateur se retrouveront à l’Euro à l’issue de cette phase.

Et la Suisse dans tout ça ? Eh bien on s’en fout complètement, on est qualifié d’office pour ce tournoi qui aura lieu à domicile. En d’autres termes, pas besoin de comprendre quoi que ce soit à la formule pour l’instant. Ça valait la peine, hein ?

Quoi ? Ah il y a peut-être quand même une raison de suivre un peu ? Paris 2024 vous dites ? Oui, les finalistes de cette Ligue des Nations se qualifieront directement pour les prochains JO. Euh enfin sauf si l’un d’eux est l’organisateur français, auquel cas le troisième se qualifierait aussi.

Ah et vous voulez peut-être savoir dans quelle ligue la Nati se trouve ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, les ouailles d’Inka Grings font partie de la Ligue A au sein du groupe 4 de l’Espagne championne du monde, de la Suède multiple médaillée de bronze en tous genres et donc de l’Italie, seule escouade a priori prenable. On joue donc ici pour éviter la dernière place au mieux. Et la sélectionneuse allemande de notre équipe nationale sait motiver ses troupes avec des discours inspirés: « Nous ne voulons pas être reléguées », a-t-elle courageusement déclaré à la RTS. Bon, à sa décharge, il est vrai que Murat Yakin a quant à lui (probablement) expliqué que son but était de ne surtout pas se qualifier pour quoi que ce soit, donc autant être clair dorénavant.

Si le match avait été une citation de Zlatan Ibrahimovic

« Je peux jouer dans les 11 positions car un bon joueur peut jouer n’importe où. »

Bachmann Forever (and everywhere).

C’est parfois l’impression que nous donne Ramona Bachmann en équipe nationale. Clairement supérieure techniquement à toutes ses coéquipières, il est difficile de ne pas comprendre sa frustration si par hasard elle n’est pas servie en sélection comme elle peut l’être au PSG (c’est-à-dire 100% du temps). On finit donc par la voir jouer à droite, à gauche, au centre, venir récupérer les ballons très bas pour tenter de les remonter à elle toute seule avec force gris-gris, passements de jambes et autres feintes parfois aussi utiles qu’une visite du Roi Charles III dans une forêt expérimentale bordelaise pour y déguster du vin bio. Bref, elle a les défauts de ses qualités, comme on dit chez nous. Ses deux seules touches de balle dans les 20 premières minutes sont d’ailleurs symptomatiques: une tentative de grand pont et une autre de coup du sombrero. Les deux manquées bien entendu.

La minute Johan Djourou 

Le moment où notre voisin transalpin vaguement gênant a réalisé qu’on comprenait sa langue et a commencé à nous raconter sa vie. Figurez-vous qu’il a fait le voyage de Bergame à Saint-Gall en train pour voir jouer l’Italie (un peu) et pour prendre un selfie avec Alisha Lehmann (surtout). On ne sait pas si son pèlerinage Pilgrimage a fini par être couronné de succès. Il faut dire que 6450 personnes étaient aussi sur les rangs (nous on était parti regarder Genève-Servette prendre son treizième but en 2 matches à notre hôtel voisin).

Bonne nouvelle: au niveau des fautes d’anti-jeu et des simulations, le foot féminin italien a rattrapé son homologue masculin.

La rétrospective du prochain match

La Nati affrontera l’Espagne mardi soir. Enfin ce qu’il en reste. Pour ceux qui rentrent de trois mois de vacances sur Jupiter, Montse Tomé, la nouvelle sélectionneuse ibère, a convoqué 21 joueuses qui s’étaient déclarées non-sélectionnables après les multiples frasques de Luis Rubiales et Jorge Vilda (entre autres). Mais pas Jennifer Hermoso, embrassée de force par son président après la finale du Mondial. Oui, malgré le départ des deux tristes personnages susmentionnés, il fallait la protéger, voyez-vous. On ne sait jamais qui peut vous sauter dessus au détour d’un couloir en Ligue des Nations.

Après des heures de réunion nocturne (qui a débuté mardi soir et s’est terminée à 6h30 mercredi matin !), les joueuses présentes au rassemblement semblent avoir obtenu la promesse écrite de ne pas être sanctionnées en cas de défection, des changements dans la structure de la Fédération (de quelle nature exacte, mystère…) et le… licenciement de la désormais future-ex-nouvelle sélectionneuse Tomé après les deux rencontres de septembre. Mapi León et Patri Guijarro, déjà absentes à la Coupe du monde, ont malgré tout décidé de ne pas rester.

Bref, on peut espérer au mieux une victoire par forfait et au pire un match tranquille contre des joueuses insomniaques (qui ont quand même battu la Suède 3-2 à l’extérieur hier soir) dans trois jours à Cordoue. Et surtout on n’a pas fini de rire.

Le plan de match d’Inka Grings pour mardi. Advienne que pourra.

Pour vous rassurer sur le niveau global du foot féminin

A propos Raphaël Iberg 175 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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