Iron Maik, ce héros

On termine nos pérégrinations germaniques hebdomadaires par l’affiche qui faisait rêver toute l’Europe du football ce week-end : Sportgemeinde Eintracht Frankfurt gegen Verein für Leibesübungen Bochum Eintausend acht hundert achtundvierzig.

Même si son patronyme a désormais été vendu au commerce (c’est le cas de le dire), le Waldstadion de Francfort portait bien son nom originel car il est véritablement entouré d’une forêt. Du coup, l’arrivée dans l’antre de l’Eintracht est assez étrange car, entre le parking et le stade, il y a une bonne vingtaine de minutes de marche au milieu d’une forêt très dense. «On croirait arriver à un Giron», me glisse mon camarade de route du week-end. Vu que j’ai des références un peu plus sportives, cela me fait plutôt penser, nonobstant le vacarme ininterrompu des avions qui se succèdent à un rythme effréné en direction du gigantesque aéroport voisin, à l’arrivée au Schoren de Langenthal. A cette différence près qu’à la sortie du bois, on découvre non pas un hangar délabré de 4’000 places mais une arène ultramoderne de 51’500 places. Même si cet Eintracht – Bochum n’a pas attiré la grande foule, Francfort reste l’une des bonnes adresses de la Bundesliga niveau ambiance. Et rayon bière aussi, même si en l’occurrence on fait l’impasse sur la fameuse Licher, conduite du retour oblige.

11 matchs, 3 entraîneurs !

Francfort réalise un début de saison tout à fait honorable, peut-être même légèrement supérieur aux attentes, malgré une certaine difficulté à capitaliser des victoires à domicile. La venue du modeste Bochum en Hesse constitue une occasion rêvée pour empocher trois nouveaux points et s’éloigner de la zone dangereuse. Car Bochum n’est guère fringant en ce début de championnat ; cité chaque saison parmi les principaux candidats à la relégation, le petit club de la Ruhr avait l’habitude de réaliser des miracles pour s’en sortir. Mais ça se passe moins bien dans cet exercice 09-10 : on ne retrouve pas vraiment cette solidarité et cette organisation qui ont souvent permis au VfL de bousculer les ténors de la Bundesliga et les joueurs-clés de l’équipe, comme le Slovaque Sestak ou le Camerounais Epalle, paraissent loin de leur meilleur niveau. Du coup, lors de cette 11e journée, Bochum inaugure déjà son troisième entraîneur de la saison, après le Suisse Marcel Koller (viré après 6 matchs) et l’intérimaire Frank Heinemann. Le nouvel élu s’appelle Heiko Herrlich, champion d’Europe et du Monde avec Dortmund en 1997 (ça fait toujours plaisir de rappeler l’une des pages les plus glorieuses de l’histoire du foot). Pour sa première expérience d’entraîneur au plus niveau, l’ancien attaquant n’aura guère le temps de faire ses gammes car la situation du VfL Bochum est déjà critique.

Tout va très vite en football

Manifestement, Heiko Herrlich n’a pas trouvé la solution pour ses débuts sur le banc du VfL car le match tourne rapidement à l’avantage de l’Eintracht. Après une première tête de Liberopoulos sur la latte, le Brésilien Caio ouvre le score sur un coup-franc et un rebond insidieux qui abusent curieusement le gardien Heerwagen. Cela aurait même pu faire 2-0 sur un centre millimétré du capitaine Christoph Sypcher (oui, oui, le même qui joue avec la Nati) mais Nikos Liberopoulos trouve cette fois le poteau. Et, bien évidemment, au lieu de 2-0, cela a fait 1-1 sur le contre lorsque le gardien francfortois Oka Nikolov et son latéral Maik Franz se sont fabriqués un invraisemblable auto-goal sur un centre anodin d’Epalle. Dommage que le match n’ait pas été retransmis sur la TSR, on aurait eu droit à un excellent «tout va très vite en football», qui constitue le summum de l’analyse footballistique dont bénéficie généralement le téléspectateur romand. Quelques occasions francfortoises plus tard et la pause était atteinte sur une statistique de 6 tirs à 0 pour l’Eintracht mais 1-1 au tableau d’affichage.

Iron Maik

En effectuant son recrutement estival, l’Eintracht ne devait pas viser le prix du fair-play en engageant deux des joueurs les plus teigneux de la ligue (derrière Mark Van Bommel, qui est hors catégorie), Selim Teber et Maik Franz. Tous deux ont été à la hauteur de leur flatteuse réputation, avec un carton jaune foncé chacun : Teber pour un coude qui a volé très haut, Franz pour un body-check suivi d’une altercation avec Fuchs puis, surtout, pour une ruade qui n’était pas loin d’une faute de dernier recours. Mais Iron Maik, c’est aussi et surtout un formidable battant, ce qui en fait un joueur généralement adulé par les supporters de son club (mais détesté par tous les autres). Vexé par son auto-goal de la première mi-temps, l’ex-capitaine de Karlsruhe a mis un point d’honneur à offrir le but de la victoire à son équipe, de la tête bien sûr, sur un corner d’Ochs et une remise de Chris. Voilà qui ravira sans doute notre chroniqueur Bundesliga, Philip Borns.

Des relégables en pagaille

Bochum ne s’est créé qu’une seule occasion de revenir mais l’Argentin Klimowicz a complètement foiré son coup de tête. Avec un minimum de lucidité dans la dernière passe, l’Eintracht aurait pu et dû s’offrir un succès beaucoup plus net. On regrette notamment qu’Alex Meier n’ait pas assez enroulé sa frappe de la 64e au sortir d’un somptueux double une-deux, typiquement le genre d’action que l’on n’aurait jamais pensé voir lors d’un Francfort – Bochum. Ce manque de réalisme, et sans doute tout simplement de talent, en phase offensive, nous fait penser que, si SGE paraît avoir une certaine marge par rapport aux cancres de cette Bundesliga 2009-2010, on le voit mal s’immiscer durablement dans la première moitié du classement.

Quant au VfL Bochum, il nous a vraiment paru d’une insigne faiblesse. La quatrième saison consécutive d’affilé dans l’élite paraît vraiment être celle de tous les dangers pour les pensionnaires du rewirpowerSTADION. La chance du VfL, c’est que le Hertha deux jours auparavant et le 1. FC Köln la veille ne nous ont pas paru beaucoup plus fringants. Comme il semblerait que les néo-promus Freiburg et Nuremberg ne soient pas trop féroces non plus, cela fait une belle brochette de relégables en puissance. Voilà qui nous promet encore quelques affiches stratosphériques que j’aurai sans doute le plaisir de te relater dans ces colonnes.

Eintracht Francfort – VfL Bochum 1848 2-1 (1-1)

Commerzbank-Arena, 37’500 spectateurs.
Arbitre : M. Gagelmann.
Buts : 14e Caio (1-0), 25e Franz (autogoal, 1-1), 53e Franz (2-1).
Eintracht Francfort : Nikolov; Franz, Chris, Russ, Spycher; Ochs, P.Schwegler, Caio (87e Köhler), Teber (66e Bajramovic); Meier, Liberopoulos (92e Fenin).
VfL Bochum : Heerwagen; Concha (87e Mavraj), Maltritz, Yahia, C.Fuchs; Epalle (69e Hashemian), Dabrowski, Ono, Grote (69e Klimowicz); Sestak, Dedic.
Cartons jaunes : 39e Teber, 44e Fuchs, 55e Ochs, 57e Franz, 61e Meier, 62e Dabrowski, 79e Ono, 89e Mavraj.
Carton rouge : 80e Ono (2e avertissement).

Écrit par Julien Mouquin

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2 Commentaires

  1. Des stades magnifiques et quasiment pleins, une belle ambiance, pas de hooligans, de la bière au stade (bon, pour ça choisissez Dortmund plutôt que Köln), tout ça à quelques heures de voiture de la Suisse romande…bref, n’hésitez pas, chers collègues lecteurs de CR, la Bundesliga ça vaut la peine…et merci Julien pour ce week-end foot en ta compagnie ! Vive le pays des centres derrière les buts, comme tu aimes à le dire 😉

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